Peintre, designer graphique, designer textile, caricaturiste, Mboko Lagriffe est un maître en arts plastiques, reconnu au Cameroun et au-delà. Grâce à son génie créatif, l’artiste est devenu une référence dans son domaine. Cet entrepreneur culturel se bat également pour le rayonnement de son secteur d’activité. Portrait.
Du haut de ses 50 ans, barbe poivre et sel bien mise en évidence, Pemeyeké Désiré Marie, plus connu sous le nom de «Mboko Lagriffe», fait partie de ces artistes qui ne cessent de se réinventer. Son sens inné des arts plastiques, dans toute leur diversité, a été révélé dès sa plus tendre enfance à Douala, sa ville d’origine où, très vite, il s’est fait connaître. Dessin, graphisme, caricature, l’artiste surfe allègrement sur plusieurs tableaux. Ses peintures retransmettent avec talent l’histoire et la richesse culturelle de l’Afrique.
«Je suis né avec ces dons et j’ai seulement sauté sur l’occasion de m’exprimer concrètement dès l’âge de six ans. J’étais alors en classe de SIL. J’étais tellement habité par ma passion que je dessinais tout le temps et partout», confie-t-il au micro de Sputnik.
© PHOTO. ORPHÉE NOUBISSI Mboko Lagriffe, artiste plasticien camerounais
Il a exposé pour la première fois en 1991 à Douala, la capitale économique du Cameroun. Il était alors âgé de 22 ans. Lors de cette exposition collective, l’artiste a conquis le public, suscitant la curiosité grâce à la qualité de ses œuvres.
Claye Edou, le génie camerounais du film d’animation
Cinq ans après, MbokoLagriffe a connu également l’un de ses plus grands succès au cours d’un stage dans une entreprise de textile en proposant un imprimé pour un pagne, «Baré collé», qui a rencontré par la suite un fabuleux accueil commercial.«Baré collé» est un terme populaire au Cameroun qui fait référence à deux êtres qui s’aiment profondément et sont inséparables. L’artiste va en faire une représentation à travers des motifs qui font apparaître un couple uni et vivant dans un décor aux couleurs du continent.
«En 1996, alors que j’effectuais un stage à la CICAM – une entreprise textile basée à Douala –, j’ai créé le fameux pagne "Baré collé", qui a connu un grand succès et a rapporté gros à l’entreprise», raconte Mboko Lagriffe au micro de Sputnik.
L’autodidacte
Ce père de trois enfants n’a pourtant jamais mis les pieds dans une école de formation spécialisée. Passionné des arts, il a développé ses capacités de manière tout à fait autonome. Même si, confesse-t-il, des exemples comme le peintre espagnol Miro et le célèbre peintre et sculpteur camerounais Koko Komegne font partie de son cercle d’influence artistique.
«Je suis un artiste autodidacte. Je ne suis jamais allé dans une école des beaux-arts pour devenir artiste. Je me suis formé en lisant des revues d’art, en faisant des visites amicales dans les ateliers des aînés et surtout de l’exercice en permanence», souligne-t-il.
Ce qui ne l’empêche de vouloir partager son expérience et son savoir-faire. Il a notamment organisé à plusieurs reprises des séances de formation dans son atelier à Douala.
© SPUTNIK . ROLAND KLOHI À Abidjan, les arts visuels sortent de l’ombre
Déjà connu pour ses toiles exposées au Cameroun, au Sénégal, en France, en Suisse, aux États-Unis et en Guadeloupe, Mboko Lagriffe, a été couronné lauréat en 2016, parmi dix artistes nominés, du concours «Wings of African Art» organisé par la Royal Air Maroc, la compagnie aérienne marocaine. Cette initiative avait pour but de célébrer l’histoire et la culture africaine pour symboliser une Afrique dynamique, responsable et tournée vers l’avenir. Une expérience que l’artiste n’oubliera pas de sitôt.
«C’était une belle expérience! Avoir son œuvre et sa signature sur le fuselage d’un avion de ligne qui dessert plus de 90 pays, ça vous fait vous sentir unique par votre talent. Il faut y croire et ne pas se laisser intimider par quoi ou par qui que ce soit. J’y ai cru jusqu’au bout et j’ai compris que tout est possible à celui qui croit. Avant de composer mon œuvre, j’ai fait des recherches sur la compagnie et son environnement et ça m’a beaucoup aidé aussi. Quand vous avez de la ressource, exploitez-la, sans limiter votre créativité ni par votre handicap, ni par la réputation des autres concurrents», se réjouit-il au micro de Sputnik.
© PHOTO. DAYOT JC L’habillage de l’avion de la Royal Air Maroc par Mboko Lagriffe
Dans un contexte local où les préoccupations quotidiennes ont tendance à détourner les populations des arts plastiques, encore considérés comme réservés à une certaine élite, le plasticien n’hésite pas à mettre de l’art partout, y compris dans les ustensiles de la vie de tous les jours. Pour ce faire, il a développé des activités connexes à sa production artistique, créant des produits dérivés bon marché, utilisables dans la vie de tous les jours par le plus grand nombre.
