Cheikh-Souleymane Diallo est ivoirien et chargé d’affaires chez Proparco depuis bientôt quatre ans. Très au fait des engagements de la filiale de l’Agence française de développement (AFD) qui est intervenu dans le financement de la centrale thermique d’Azito, il nous explique les axes d’intervention de sa structure. Mais surtout le rôle de Proparco dans le financement du secteur privé ivoirien et sous- régional.
Pouvez-vous présenter votre structure à nos lecteurs ?
Proparco est une filiale de l’AFD, qui est l’actionnaire de référence avec 63% du capital. A l’intérieur de cet actionnariat, on trouve des entreprises privées du Nord et du Sud, des institutions financières et des institutions de développement (Akfed, la BOAD, la DBSA …). Proparco focalise son action sur le secteur privé, contrairement à l’AFD qui intervient principalement sur le souverain et para-étatique. L’AFD dispose néanmoins de certains produits financiers à destination du secteur privé, comme l’outil de garantie Ariz. L’action de Proparco vise à développer le secteur privé, donc l’économie. Bénéficiant de 13 représentations régionales (dont 6 en Afrique), la Proparco est présente sur 4 continents dans plus de 70 pays. Nous accompagnons des banques dans le refinancement de l’économie, des entreprises dans la réalisation de leurs projets d’investissement, des fonds d’investissement dans leurs levées de fonds.
Tout d’abord, au niveau des banques, nous offrons des lignes de refinancement. Nous leur accordons des ressources longues pour qu’elles refinancent l’économie dans notre région. Les banques de la région ont bien souvent des problématiques de ratio de transformation. Nous les aidons à disposer de ressources longues pour financer les emplois longs. Par exemple, nous avons octroyé des lignes de refinancement à plusieurs groupes bancaires panafricains (Groupe Ecobank, Groupe BOA). Proparco est également actionnaire et prêteur de certaines filiales de la Société Générale et la BNP Paribas.
Proparco réalise également des financements directs. En Côte d’Ivoire, par exemple, nous avons une présence marquée dans le secteur énergétique. Nous considérons que bénéficier de sources d’énergie suffisantes et stables est l’un des principaux facteurs de croissance pour une économie. Il s’agit en fait d’accompagner des opérateurs privés à produire de l’énergie nécessaire au développement du secteur industriel. Proparco est également assez présente dans l’agro-industrie en Côte d’Ivoire.
Proparco peut aussi jouer un rôle d’intermédiaire financier, nous accompagnons la plupart des fonds d’investissement régionaux. Aujourd’hui, Proparco est actionnaire de plusieurs fonds d’investissement régionaux (Cauris Croissance II, Afric Invest II, I&P AE, I&P Dev II, ECP Africa Fund II…) qui accompagnent les grosses PME en capital-risque ou capital-développement, mais également dans leur gestion et leur stratégie de développement.
A propos du secteur énergétique, Proparco a contribué à l’extension de la centrale d’Azito. Comment s’est traduit l’apport de cette structure ?
Notre intervention aux côtés d’autres institutions financières de développement a permis au producteur indépendant d’énergie, Azito, de produire plus d’énergie avec la même quantité de combustible via la mise en place d’un cycle combiné. Dans le cas d’Azito, au-delà du financement de 55 millions dollars US apporté directement, Proparco a syndiqué d’autres bailleurs afin d’apporter au total 170 dollars US de financement au projet. Nous avons au final accompagné en Côte d’Ivoire les deux principaux producteurs indépendants d’énergie, à savoir Azito et Ciprel. Notre action se situe cependant au-delà du financement de l’énergie thermique. Alors que s’ouvrent bientôt les négociations à Paris, dites COP 21, notre action sera orientée de plus en plus dans la production d’énergie renouvelable telle que l’énergie solaire, photovoltaïque, hydraulique… Nous étudions en ce moment plusieurs projets avec des développeurs locaux, régionaux et internationaux…, à l’effet de diversifier le mix énergétique tout en essayant de réduire la facture énergétique.
Vous intervenez dans le financement des banques, mais en dehors de ces partenaires traditionnels, d’autres structures peuvent-elles vous solliciter ?
