Le calendrier onusien est rythmé annuellement par 119 journées internationales ; difficile de rendre le message audible. Mais l’ONU est dans son rôle d’impulsion. Concernant, la lutte pour l’égalité des femmes, chaque pays fait sienne de ces recommandations en fonction de ses contingences budgétaires, sociales et traditionnelles. Quelle solution pour le futur : l’éducation des filles pour qu’elles se prennent elles-mêmes en charge ?
La date du 8 mars célèbre la Journée Internationale de la Femme avec pour thème cette année : autonomisation des femmes – autonomisation de l’humanité. La lutte pour l’égalité de l’homme et de la femme est un combat perpétuel ; même s’il a fait d’énormes progrès dans la société occidentale et dans les discours officiels, grâce à l’impulsion de l’ONU. Pourtant, il existe un pan entier de l’humanité qui ne la conçoit pas ainsi. Le président turc Recep Tayyip Erdogan, ne s’en offusque pas, lorsqu’il a déclaré en 2012 que « la femme ne peut naturellement pas être l'égale de l'homme ». Selon lui, « les deux sexes ne pouvaient pas être traités de la même façon parce que c'est contre la nature humaine ». Il reconnaissait lui-même, par la suite, les conditions féminines en Anatolie, il y a seulement quelques décennies : « nos pauvres mères ont énormément souffert et ont fini bossues pendant que les hommes jouaient aux cartes ou aux dés dans les maisons de thé ».
Depuis quand la Femme lutte-elle pour l’égalité des sexes ? Au nom de l’islam un chef d’Etat d’une république considère que sa religion a défini une place pour les femmes : la maternité. En fait, toutes les religions monothéistes justifient par un dogme l’inégalité entre les deux sexes. L’Eglise catholique n’en est pas exempte avec « le fruit de la tentation qu’Eve a offert à Adam dans le jardin d’Eden ». Donc toutes ses descendantes devront porter le fardeau de ce pêché originel. Ainsi-soit-il !
Simone de Beauvoir dans son œuvre intitulée le deuxième sexe - paru il y a 65 ans – place le curseur, du début de la lutte pour l’égalité entre homme et femme, deux siècles en arrière. Elle considère que cette inégalité est une construction historique et idéologique pour réduire les conditions de la femme. Historiquement, on constate aussi que les transformations sociales telles que la révolution française de 1789 ou la révolution industrielle du XIXème siècle ont été des périodes propices à l’avancée de la cause féminine.
En occident, le combat des femmes a d’abord commencé au niveau du droit de vote qui leur a été refusé sous prétexte qu’elles étaient intellectuellement inférieures. A la fin de la seconde moitié du XIXème siècle, un peu partout en Europe, des mouvements féministes revendiquent le droit des femmes à l’éligibilité ; le plus célèbre fût celui fondé en 1903 par la britannique Emmeline Pankhurst appelé « les suffragettes ». La Nouvelle-Zélande (1893) et l’Australie (1902) sont les pionniers en matière d’accès à l’isoloir de la gent féminine. Les Etats-Unis et la Grande-Bretagne l’adoptèrent respectivement en 1919 et 1918 alors que les françaises ont dû patienter jusqu’à la fin de la Seconde Guerre Mondiale et plus exactement en 1944. Encore une date anniversaire pour la petite histoire : on fêtera cette année en France, les 50 ans de la possibilité d’ouvrir, seule, un compte bancaire et de pouvoir travailler sans l’autorisation du conjoint !