«Je propose au grand public des produits dérivés et personnalisés tels que des tasses de café, des dessous de plat, des tapis avec leur souris d’ordinateur, des blocs-notes, des tee-shirts, etc. Je fais aussi dans le conseil en créativité, design textile, art et décoration, commissariat et événementiel artistique», précise Mboko Lagriffe.
© PHOTO. MBOKO LAGRIFFE
Une œuvre de Mboko Lagriffe
Cet entrepreneur culturel organise également chaque année depuis 2004 un événement dénommé «Barbecue expo». Cette initiative vise à créer une plateforme de rencontre entre les plasticiens de tous les âges dans le but de promouvoir ce secteur d’activité.
«C’est un événement culturel mettant en relief les arts plastiques que j’ai créé afin de permettre aux jeunes artistes qui n’avaient pas accès aux galeries locales de s’exprimer en dehors des sentiers battus et d’augmenter ainsi leur visibilité. L’idée, c’est de permettre aux jeunes artistes de démocratiser les arts plastiques, de les amener vers le grand public en vue de susciter des vocations. Il s’agit aussi d’associer les chefs d’entreprise au développement des artistes locaux camerounais et de la scène artistique», explique-t-il au micro de Sputnik.
Une initiative louable dans la mesure où de nombreux artistes plasticiens en quête de visibilité ont difficilement accès aux galeries. Par ailleurs, la précarité étouffe l’art en Afrique et les pouvoirs publics font souvent preuve d’inertie devant cet état de fait, déplore Mboko Lagriffe. Alors que des solutions simples existent, affirme-t-il.
«L’État doit impulser un mouvement fédérateur qui commence à la base. C'est-à-dire dès la maternelle. Qu’on y inscrive dans les programmes scolaires l’éducation artistique et la sauvegarde du patrimoine immatériel. Qu’on enseigne le respect de l’art et des artistes, en soulignant l’importance de la culture pour une nation qui veut se développer. Que des lois et des structures de bourses en association avec des entreprises soient mises en place pour protéger et valoriser l’artiste! De cette façon, les artistes auront de l’importance aux yeux de la nation et seront forcément visibles et valorisés. Le pays tout entier en profiterait», conclut-il.
Malgré ces difficultés contextuelles, Mboko Lagriffe, bien qu’ayant déjà une renommée internationale, n’a pas pour autant l’intention de quitter le continent. Ce passionné continue de créer et de croire à une meilleure valorisation des talents artistiques africains.
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Du haut de ses 50 ans, barbe poivre et sel bien mise en évidence, Pemeyeké Désiré Marie, plus connu sous le nom de «Mboko Lagriffe», fait partie de ces artistes qui ne cessent de se réinventer. Son sens inné des arts plastiques, dans toute leur diversité, a été révélé dès sa plus tendre enfance à Douala, sa ville d’origine où, très vite, il s’est fait connaître. Dessin, graphisme, caricature, l’artiste surfe allègrement sur plusieurs tableaux. Ses peintures retransmettent avec talent l’histoire et la richesse culturelle de l’Afrique.
«Je suis né avec ces dons et j’ai seulement sauté sur l’occasion de m’exprimer concrètement dès l’âge de six ans. J’étais alors en classe de SIL. J’étais tellement habité par ma passion que je dessinais tout le temps et partout», confie-t-il au micro de Sputnik.
© PHOTO. ORPHÉE NOUBISSI Mboko Lagriffe, artiste plasticien camerounais
Il a exposé pour la première fois en 1991 à Douala, la capitale économique du Cameroun. Il était alors âgé de 22 ans. Lors de cette exposition collective, l’artiste a conquis le public, suscitant la curiosité grâce à la qualité de ses œuvres.
Claye Edou, le génie camerounais du film d’animation
Cinq ans après, MbokoLagriffe a connu également l’un de ses plus grands succès au cours d’un stage dans une entreprise de textile en proposant un imprimé pour un pagne, «Baré collé», qui a rencontré par la suite un fabuleux accueil commercial.«Baré collé» est un terme populaire au Cameroun qui fait référence à deux êtres qui s’aiment profondément et sont inséparables. L’artiste va en faire une représentation à travers des motifs qui font apparaître un couple uni et vivant dans un décor aux couleurs du continent.
«En 1996, alors que j’effectuais un stage à la CICAM – une entreprise textile basée à Douala –, j’ai créé le fameux pagne "Baré collé", qui a connu un grand succès et a rapporté gros à l’entreprise», raconte Mboko Lagriffe au micro de Sputnik.
L’autodidacte
Ce père de trois enfants n’a pourtant jamais mis les pieds dans une école de formation spécialisée. Passionné des arts, il a développé ses capacités de manière tout à fait autonome. Même si, confesse-t-il, des exemples comme le peintre espagnol Miro et le célèbre peintre et sculpteur camerounais Koko Komegne font partie de son cercle d’influence artistique.
