Ci-dessous les explications de Mme la procureure Fatou Bensouda, face aux nombreuses interrogations sur les mesures prises par le Bureau à propos de ces allégations.
Depuis l’été 2014, mon Bureau reçoit et examine des renseignements à propos d’allégations préoccupantes concernant des atrocités commises de façon généralisée par le prétendu État islamique d’Irak et du Cham/Grande Syrie (« EIIS » alias « EIIL », « Daesh » ou « EI ») en Syrie et en Iraq. Des crimes d’une incroyable cruauté ont été signalés, notamment des exécutions en masse, l’esclavage sexuel, des viols et autres formes de violences sexuelles ou à caractère sexiste, des actes de torture, des mutilations, l’enrôlement et le recrutement forcé d’enfants et la persécution de minorités ethniques et religieuses, sans oublier la destruction délibérée de biens culturels. Le crime de génocide a par ailleurs été mentionné. Face aux nombreuses interrogations sur les mesures prises par le Bureau à propos de ces allégations, j’ai pris la décision de fournir les explications suivantes.
Les atrocités qui auraient été commises par l’EIIS constituent sans l’ombre d’un doute des crimes graves qui touchent l’ensemble de la communauté internationale et menacent la paix, la sécurité et le bien-être de la région en cause et du monde. Elles ont en outre été perpétrées dans le cadre d’autres crimes présumés commis par d’autres factions belligérantes en Syrie et en Iraq. Cependant, ni la Syrie ni l’Iraq ne sont partie au Statut de Rome – le traité fondateur de la Cour pénale internationale (la « Cour » ou la CPI). Par conséquent, la Cour n’a pas de compétence ratione loci s’agissant des crimes commis sur leur territoire.
Les chances de poursuivre les personnes qui portent la responsabilité la plus lourde au sein de la direction de l’EIIS semblent très minces.
Cela étant, ainsi qu’il est prévu au Statut de Rome, la CPI peut exercer sa compétente ratione personae à l’égard des auteurs présumés de crimes s’ils sont ressortissants d’un État partie, et ce, même lorsqu’elle n’a pas de compétence ratione loci. Sur cette base, le Bureau a examiné les communications qu’il a reçues à propos des crimes qui auraient été commis par l’EIIS afin d’évaluer les possibilités d’exercer sa compétence à l’égard des ressortissants d’États parties engagés dans les rangs de cette organisation. Ce faisant, il n’a pas perdu de vue qu’il avait pour politique de concentrer son action sur les personnes qui portent la responsabilité la plus lourde dans les crimes commis à grande échelle. D’après les informations réunies, des milliers de combattants étrangers ont rallié les rangs de l’EIIS en l’espace de quelques mois seulement. Parmi eux, figure un nombre important de ressortissants d’États parties dont, entre autres, la Tunisie, la Jordanie, la France, le Royaume-Uni, l’Allemagne, la Belgique, les Pays-Bas et l’Australie. Certains d’entre eux ont pu être impliqués dans des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre. Quelques uns ont rendu publics leurs crimes odieux en communiquant sur les réseaux sociaux. Les renseignements dont dispose le Bureau indiquent également que l’EIIS est une organisation militaire et politique dirigée principalement par des ressortissants iraquiens et syriens. Partant, à ce stade, les chances qu’a le Bureau de pouvoir enquêter et poursuivre les personnes qui portent la responsabilité la plus lourde au sein de la direction de l’EIIS semblent très minces.
Dans ce contexte, je suis parvenue à la conclusion qu’au stade actuel, le fondement juridique nécessaire pour procéder à un examen préliminaire était trop étriqué. Si les États en cause renouvellent leur engagement et prennent conscience de l’urgence de la situation, des solutions seront peut-être envisageables. La décision d’États non parties ou du Conseil de sécurité de l’ONU de saisir la CPI pour qu’elle intervienne est, cependant, complètement indépendante de sa volonté.
Je suis prête à jouer mon rôle, en toute indépendance et en toute impartialité, conformément au cadre juridique établi par le Statut de Rome.