Les deux grands conflits mondiaux et la lutte des classes des partis dits progressistes (socialistes, communistes) ont été les plus déterminants dans la reconnaissance de l’aspiration des femmes à davantage d’égalité. Parallèlement aux revendications des hommes pour l’amélioration de leurs conditions de travail, des féministes s’y sont engouffrées pour faire avancer leur cause. Et c’est surtout, l’absence de main d’œuvre dans les usines, du fait de la mobilisation au front des hommes, qui a fait prendre conscience à la société de la contribution des femmes. Quant à la paternité de cette date du 8 mars, les versions divergent et selon la tendance des historiens. Certains affirment que c’est à l’appel du Parti Socialiste d’Amérique qu’une journée nationale de la femme fut célébrée le dernier dimanche de février en 1909 ; le 28 en l’occurrence. Tandis que les pays socialistes préfèrent la date du 8 mars 1917 comme symbole de la journée internationale de la femme. Ce serait les femmes qui, les premières, avaient manifesté à Petrograd, lors de la Révolution d’Octobre qui entraîna la chute du Tsar. Par la suite, la commémoration de cette date fut gravée dans le marbre par Lénine en 1921.
Les Conférences Mondiales sur les Femmes
Au lendemain de la 2nde Guerre Mondiale et pratiquement pendant trois décennies, on a eu l’impression que les institutions de l’ONU se sont contentées de classer par nomenclature les droits juridiques et civils des femmes. Elles se sont rendu compte que la modification progressive de leur statut juridique ne garantissait toujours pas l’égalité entre homme et femme sur le terrain.
L’année 1975, décrétée Année internationale de la femme, ouvre une nouvelle perspective. La première Conférence Mondiale sur les Femmes fut organisée à Mexico avec pour objectif : « le développement des stratégies et des plans d'action pour la promotion des femmes ». La principale revendication issue de cette rencontre s’est concrétisée par la déclaration à l’Assemblée Générale de l’ONU, quelques mois après cette Conférence, de la Décennie des Nations-Unies pour la Femme de 1976 à 1985. Et le 8 mars 1977, l’ONU adopte une résolution pour que tous les pays consacrent, à chaque date anniversaire, la Journée des Nations-Unies pour les Droits de la Femme et la paix Internationale.
S’en suivirent alors le cycle des Conférences Mondiales sur les Femmes, de plus en plus espacées dans le temps : Copenhague (1980), Nairobi (1985), Beijing (1995). Et depuis Pékin, la machine onusienne semble de nouveau se gripper. En 2000, une déclaration politique « Pékin+5 » a été adoptée en Assemblée Générale comme le « Pékin+10 » de 2005. Il s’agissait d’insister auprès de chaque acteur – pays, institutions, entreprises privées, sociétés civiles – de mettre en application les stratégies définies en 1995. Rappelons que le Programme d’Actions tracé à Pékin est l’autonomisation de la femme. Ah oui mais bon sang, c’est le thème de l’année 2015 qu’on a donc ressorti du fond du tiroir : « autonomisation des femmes – autonomisation de l’humanité ». L’organisation d’une 5ème Conférence Mondiale des Femmes ne fait plus recette ; alors que plusieurs organisations de la société civile et du système des Nations-Unies la réclame depuis dix ans. Même l’idée de cinq Conférences Régionales a été évoquée, mais en vain. Est-ce dû en partie au profond changement géopolitique du monde depuis le début des années 2000 ?
Et l’Afrique ?
Le continent peut se prévaloir d’avoir des femmes illustres : deux Prix Nobel de la paix : un pour la kenyane Wangari Muta Maathai en 2004 ; un autre collectif pour la présidente du Libéria Ellen Johnson Shirleaf et deux militantes des Droits de l’Homme (2011). L’une d’elle est aussi libérienne : « Leymah Gbowee a été récompensée pour son travail de mobilisation et d'organisation des femmes de toutes ethnies et de toutes religions pour mettre fin à la guerre civile et garantir la participation des femmes aux élections ». Hormis madame Ellen Johnson Shirleaf, Joyce Banda était à la tête de l’Etat du Malawi entre 2012 et 2014. Score honorable pour l’Afrique car depuis que les Etats-Nations existent seules 20 femmes ont été chefs d'Etat et de gouvernement démocratiquement élus. Une femme est également à la tête de l’Union Africaine depuis 2012 ; il s’agit de la sud-africaine Nkosazana Dlamini-Zuma.
