A 14 mois de l’élection présidentielle de 2020, connu pour son franc-parler, le Révérend Ediémou Blin Jacob, président du Forum des confessions religieuses et Pasteur national de l’Eglise du christianisme céleste de Côte d’Ivoire, chargé de la paroisse mère, sise à Port-Bouët Petit-Bassam, se prononce sur l’actualité politique. On se souvient qu’en 2014, il avait fait des prophéties sur la victoire du candidat du Rhdp en 2015, qui se sont réalisées. Bien qu’ayant décidé de se garder de toute déclaration, il a décidé de s’ouvrir au "Nouveau Réveil" et sortir de ce long silence. Dans la première partie de cette interview, il se prononce sur la réforme de la Cei, la réconciliation nationale, la Cdvr et propose de pistes pour éviter à la Côte d’Ivoire des risques d’implosion dommageables.
Comment se porte le Révérend Ediémou Blin Jacob aujourd’hui avec l’âge, le poids des responsabilités ?
Gloire à Dieu. Oui, effectivement, nous sommes de la lignée du président Gbagbo. On a fait le lycée ensemble. Cela me fait 74 ans. Du point de vue poids de la vie, je n’ai pas de problème, parce qu’on m’a appris à mettre mon espoir en Dieu. Il nous a fait savoir par le prophète que l’homme ne peut rien faire sans lui. Et il faut s’appuyer sur lui. En pensant spirituellement, je me suis toujours déchargé, laissant tout dans les mains de notre Créateur. Si le père prend soin de ses enfants, Dieu prend soin des oiseaux qui ne sèment ni ne moissonnent. Si nous pensons bien fort, si nous voulons être croyants, on fait l’effort pour mettre notre vie entre les mains du Seigneur. Et ce côté-là, ça va. Vous avez vu, j’ai des fils, des amis docteurs, qui m’aident à diriger ma vie, mais vous avez dû entendre effectivement que, 2014-2015, c’était très très sérieux. Il fallait qu’on m’emmène en France. Grâce au président Ouattara, j’ai pu me rendre en France. C’est là que j’ai vu deux docteurs pour mes maux d’yeux et de tête. Mais je m’en sors grâce à Dieu.
Quel est le regard que vous jetez sur la Côte d’Ivoire, aujourd’hui, avec les tensions et les violences verbales observées dans la classe politique ?
La Côte d’Ivoire, j’étais tout petit, je travaillais auprès d’un grand monsieur, le trésorier payeur général de Côte d’Ivoire, le ministre d’Etat, ancien président du Conseil économique et social, Séri Gnoléba. J’étais son premier attaché de cabinet quand on l’a nommé comme ministre. J’ai entendu le président Houphouët-Boigny parler. J’ai entendu le prophète Oshofa parler. Ainsi que le prophète Papa Nouveau. On dit, la Côte d’Ivoire est le pays le plus beau du monde. Le pays de Dieu et Mgr Touably a l’habitude de dire, c’est un pan du ciel que Dieu a envoyé sur la terre. Donc en regardant la Bible qui dit que, à force de recevoir des gens, leur faire l’hospitalité, d’autres ont reçu des anges qui ont béni leur maison. Donc, pays de l’hospitalité, prions fort pour que la Côte d’Ivoire soit dans la maison du Seigneur. Mais, si nous sommes dans la main du Seigneur, les enfants de la Côte d’Ivoire, la fierté a un double sens. Fiers Ivoiriens, le pays nous appelle. La fierté ne doit pas être l’orgueil. La fierté ne doit pas être l’arrogance ou la rébellion. La Côte d’Ivoire d’avant, celle qui nous a vu aller à l’école. Malheureux, de famille pauvre, mais nous avons pu aller à l’école avec les enfants des grands. Les enfants de nanan Houphouët, les enfants du président Yacé, les enfants Ekra, les enfants Thiam. Cette Côte d’Ivoire-là avait sa classe des grands et savait aussi recevoir