Proparco a effectué, en effet, de nombreux refinancements bancaires, mais nous sommes également présents dans bien d’autres secteurs d’activité. En Côte d’Ivoire, par exemple, nous avons mis en place plusieurs lignes de financements pour le compte du Groupe Sifca dans le secteur du palmier à huile, du sucre et de l’hévéa. Nous sommes également prêteurs d’Olam dans la transformation de cacao. Dans le secteur des transports, Proparco est prêteur et actionnaire de Aeria, le concessionnaire de l’aéroport Félix-Houphouët-Boigny et l’accompagne dans son programme d’extension. Nous avons accompagné le Groupe NSIA dans sa stratégie de développement. Nous travaillons également à dynamiser le marché boursier régional par la mise en place de produits de garantie. Proparco a tout récemment été approuvé par le Conseil régional de l’épargne et des marchés financiers (CREPMF) en tant que garant d’opérations d’appel public à l’épargne. Nous pourrions donc être encore plus actifs sur les instruments côtés de type emprunts obligataires.
En dehors de ces grosses machines que vous avez citées, d’autres structures, moins grosses, pourraient être éventuellement tentées de vous solliciter… Y a-t-il des critères spécifiques à respecter pour être soutenu financièrement par Proparco ?
Comme toute institution financière, nous avons des critères d’intervention. Nous nous positionnons sur des financements longs avec un seuil minimum d’intervention sur l’ensemble de notre gamme de produits. Nous pouvons intervenir sur des grosses PME structurées par le biais de capital ou quasi-capital pour un minimum de 1 Md FCFA, avec pour objectif une prise de participation minoritaire du capital. Nous étudions en ce moment plusieurs projets dans ce sens. Sur les financements en dette, les niveaux minimums se situent plutôt vers 4 Mds CFA. En ce qui concerne les plus petites structures, nous n’avons malheureusement pas encore atteint la taille critique pour pouvoir correctement les accompagner en direct, raison pour laquelle nous soutenons fortement le secteur bancaire, les fonds de private equity et la microfinance. L’idée de cet appui est de soutenir au final les petites structures en s’appuyant sur ces intermédiaires financiers et en les aidant à se développer.
Il est de plus en plus question de développement durable. Pour les entreprises, plus qu’une obligation, c’est une responsabilité citoyenne. Ce concept est-il important pour vous avant de manifester de l’intérêt pour une entreprise qui vous sollicite ?
Effectivement, Proparco est très regardant sur les problématiques de développement durable. La Responsabilité sociale et environnementale (RSE) de l’entreprise demeure un critère important au regard des standards internationaux. Proparco dispose d’une équipe d’experts qui suit cet aspect pour vérifier que le projet s’inscrit bien dans la politique RSE du groupe AFD, qui est en ligne avec celle des autres grands bailleurs.
Y a-t-il actuellement d’autres projets ivoiriens en attente de financements ?
Oui. Nous avons de nombreux projets dans le «pipe» dont je ne peux malheureusement pas vous parler dans les détails parce que je suis astreint au devoir de réserve que m’imposent nos accords de confidentialité. Mais sachez que nous étudions plusieurs projets dans le secteur de l’agro-industrie, l’industrie de transformation, l’hôtellerie, l’énergie, les marchés financiers, ou encore d’accompagnement de fonds d’investissements. Le secteur privé ivoirien est très dynamique !
Cela passe aussi par des appuis budgétaires. Proparco intervient-il directement en apportant son appui au financement du budget ivoirien ?
En termes d’appui budgétaire, cela est plus du ressort de notre maison-mère qui est l’AFD. En Côte d’Ivoire, l’AFD intervient principalement à travers le Contrat-Désendettement-Développement (C2D). Elle a beaucoup soutenu l’Etat ivoirien sur plusieurs axes prioritaires, que ce soit dans le secteur de l’eau, la santé, l’éducation… L’appui budgétaire fait également parti du périmètre du C2D.
En 2010, beaucoup d’entreprises ivoiriennes ou françaises ont été impactées par la crise politico-militaire. Avez-vous été sollicité pour les refinancer ?
