Les militants du Front populaire ivoirien (Fpi) ne participeront ni au recensement de la population et de l’habitat, ni à l’audition des victimes de la crise ivoirienne. Ainsi en a décidé Pascal Affi N’Guessan, le président de cette formation politique, qui a choisi la voie du populisme, au détriment de celle de la paix et du développement.
Les partisans de Laurent Gbagbo se signalent. Depuis jeudi dernier, Pascal Affi N’Guessan, le président du Front populaire ivoirien (Fpi) a monté les enchères d’un cran supérieur, en appelant les militants de son parti à boycotter l’opération de recensement, lancée le 17 mars dernier. Mais, très en verve, l’ancien Premier ministre ne s’est pas arrêté là. Il a aussi encouragé les militants frontistes qui ont subi quelques dommages, lors de la crise postélectorale, à ne pas participer aux activités de la Commission dialogue, vérité et réconciliation (Cdvr). « Le Fpi demande aux populations de s’abstenir de prendre part à l’opération de Recensement général de la population et de l’habitat. Toutes les conditions ne sont pas encore réunies. (…) Le mot d’ordre va être relayé par l’ensemble de nos bases. Nous refusons ce recensement à sens unique qui est un recensement des vainqueurs », a indiqué le président du Fpi, lors de la conférence de presse qu’il a animée, jeudi dernier. « La cartographie n’est pas encore achevée, par exemple, dans la région du Haut-Sassandra et le district des Montagnes. Les Smartphones sont du matériel d’occasion prêtés par le Brésil, utilisés au Sénégal. Ces appareils ont besoin d’être réinitialisés et ont besoin d’une maintenance. A quel résultat sérieux et fiable doit-on s’attendre, au terme d’une telle opération ?», s’est interrogé Affi N’Guessan, qui a aussi invité les militants de son parti à cesser toute participation aux activités de la Cdvr. « Le Fpi demande aux populations de s’abstenir des audiences publiques d’écoute des victimes lancées par la Cdvr. Nous demandons la réforme de la Cdvr. Ce n’est pas le gouvernement seul qui est impliqué dans cette affaire de réconciliation », a-t-il lancé. Assurément, le Fpi qui a toujours tout boycotté, s’est engagé dans un faux combat et dans une fausse polémique. Après le transfèrement de son président-fondateur, Laurent Gbagbo, à la Cour pénale internationale (Cpi), en novembre 2011, les frontistes avaient opté pour la politique de la chaise vide aussi bien aux législatives de cette année qu’aux municipales et aux régionales qui suivirent, deux ans après. Mais si la conséquence de cette politique de la chaise vide, n’a eu pour mérite que d’empêcher les militants de cette formation d’accomplir un droit civique, ce qui est en soi une frustration, le boycott qu’appelle à nouveau Affi N’Guessan porte les germes d’une confrontation.
Les précédents en matière de boycott
Les agents recenseurs ne courent-ils pas le risque de se faire molester par les militants du Fpi soucieux de respecter le mot d’ordre de Pascal Affi N’Guessan, notamment dans les zones réputées bastions de l’ex-chef de l’Etat, Laurent Gbagbo ? « Il y a effectivement des risques d’escalade. On se souvient tous ce qu’a donné l’appel au boycott lancé par le même Fpi, lors des audiences foraines en 2006, jusqu’à la publication de la liste électorale. On a enregistré des violences dans la partie sud du pays; on a dénombré des blessés et des morts. Souvenons-nous aussi du boycott actif des élections en 1995. C’est pourquoi il faut redouter ce nouvel appel au boycott lancé par le président du Fpi, surtout que celui-ci assure que le mot d’ordre sera relayé par ses responsables de base auprès de ses militants », rappelle Issouf Kouyaté, sympathisant du parti au pouvoir, le Rassemblement des républicains (Rdr). « Certes, ils ne sont plus au pouvoir, mais, dans la mesure où ils veulent reprendre du poil de la bête, les responsables du Fpi peuvent être tentés de chauffer à blanc leurs militants au point de les pousser à commettre l’irréparable », s’alarme ce jeune étudiant originaire de Lakota, joint par téléphone. « Il faut que les autorités songent d’ores et déjà à prendre des mesures pour rassurer les populations, notamment dans les villages qu’ils considèrent comme leurs bastions et où il n’y a pas de forces de l’ordre. Sinon, on risque de déplorer encore des victimes inutiles de la barbarie de l’homme », alerte Issouf Kouyaté. Une inquiétude partagée par KB, intéressé par l’encadrement de l’opération de recensement initiée par l’Institut national de la statistique (Ins) dans le département de Gagnoa. « J’espère vivement être retenu par l’Ins, mais cette affaire de boycott m’inquiète tout de même. J’espère que ce sera un boycott passif. Sinon, il faut que nos responsables pensent à l’aspect sécuritaire », préconise-t-il. A Daloa aussi, les agents recenseurs, entre autres ceux déployés au quartier Tazibouo, ont quelques appréhensions. Tazibouo est réputé abriter les activistes du Fpi. Et les agents recenseurs disent avoir eu vent d’une décision prise par ceux-ci, décrétant que ce quartier n’est nullement concerné par l’opération de recensement.