les malheureux pour faire l’équilibre. Oui la Côte d’Ivoire de Dieu. Mais les temps que nous vivons, tout le monde est en train d’oublier Dieu. Alors c’est là notre parole. Quand on oublie Dieu, on se réfère à soi-même, je suis le plus fort. Et quand on est le plus fort, on doit s’imposer devant tout le monde. Et en s’imposant devant tout le monde, l’autre dit, il est le plus fort. Et deux forts qui se croisent, c’est que le bateau bouge. Et c’est ce que nous sommes en train de constater. Satan, le diable a remis le couteau que nous avions pour nous protéger, que Saint Michel avait pour nous protéger, on sent que chacun a un couteau qu’il veut se tuer, en pensant qu’il veut tuer l’autre. Donc la Côte d’Ivoire, avec ce que nous voyons, sachons dire, il y a la Côte d’Ivoire de ceux qui s’inquiètent, la Côte d’Ivoire de ceux qui disent qu’ils sont rassurés. Alors, dans quel camp tu es ? Tu es dans le camp de ceux qui s’inquiètent ou dans le camp de l’assurance me suffit. Alors voici, la Côte d’Ivoire est divisée en deux. Alors ça m’inquiète, non pour moi ! Je le disais tout à l’heure, ma vie même, je remets ça dans la main de Dieu. En remettant la Côte d’Ivoire dans la main de Dieu, Dieu dit, ceux ou celles qui voudront s’imposer à leur manière sans la volonté de Dieu vont laisser la Côte d’Ivoire. Ceux qui vont faire tout en s’appuyant sur Dieu et bien seront dans la Côte d’Ivoire. Donc, le prophète Oshofa disait, mieux vaut chercher la paix que d’avoir raison. Et la prière est l’ultime salut de l’humanité. En ma qualité d’homme religieux, je m’appuie sur un mot. Prière, paix et trésor. Beaucoup de prières qui vont engendrer la paix et la paix va engendrer le trésor. Si nous ne faisons pas cela, ce sera à nos risques et périls. Ce sont les paroles de notre prophète, il faut être éduqué pour savoir ce que tu fais. L’homme est vide, il faut prendre la parole de Dieu. Là, nous parlons le français, c’est l’éducation et la connaissance françaises que nous avons reçues. Tout en allant à l’école pour avoir le diplôme, nous devons penser que nous sommes homme. L’homme animal se bat, il fait ce qu’il veut. L’homme spirituel réfléchit avant de faire quoique ce soit.
Vous avez dit que le président Laurent Gbagbo est votre camarade d’école. Comment avez-vous vécu sa détention préventive pendant plus de sept ans à la Cpi et comment vous percevez le fait que bien que libéré, il ne puisse rentrer en Côte d’Ivoire ?
Les risques du métier. Les risques du métier sont là. Depuis le lycée, le président Gbagbo est président. Il dit aussi, quand Ediémou est dans les buts (football), le match est gagné d’avance. Chacun de nous avait un surnom. Donc les risques du métier ont fait ressortir ce que nous avons constaté. Attention, quand quelqu’un fait son métier, il est déjà averti de ce qui l’attend. Pour moi, avant qu’il devienne président, c’est mon ami et frère. Quand il est venu au pouvoir, ceux qui n’étaient pas à côté de lui, sont venus à côté de lui, nous nous sommes retirés. Mais il sait lui-même dans notre dernière parole ce que nous nous sommes dit, qui est entre Dieu et nous. Quel que soit ce qui va arriver, moi je suis dans une religion et la religion m’oblige à respecter la volonté de Dieu. Tout ce que Dieu fait est bon. Aucun malheur n’arrive sans qu’il y ait un petit bonheur. Examinez ce qui est arrivé au président Gbagbo.
Pensez-vous que c’est un sort qui est réservé à tous les hommes politiques en général et les chefs de d’Etat africains en particulier ?