Proparco a été sollicitée par certaines entreprises qui souhaitaient se refinancer pour «relancer» leurs activités. Nous sommes complémentaires au système bancaire local. Ainsi, lorsqu’une banque peut intervenir directement pour faire de la restructuration, nous n’intervenons pas parce que nous ne sommes pas vraiment adaptés pour ce type de refinancement. Lorsque nous ne pouvons pas intervenir directement en faveur de l’entreprise, nous procédons à une mise en relation car nous disposons d’un vaste réseau en Côte d’Ivoire et en Afrique. Nous mettons en relation des entreprises avec des partenaires techniques, des banques commerciales, des fonds d’investissements, ou encore des experts sectoriels pour les aider à solutionner leurs difficultés.
Combien de pays couvrez-vous ?
Depuis Abidjan où se trouve la représentation régionale pour l’Afrique de l’Ouest, nous couvrons l’ensemble des pays de la zone Cedeao à l’exception du Nigeria, soit 14 pays. Sinon, Proparco couvre l’ensemble des pays en développement, en Afrique, Amérique latine ou Asie.
On voit que Proparco est fortement présent dans la sous-région. A combien peut-on évaluer l’enveloppe de votre engagement ces dernières années ?
Dans la région, nous faisons aujourd’hui plus de 500 millions d’euros d’engagement : 40% dans le secteur bancaire, 30% dans le secteur énergétique et le solde dans les entreprises & services incluant les fonds d’investissement. La Côte d’Ivoire représente aujourd’hui le pays dans lequel nous sommes le plus exposé avec plus de 200 millions d’euros d’engagement dans de nombreux secteurs d’activités.
Il y a beaucoup de spéculations sur les taux d’intérêt auxquels vous prêtez. Qu’en est-il exactement ?
Nous avons certes des critères de rentabilité moins élevés qu’une institution financière à capitaux intégralement privés. Cependant, nous avons un mandat d’additionnalité par rapport au marché bancaire local et de subsidiarité par rapport aux solutions de financement existantes. Notre valeur ajoutée ne se situe réellement pas au niveau des taux d’intérêt que nous pratiquons, qui sont en ligne avec le niveau du risque du projet, mais plutôt dans la durée de nos financements, notre mission sociale et les aspects extra-financiers de notre partenariat.
Votre engagement est-il dû au redécollage économique du pays ?
Il est vrai que les perspectives de développement de la Côte d’Ivoire sont bonnes au regard des derniers chiffres de la Banque mondiale et des différents rapports économiques sur ce pays. Nous nous en réjouissons, surtout que la Côte d’Ivoire a connu plusieurs années de turbulences et de manque d’investissement. Proparco apporte sa contribution à l’émergence d’un secteur privé fort pouvant tirer la croissance donc le développement. Dans tous les cas, Proparco est ravie de voir que la Côte d’Ivoire reprend sa position de leader régional dans bien des secteurs activités dans la sous-région. Le flux de visiteurs ne cesse de croître depuis plus de trois années. On note également l’apparition d’une classe moyenne qui devrait supporter la consommation et le développement de nombreux type de services. C’est autant de facteurs qui permettent d’être optimiste pour l’avenir de la Côte d’Ivoire et pour les investisseurs.
Parlant justement d’investisseurs, les entreprises se plaignent de plus en plus d’une pression fiscale étouffante. Quel regard portez-vous sur cet aspect ?
Cela relève de la compétence de l’Etat ivoirien. Je ne voudrais pas trop m’étendre sur cela.
Un dernier mot ?
Proparco soutient le développement du secteur privé par le biais de ressources longues avec un accent particulier sur les aspects sociaux et le respect de l’environnement. Présents sur 4 continents et dans plus de 70 pays, nous avons une priorité africaine clairement affichée, le continent devant représenter la moitié de nos interventions. Proparco dispose de trois principaux outils de financement : de la dette, de la garantie et du capital, et vise à être complémentaire par rapport aux sources de financement que l’on peut trouver sur le marché ivoirien. Nous sommes complémentaires par rapport aux banques commerciales sur nos produits de dettes parce qu’on arrive à apporter en devises fortes (USD/EUR) des ressources longues (c'est-à-dire sur plus de sept ans) et par rapport aux fonds d’investissement sur nos produits de prises de participation du fait de notre mandat institutionnel qui induit un apport de valeur ajoutée différente. Les apports extra-financiers que nous sommes capables d’apporter à nos partenaires font intégralement partie de notre action d’institution de développement, tout autant que les financements eux-mêmes.
