Sans surprise, Youssouf Bakayoko a été reconduit, le 5 septembre 2014, à la tête de la nouvelle Commission Electorale Indépendante (CEI) en Côte d’Ivoire. Toute chose qui suscite des doutes sur l’impartialité du scrutin présidentiel de 2015. Décryptage.
«Les mêmes causes produisent toujours les mêmes effets», dit l’adage. Cette maxime risque fort malheureusement de s’appliquer à la Côte d’Ivoire à l’issue des élections à venir. En effet, le choix du nouveau président de la Commission Electorale Indépendante (CEI) ne rassurent pas des observateurs politiques nationaux et internationaux. De fait, au bout de deux jours de tractations, le bureau de la CEI a été mis sur pied et son président connu. Ce, après de longues discussions autour de la désignation dudit Bureau. Cinq (5) commissaires de cette institution, à savoir Alain Dogou du Front populaire ivoirien (FPI), Bertin N’goran Ganin de l’Alliance des forces démocratiques (AFD, coalition de l’opposition incluant le FPI), l’Abbé Boni Martial, représentant la Conférence des Evêques catholiques de Côte d’ivoire, Marguerite Yoli Bi Koné de la Société civile et Anaky Jacob du Mouvement des Forces d'Avenir (MFA), ont quitté la salle dénonçant un ‘’vote mécanique au détriment du consensus’’. Malgré cette contestation, les douze (12) autres commissaires de la CEI, restés sur place, ont reconduit Youssouf Bakayoko à la tête de la structure en charge des élections en Côte d’Ivoire.
Si le choix du Bureau de la CEI et de son président divise l’ensemble des 17 commissaires de la CEI, qu’en sera-t-il du choix du président de la République à l’issue du scrutin présidentiel prévu en octobre 2015? Ne risquerait-on pas de connaître, en 2015, une nouvelle crise post-électorale comparable à celle de 2010 ? Pour de nombreux observateurs de la vie politique ivoirienne, la réélection de Youssouf Bakayoko à la tête de la CEI constitue un danger. En ce sens qu’il était président de cette institution électorale lors de la présidentielle de 2010 et qu’en partie, il est responsable de la crise post-électorale qui a fait plus de 3000 morts selon l’Onu et de nombreux exilés et prisonniers. Ce, du fait qu’il n’ait pas proclamé les résultats dans les délais et en plus, que ces résultats aient été par la suite proclamés au Quartier Général (QG) d’un candidat, Alassane Ouattara, actuel Chef de l’Etat.
De ce fait, l’opposition et certains diplomates soutiennent, qui en sourdine, qui hautement, que Youssouf Bakayoko est un mauvais choix. C’est le député PDCI de Port-Bouët, Kouadio Konan Bertin (KKB) qui, le premier, a récusé le maintien de Youssouf Bakayoko à la tête de la CEI. Pour lui, M. Bakayoko, au lieu de vouloir se maintenir coûte que coûte à la tête de cette institution, devrait rendre compte aux Ivoiriens de ce qui s’est réellement passé lors de la présidentielle de 2010, puis, rendre le tablier. Lors d’une conférence de presse tenue en septembre 2014, Daniel Bony-Claverie, vice-présidente de l’Alliance des forces démocratiques (AFD), a été formelle: «Il faut tourner la page Youssouf Bakayoko, car avec lui, nous avons un souvenir douloureux et il représente un symbole préjudiciable pour l’avenir». Comme pour dire que le choix de l’ancien et nouveau président de la CEI crée plus de problèmes qu’il n’en résout.
D’ailleurs, son maintien à la tête de la CEI a eu pour conséquence immédiat le retrait du représentant de l’opposition significative (FPI) de cette institution. Même si pour le gouvernement et pour le Rassemblement des républicains (RDR, parti au pouvoir), cela est «un argument fallacieux», il importe de porter une attention particulière sur ce problème qui se présente comme une bombe à retardement qui pourrait exploser en 2015.
Par Herman N’Zarama
Comparaison des trois (3) derniers présidium du Bureau de la CEI
1- Bureau consensuel de la CEI établi en 2001 sur la base de la loi 2001-634 du 9 Octobre 2001
Président: Camille Hoguié, Magistrat, Représentant du Président de la République ;
1ere vice-présidente : Danielle Boni Claverie, UDPCI, Opposition;
2è vice-président: Bamba Siaka, PDCI, Opposition ;
Observations
·Aucun représentant du FPI, qui était le parti politique au pouvoir ;
·Le représentant du Président de la République n’était pas militant du FPI ;
·Deux représentants des partis politiques de l’Opposition encadraient le Président de la CEI.