Si dans les instances officielles, quelques frémissements peuvent donner du baume au cœur, pour des millions de nos concitoyennes le Programme d’Actions de Pékin ne s’est malheureusement concrétisé dans leur vie quotidienne. Et pourtant, elles contribuent pour plus de 60% de la production alimentaire d’un ménage. A chaque fois, comme pour rappeler à nos dirigeants qu’il s’agit bien d’une priorité, le thème de la femme et de l’enfant revient à chaque Sommet des chefs d’Etats. Ce fut le cas pour la Francophonie de 2014 : « femmes et jeunes : vecteurs de Paix et de développement ». Faute d’accès à la santé, à l’éducation de jeunes filles, les femmes subissent encore plus que les hommes les conséquences de la pauvreté. En dehors des problèmes structurels - les conséquences des mesures d’austérité imposées par les bailleurs de fonds dans les années 1990 - ont considérablement réduit le budget consacré à la santé et surtout à l’éducation.
Ensuite, le poids de la tradition reste également un sérieux problème pour l’amélioration de la condition féminine. Prenons l’exemple de l’excision : près de 100 millions de jeunes filles de 10 ans et plus sont excisées en Afrique (source : OMS). Et ce malgré, l’arsenal juridique mise en place il y a dix ans, lorsque la communauté internationale a engagé la lutte. Le tout-répressif est inefficace face aux normes sociales et l’attachement aux us et coutumes. Le travail de sensibilisation apporte quelques résultats tangibles. Mais ce combat passe certainement par l’éducation des femmes ; ce qui pourra changer progressivement les mentalités.
Encadré
Femme-objet
Les faits divers emblématiques, qui défrayent les chroniques internationales, nous rappellent de temps en temps le sort de millions de femmes victimes anonymes d’agressions sexuelles. L’homme est un prédateur, sûr de son impunité face aux femmes réduites au silence par le poids de la honte, la pesanteur familiale, l’obscurantisme d’une société misogyne.
Et la barbarie n’a pas de frontière ; elle sévit partout dans le monde. L’Inde est souvent stigmatisée. Comment en serait-il autrement quand un accusé profère la phrase suivante à la barre d’un tribunal : « lorsqu’une femme se fait violer, elle ne devrait pas se défendre. Elle devrait se taire et se laisser faire ». Ce sont les mots d’un des agresseurs de Jyoti Singh, cette jeune étudiante violée collectivement, en 2012, dans un bus et décédée quelques semaines plus tard.
La misère pousse de jeunes femmes à aller chercher du travail hors les murs. Que dire alors des mauvais traitements infligés aux domestiques dans un huis-clos d’un domicile. 1997 aux Emirats : Sarah Balabagan, jeune philippine est employée de maison. Tentative de viol de son patron, elle le poignarda. Verdict du tribunal : perpétuité pour meurtre prémédité. Fin des années 1980 en France : Véronique Akobé, jeune immigrée ivoirienne de 26 ans. Violée successivement et plusieurs fois par son patron – un industriel – et son fils, elle finît par se rebiffer. Coups de couteau et de marteau sur les deux agresseurs. Le fils est mortellement blessé et papa a eu plus de chance ; il a eu seulement le ventre éventré ! Véronique écopa de 20 ans à la cour d’Assises de Grasse en 1990 mais graciée par le président Jacques Chirac en 1996.
L’acte le plus abject reste la violence sexuelle utilisée comme arme de guerre. Exterminer les hommes et engrosser leurs femmes et leurs filles ou carrément détruire leur appareil génital par l’introduction d’objet contondant après l’acte. Le docteur Denis Mukwege « répare les femmes » dans son petit hôpital de Panzi à Bukavu (Sud Kivu, RD Congo), depuis une quinzaine d’années. Il a miraculeusement survécu à un attentat en 2012. Aux dernières nouvelles, les comptes bancaires de son hôpital ont été saisis par les autorités en janvier 2015. L’homme est un loup pour l’homme !