Propos recueillis par Dieudonné Wognin
Pouvez-vous présenter votre structure à nos lecteurs ?
Proparco est une filiale de l’AFD, qui est l’actionnaire de référence avec 63% du capital. A l’intérieur de cet actionnariat, on trouve des entreprises privées du Nord et du Sud, des institutions financières et des institutions de développement (Akfed, la BOAD, la DBSA …). Proparco focalise son action sur le secteur privé, contrairement à l’AFD qui intervient principalement sur le souverain et para-étatique. L’AFD dispose néanmoins de certains produits financiers à destination du secteur privé, comme l’outil de garantie Ariz. L’action de Proparco vise à développer le secteur privé, donc l’économie. Bénéficiant de 13 représentations régionales (dont 6 en Afrique), la Proparco est présente sur 4 continents dans plus de 70 pays. Nous accompagnons des banques dans le refinancement de l’économie, des entreprises dans la réalisation de leurs projets d’investissement, des fonds d’investissement dans leurs levées de fonds.
Tout d’abord, au niveau des banques, nous offrons des lignes de refinancement. Nous leur accordons des ressources longues pour qu’elles refinancent l’économie dans notre région. Les banques de la région ont bien souvent des problématiques de ratio de transformation. Nous les aidons à disposer de ressources longues pour financer les emplois longs. Par exemple, nous avons octroyé des lignes de refinancement à plusieurs groupes bancaires panafricains (Groupe Ecobank, Groupe BOA). Proparco est également actionnaire et prêteur de certaines filiales de la Société Générale et la BNP Paribas.
Proparco réalise également des financements directs. En Côte d’Ivoire, par exemple, nous avons une présence marquée dans le secteur énergétique. Nous considérons que bénéficier de sources d’énergie suffisantes et stables est l’un des principaux facteurs de croissance pour une économie. Il s’agit en fait d’accompagner des opérateurs privés à produire de l’énergie nécessaire au développement du secteur industriel. Proparco est également assez présente dans l’agro-industrie en Côte d’Ivoire.
Proparco peut aussi jouer un rôle d’intermédiaire financier, nous accompagnons la plupart des fonds d’investissement régionaux. Aujourd’hui, Proparco est actionnaire de plusieurs fonds d’investissement régionaux (Cauris Croissance II, Afric Invest II, I&P AE, I&P Dev II, ECP Africa Fund II…) qui accompagnent les grosses PME en capital-risque ou capital-développement, mais également dans leur gestion et leur stratégie de développement.
A propos du secteur énergétique, Proparco a contribué à l’extension de la centrale d’Azito. Comment s’est traduit l’apport de cette structure ?
Notre intervention aux côtés d’autres institutions financières de développement a permis au producteur indépendant d’énergie, Azito, de produire plus d’énergie avec la même quantité de combustible via la mise en place d’un cycle combiné. Dans le cas d’Azito, au-delà du financement de 55 millions dollars US apporté directement, Proparco a syndiqué d’autres bailleurs afin d’apporter au total 170 dollars US de financement au projet. Nous avons au final accompagné en Côte d’Ivoire les deux principaux producteurs indépendants d’énergie, à savoir Azito et Ciprel. Notre action se situe cependant au-delà du financement de l’énergie thermique. Alors que s’ouvrent bientôt les négociations à Paris, dites COP 21, notre action sera orientée de plus en plus dans la production d’énergie renouvelable telle que l’énergie solaire, photovoltaïque, hydraulique… Nous étudions en ce moment plusieurs projets avec des développeurs locaux, régionaux et internationaux…, à l’effet de diversifier le mix énergétique tout en essayant de réduire la facture énergétique.
Vous intervenez dans le financement des banques, mais en dehors de ces partenaires traditionnels, d’autres structures peuvent-elles vous solliciter ?