Les appréhensions des agents recenseurs
A Man, les agents n’ont pas attendu d’aller sur le terrain pour poser leurs inquiétudes à leurs responsables. Ceux-ci les ont assurés que force restera à la loi pour que l’opération se réalise. Ce qui ne manque pas de désoler Lazare GB, un transfuge du Fpi qui dit avoir déposé aujourd’hui ses valises dans la case des républicains. « Même Gbagbo savait faire la part des choses entre ce qui est bon pour le pays. Mes amis doivent arrêter ça. La violence ne mène à rien et nous sommes bien placés pour le comprendre », relève-t-il. En le disant, il apporte de l’eau au moulin d’Issouf Kouyaté. « Pendant dix ans, ils n’ont rien construit. Maintenant, on leur propose le développement, mais ils refusent. Non contents de refuser ce développement qu’on leur propose à travers ce recensement, ils menacent de le boycotter. Et pourtant, on leur a bien expliqué que cette opération n’a rien de politique. Pendant le décès du Président Félix Houphouet-Boigny, on a fait la politique, mais cela ne nous a conduit nulle part. Il est peut-être temps que nous soyons gagnés par la sagesse pour penser au développement du pays », propose-t-il, avant de laisser son ami, Arouna Koffi enfoncer le clou : « cette maladie de la violence habite le Fpi et ses dirigeants. Depuis 1990, ils ne font qu’empoisonner la vie des Ivoiriens, à travers leurs différents boycotts. A chaque fois, ils ne font que tirer le pays vers le bas. Même l’audition des victimes de la crise, ils veulent la boycotter. C’est vraiment dommage de la part de gens qui nous ont dirigés dix ans durant. Affi et ses camarades ne pensent pas à l’intérêt du pays. C’est plutôt leurs propres intérêts qui les préoccupent. Ils pensent que c’est en ramant à contre-courant de la situation actuelle du pays, qu’ils s’imposeront à la tête du Fpi et cela est dommage ».
Le tigre toujours féroce ?
Des points de vue largement partagés par l’ancien ministre, Joël N’Guessan. « Ils n’ont aucun esprit républicain. Ce que je n’arrive pas à comprendre, c’est la façon dont se comporte Affi N’Guessan qui a quand même été Premier ministre dans ce pays », déplore , le porte-parole principal du Rdr, joint par téléphone. « Ils disent qu’ils mettent fin aux discussions avec le gouvernement. On devrait peut-être leur demander ce qu’ils proposent en lieu et place de ces discussions », ajoute-t-il, avant de se faire rassurant, au sujet du boycott du recensement. « Il n’y a pas d’inquiétudes particulières à avoir d’abord parce qu’ils ne disposent plus de l’appareil sécuritaire. Ensuite, ceux qui chauffaient à blanc leurs militants, qui les poussaient à la rue comme Blé Goudé, ne sont plus là. En plus, il vient d’être transféré à la Cpi justement pour ces faits. Tout ça les amène à réfléchir par deux fois avant de poser un acte », analyse-t-il.