Alex ZAKA
La date du 8 mars célèbre la Journée Internationale de la Femme avec pour thème cette année : autonomisation des femmes – autonomisation de l’humanité. La lutte pour l’égalité de l’homme et de la femme est un combat perpétuel ; même s’il a fait d’énormes progrès dans la société occidentale et dans les discours officiels, grâce à l’impulsion de l’ONU. Pourtant, il existe un pan entier de l’humanité qui ne la conçoit pas ainsi. Le président turc Recep Tayyip Erdogan, ne s’en offusque pas, lorsqu’il a déclaré en 2012 que « la femme ne peut naturellement pas être l'égale de l'homme ». Selon lui, « les deux sexes ne pouvaient pas être traités de la même façon parce que c'est contre la nature humaine ». Il reconnaissait lui-même, par la suite, les conditions féminines en Anatolie, il y a seulement quelques décennies : « nos pauvres mères ont énormément souffert et ont fini bossues pendant que les hommes jouaient aux cartes ou aux dés dans les maisons de thé ».
Depuis quand la Femme lutte-elle pour l’égalité des sexes ? Au nom de l’islam un chef d’Etat d’une république considère que sa religion a défini une place pour les femmes : la maternité. En fait, toutes les religions monothéistes justifient par un dogme l’inégalité entre les deux sexes. L’Eglise catholique n’en est pas exempte avec « le fruit de la tentation qu’Eve a offert à Adam dans le jardin d’Eden ». Donc toutes ses descendantes devront porter le fardeau de ce pêché originel. Ainsi-soit-il !
Simone de Beauvoir dans son œuvre intitulée le deuxième sexe - paru il y a 65 ans – place le curseur, du début de la lutte pour l’égalité entre homme et femme, deux siècles en arrière. Elle considère que cette inégalité est une construction historique et idéologique pour réduire les conditions de la femme. Historiquement, on constate aussi que les transformations sociales telles que la révolution française de 1789 ou la révolution industrielle du XIXème siècle ont été des périodes propices à l’avancée de la cause féminine.
En occident, le combat des femmes a d’abord commencé au niveau du droit de vote qui leur a été refusé sous prétexte qu’elles étaient intellectuellement inférieures. A la fin de la seconde moitié du XIXème siècle, un peu partout en Europe, des mouvements féministes revendiquent le droit des femmes à l’éligibilité ; le plus célèbre fût celui fondé en 1903 par la britannique Emmeline Pankhurst appelé « les suffragettes ». La Nouvelle-Zélande (1893) et l’Australie (1902) sont les pionniers en matière d’accès à l’isoloir de la gent féminine. Les Etats-Unis et la Grande-Bretagne l’adoptèrent respectivement en 1919 et 1918 alors que les françaises ont dû patienter jusqu’à la fin de la Seconde Guerre Mondiale et plus exactement en 1944. Encore une date anniversaire pour la petite histoire : on fêtera cette année en France, les 50 ans de la possibilité d’ouvrir, seule, un compte bancaire et de pouvoir travailler sans l’autorisation du conjoint !
Les deux grands conflits mondiaux et la lutte des classes des partis dits progressistes (socialistes, communistes) ont été les plus déterminants dans la reconnaissance de l’aspiration des femmes à davantage d’égalité. Parallèlement aux revendications des hommes pour l’amélioration de leurs conditions de travail, des féministes s’y sont engouffrées pour faire avancer leur cause. Et c’est surtout, l’absence de main d’œuvre dans les usines, du fait de la mobilisation au front des hommes, qui a fait prendre conscience à la société de la contribution des femmes. Quant à la paternité de cette date du 8 mars, les versions divergent et selon la tendance des historiens. Certains affirment que c’est à l’appel du Parti Socialiste d’Amérique qu’une journée nationale de la femme fut célébrée le dernier dimanche de février en 1909 ; le 28 en l’occurrence. Tandis que les pays socialistes préfèrent la date du 8 mars 1917 comme symbole de la journée internationale de la femme. Ce serait les femmes qui, les premières, avaient manifesté à Petrograd, lors de la Révolution d’Octobre qui entraîna la chute du Tsar. Par la suite, la commémoration de cette date fut gravée dans le marbre par Lénine en 1921.