Il convient de rappeler qu’au regard du Statut de Rome, il incombe en premier lieu aux autorités nationales d’enquêter sur les crimes commis à grande échelle et de poursuivre leurs auteurs. Je continuerai à collaborer avec les États concernés afin de coordonner les actions, voire d’échanger des informations se rapportant aux crimes qui auraient été commis par des ressortissants de leur pays en vue d’apporter un soutien aux enquêtes et aux poursuites menées à l’échelon national, le cas échéant. Le Bureau continuera en outre à recueillir tout renseignement supplémentaire qui permettrait d’établir clairement les différentes positions occupées par les ressortissants d’États parties au sein de la structure hiérarchique de l’EIIS.
Je reste profondément préoccupée par la situation actuelle et je souhaite souligner qu’il est de notre devoir en tant que communauté internationale de nous mobiliser compte tenu du sort tragique des victimes qui ont vu leurs droits et leur dignité bafoués. L’EIIS continue à semer la terreur de façon généralisée sur les territoires où il sévit. La communauté internationale s’est engagée à ce que les crimes épouvantables qui heurtent profondément la conscience humaine ne restent pas impunis.
En tant que Procureur de la CPI, je suis prête à jouer mon rôle, en toute indépendance et en toute impartialité, conformément au cadre juridique établi par le Statut de Rome.
Contexte
La Cour pénale internationale est régie par le Statut de Rome, lequel lui confère une compétence et un mandat particuliers et soigneusement définis. L’une des dispositions fondamentales du Statut de Rome (articles 12 et 13) prévoit que la Cour ne peut exercer sa compétence qu’à l’égard des crimes internationaux si i) l’État sur le territoire duquel le crime a été commis a accepté la compétence de la Cour ; ii) l’État dont la personne accusée du crime est un ressortissant a accepté la compétence de la Cour ; ou iii) la situation en cause est déférée au Procureur par le Conseil de sécurité de l’ONU agissant en vertu du chapitre VII de la Charte des Nations Unies.
Le Bureau du Procureur de la CPI mène des enquêtes et des poursuites, en toute indépendance et en toute impartialité, à propos du crime de génocide, de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre. Il poursuit actuellement des enquêtes en Ouganda, en République démocratique du Congo, au Darfour (Soudan), en République centrafricaine, au Kenya, en Libye, en Côte d'Ivoire et au Mali. Il conduit également des examens préliminaires à propos des situations en Afghanistan, en Colombie, en Géorgie, en Guinée, au Honduras, en Iraq (exactions présumées commises par des militaires britanniques), au Nigéria, en Palestine et en Ukraine.
Depuis l’été 2014, mon Bureau reçoit et examine des renseignements à propos d’allégations préoccupantes concernant des atrocités commises de façon généralisée par le prétendu État islamique d’Irak et du Cham/Grande Syrie (« EIIS » alias « EIIL », « Daesh » ou « EI ») en Syrie et en Iraq. Des crimes d’une incroyable cruauté ont été signalés, notamment des exécutions en masse, l’esclavage sexuel, des viols et autres formes de violences sexuelles ou à caractère sexiste, des actes de torture, des mutilations, l’enrôlement et le recrutement forcé d’enfants et la persécution de minorités ethniques et religieuses, sans oublier la destruction délibérée de biens culturels. Le crime de génocide a par ailleurs été mentionné. Face aux nombreuses interrogations sur les mesures prises par le Bureau à propos de ces allégations, j’ai pris la décision de fournir les explications suivantes.
Les atrocités qui auraient été commises par l’EIIS constituent sans l’ombre d’un doute des crimes graves qui touchent l’ensemble de la communauté internationale et menacent la paix, la sécurité et le bien-être de la région en cause et du monde. Elles ont en outre été perpétrées dans le cadre d’autres crimes présumés commis par d’autres factions belligérantes en Syrie et en Iraq. Cependant, ni la Syrie ni l’Iraq ne sont partie au Statut de Rome – le traité fondateur de la Cour pénale internationale (la « Cour » ou la CPI). Par conséquent, la Cour n’a pas de compétence ratione loci s’agissant des crimes commis sur leur territoire.
Les chances de poursuivre les personnes qui portent la responsabilité la plus lourde au sein de la direction de l’EIIS semblent très minces.