«Je suis un artiste autodidacte. Je ne suis jamais allé dans une école des beaux-arts pour devenir artiste. Je me suis formé en lisant des revues d’art, en faisant des visites amicales dans les ateliers des aînés et surtout de l’exercice en permanence», souligne-t-il.
Ce qui ne l’empêche de vouloir partager son expérience et son savoir-faire. Il a notamment organisé à plusieurs reprises des séances de formation dans son atelier à Douala.
© SPUTNIK . ROLAND KLOHI À Abidjan, les arts visuels sortent de l’ombre
Déjà connu pour ses toiles exposées au Cameroun, au Sénégal, en France, en Suisse, aux États-Unis et en Guadeloupe, Mboko Lagriffe, a été couronné lauréat en 2016, parmi dix artistes nominés, du concours «Wings of African Art» organisé par la Royal Air Maroc, la compagnie aérienne marocaine. Cette initiative avait pour but de célébrer l’histoire et la culture africaine pour symboliser une Afrique dynamique, responsable et tournée vers l’avenir. Une expérience que l’artiste n’oubliera pas de sitôt.
«C’était une belle expérience! Avoir son œuvre et sa signature sur le fuselage d’un avion de ligne qui dessert plus de 90 pays, ça vous fait vous sentir unique par votre talent. Il faut y croire et ne pas se laisser intimider par quoi ou par qui que ce soit. J’y ai cru jusqu’au bout et j’ai compris que tout est possible à celui qui croit. Avant de composer mon œuvre, j’ai fait des recherches sur la compagnie et son environnement et ça m’a beaucoup aidé aussi. Quand vous avez de la ressource, exploitez-la, sans limiter votre créativité ni par votre handicap, ni par la réputation des autres concurrents», se réjouit-il au micro de Sputnik.
© PHOTO. DAYOT JC L’habillage de l’avion de la Royal Air Maroc par Mboko Lagriffe
Dans un contexte local où les préoccupations quotidiennes ont tendance à détourner les populations des arts plastiques, encore considérés comme réservés à une certaine élite, le plasticien n’hésite pas à mettre de l’art partout, y compris dans les ustensiles de la vie de tous les jours. Pour ce faire, il a développé des activités connexes à sa production artistique, créant des produits dérivés bon marché, utilisables dans la vie de tous les jours par le plus grand nombre.
«Je propose au grand public des produits dérivés et personnalisés tels que des tasses de café, des dessous de plat, des tapis avec leur souris d’ordinateur, des blocs-notes, des tee-shirts, etc. Je fais aussi dans le conseil en créativité, design textile, art et décoration, commissariat et événementiel artistique», précise Mboko Lagriffe.
© PHOTO. MBOKO LAGRIFFE
Une œuvre de Mboko Lagriffe
Cet entrepreneur culturel organise également chaque année depuis 2004 un événement dénommé «Barbecue expo». Cette initiative vise à créer une plateforme de rencontre entre les plasticiens de tous les âges dans le but de promouvoir ce secteur d’activité.
«C’est un événement culturel mettant en relief les arts plastiques que j’ai créé afin de permettre aux jeunes artistes qui n’avaient pas accès aux galeries locales de s’exprimer en dehors des sentiers battus et d’augmenter ainsi leur visibilité. L’idée, c’est de permettre aux jeunes artistes de démocratiser les arts plastiques, de les amener vers le grand public en vue de susciter des vocations. Il s’agit aussi d’associer les chefs d’entreprise au développement des artistes locaux camerounais et de la scène artistique», explique-t-il au micro de Sputnik.
Une initiative louable dans la mesure où de nombreux artistes plasticiens en quête de visibilité ont difficilement accès aux galeries. Par ailleurs, la précarité étouffe l’art en Afrique et les pouvoirs publics font souvent preuve d’inertie devant cet état de fait, déplore Mboko Lagriffe. Alors que des solutions simples existent, affirme-t-il.
«L’État doit impulser un mouvement fédérateur qui commence à la base. C'est-à-dire dès la maternelle. Qu’on y inscrive dans les programmes scolaires l’éducation artistique et la sauvegarde du patrimoine immatériel. Qu’on enseigne le respect de l’art et des artistes, en soulignant l’importance de la culture pour une nation qui veut se développer. Que des lois et des structures de bourses en association avec des entreprises soient mises en place pour protéger et valoriser l’artiste! De cette façon, les artistes auront de l’importance aux yeux de la nation et seront forcément visibles et valorisés. Le pays tout entier en profiterait», conclut-il.
Malgré ces difficultés contextuelles, Mboko Lagriffe, bien qu’ayant déjà une renommée internationale, n’a pas pour autant l’intention de quitter le continent. Ce passionné continue de créer et de croire à une meilleure valorisation des talents artistiques africains.
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