Les marchés de Port-Bouët, Gonzaqueville et Adjouffou sont tous les jours pris d’assaut par des agents municipaux qui imposent des taxes parallèles aux commerçants. Le phénomène, à en croire certains commerçants, perdure depuis des années, au vu et au su des autorités municipales.
Ce mercredi 4 juin 2014, nous recevons un coup de fil anonyme nous informant de la présence d’agents municipaux intimant l’ordre aux commerçants de payer d’autres taxes qui n’ont rien avoir avec les taxes journalières habituelles, au marché de Port-Bouët. Nous nous y déportons.
Flagrant délit de racket
Il est alors 15h 08mn. Du côté du commissariat de police, nous sommes tout de suite frappés par une scène insolite. Deux agents municipaux. L’un habillé en tee-shirt de la police municipale de couleur vert forêt, et l’autre en civil, chemise blanche, pantalon kaki, de teint noir et d’une forte corpulence sont en train de rançonner des commerçantes de poisson. Durant 14 minutes, nous observons la scène. Une fois, ‘’le travail terminé’’, les deux individus, ne sachant pas que ‘‘nous sommes à leur trousse’’, depuis quelques temps, se retrouvent dans un endroit qu’ils jugent discret, pour se partager le butin composé de billets de 2000 F CFA et plusieurs pièces de monnaie. Dans un mouvement rapide, le partage est fait et la joie se lit sur les visages. C’est en silence que les agents municipaux se séparent. Auprès de certains commerçants, nous prenons la peine de nous enquérir de leur identité. Ceux-ci nous informent que le chef se nomme Kadjo.
La colère des commerçants et des consommateurs
Nous nous rendons ensuite sur le marché d’Adjouffou et de Gonzagueville situé sur la voie express menant à Grand-Bassam. Là pas d’agents véreux, mais des commerçants en colère. Outrés par le racket quotidien dont ils sont victimes. Korotoum T. commerçante de produits vivriers déclare, « on est fatigué ! Il y a trop de taxes à payer ici. En plus des taxes quotidiennes de 150 F CFA de la mairie, nous sommes soumis à deux autres taxes. Une taxe de 500 F CFA et une autre de 150 ou 200 F CFA. Pour ces deux dernières taxes, nous ne recevons pas de reçus. Lorsque nous demandons à quoi ça sert, ils disent que c’est pour l’hygiène et la sécurité ». A la question de savoir si ce sont des agents municipaux qui les rançonnent, notre interlocutrice répond par l’affirmative. Elle précise que ce sont des gens connus de tous aussi bien au marché qu’à la mairie de Port-Bouët. Kaffal D. boutiquier, affirme être victime de violence de la part de certains agents quand il refuse de payer ces taxes ‘‘illégales’’. « Je demande aux autorités municipales de trouver une solution à cette situation. En attendant, moi je suis obligé d’augmenter le prix de certains articles pour ne pas vendre à perte », confesse-t-il en colère. Poursuivant nos investigations, nous apprenons que des commerçantes ont été sommées de quitter leur place pour avoir refusé de payer ces taxes parallèles. Celles qui sont restées ont tout simplement agi comme le boutiquier Kaffal. Elles ont augmenté le prix de leurs marchandises.
« Les autorités municipales cautionnent cette anarchie »
Face à cet état de fait, nous avons rencontré le président de l’Union fédérale des consommateurs de Côte d’Ivoire, section de Port-Bouët. Konan A. dénonce l’acharnement contre les commerçants. « Ce qui se passe à Port-Bouët est grave. Nous avons affaire à un véritable réseau de racketteurs. A plusieurs reprises, nous avons interpellé la mairie mais nos plaintes sont restées sans suite. Tout laisse croire que les autorités municipales cautionnent cette anarchie qui règne dans les marchés. Au final, c’est nous les consommateurs qui subissons les effets de ce racket. Aujourd’hui, le marché est cher à Port-Bouët et tout le monde se plaint. »
Mme Kene L. responsable des commerçantes au marché de Port-Bouët est du même avis. Selon elle, ce réseau d’agents racketteurs sévit depuis des années. Tous les efforts entrepris auprès des autorités communales pour mettre fin au phénomène sont restés vains. Au fil des années, la persévérance des ‘’seigneurs de taxes’’ a eu raison de la témérité des commerçants. Aujourd’hui, c’est la résignation dans leur rangs. Comme alternative, ils répercutent le coût du racket sur les prix à la consommation.