Les Conférences Mondiales sur les Femmes
Au lendemain de la 2nde Guerre Mondiale et pratiquement pendant trois décennies, on a eu l’impression que les institutions de l’ONU se sont contentées de classer par nomenclature les droits juridiques et civils des femmes. Elles se sont rendu compte que la modification progressive de leur statut juridique ne garantissait toujours pas l’égalité entre homme et femme sur le terrain.
L’année 1975, décrétée Année internationale de la femme, ouvre une nouvelle perspective. La première Conférence Mondiale sur les Femmes fut organisée à Mexico avec pour objectif : « le développement des stratégies et des plans d'action pour la promotion des femmes ». La principale revendication issue de cette rencontre s’est concrétisée par la déclaration à l’Assemblée Générale de l’ONU, quelques mois après cette Conférence, de la Décennie des Nations-Unies pour la Femme de 1976 à 1985. Et le 8 mars 1977, l’ONU adopte une résolution pour que tous les pays consacrent, à chaque date anniversaire, la Journée des Nations-Unies pour les Droits de la Femme et la paix Internationale.
S’en suivirent alors le cycle des Conférences Mondiales sur les Femmes, de plus en plus espacées dans le temps : Copenhague (1980), Nairobi (1985), Beijing (1995). Et depuis Pékin, la machine onusienne semble de nouveau se gripper. En 2000, une déclaration politique « Pékin+5 » a été adoptée en Assemblée Générale comme le « Pékin+10 » de 2005. Il s’agissait d’insister auprès de chaque acteur – pays, institutions, entreprises privées, sociétés civiles – de mettre en application les stratégies définies en 1995. Rappelons que le Programme d’Actions tracé à Pékin est l’autonomisation de la femme. Ah oui mais bon sang, c’est le thème de l’année 2015 qu’on a donc ressorti du fond du tiroir : « autonomisation des femmes – autonomisation de l’humanité ». L’organisation d’une 5ème Conférence Mondiale des Femmes ne fait plus recette ; alors que plusieurs organisations de la société civile et du système des Nations-Unies la réclame depuis dix ans. Même l’idée de cinq Conférences Régionales a été évoquée, mais en vain. Est-ce dû en partie au profond changement géopolitique du monde depuis le début des années 2000 ?
Et l’Afrique ?
Le continent peut se prévaloir d’avoir des femmes illustres : deux Prix Nobel de la paix : un pour la kenyane Wangari Muta Maathai en 2004 ; un autre collectif pour la présidente du Libéria Ellen Johnson Shirleaf et deux militantes des Droits de l’Homme (2011). L’une d’elle est aussi libérienne : « Leymah Gbowee a été récompensée pour son travail de mobilisation et d'organisation des femmes de toutes ethnies et de toutes religions pour mettre fin à la guerre civile et garantir la participation des femmes aux élections ». Hormis madame Ellen Johnson Shirleaf, Joyce Banda était à la tête de l’Etat du Malawi entre 2012 et 2014. Score honorable pour l’Afrique car depuis que les Etats-Nations existent seules 20 femmes ont été chefs d'Etat et de gouvernement démocratiquement élus. Une femme est également à la tête de l’Union Africaine depuis 2012 ; il s’agit de la sud-africaine Nkosazana Dlamini-Zuma.