Cela étant, ainsi qu’il est prévu au Statut de Rome, la CPI peut exercer sa compétente ratione personae à l’égard des auteurs présumés de crimes s’ils sont ressortissants d’un État partie, et ce, même lorsqu’elle n’a pas de compétence ratione loci. Sur cette base, le Bureau a examiné les communications qu’il a reçues à propos des crimes qui auraient été commis par l’EIIS afin d’évaluer les possibilités d’exercer sa compétence à l’égard des ressortissants d’États parties engagés dans les rangs de cette organisation. Ce faisant, il n’a pas perdu de vue qu’il avait pour politique de concentrer son action sur les personnes qui portent la responsabilité la plus lourde dans les crimes commis à grande échelle. D’après les informations réunies, des milliers de combattants étrangers ont rallié les rangs de l’EIIS en l’espace de quelques mois seulement. Parmi eux, figure un nombre important de ressortissants d’États parties dont, entre autres, la Tunisie, la Jordanie, la France, le Royaume-Uni, l’Allemagne, la Belgique, les Pays-Bas et l’Australie. Certains d’entre eux ont pu être impliqués dans des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre. Quelques uns ont rendu publics leurs crimes odieux en communiquant sur les réseaux sociaux. Les renseignements dont dispose le Bureau indiquent également que l’EIIS est une organisation militaire et politique dirigée principalement par des ressortissants iraquiens et syriens. Partant, à ce stade, les chances qu’a le Bureau de pouvoir enquêter et poursuivre les personnes qui portent la responsabilité la plus lourde au sein de la direction de l’EIIS semblent très minces.
Dans ce contexte, je suis parvenue à la conclusion qu’au stade actuel, le fondement juridique nécessaire pour procéder à un examen préliminaire était trop étriqué. Si les États en cause renouvellent leur engagement et prennent conscience de l’urgence de la situation, des solutions seront peut-être envisageables. La décision d’États non parties ou du Conseil de sécurité de l’ONU de saisir la CPI pour qu’elle intervienne est, cependant, complètement indépendante de sa volonté.
Je suis prête à jouer mon rôle, en toute indépendance et en toute impartialité, conformément au cadre juridique établi par le Statut de Rome.
Il convient de rappeler qu’au regard du Statut de Rome, il incombe en premier lieu aux autorités nationales d’enquêter sur les crimes commis à grande échelle et de poursuivre leurs auteurs. Je continuerai à collaborer avec les États concernés afin de coordonner les actions, voire d’échanger des informations se rapportant aux crimes qui auraient été commis par des ressortissants de leur pays en vue d’apporter un soutien aux enquêtes et aux poursuites menées à l’échelon national, le cas échéant. Le Bureau continuera en outre à recueillir tout renseignement supplémentaire qui permettrait d’établir clairement les différentes positions occupées par les ressortissants d’États parties au sein de la structure hiérarchique de l’EIIS.
Je reste profondément préoccupée par la situation actuelle et je souhaite souligner qu’il est de notre devoir en tant que communauté internationale de nous mobiliser compte tenu du sort tragique des victimes qui ont vu leurs droits et leur dignité bafoués. L’EIIS continue à semer la terreur de façon généralisée sur les territoires où il sévit. La communauté internationale s’est engagée à ce que les crimes épouvantables qui heurtent profondément la conscience humaine ne restent pas impunis.
En tant que Procureur de la CPI, je suis prête à jouer mon rôle, en toute indépendance et en toute impartialité, conformément au cadre juridique établi par le Statut de Rome.
Contexte
La Cour pénale internationale est régie par le Statut de Rome, lequel lui confère une compétence et un mandat particuliers et soigneusement définis. L’une des dispositions fondamentales du Statut de Rome (articles 12 et 13) prévoit que la Cour ne peut exercer sa compétence qu’à l’égard des crimes internationaux si i) l’État sur le territoire duquel le crime a été commis a accepté la compétence de la Cour ; ii) l’État dont la personne accusée du crime est un ressortissant a accepté la compétence de la Cour ; ou iii) la situation en cause est déférée au Procureur par le Conseil de sécurité de l’ONU agissant en vertu du chapitre VII de la Charte des Nations Unies.
Le Bureau du Procureur de la CPI mène des enquêtes et des poursuites, en toute indépendance et en toute impartialité, à propos du crime de génocide, de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre. Il poursuit actuellement des enquêtes en Ouganda, en République démocratique du Congo, au Darfour (Soudan), en République centrafricaine, au Kenya, en Libye, en Côte d'Ivoire et au Mali. Il conduit également des examens préliminaires à propos des situations en Afghanistan, en Colombie, en Géorgie, en Guinée, au Honduras, en Iraq (exactions présumées commises par des militaires britanniques), au Nigéria, en Palestine et en Ukraine.