Marc Dossa
Les partisans de Laurent Gbagbo se signalent. Depuis jeudi dernier, Pascal Affi N’Guessan, le président du Front populaire ivoirien (Fpi) a monté les enchères d’un cran supérieur, en appelant les militants de son parti à boycotter l’opération de recensement, lancée le 17 mars dernier. Mais, très en verve, l’ancien Premier ministre ne s’est pas arrêté là. Il a aussi encouragé les militants frontistes qui ont subi quelques dommages, lors de la crise postélectorale, à ne pas participer aux activités de la Commission dialogue, vérité et réconciliation (Cdvr). « Le Fpi demande aux populations de s’abstenir de prendre part à l’opération de Recensement général de la population et de l’habitat. Toutes les conditions ne sont pas encore réunies. (…) Le mot d’ordre va être relayé par l’ensemble de nos bases. Nous refusons ce recensement à sens unique qui est un recensement des vainqueurs », a indiqué le président du Fpi, lors de la conférence de presse qu’il a animée, jeudi dernier. « La cartographie n’est pas encore achevée, par exemple, dans la région du Haut-Sassandra et le district des Montagnes. Les Smartphones sont du matériel d’occasion prêtés par le Brésil, utilisés au Sénégal. Ces appareils ont besoin d’être réinitialisés et ont besoin d’une maintenance. A quel résultat sérieux et fiable doit-on s’attendre, au terme d’une telle opération ?», s’est interrogé Affi N’Guessan, qui a aussi invité les militants de son parti à cesser toute participation aux activités de la Cdvr. « Le Fpi demande aux populations de s’abstenir des audiences publiques d’écoute des victimes lancées par la Cdvr. Nous demandons la réforme de la Cdvr. Ce n’est pas le gouvernement seul qui est impliqué dans cette affaire de réconciliation », a-t-il lancé. Assurément, le Fpi qui a toujours tout boycotté, s’est engagé dans un faux combat et dans une fausse polémique. Après le transfèrement de son président-fondateur, Laurent Gbagbo, à la Cour pénale internationale (Cpi), en novembre 2011, les frontistes avaient opté pour la politique de la chaise vide aussi bien aux législatives de cette année qu’aux municipales et aux régionales qui suivirent, deux ans après. Mais si la conséquence de cette politique de la chaise vide, n’a eu pour mérite que d’empêcher les militants de cette formation d’accomplir un droit civique, ce qui est en soi une frustration, le boycott qu’appelle à nouveau Affi N’Guessan porte les germes d’une confrontation.
Les précédents en matière de boycott
Les agents recenseurs ne courent-ils pas le risque de se faire molester par les militants du Fpi soucieux de respecter le mot d’ordre de Pascal Affi N’Guessan, notamment dans les zones réputées bastions de l’ex-chef de l’Etat, Laurent Gbagbo ? « Il y a effectivement des risques d’escalade. On se souvient tous ce qu’a donné l’appel au boycott lancé par le même Fpi, lors des audiences foraines en 2006, jusqu’à la publication de la liste électorale. On a enregistré des violences dans la partie sud du pays; on a dénombré des blessés et des morts. Souvenons-nous aussi du boycott actif des élections en 1995. C’est pourquoi il faut redouter ce nouvel appel au boycott lancé par le président du Fpi, surtout que celui-ci assure que le mot d’ordre sera relayé par ses responsables de base auprès de ses militants », rappelle Issouf Kouyaté, sympathisant du parti au pouvoir, le Rassemblement des républicains (Rdr). « Certes, ils ne sont plus au pouvoir, mais, dans la mesure où ils veulent reprendre du poil de la bête, les responsables du Fpi peuvent être tentés de chauffer à blanc leurs militants au point de les pousser à commettre l’irréparable », s’alarme ce jeune étudiant originaire de Lakota, joint par téléphone. « Il faut que les autorités songent d’ores et déjà à prendre des mesures pour rassurer les populations, notamment dans les villages qu’ils considèrent comme leurs bastions et où il n’y a pas de forces de l’ordre. Sinon, on risque de déplorer encore des victimes inutiles de la barbarie de l’homme », alerte Issouf Kouyaté. Une inquiétude partagée par KB, intéressé par l’encadrement de l’opération de recensement initiée par l’Institut national de la statistique (Ins) dans le département de Gagnoa. « J’espère vivement être retenu par l’Ins, mais cette affaire de boycott m’inquiète tout de même. J’espère que ce sera un boycott passif. Sinon, il faut que nos responsables pensent à l’aspect sécuritaire », préconise-t-il. A Daloa aussi, les agents recenseurs, entre autres ceux déployés au quartier Tazibouo, ont quelques appréhensions. Tazibouo est réputé abriter les activistes du Fpi. Et les agents recenseurs disent avoir eu vent d’une décision prise par ceux-ci, décrétant que ce quartier n’est nullement concerné par l’opération de recensement.