Nanan Houphouët-Boigny n’a pas vu cela ! Mais au moment de faire la politique, sache que la politique, c’est un métier, quand on classe les métiers du monde, la politique est au sixième rang. Or c’est un métier…D’autres font la politique sans apprendre le métier. Donc c’est un métier, avant de faire cela, il faut s’attendre à tout. Car la politique n’a pas de religion. C’est-à-dire que la politique ne va pas avec Dieu. La politique va sur sa personne. Je suis x, je suis puissant. Je dois être puissant, c’est la politique. Donc nous disons, ceux qui sont sages, qui s’appuient sur Dieu, le sort comme ça ne doit pas leur arriver. On dit dans la Bible, nous avons vu les rois. Le roi David, le roi Salomon qui ont travaillé avec la grâce de Dieu. Nous avons vu le roi Saül qui a perdu. Et bien sur la terre actuellement, nous voyons des présidents Nanan Houphouët-Boigny, Léopold Sédar Senghor, Nelson Mandela s’en sont sortis. Mais, N’krumah et Sékou Touré n’ont pu s’en sortir. Senghor, alors c’est un autre cas. Donc la politique, c’est un métier. Il faut savoir travailler avec Dieu. Et l’homme qui fait quelque chose sans Dieu se perd dans l’orgueil du diable.
En tant que guide religieux et visionnaire, avez-vous le sentiment que des signes montrent que ce qui est arrivé à la Côte d’Ivoire à la suite de l’élection présidentielle du 28 octobre 2010, risque d’arriver encore en octobre 2020 ?
En 2010, pourquoi vous ne voyez pas en 2002 ? En 2010, c’était visible là ! C’est ça qu’on appelle le face-à-face. Le face-à-face a eu lieu à la télévision. Il y a eu l’amour entre les deux grands. Et ce face-à-face-là ressort maintenant. Disons simplement que nous n’avons pas eu le courage comme Dieu le voulait, pour dire à ses enfants du pays, attention, il y a la limite. Vous ne devez pas arriver là-bas. Parce qu’ils ont mangé ensemble. Ils ont dormi ensemble hier. Donc pourquoi maintenant, ne peuvent-ils pas faire la même chose et continuer comme avant ? Disons que ce qui est arrivé en 2002 là, c’était sérieux. Vous avez vu ça n’a pas duré. Donc, la main de Dieu y est. En 2010, vous n’avez pas entendu que le général Poncet du 43ème Bima, lors de son passage en Côte d’Ivoire, a dit, si vous voulez voir Dieu, allez en Côte d’Ivoire. Il n’a fait que vous révéler Christ. Il dit, il y a Dieu en Côte d’Ivoire. Nous avons entendu, aussi, le président Yao-N’dré dire, le diable nous a tous trompés. En Côte d’Ivoire, il y a Dieu et il y a le Diable. C’est là que nous devons discerner pour avancer et être dans le camp de Dieu qui est Amour et éviter le diable qui est méchanceté et guerre. Et nous devons nous appuyer sur cela pour ne pas jouer avec le Créateur. La créature qui s’est rebellée contre le Créateur. C’est cela la Côte d’Ivoire, donc ce que nous voyons en ce moment, il n’y a rien si nous avons le courage spirituel, l’honnêteté morale, intellectuelle, l’honnêteté spirituelle. Ce qui arrive là, c’est rien. C’est parce qu’il y a une sorte de malhonnêteté spirituelle, morale, intellectuelle qui est le diable. Nous sommes bénis les enfants de Dieu en Côte d’Ivoire, un pays de paix, un pays d’amour. Notre deuxième religion n’est-elle pas la paix, a dit Houphouët-Boigny. Houphouët a tout prévu. Il faudrait que nous revenions à écouter la chanson, ‘’Le travail de mille générations a construit ma Côte Ivoire’’. Et c’est cela. Nous devons aimer la Côte d’Ivoire pour que le travail puisse continuer. Ce qui doit arriver, mais c’est le diable. Chacun veut arriver à abattre son frère. Sachons que l’homme est animal et l’homme est spirituel. L’homme spirituel connait les choses de Dieu. Dieu a dit tu ne tueras pas. Même plus, tu vas aimer ton ennemi. L’homme animal, c’est le plus fort qui gagne. Il est bon que nous revenions à nous-mêmes pour dire que ce pays n’a jamais fait la guerre avec un autre pays, contre un voisin proche. Arrêtons, pensons à Dieu. Donc si nous ne voulons pas penser à Dieu, nous raisonnons. Celui qui raisonne se donne raison. Si tu as raison, j’ai raison, si tu ne fais pas ce qu’Oshofa dit, à savoir, ‘’mieux vaut chercher la paix au lieu d’avoir raison’’, les deux raisons vont se battre. C’est ce que nous sommes en train de vivre. Alors nous prions pour que le Dieu de paix, qui est le Dieu paix lui-même comme le disait le président Félix Houphouët-Boigny, au temps indiqué, ne laisse pas ses enfants s’affronter. Mais au contraire, au temps indiqué, que nos yeux s’ouvrent et voyons que nous sommes parents.
