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Afrique Publié le mardi 14 juillet 2015 | Diasporas-News

Interview exclusive Aliou Sall: « J’ai de l’estime pour Karim Wade »

© Diasporas-News Par DR
Aliou Sall, frère du président Sénégalais Macky Sall
Frère du président Macky Sall, Aliou compte se faire un prénom en briguant et obtenant la mairie de Guédiawaye, la bouillonnante et populaire ville périphérique de Dakar. Mais son apparition sur la scène publique sénégalaise est l’objet de fantasmes, de polémiques et d’accusations de scandales politico-financiers. Venu participer à la sixième édition du forum actions internationales des collectivités locales organisé en France, Aliou Sall a répondu à nos questions. Entretien sans détour avec celui qui s’agace d’être décrit comme l’officieux vice-président du Sénégal.

L’avenir de Guédiawaye est de créer une économie dans notre cité. Dans le cadre du Plan Sénégal Émergent (PSE), la région de Dakar est en train de se positionner comme un Hub de services. Guédiawaye doit y avoir son rôle. Ceci en tant que pôle universitaire à travers l’érection d’une université arabo-africaine, mais aussi en tant que pôle de commerce. Nous avons pour projet d’aménager la bande des bandes filaos à Guédiawaye. Il y a une négociation avancée avec le ministère de l’environnement. Ce qui va nous permettra d’avoir un peu de foncier pour y ériger un ensemble de projets. La création d’une salle de spectacle de 1200 places est le projet phare. Toutes ses activités feront de Guédiawaye un pôle de services. Nous comptons inverser le regard sur notre ville qui ne sera plus un dortoir. Les Sénégalais vont désormais venir à Guédiawaye pour les services sanitaires, pour l’éducation. C’est un projet qui va démarrer au mois de janvier prochain. La salle sera érigée vers le pont Malibu. L’université arabo africaine sera érigée dans la commune Wakhinane Nimzatt.

Diasporas –News : Quels sont les délais pour l’achèvement des travaux de tous ses projets ?
Il n y a pas de délai pour le développement. Ce sont des projets dont la réalisation demande peut être tout mon mandat et même au delà.

Aliou SALL : Qu’est-ce qui vous lie à Guédiawaye ? Il vous est souvent reproché d’être parachuté
A.S : Non, ce n’est pas le cas. Je peux même dire que mon parti était contre ma candidature à Guédiawaye. Je me suis parachuté, moi même. Qu’est-ce qui m’a amené à Guédiawaye ? C’est une question à laquelle je ne peux pas répondre. Je ne sais pas ce qui a motivé ma venue dans cette ville. C’est le bon Dieu qui m’a orienté vers cette ville que j’aime.

D-N : Est-ce le choix de la facilité ?
A.S : C’est du n’importe quoi… Dans notre parti à Guédiawaye, il y a Racine Talla, ancien fonctionnaire des Nations-Unis, actuel Directeur de Radio Télévision Sénégalaise, Cheikh Awa Balla Fall, actuel directeur de l’École d’administration, qui a occupé beaucoup de hautes fonctions dans l’Etat du Sénégal. Dire que j’ai aimé la facilité, c’est contraire à la vérité. Si j’avais aimé la facilité, j’aurais milité à Fatick. Il m’est 100% plus facile d’être élu maire de Fatick que celui de Guédiawaye. Je n’ai pas l’atout d’y avoir vécu toute mon enfance, d’y avoir beaucoup d’amis, encore moins un vécu politique. Ce que j’avais à Fatick. C’est une ville où les gens ne se laisse pas faire, avec des personnes hyper dynamiques, ce n’était pas cadeau.