Si dans les instances officielles, quelques frémissements peuvent donner du baume au cœur, pour des millions de nos concitoyennes le Programme d’Actions de Pékin ne s’est malheureusement concrétisé dans leur vie quotidienne. Et pourtant, elles contribuent pour plus de 60% de la production alimentaire d’un ménage. A chaque fois, comme pour rappeler à nos dirigeants qu’il s’agit bien d’une priorité, le thème de la femme et de l’enfant revient à chaque Sommet des chefs d’Etats. Ce fut le cas pour la Francophonie de 2014 : « femmes et jeunes : vecteurs de Paix et de développement ». Faute d’accès à la santé, à l’éducation de jeunes filles, les femmes subissent encore plus que les hommes les conséquences de la pauvreté. En dehors des problèmes structurels - les conséquences des mesures d’austérité imposées par les bailleurs de fonds dans les années 1990 - ont considérablement réduit le budget consacré à la santé et surtout à l’éducation.
Ensuite, le poids de la tradition reste également un sérieux problème pour l’amélioration de la condition féminine. Prenons l’exemple de l’excision : près de 100 millions de jeunes filles de 10 ans et plus sont excisées en Afrique (source : OMS). Et ce malgré, l’arsenal juridique mise en place il y a dix ans, lorsque la communauté internationale a engagé la lutte. Le tout-répressif est inefficace face aux normes sociales et l’attachement aux us et coutumes. Le travail de sensibilisation apporte quelques résultats tangibles. Mais ce combat passe certainement par l’éducation des femmes ; ce qui pourra changer progressivement les mentalités.
Encadré
Femme-objet
Les faits divers emblématiques, qui défrayent les chroniques internationales, nous rappellent de temps en temps le sort de millions de femmes victimes anonymes d’agressions sexuelles. L’homme est un prédateur, sûr de son impunité face aux femmes réduites au silence par le poids de la honte, la pesanteur familiale, l’obscurantisme d’une société misogyne.
Et la barbarie n’a pas de frontière ; elle sévit partout dans le monde. L’Inde est souvent stigmatisée. Comment en serait-il autrement quand un accusé profère la phrase suivante à la barre d’un tribunal : « lorsqu’une femme se fait violer, elle ne devrait pas se défendre. Elle devrait se taire et se laisser faire ». Ce sont les mots d’un des agresseurs de Jyoti Singh, cette jeune étudiante violée collectivement, en 2012, dans un bus et décédée quelques semaines plus tard.
La misère pousse de jeunes femmes à aller chercher du travail hors les murs. Que dire alors des mauvais traitements infligés aux domestiques dans un huis-clos d’un domicile. 1997 aux Emirats : Sarah Balabagan, jeune philippine est employée de maison. Tentative de viol de son patron, elle le poignarda. Verdict du tribunal : perpétuité pour meurtre prémédité. Fin des années 1980 en France : Véronique Akobé, jeune immigrée ivoirienne de 26 ans. Violée successivement et plusieurs fois par son patron – un industriel – et son fils, elle finît par se rebiffer. Coups de couteau et de marteau sur les deux agresseurs. Le fils est mortellement blessé et papa a eu plus de chance ; il a eu seulement le ventre éventré ! Véronique écopa de 20 ans à la cour d’Assises de Grasse en 1990 mais graciée par le président Jacques Chirac en 1996.
L’acte le plus abject reste la violence sexuelle utilisée comme arme de guerre. Exterminer les hommes et engrosser leurs femmes et leurs filles ou carrément détruire leur appareil génital par l’introduction d’objet contondant après l’acte. Le docteur Denis Mukwege « répare les femmes » dans son petit hôpital de Panzi à Bukavu (Sud Kivu, RD Congo), depuis une quinzaine d’années. Il a miraculeusement survécu à un attentat en 2012. Aux dernières nouvelles, les comptes bancaires de son hôpital ont été saisis par les autorités en janvier 2015. L’homme est un loup pour l’homme !
Alex ZAKA