L’actualité est marquée par la réforme de la Commission électorale indépendante (Cei) où les députés de l’opposition ont claqué la porte, ils n’ont pas pris part au vote de la loi portant réforme de cette institution et les députés du parti au pouvoir ont adopté cette loi de façon unilatérale. Quelle lecture faites-vous de cette situation ? Qu’est-ce que cela vous inspire comme commentaire ?
C’est une situation naturelle. Chaque génération croit qu’il y a quelque chose de nouveau. Il n’y a rien de nouveau. Celui qui est au pouvoir fait tout pour garder le pouvoir. Nous sommes là depuis 2000, on a vu cela. Honoré Guié est encore là, le président de la Commission indépendante, la première fois, c’était lui. Il a fini son mandat, il a été remplacé. Nous ne devons pas croire que nous sommes dans un nouveau monde. C’est le même monde. Celui qui est là fait tout en sa faveur. Ce n’est pas nouveau. L’opposition a raison de se plaindre. Qui va avoir quelque chose et laisser pour donner à l’autre ? Si on doit faire tout pour gagner, on fait tout pour gagner.
En votre qualité d’ancien membre de la Commission dialogue, vérité, réconciliation (Cdvr), pensez-vous que cette institution a atteint ses objectifs, à savoir réconcilier les Ivoiriens après la crise que la Côte d’Ivoire a connue ?
Erreur, erreur ! On n’est même pas passé à côté d’eux. La première réconciliation, on était là-dedans après que le président Gbagbo est venu au pouvoir. Quelle réconciliation nous voulons ? Nous voulons la réconciliation de Nelson Mandela ? La réconciliation américaine ? Africaine ? Au moment qu’on nous a dit que nous n’étions pas dans le tempo, on s’est retiré. On n’a pas pris part. Même tous mes biens qui ont été volés ici, les voitures saccagées, on n’a même pas dédommagé pikini. Je n’ai pas pris part. Il y a des religieux qui ont effectivement pris part. Mais si on est sincère, au moment où il y avait la guerre, depuis 2002, depuis 2000, le pouvoir était dans la main des militaires. On fait l’élection, on change la Constitution. Le pays bouillonnait jusqu’à ce qu’on aille aux élections. Les militaires disent qu’ils ont gagné. Dieu a dit non, la Côte d’Ivoire est un pays juste. C’est Honoré Guié qui eut l’idée de venir me chercher ici pour qu’on fasse revivre le Forum des confessions religieuses. Nous pensons à l’imam Koudouss, Mgr Dakouri, Bishop Benjamin Boni et bien d’autres. Il m’a dit réfléchis. C’était au bord de la mer. Quand il est venu, je lui ai dit je prends part, je vais aller avec toi. Dieu a tout fait. Il a rendu le tablier. Qu’est-ce que nous avons eu ? Dieu est là.
Quel est le bilan de vos actions en matière de réconciliation dans le cadre du Forum des confessions religieuses ?
Les journalistes ont fait le choix du meilleur homme religieux. La première année, c’est Ediémou, la deuxième année, Ediémou. La troisième année, on était trois. Imam Koudouss, Ahouana et Ediémou. Les trois meilleurs hommes religieux en Côte d’Ivoire, c’était nous. Le président Gbagbo a présidé la cérémonie au palais de la Culture. C’est pour dire que je n’ai pas pris part. Donc si on devait, en regardant ce qui s’est passé, on devrait nous appeler pour dire vu, vu vu, tenez, on nous a ignorés. En plus, on doit participer à l’œuvre de Dieu qui est la Côte d’Ivoire. Nous n’avons jamais reculé. Nous sommes là jusqu’à ce qu’aujourd’hui vous-même vous m’interviewiez.