Les appréhensions des agents recenseurs
A Man, les agents n’ont pas attendu d’aller sur le terrain pour poser leurs inquiétudes à leurs responsables. Ceux-ci les ont assurés que force restera à la loi pour que l’opération se réalise. Ce qui ne manque pas de désoler Lazare GB, un transfuge du Fpi qui dit avoir déposé aujourd’hui ses valises dans la case des républicains. « Même Gbagbo savait faire la part des choses entre ce qui est bon pour le pays. Mes amis doivent arrêter ça. La violence ne mène à rien et nous sommes bien placés pour le comprendre », relève-t-il. En le disant, il apporte de l’eau au moulin d’Issouf Kouyaté. « Pendant dix ans, ils n’ont rien construit. Maintenant, on leur propose le développement, mais ils refusent. Non contents de refuser ce développement qu’on leur propose à travers ce recensement, ils menacent de le boycotter. Et pourtant, on leur a bien expliqué que cette opération n’a rien de politique. Pendant le décès du Président Félix Houphouet-Boigny, on a fait la politique, mais cela ne nous a conduit nulle part. Il est peut-être temps que nous soyons gagnés par la sagesse pour penser au développement du pays », propose-t-il, avant de laisser son ami, Arouna Koffi enfoncer le clou : « cette maladie de la violence habite le Fpi et ses dirigeants. Depuis 1990, ils ne font qu’empoisonner la vie des Ivoiriens, à travers leurs différents boycotts. A chaque fois, ils ne font que tirer le pays vers le bas. Même l’audition des victimes de la crise, ils veulent la boycotter. C’est vraiment dommage de la part de gens qui nous ont dirigés dix ans durant. Affi et ses camarades ne pensent pas à l’intérêt du pays. C’est plutôt leurs propres intérêts qui les préoccupent. Ils pensent que c’est en ramant à contre-courant de la situation actuelle du pays, qu’ils s’imposeront à la tête du Fpi et cela est dommage ».
Le tigre toujours féroce ?
Des points de vue largement partagés par l’ancien ministre, Joël N’Guessan. « Ils n’ont aucun esprit républicain. Ce que je n’arrive pas à comprendre, c’est la façon dont se comporte Affi N’Guessan qui a quand même été Premier ministre dans ce pays », déplore , le porte-parole principal du Rdr, joint par téléphone. « Ils disent qu’ils mettent fin aux discussions avec le gouvernement. On devrait peut-être leur demander ce qu’ils proposent en lieu et place de ces discussions », ajoute-t-il, avant de se faire rassurant, au sujet du boycott du recensement. « Il n’y a pas d’inquiétudes particulières à avoir d’abord parce qu’ils ne disposent plus de l’appareil sécuritaire. Ensuite, ceux qui chauffaient à blanc leurs militants, qui les poussaient à la rue comme Blé Goudé, ne sont plus là. En plus, il vient d’être transféré à la Cpi justement pour ces faits. Tout ça les amène à réfléchir par deux fois avant de poser un acte », analyse-t-il.
Marc Dossa