D-N : De votre parcours, quels sont les avantages que vous tirez du fait d’être le frère du président Macky Sall ?
A.S : Il y a eu des avantages et des inconvénients. Je ne peux pas nier qu’être le frère du président a fait de moi immédiatement un sujet politique intéressant. Si je n’étais pas le frère du président, j’aurais à déployer beaucoup plus d’efforts pour faire ma communication. Etre le frère du président me donne un marketing gratuit. L’inconvénient est lié à l’histoire récente du Sénégal avec l’accusation portée sur Karim et Abdoulaye Wade de vouloir « monarchisé » le pouvoir, d’en faire quelque chose de familiale. Cela a constitué un grand handicap pour moi. Quand j’ai annoncé ma candidature à la mairie de Guédiawaye, les gens ont vite fait de l’assimiler à la démarche que Karim et Abdoulaye Wade avaient voulu mettre en œuvre (Président et vice président du Sénégal, ndlr). Cela a charrié beaucoup de passions pour ne pas dire de haine, beaucoup d’attaques médiatiques y compris même un peu de violence physique. Mais cela a mis en moi une très grande envie de me battre et de démontrer qu’en général, les Sénégalais sont sensés et ils ne se laissent pas bernés par ce que la presse disait par ailleurs. Ce que les médias disent est parfois différent de ce que les populations ressentent. Elles ont sanctionné positivement ma présence politique. La façon de communiquer, d’être sur le terrain, mais aussi notre projet politique, économique ont suscité l’espoir d’avoir un avenir meilleur à Guédiawaye.

D-N : Quelle est la différence entre le duo Aliou et Macky Sall et celui Abdoulaye et Karim Wade ?
A.S : D’abord, je dois dire qu’il n y a pas de duo Aliou et Macky Sall. Il ne m’a pas présenté, je peux même dire qu’il n’a pas encouragé ma candidature. Je peux même aller plus loin pour dire qu’il a découragé ma candidature.
D-N : Pourquoi ?
A.S : Tout le monde, y compris lui, avait peur que je perde les élections. C’était inimaginable de voir quelqu’un avec tous les handicaps évoqués (plus haut) sortir vainqueur d’une élection locale après l’expérience du cas Karim Wade. C’était une défaite programmée et annoncée pour l’ensemble des acteurs. Mes amis et parents m’ont poussé à ne pas y aller mais je n’ai pas accepté.

D-N : Qu’est ce qui vous a motivé à aller outre leur avis ?
A.S : C’est ma conviction profonde qu’en tant que politique. Je pense qu’il ne faut pas avoir peur de la défaite politique. Ce sont les Sénégalais qui votent, c’est à eux de prendre la décision. Il n’y a pas le feu, comme on dit…
D-N : Que répondez-vous à ceux qui disent qu’au sein de l’appareil d’Etat du Sénégal il y a du népotisme, une forme de gestion familiale ?
A.S : Ce n’est pas vrai. Les gens qui le disent eux même savent que ce n’est pas vrai. Je suis le frère du président mais aussi, je regrette de le rappeler, un cadre de mon pays. J’ai fréquenté les écoles qu’il fallait. J’ai l’expérience qu’il faut dans la plus haute fonction publique, aujourd’hui je ne travaille dans aucune instance gouvernementale. Aucun décret n’a nommé Aliou Sall. S’il y avait de la gestion familiale, j’aurais été ministre et légitimement. Cela n’existe pas car le président ne veut pas de la gestion familiale. D’autre part, je ne connais pas un seul membre de notre famille qui a été nommé à un poste de responsabilité dans le gouvernement.

D-N : Maire d’une grande ville, Président de l’Association des Maires du Sénégal (AMS), et de l’Union élus locaux de votre pays, êtes-vous le vice président du Sénégal ?
A.S : C’est exagéré quand même. C’est ridicule.
D-N : Quelle est la part de vérité ?
A.S : Je viens de vous dire que je n’ai aucune fonction publique dans l’Etat, ni de nomination. En tant que Maire de Guédiawaye, j’ai été élu. Président l’AMS, c’est une association qui a porté son choix sur moi. Ce n’est pas un organisme d’Etat. Ce sont des membres qui se sont réunis pour me confier la présidence de cette association. Qu’est-ce que cela à voir avec l’Etat. Et si j’étais ministre ? Je ne suis pas ministre, ni directeur général d’une société publique, je n’ai pas de salaire d’Etat en dehors de mes indemnités de maire.

Je ne dispose ni de véhicule, ni de téléphone de l’Etat. C’est totalement ridicule.