Proparco a effectué, en effet, de nombreux refinancements bancaires, mais nous sommes également présents dans bien d’autres secteurs d’activité. En Côte d’Ivoire, par exemple, nous avons mis en place plusieurs lignes de financements pour le compte du Groupe Sifca dans le secteur du palmier à huile, du sucre et de l’hévéa. Nous sommes également prêteurs d’Olam dans la transformation de cacao. Dans le secteur des transports, Proparco est prêteur et actionnaire de Aeria, le concessionnaire de l’aéroport Félix-Houphouët-Boigny et l’accompagne dans son programme d’extension. Nous avons accompagné le Groupe NSIA dans sa stratégie de développement. Nous travaillons également à dynamiser le marché boursier régional par la mise en place de produits de garantie. Proparco a tout récemment été approuvé par le Conseil régional de l’épargne et des marchés financiers (CREPMF) en tant que garant d’opérations d’appel public à l’épargne. Nous pourrions donc être encore plus actifs sur les instruments côtés de type emprunts obligataires.
En dehors de ces grosses machines que vous avez citées, d’autres structures, moins grosses, pourraient être éventuellement tentées de vous solliciter… Y a-t-il des critères spécifiques à respecter pour être soutenu financièrement par Proparco ?
Comme toute institution financière, nous avons des critères d’intervention. Nous nous positionnons sur des financements longs avec un seuil minimum d’intervention sur l’ensemble de notre gamme de produits. Nous pouvons intervenir sur des grosses PME structurées par le biais de capital ou quasi-capital pour un minimum de 1 Md FCFA, avec pour objectif une prise de participation minoritaire du capital. Nous étudions en ce moment plusieurs projets dans ce sens. Sur les financements en dette, les niveaux minimums se situent plutôt vers 4 Mds CFA. En ce qui concerne les plus petites structures, nous n’avons malheureusement pas encore atteint la taille critique pour pouvoir correctement les accompagner en direct, raison pour laquelle nous soutenons fortement le secteur bancaire, les fonds de private equity et la microfinance. L’idée de cet appui est de soutenir au final les petites structures en s’appuyant sur ces intermédiaires financiers et en les aidant à se développer.
Il est de plus en plus question de développement durable. Pour les entreprises, plus qu’une obligation, c’est une responsabilité citoyenne. Ce concept est-il important pour vous avant de manifester de l’intérêt pour une entreprise qui vous sollicite ?
Effectivement, Proparco est très regardant sur les problématiques de développement durable. La Responsabilité sociale et environnementale (RSE) de l’entreprise demeure un critère important au regard des standards internationaux. Proparco dispose d’une équipe d’experts qui suit cet aspect pour vérifier que le projet s’inscrit bien dans la politique RSE du groupe AFD, qui est en ligne avec celle des autres grands bailleurs.
Y a-t-il actuellement d’autres projets ivoiriens en attente de financements ?
Oui. Nous avons de nombreux projets dans le «pipe» dont je ne peux malheureusement pas vous parler dans les détails parce que je suis astreint au devoir de réserve que m’imposent nos accords de confidentialité. Mais sachez que nous étudions plusieurs projets dans le secteur de l’agro-industrie, l’industrie de transformation, l’hôtellerie, l’énergie, les marchés financiers, ou encore d’accompagnement de fonds d’investissements. Le secteur privé ivoirien est très dynamique !
Cela passe aussi par des appuis budgétaires. Proparco intervient-il directement en apportant son appui au financement du budget ivoirien ?
En termes d’appui budgétaire, cela est plus du ressort de notre maison-mère qui est l’AFD. En Côte d’Ivoire, l’AFD intervient principalement à travers le Contrat-Désendettement-Développement (C2D). Elle a beaucoup soutenu l’Etat ivoirien sur plusieurs axes prioritaires, que ce soit dans le secteur de l’eau, la santé, l’éducation… L’appui budgétaire fait également parti du périmètre du C2D.
En 2010, beaucoup d’entreprises ivoiriennes ou françaises ont été impactées par la crise politico-militaire. Avez-vous été sollicité pour les refinancer ?
Proparco a été sollicitée par certaines entreprises qui souhaitaient se refinancer pour «relancer» leurs activités. Nous sommes complémentaires au système bancaire local. Ainsi, lorsqu’une banque peut intervenir directement pour faire de la restructuration, nous n’intervenons pas parce que nous ne sommes pas vraiment adaptés pour ce type de refinancement. Lorsque nous ne pouvons pas intervenir directement en faveur de l’entreprise, nous procédons à une mise en relation car nous disposons d’un vaste réseau en Côte d’Ivoire et en Afrique. Nous mettons en relation des entreprises avec des partenaires techniques, des banques commerciales, des fonds d’investissements, ou encore des experts sectoriels pour les aider à solutionner leurs difficultés.