2- Bureau consensuel (de la CEI établi en 2004, sur la base de la loi 2004-642 du 14 Décembre 2004 (Accord de Pretoria)
Président: Beugré Mambé/Bakayoko Youssouf, RHDP, Opposition ;
1er vice-président: Gomis Jean-Baptiste/Koné Sourou, RHDP, Opposition ;
2è vice-président: Fatoumata Traoré / Diarrassouba Soumalaye, MPCI-RHDP; Opposition ;
3è vice-président: Sinan Bakary/ Anaky Jacob, RHDP, Opposition ;
4e vice-président: Oulai Siéné/Dogou Alain, Représentant du Président de la République.
Observations :
·Les Représentants des partis politiques de l’Opposition étaient au nombre de quatre (4) sur cinq (5) membres du Présidium;
·De 2004 à 2014, le présidium de la CEI était totalement déséquilibré, en faveur des partis politiques jadis de l’Opposition, qui voulaient être rassurés ;
·L’opposition de 2004 qui avait demandé et obtenu par consensus ce présidium, n’est autre que le même RHDP, le regroupement de partis politiques aujourd’hui au pouvoir en 2014
3- Bureau non consensuel de la CEI établi le 5 septembre 2014, sur la base de la loi 2014-335 du 18 Juin 2014
Président: Bakayoko Youssouf, RHDP, pouvoir exécutif ;
1er vice-président: Koné Sourou, RHDP, représentant du président de la République, chef du pouvoir exécutif ;
2è vice-président: Coulibaly Gervais, LMP, parti politique de l’opposition
3è vice-président : Auguste Miremont, RHDP, pouvoir exécutif.
Observations:
·3/4 des membres du présidium du bureau de la CEI sont des représentants du regroupement des partis politiques au pouvoir : le Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (RHDP) ;
·L’actuel bureau de la CEI est déséquilibrée et inféodée au pouvoir exécutif ;
·L’opposition significative est totalement ignorée dans le Présidium de la CEI
«Les mêmes causes produisent toujours les mêmes effets», dit l’adage. Cette maxime risque fort malheureusement de s’appliquer à la Côte d’Ivoire à l’issue des élections à venir. En effet, le choix du nouveau président de la Commission Electorale Indépendante (CEI) ne rassurent pas des observateurs politiques nationaux et internationaux. De fait, au bout de deux jours de tractations, le bureau de la CEI a été mis sur pied et son président connu. Ce, après de longues discussions autour de la désignation dudit Bureau. Cinq (5) commissaires de cette institution, à savoir Alain Dogou du Front populaire ivoirien (FPI), Bertin N’goran Ganin de l’Alliance des forces démocratiques (AFD, coalition de l’opposition incluant le FPI), l’Abbé Boni Martial, représentant la Conférence des Evêques catholiques de Côte d’ivoire, Marguerite Yoli Bi Koné de la Société civile et Anaky Jacob du Mouvement des Forces d'Avenir (MFA), ont quitté la salle dénonçant un ‘’vote mécanique au détriment du consensus’’. Malgré cette contestation, les douze (12) autres commissaires de la CEI, restés sur place, ont reconduit Youssouf Bakayoko à la tête de la structure en charge des élections en Côte d’Ivoire.
Si le choix du Bureau de la CEI et de son président divise l’ensemble des 17 commissaires de la CEI, qu’en sera-t-il du choix du président de la République à l’issue du scrutin présidentiel prévu en octobre 2015? Ne risquerait-on pas de connaître, en 2015, une nouvelle crise post-électorale comparable à celle de 2010 ? Pour de nombreux observateurs de la vie politique ivoirienne, la réélection de Youssouf Bakayoko à la tête de la CEI constitue un danger. En ce sens qu’il était président de cette institution électorale lors de la présidentielle de 2010 et qu’en partie, il est responsable de la crise post-électorale qui a fait plus de 3000 morts selon l’Onu et de nombreux exilés et prisonniers. Ce, du fait qu’il n’ait pas proclamé les résultats dans les délais et en plus, que ces résultats aient été par la suite proclamés au Quartier Général (QG) d’un candidat, Alassane Ouattara, actuel Chef de l’Etat.