Interview réalisée par SERGE AMANY
Comment se porte le Révérend Ediémou Blin Jacob aujourd’hui avec l’âge, le poids des responsabilités ?
Gloire à Dieu. Oui, effectivement, nous sommes de la lignée du président Gbagbo. On a fait le lycée ensemble. Cela me fait 74 ans. Du point de vue poids de la vie, je n’ai pas de problème, parce qu’on m’a appris à mettre mon espoir en Dieu. Il nous a fait savoir par le prophète que l’homme ne peut rien faire sans lui. Et il faut s’appuyer sur lui. En pensant spirituellement, je me suis toujours déchargé, laissant tout dans les mains de notre Créateur. Si le père prend soin de ses enfants, Dieu prend soin des oiseaux qui ne sèment ni ne moissonnent. Si nous pensons bien fort, si nous voulons être croyants, on fait l’effort pour mettre notre vie entre les mains du Seigneur. Et ce côté-là, ça va. Vous avez vu, j’ai des fils, des amis docteurs, qui m’aident à diriger ma vie, mais vous avez dû entendre effectivement que, 2014-2015, c’était très très sérieux. Il fallait qu’on m’emmène en France. Grâce au président Ouattara, j’ai pu me rendre en France. C’est là que j’ai vu deux docteurs pour mes maux d’yeux et de tête. Mais je m’en sors grâce à Dieu.
Quel est le regard que vous jetez sur la Côte d’Ivoire, aujourd’hui, avec les tensions et les violences verbales observées dans la classe politique ?
La Côte d’Ivoire, j’étais tout petit, je travaillais auprès d’un grand monsieur, le trésorier payeur général de Côte d’Ivoire, le ministre d’Etat, ancien président du Conseil économique et social, Séri Gnoléba. J’étais son premier attaché de cabinet quand on l’a nommé comme ministre. J’ai entendu le président Houphouët-Boigny parler. J’ai entendu le prophète Oshofa parler. Ainsi que le prophète Papa Nouveau. On dit, la Côte d’Ivoire est le pays le plus beau du monde. Le pays de Dieu et Mgr Touably a l’habitude de dire, c’est un pan du ciel que Dieu a envoyé sur la terre. Donc en regardant la Bible qui dit que, à force de recevoir des gens, leur faire l’hospitalité, d’autres ont reçu des anges qui ont béni leur maison. Donc, pays de l’hospitalité, prions fort pour que la Côte d’Ivoire soit dans la maison du Seigneur. Mais, si nous sommes dans la main du Seigneur, les enfants de la Côte d’Ivoire, la fierté a un double sens. Fiers Ivoiriens, le pays nous appelle. La fierté ne doit pas être l’orgueil. La fierté ne doit pas être l’arrogance ou la rébellion. La Côte d’Ivoire d’avant, celle qui nous a vu aller à l’école. Malheureux, de famille pauvre, mais nous avons pu aller à l’école avec les enfants des grands. Les enfants de nanan Houphouët, les enfants du président Yacé, les enfants Ekra, les enfants Thiam. Cette Côte d’Ivoire-là avait sa classe des grands et savait aussi recevoir les malheureux pour faire l’équilibre. Oui la Côte d’Ivoire de Dieu. Mais les temps que nous vivons, tout le monde est en train d’oublier Dieu. Alors c’est là notre parole. Quand on oublie Dieu, on se réfère à soi-même, je suis le plus fort. Et quand on est le plus fort, on doit s’imposer devant tout le monde. Et en s’imposant devant tout le monde, l’autre dit, il est le plus fort. Et deux forts qui se croisent, c’est que le bateau bouge. Et c’est ce que nous sommes en train de constater. Satan, le diable a remis le couteau que nous avions pour nous protéger, que Saint Michel avait pour nous protéger, on sent que chacun a un couteau qu’il veut se tuer, en pensant qu’il veut tuer l’autre. Donc la Côte d’Ivoire, avec ce que nous voyons, sachons dire, il y a la Côte d’Ivoire de ceux qui s’inquiètent, la Côte d’Ivoire de ceux qui disent qu’ils sont rassurés. Alors, dans quel camp tu es ? Tu es dans le camp de ceux qui s’inquiètent ou dans le camp de