Combien de pays couvrez-vous ?
Depuis Abidjan où se trouve la représentation régionale pour l’Afrique de l’Ouest, nous couvrons l’ensemble des pays de la zone Cedeao à l’exception du Nigeria, soit 14 pays. Sinon, Proparco couvre l’ensemble des pays en développement, en Afrique, Amérique latine ou Asie.
On voit que Proparco est fortement présent dans la sous-région. A combien peut-on évaluer l’enveloppe de votre engagement ces dernières années ?
Dans la région, nous faisons aujourd’hui plus de 500 millions d’euros d’engagement : 40% dans le secteur bancaire, 30% dans le secteur énergétique et le solde dans les entreprises & services incluant les fonds d’investissement. La Côte d’Ivoire représente aujourd’hui le pays dans lequel nous sommes le plus exposé avec plus de 200 millions d’euros d’engagement dans de nombreux secteurs d’activités.
Il y a beaucoup de spéculations sur les taux d’intérêt auxquels vous prêtez. Qu’en est-il exactement ?
Nous avons certes des critères de rentabilité moins élevés qu’une institution financière à capitaux intégralement privés. Cependant, nous avons un mandat d’additionnalité par rapport au marché bancaire local et de subsidiarité par rapport aux solutions de financement existantes. Notre valeur ajoutée ne se situe réellement pas au niveau des taux d’intérêt que nous pratiquons, qui sont en ligne avec le niveau du risque du projet, mais plutôt dans la durée de nos financements, notre mission sociale et les aspects extra-financiers de notre partenariat.
Votre engagement est-il dû au redécollage économique du pays ?
Il est vrai que les perspectives de développement de la Côte d’Ivoire sont bonnes au regard des derniers chiffres de la Banque mondiale et des différents rapports économiques sur ce pays. Nous nous en réjouissons, surtout que la Côte d’Ivoire a connu plusieurs années de turbulences et de manque d’investissement. Proparco apporte sa contribution à l’émergence d’un secteur privé fort pouvant tirer la croissance donc le développement. Dans tous les cas, Proparco est ravie de voir que la Côte d’Ivoire reprend sa position de leader régional dans bien des secteurs activités dans la sous-région. Le flux de visiteurs ne cesse de croître depuis plus de trois années. On note également l’apparition d’une classe moyenne qui devrait supporter la consommation et le développement de nombreux type de services. C’est autant de facteurs qui permettent d’être optimiste pour l’avenir de la Côte d’Ivoire et pour les investisseurs.
Parlant justement d’investisseurs, les entreprises se plaignent de plus en plus d’une pression fiscale étouffante. Quel regard portez-vous sur cet aspect ?
Cela relève de la compétence de l’Etat ivoirien. Je ne voudrais pas trop m’étendre sur cela.
Un dernier mot ?
Proparco soutient le développement du secteur privé par le biais de ressources longues avec un accent particulier sur les aspects sociaux et le respect de l’environnement. Présents sur 4 continents et dans plus de 70 pays, nous avons une priorité africaine clairement affichée, le continent devant représenter la moitié de nos interventions. Proparco dispose de trois principaux outils de financement : de la dette, de la garantie et du capital, et vise à être complémentaire par rapport aux sources de financement que l’on peut trouver sur le marché ivoirien. Nous sommes complémentaires par rapport aux banques commerciales sur nos produits de dettes parce qu’on arrive à apporter en devises fortes (USD/EUR) des ressources longues (c'est-à-dire sur plus de sept ans) et par rapport aux fonds d’investissement sur nos produits de prises de participation du fait de notre mandat institutionnel qui induit un apport de valeur ajoutée différente. Les apports extra-financiers que nous sommes capables d’apporter à nos partenaires font intégralement partie de notre action d’institution de développement, tout autant que les financements eux-mêmes.
Propos recueillis par Dieudonné Wognin