Encadré
M. Diomandé (Chef du service d’hygiène de la mairie de Port-Bouët)
« Ce sont des accusations sans fondement »
La taxe parallèle la plus décriée par les commerçants de Port-Bouët, reste la taxe sur l’hygiène. Elle coûte 500 F CFA quotidiennement aux commerçants. Et est payable sans que ne soit délivré aux commerçants, un reçu. Pour en savoir davantage, nous nous sommes rendus au service d’hygiène de la mairie de Port-Bouët en vue de rencontrer le responsable de ce service. Bien que présent, M.Diomandé se refuse à tout commentaire. Il nous renvoie au secrétaire général de la mairie. Nous insistons pour savoir s’il est informé de ce que certains de ses éléments recueillent des taxes sur l’hygiène dans les différents marchés de Port-Bouët. L’homme marque son étonnement et déclare qu’il n’existe pas de taxe sur l’hygiène à Port-Bouët. Pourtant, il s’écrie : « il y a eu certes des plaintes dans ce sens mais nous avons toujours dit aux plaignants de venir nous voir avec des preuves. Vous savez, ce sont des accusations sans fondement ».
Relancé pour savoir pourquoi il ne mènerait pas sa propre enquête, il répond,« Nous ne sommes pas les seuls sur le terrain. Souvent certains agents de la mairie de Koumassi, viennent opérer à Port-Bouët. Il y a aussi des agents du district qui interviennent dans notre commune. C’est leur prérogative ».
Nous ne manquons de lui demander ce que viennent faire les agents de la mairie de Koumassi à Port-Bouët au vu et au su de ses services ? M. Diomandé reste muet.
Samuel Guelah
Ce mercredi 4 juin 2014, nous recevons un coup de fil anonyme nous informant de la présence d’agents municipaux intimant l’ordre aux commerçants de payer d’autres taxes qui n’ont rien avoir avec les taxes journalières habituelles, au marché de Port-Bouët. Nous nous y déportons.
Flagrant délit de racket
Il est alors 15h 08mn. Du côté du commissariat de police, nous sommes tout de suite frappés par une scène insolite. Deux agents municipaux. L’un habillé en tee-shirt de la police municipale de couleur vert forêt, et l’autre en civil, chemise blanche, pantalon kaki, de teint noir et d’une forte corpulence sont en train de rançonner des commerçantes de poisson. Durant 14 minutes, nous observons la scène. Une fois, ‘’le travail terminé’’, les deux individus, ne sachant pas que ‘‘nous sommes à leur trousse’’, depuis quelques temps, se retrouvent dans un endroit qu’ils jugent discret, pour se partager le butin composé de billets de 2000 F CFA et plusieurs pièces de monnaie. Dans un mouvement rapide, le partage est fait et la joie se lit sur les visages. C’est en silence que les agents municipaux se séparent. Auprès de certains commerçants, nous prenons la peine de nous enquérir de leur identité. Ceux-ci nous informent que le chef se nomme Kadjo.