l’assurance me suffit. Alors voici, la Côte d’Ivoire est divisée en deux. Alors ça m’inquiète, non pour moi ! Je le disais tout à l’heure, ma vie même, je remets ça dans la main de Dieu. En remettant la Côte d’Ivoire dans la main de Dieu, Dieu dit, ceux ou celles qui voudront s’imposer à leur manière sans la volonté de Dieu vont laisser la Côte d’Ivoire. Ceux qui vont faire tout en s’appuyant sur Dieu et bien seront dans la Côte d’Ivoire. Donc, le prophète Oshofa disait, mieux vaut chercher la paix que d’avoir raison. Et la prière est l’ultime salut de l’humanité. En ma qualité d’homme religieux, je m’appuie sur un mot. Prière, paix et trésor. Beaucoup de prières qui vont engendrer la paix et la paix va engendrer le trésor. Si nous ne faisons pas cela, ce sera à nos risques et périls. Ce sont les paroles de notre prophète, il faut être éduqué pour savoir ce que tu fais. L’homme est vide, il faut prendre la parole de Dieu. Là, nous parlons le français, c’est l’éducation et la connaissance françaises que nous avons reçues. Tout en allant à l’école pour avoir le diplôme, nous devons penser que nous sommes homme. L’homme animal se bat, il fait ce qu’il veut. L’homme spirituel réfléchit avant de faire quoique ce soit.
Vous avez dit que le président Laurent Gbagbo est votre camarade d’école. Comment avez-vous vécu sa détention préventive pendant plus de sept ans à la Cpi et comment vous percevez le fait que bien que libéré, il ne puisse rentrer en Côte d’Ivoire ?
Les risques du métier. Les risques du métier sont là. Depuis le lycée, le président Gbagbo est président. Il dit aussi, quand Ediémou est dans les buts (football), le match est gagné d’avance. Chacun de nous avait un surnom. Donc les risques du métier ont fait ressortir ce que nous avons constaté. Attention, quand quelqu’un fait son métier, il est déjà averti de ce qui l’attend. Pour moi, avant qu’il devienne président, c’est mon ami et frère. Quand il est venu au pouvoir, ceux qui n’étaient pas à côté de lui, sont venus à côté de lui, nous nous sommes retirés. Mais il sait lui-même dans notre dernière parole ce que nous nous sommes dit, qui est entre Dieu et nous. Quel que soit ce qui va arriver, moi je suis dans une religion et la religion m’oblige à respecter la volonté de Dieu. Tout ce que Dieu fait est bon. Aucun malheur n’arrive sans qu’il y ait un petit bonheur. Examinez ce qui est arrivé au président Gbagbo.
Pensez-vous que c’est un sort qui est réservé à tous les hommes politiques en général et les chefs de d’Etat africains en particulier ?
Nanan Houphouët-Boigny n’a pas vu cela ! Mais au moment de faire la politique, sache que la politique, c’est un métier, quand on classe les métiers du monde, la politique est au sixième rang. Or c’est un métier…D’autres font la politique sans apprendre le métier. Donc c’est un métier, avant de faire cela, il faut s’attendre à tout. Car la politique n’a pas de religion. C’est-à-dire que la politique ne va pas avec Dieu. La politique va sur sa personne. Je suis x, je suis puissant. Je dois être puissant, c’est la politique. Donc nous disons, ceux qui sont sages, qui s’appuient sur Dieu, le sort comme ça ne doit pas leur arriver. On dit dans la Bible, nous avons vu les rois. Le roi David, le roi Salomon qui ont travaillé avec la grâce de Dieu. Nous avons vu le roi Saül qui a perdu. Et bien sur la terre actuellement, nous voyons des présidents Nanan Houphouët-Boigny, Léopold Sédar Senghor, Nelson Mandela s’en sont sortis. Mais, N’krumah et Sékou Touré n’ont pu s’en sortir. Senghor, alors c’est un autre cas. Donc la politique, c’est un métier. Il faut savoir travailler avec Dieu. Et l’homme qui fait quelque chose sans Dieu se perd dans l’orgueil du diable.