De ce fait, l’opposition et certains diplomates soutiennent, qui en sourdine, qui hautement, que Youssouf Bakayoko est un mauvais choix. C’est le député PDCI de Port-Bouët, Kouadio Konan Bertin (KKB) qui, le premier, a récusé le maintien de Youssouf Bakayoko à la tête de la CEI. Pour lui, M. Bakayoko, au lieu de vouloir se maintenir coûte que coûte à la tête de cette institution, devrait rendre compte aux Ivoiriens de ce qui s’est réellement passé lors de la présidentielle de 2010, puis, rendre le tablier. Lors d’une conférence de presse tenue en septembre 2014, Daniel Bony-Claverie, vice-présidente de l’Alliance des forces démocratiques (AFD), a été formelle: «Il faut tourner la page Youssouf Bakayoko, car avec lui, nous avons un souvenir douloureux et il représente un symbole préjudiciable pour l’avenir». Comme pour dire que le choix de l’ancien et nouveau président de la CEI crée plus de problèmes qu’il n’en résout.
D’ailleurs, son maintien à la tête de la CEI a eu pour conséquence immédiat le retrait du représentant de l’opposition significative (FPI) de cette institution. Même si pour le gouvernement et pour le Rassemblement des républicains (RDR, parti au pouvoir), cela est «un argument fallacieux», il importe de porter une attention particulière sur ce problème qui se présente comme une bombe à retardement qui pourrait exploser en 2015.
Par Herman N’Zarama
Comparaison des trois (3) derniers présidium du Bureau de la CEI
1- Bureau consensuel de la CEI établi en 2001 sur la base de la loi 2001-634 du 9 Octobre 2001
Président: Camille Hoguié, Magistrat, Représentant du Président de la République ;
1ere vice-présidente : Danielle Boni Claverie, UDPCI, Opposition;
2è vice-président: Bamba Siaka, PDCI, Opposition ;
Observations
·Aucun représentant du FPI, qui était le parti politique au pouvoir ;
·Le représentant du Président de la République n’était pas militant du FPI ;
·Deux représentants des partis politiques de l’Opposition encadraient le Président de la CEI.
2- Bureau consensuel (de la CEI établi en 2004, sur la base de la loi 2004-642 du 14 Décembre 2004 (Accord de Pretoria)
Président: Beugré Mambé/Bakayoko Youssouf, RHDP, Opposition ;
1er vice-président: Gomis Jean-Baptiste/Koné Sourou, RHDP, Opposition ;
2è vice-président: Fatoumata Traoré / Diarrassouba Soumalaye, MPCI-RHDP; Opposition ;
3è vice-président: Sinan Bakary/ Anaky Jacob, RHDP, Opposition ;
4e vice-président: Oulai Siéné/Dogou Alain, Représentant du Président de la République.
Observations :
·Les Représentants des partis politiques de l’Opposition étaient au nombre de quatre (4) sur cinq (5) membres du Présidium;
·De 2004 à 2014, le présidium de la CEI était totalement déséquilibré, en faveur des partis politiques jadis de l’Opposition, qui voulaient être rassurés ;
·L’opposition de 2004 qui avait demandé et obtenu par consensus ce présidium, n’est autre que le même RHDP, le regroupement de partis politiques aujourd’hui au pouvoir en 2014
3- Bureau non consensuel de la CEI établi le 5 septembre 2014, sur la base de la loi 2014-335 du 18 Juin 2014
Président: Bakayoko Youssouf, RHDP, pouvoir exécutif ;
1er vice-président: Koné Sourou, RHDP, représentant du président de la République, chef du pouvoir exécutif ;
2è vice-président: Coulibaly Gervais, LMP, parti politique de l’opposition
3è vice-président : Auguste Miremont, RHDP, pouvoir exécutif.
Observations:
·3/4 des membres du présidium du bureau de la CEI sont des représentants du regroupement des partis politiques au pouvoir : le Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (RHDP) ;
·L’actuel bureau de la CEI est déséquilibrée et inféodée au pouvoir exécutif ;
·L’opposition significative est totalement ignorée dans le Présidium de la CEI