D-N : Est-ce qu’on vous a donné des postes parce que vous êtes le frère du président ?
A.S : Pour la mairie de Guédiawaye, personne ne m’a mis là bas, on m’en a même dissuadé. Les gens ont voté pour moi avec transparence. Le débat sur le fait d’être frère du président est dépassé. Il aurait été pertinent avant le vote et cela a été posé sur la table. Et cela n’a pas influencé les gens. Karim Wade était le fils du président Wade, il s’est présenté à des élections et n’a pas gagné dans son bureau de vote. Je ne parle même pas de sa localité. Il avait perdu partout.

D-N : Quels enseignement tirés vous du cas de Karim Wade ?
A.S : D’abord j’ai une très grande estime pour Karim Wade. Il a assumé des responsabilités et a pu faire des choses. Maintenant on peut avoir des critiques sur son bilan. Aujourd’hui, il a été jugé et condamné. C’est sa responsabilité devant la justice. Cela ne me regarde pas. En revanche Karim Wade a été un homme public, ministre d’Etat du Sénégal. Il en avait le droit en tant que Sénégalais. Il a pu réaliser des choses. A cette personnalité, je dis respect pour ses fonctions de ministres. J’ai vraiment du respect pour Karim. Je lui souhaite d’être le plus tôt possible, libre de ses actions et qu’il puisse assumer ses positions politiques.

D-N : Avez-vous eu des contacts avec Karim Wade depuis son incarcération ?
A.S : Malheureusement non. Je disais à un de ses amis que j’aurais bien aimé aller voir Karim Wade (en prison) mais si je le fais toute de suite les médias vont l’interpréter autrement en disant que je suis le médiateur du président (Sall) pour négocier avec lui. Donc j’ai envie d’aller le voir mais je ne peux même pas le faire.

D-N : Avec du recul comment analyser vous l’affaire Petrotim ?
A.S : J’ai dépassé cette affaire. On m’a accusé, j’ai répondu. Si une personne au monde a la plus petite preuve que j’ai été actionnaire de Petrotim, elle n’a qu’à la montrer. Je dirai même qu’une seule personne identifie des traces d’argent dans n’importe quel compte au monde, qu’on me montre les preuves.

D-N : On dit que vous être multimillionnaire… ?
A.S : J’aurais bien aimé être multimillionnaire. La dernière fois, on m’a prêté la création d’une banque (Banque de Dakar, ndlr), Ce n’est pas vrai mais j’aurais bien aimé en être actionnaire. C’est mon droit.

D-N : Vous n’avez rien à voir de près ou de loin avec la création de cette banque ?
A.S : Si, j’ai des amis que j’ai aidés à créer une banque au Sénégal. Ils ont injecté 26 milliards de F Cfa au Sénégal. Je pense, franchement, que je devrais être décoré pour cela. Mais en dehors de cela, je n’ai pas un sou dans une banque. Est-ce que les gens imaginent, en tant que frère du président, ce que cela représente de mettre de l’argent dans une banque ? C’est impossible à cacher. Si on avait dit que j’ai des comptes à Singapour, dans des paradis fiscaux… mais qu’on dise que j’ai une banque au Sénégal c’est pousser la réflexion pas plus loin qu’un mètre. C’est aberrant.

D-N : Vous êtes en train de nous dire que tous vos comptes sont domiciliés au Sénégal ?
A.S : (Eclat de rire) Pourquoi tous vos comptes, comme si j’en avais plusieurs…(rires) Bon, j’en n’ai pas un, j’en ai deux, trois ou quatre, je ne sais pas. Mais je n’ai aucune activité financière, pas de virement, pas de compte d’épargne, rien à travers le monde excepté un compte d’assurance où il y a 35 euros qui date de l’époque où j’étais étudiant. Je ne l’ai jamais fermé ce qui me vaut la réception de mails de relance sur sa fermeture. Les gens rêvent et prennent leurs rêves pour réalité.

D-N : Comment expliquez-vous qu’il ait autant d’accusations portées sur votre personne ?
A.S : Je ne sais pas, peut être qu’il faut poser la question à ceux qui en sont responsables. Vous savez, nous avons vécu des fantasmes, car je ne connais pas la réalité des choses, en prêtant à Karim Wade d’être multimilliardaire. Quand Karim est parti, il fallait trouver quelqu’un d’autre.

D-N : Avez-vous des doutes sur le fait que Karim Wade soit multimilliardaire ?
A.S : Je n’en sais rien.

Moussa DIOP
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