En tant que guide religieux et visionnaire, avez-vous le sentiment que des signes montrent que ce qui est arrivé à la Côte d’Ivoire à la suite de l’élection présidentielle du 28 octobre 2010, risque d’arriver encore en octobre 2020 ?
En 2010, pourquoi vous ne voyez pas en 2002 ? En 2010, c’était visible là ! C’est ça qu’on appelle le face-à-face. Le face-à-face a eu lieu à la télévision. Il y a eu l’amour entre les deux grands. Et ce face-à-face-là ressort maintenant. Disons simplement que nous n’avons pas eu le courage comme Dieu le voulait, pour dire à ses enfants du pays, attention, il y a la limite. Vous ne devez pas arriver là-bas. Parce qu’ils ont mangé ensemble. Ils ont dormi ensemble hier. Donc pourquoi maintenant, ne peuvent-ils pas faire la même chose et continuer comme avant ? Disons que ce qui est arrivé en 2002 là, c’était sérieux. Vous avez vu ça n’a pas duré. Donc, la main de Dieu y est. En 2010, vous n’avez pas entendu que le général Poncet du 43ème Bima, lors de son passage en Côte d’Ivoire, a dit, si vous voulez voir Dieu, allez en Côte d’Ivoire. Il n’a fait que vous révéler Christ. Il dit, il y a Dieu en Côte d’Ivoire. Nous avons entendu, aussi, le président Yao-N’dré dire, le diable nous a tous trompés. En Côte d’Ivoire, il y a Dieu et il y a le Diable. C’est là que nous devons discerner pour avancer et être dans le camp de Dieu qui est Amour et éviter le diable qui est méchanceté et guerre. Et nous devons nous appuyer sur cela pour ne pas jouer avec le Créateur. La créature qui s’est rebellée contre le Créateur. C’est cela la Côte d’Ivoire, donc ce que nous voyons en ce moment, il n’y a rien si nous avons le courage spirituel, l’honnêteté morale, intellectuelle, l’honnêteté spirituelle. Ce qui arrive là, c’est rien. C’est parce qu’il y a une sorte de malhonnêteté spirituelle, morale, intellectuelle qui est le diable. Nous sommes bénis les enfants de Dieu en Côte d’Ivoire, un pays de paix, un pays d’amour. Notre deuxième religion n’est-elle pas la paix, a dit Houphouët-Boigny. Houphouët a tout prévu. Il faudrait que nous revenions à écouter la chanson, ‘’Le travail de mille générations a construit ma Côte Ivoire’’. Et c’est cela. Nous devons aimer la Côte d’Ivoire pour que le travail puisse continuer. Ce qui doit arriver, mais c’est le diable. Chacun veut arriver à abattre son frère. Sachons que l’homme est animal et l’homme est spirituel. L’homme spirituel connait les choses de Dieu. Dieu a dit tu ne tueras pas. Même plus, tu vas aimer ton ennemi. L’homme animal, c’est le plus fort qui gagne. Il est bon que nous revenions à nous-mêmes pour dire que ce pays n’a jamais fait la guerre avec un autre pays, contre un voisin proche. Arrêtons, pensons à Dieu. Donc si nous ne voulons pas penser à Dieu, nous raisonnons. Celui qui raisonne se donne raison. Si tu as raison, j’ai raison, si tu ne fais pas ce qu’Oshofa dit, à savoir, ‘’mieux vaut chercher la paix au lieu d’avoir raison’’, les deux raisons vont se battre. C’est ce que nous sommes en train de vivre. Alors nous prions pour que le Dieu de paix, qui est le Dieu paix lui-même comme le disait le président Félix Houphouët-Boigny, au temps indiqué, ne laisse pas ses enfants s’affronter. Mais au contraire, au temps indiqué, que nos yeux s’ouvrent et voyons que nous sommes parents.