La colère des commerçants et des consommateurs
Nous nous rendons ensuite sur le marché d’Adjouffou et de Gonzagueville situé sur la voie express menant à Grand-Bassam. Là pas d’agents véreux, mais des commerçants en colère. Outrés par le racket quotidien dont ils sont victimes. Korotoum T. commerçante de produits vivriers déclare, « on est fatigué ! Il y a trop de taxes à payer ici. En plus des taxes quotidiennes de 150 F CFA de la mairie, nous sommes soumis à deux autres taxes. Une taxe de 500 F CFA et une autre de 150 ou 200 F CFA. Pour ces deux dernières taxes, nous ne recevons pas de reçus. Lorsque nous demandons à quoi ça sert, ils disent que c’est pour l’hygiène et la sécurité ». A la question de savoir si ce sont des agents municipaux qui les rançonnent, notre interlocutrice répond par l’affirmative. Elle précise que ce sont des gens connus de tous aussi bien au marché qu’à la mairie de Port-Bouët. Kaffal D. boutiquier, affirme être victime de violence de la part de certains agents quand il refuse de payer ces taxes ‘‘illégales’’. « Je demande aux autorités municipales de trouver une solution à cette situation. En attendant, moi je suis obligé d’augmenter le prix de certains articles pour ne pas vendre à perte », confesse-t-il en colère. Poursuivant nos investigations, nous apprenons que des commerçantes ont été sommées de quitter leur place pour avoir refusé de payer ces taxes parallèles. Celles qui sont restées ont tout simplement agi comme le boutiquier Kaffal. Elles ont augmenté le prix de leurs marchandises.
« Les autorités municipales cautionnent cette anarchie »
Face à cet état de fait, nous avons rencontré le président de l’Union fédérale des consommateurs de Côte d’Ivoire, section de Port-Bouët. Konan A. dénonce l’acharnement contre les commerçants. « Ce qui se passe à Port-Bouët est grave. Nous avons affaire à un véritable réseau de racketteurs. A plusieurs reprises, nous avons interpellé la mairie mais nos plaintes sont restées sans suite. Tout laisse croire que les autorités municipales cautionnent cette anarchie qui règne dans les marchés. Au final, c’est nous les consommateurs qui subissons les effets de ce racket. Aujourd’hui, le marché est cher à Port-Bouët et tout le monde se plaint. »
Mme Kene L. responsable des commerçantes au marché de Port-Bouët est du même avis. Selon elle, ce réseau d’agents racketteurs sévit depuis des années. Tous les efforts entrepris auprès des autorités communales pour mettre fin au phénomène sont restés vains. Au fil des années, la persévérance des ‘’seigneurs de taxes’’ a eu raison de la témérité des commerçants. Aujourd’hui, c’est la résignation dans leur rangs. Comme alternative, ils répercutent le coût du racket sur les prix à la consommation.
Encadré
M. Diomandé (Chef du service d’hygiène de la mairie de Port-Bouët)
« Ce sont des accusations sans fondement »
La taxe parallèle la plus décriée par les commerçants de Port-Bouët, reste la taxe sur l’hygiène. Elle coûte 500 F CFA quotidiennement aux commerçants. Et est payable sans que ne soit délivré aux commerçants, un reçu. Pour en savoir davantage, nous nous sommes rendus au service d’hygiène de la mairie de Port-Bouët en vue de rencontrer le responsable de ce service. Bien que présent, M.Diomandé se refuse à tout commentaire. Il nous renvoie au secrétaire général de la mairie. Nous insistons pour savoir s’il est informé de ce que certains de ses éléments recueillent des taxes sur l’hygiène dans les différents marchés de Port-Bouët. L’homme marque son étonnement et déclare qu’il n’existe pas de taxe sur l’hygiène à Port-Bouët. Pourtant, il s’écrie : « il y a eu certes des plaintes dans ce sens mais nous avons toujours dit aux plaignants de venir nous voir avec des preuves. Vous savez, ce sont des accusations sans fondement ».
Relancé pour savoir pourquoi il ne mènerait pas sa propre enquête, il répond,« Nous ne sommes pas les seuls sur le terrain. Souvent certains agents de la mairie de Koumassi, viennent opérer à Port-Bouët. Il y a aussi des agents du district qui interviennent dans notre commune. C’est leur prérogative ».
Nous ne manquons de lui demander ce que viennent faire les agents de la mairie de Koumassi à Port-Bouët au vu et au su de ses services ? M. Diomandé reste muet.
Samuel Guelah