L’actualité est marquée par la réforme de la Commission électorale indépendante (Cei) où les députés de l’opposition ont claqué la porte, ils n’ont pas pris part au vote de la loi portant réforme de cette institution et les députés du parti au pouvoir ont adopté cette loi de façon unilatérale. Quelle lecture faites-vous de cette situation ? Qu’est-ce que cela vous inspire comme commentaire ?
C’est une situation naturelle. Chaque génération croit qu’il y a quelque chose de nouveau. Il n’y a rien de nouveau. Celui qui est au pouvoir fait tout pour garder le pouvoir. Nous sommes là depuis 2000, on a vu cela. Honoré Guié est encore là, le président de la Commission indépendante, la première fois, c’était lui. Il a fini son mandat, il a été remplacé. Nous ne devons pas croire que nous sommes dans un nouveau monde. C’est le même monde. Celui qui est là fait tout en sa faveur. Ce n’est pas nouveau. L’opposition a raison de se plaindre. Qui va avoir quelque chose et laisser pour donner à l’autre ? Si on doit faire tout pour gagner, on fait tout pour gagner.
En votre qualité d’ancien membre de la Commission dialogue, vérité, réconciliation (Cdvr), pensez-vous que cette institution a atteint ses objectifs, à savoir réconcilier les Ivoiriens après la crise que la Côte d’Ivoire a connue ?
Erreur, erreur ! On n’est même pas passé à côté d’eux. La première réconciliation, on était là-dedans après que le président Gbagbo est venu au pouvoir. Quelle réconciliation nous voulons ? Nous voulons la réconciliation de Nelson Mandela ? La réconciliation américaine ? Africaine ? Au moment qu’on nous a dit que nous n’étions pas dans le tempo, on s’est retiré. On n’a pas pris part. Même tous mes biens qui ont été volés ici, les voitures saccagées, on n’a même pas dédommagé pikini. Je n’ai pas pris part. Il y a des religieux qui ont effectivement pris part. Mais si on est sincère, au moment où il y avait la guerre, depuis 2002, depuis 2000, le pouvoir était dans la main des militaires. On fait l’élection, on change la Constitution. Le pays bouillonnait jusqu’à ce qu’on aille aux élections. Les militaires disent qu’ils ont gagné. Dieu a dit non, la Côte d’Ivoire est un pays juste. C’est Honoré Guié qui eut l’idée de venir me chercher ici pour qu’on fasse revivre le Forum des confessions religieuses. Nous pensons à l’imam Koudouss, Mgr Dakouri, Bishop Benjamin Boni et bien d’autres. Il m’a dit réfléchis. C’était au bord de la mer. Quand il est venu, je lui ai dit je prends part, je vais aller avec toi. Dieu a tout fait. Il a rendu le tablier. Qu’est-ce que nous avons eu ? Dieu est là.
Quel est le bilan de vos actions en matière de réconciliation dans le cadre du Forum des confessions religieuses ?
Les journalistes ont fait le choix du meilleur homme religieux. La première année, c’est Ediémou, la deuxième année, Ediémou. La troisième année, on était trois. Imam Koudouss, Ahouana et Ediémou. Les trois meilleurs hommes religieux en Côte d’Ivoire, c’était nous. Le président Gbagbo a présidé la cérémonie au palais de la Culture. C’est pour dire que je n’ai pas pris part. Donc si on devait, en regardant ce qui s’est passé, on devrait nous appeler pour dire vu, vu vu, tenez, on nous a ignorés. En plus, on doit participer à l’œuvre de Dieu qui est la Côte d’Ivoire. Nous n’avons jamais reculé. Nous sommes là jusqu’à ce qu’aujourd’hui vous-même vous m’interviewiez.
Interview réalisée par SERGE AMANY