La quarantaine révolue, Hermann Aboa Yapi, était journaliste à la Radiodiffusion télévision ivoirienne (RTI) première chaîne. Présentateur vedette de l'Émission " Raison d'État ". Le fils de Montézo ( Alépé) , 12 années après la crise postélectorale, évoque ses regrets ainsi que ses ambitions pour la nouvelle Côte d'Ivoire. Ces péripéties, Hermann Aboa en livre à vérité, parfois à l’opposé de celles qu'on croyait connaître. Interview.
Que devient Hermann Aboa ?
Je suis le même. Certes avec des cheveux grisonnants à présent mais toujours avec la même fraicheur d’esprit. Je continue ma marche. Loin des tintamarres. Etes-vous toujours militant du Fpi, et quel poste occupez-vous ?Depuis 2005, lorsque je me suis fixé à une rédaction en tant que journaliste pratiquant, je n’ai plus jamais milité dans un parti politique jusqu’à ce que, en 2017, j’adhère à Lider (Ndlr Liberté et démocratie pour la République) du professeur Mamadou Koulibaly que j’ai quitté trois mois après pour convenances personnelles. Depuis lors, je n’ai pris aucune carte de militant de parti ou mouvement politique. Donc je n’occupe aucun poste politique.
Quand on dit Hermann Aboa, on voit l'émission « Raison d’Etat » de la RTI première chaîne pendant la crise postélectorale de 2010. Vous avez soutenu et fait beaucoup de choses. Il y a certains actes posés que vous regrettiez ?
Je n’utiliserai pas les mêmes éléments de langage que vous. Je dirai plutôt que j’ai fait mon travail de journaliste et cela je l’assumerai toujours. J’étais journaliste dans une rédaction d’un média d’Etat. Il y avait deux parties en conflit dont celle exerçant le pouvoir d’Etat, détentrice de la force publique qui est propriétaire de la RTI, média de service public dans lequel je n’étais qu’un journaliste. Sur le plateau de « Raison d’Etat », j’ai fait de mon mieux pour rester professionnel. Je reconnais que toute œuvre professionnelle et humaine n’est pas sans erreur. Je comprends alors tous ceux qui estiment que je ne jouais pas le bon rôle mais cette période fait partie de mon parcours professionnel. Je l’assume humblement, avec tout le respect que je dois à ceux qui en avaient été affectés. Toutefois, douze ans après, faisant le bilan de tout cela. Il y a forcément des actes regrettables que je n’aurais pas posés.
Vous étiez candidat dans votre ville natale, Alépé, lors des dernières législatives. Serez-vous candidat pour les municipales du 2 septembre ?
Depuis l’annonce du calendrier des prochaines élections locales, cette question ne cesse de m’être posée. Mais je voudrais indiquer solennellement à toutes et à tous que je ne suis pas et je ne serai pas candidat à la prochaine élection municipale à Alépé. Pas parce que je flaire une quelconque défaite ; puisque la commune d’Alépé ce n’est que 6 localités dont Montézo d’où je suis originaire, qui est d’ailleurs le plus gros village démographiquement de cette commune. A comparer aux 54 localités du département d’Alépé pour l’unique siège de député. C’est juste que briguer la fonction de maire n’est, à l’heure actuelle, pas dans mon agenda. Je ne suis pas candidat à cette échéance parce que pour moi, ce sont les législatives mon objectif. Accéder à l’hémicycle pour prendre part à des débats afin de structurer la marche de la nation ivoirienne. Voilà mon rêve. J’espère qu’un jour, mes parents d’Alépé me donneront cette opportunité de porter leur voix à l’Assemblée nationale. Cependant, comme tout fils d’Alépé et de la région de La Mé, soucieux du développement local de chez lui, je regarde avec grand intérêt les élections à venir.
Si vous n'êtes pas candidat pour la mairie, pour les régionales, il y a la bataille Patrick Achi-Monnet Léon. Est-ce que vous avez une idée de qui sera votre candidat ?
Vous savez cher confrère, depuis 30 ans, j’ai la chance de voir des cadres de cette région accéder à des hauts postes de responsabilités au sommet de l’Etat et ce que chacun d’eux a pu apporter ou faire pour Alépé. Mais croyez-moi, avec le Premier ministre Patrick Achi, on sent une véritable bouffée d’oxygène pour les populations de cette région. Dans le cadre des activités de l’Association pour la protection du foncier et du développement d’Alépé (Apfda) que j’ai mise en place avec le soutien d’autres jeunes cadres, je sillonne le département et les villages. Il n’y a que le nom Patrick Achi sur lèvres des populations. Demandez pourquoi les populations apprécient tant Patrick Achi et vous comprendrez pourquoi.
Vous décidez de soutenir le Premier ministre Patrick Achi. Virez-vous au Rhdp ?
Je ne suis pas Rhdp. Ce serait renier mes profondes convictions idéologiques que de militer dans un parti de droite. Les militants de cette formation me moqueraient bien s’ils apprenaient qu’Hermann Aboa a pris une carte d’adhésion à leur parti politique. De plus, j’ai décidé de me tenir loin des instances politiques actuellement, après toutes ces années ponctuées, pour moi, de déception, de tribulations, de médisances, etc. L’enjeu des élections locales pour des actions de développement des collectivités n’est pas là. Il s’agit de porter celui des fils et filles qui est à même de conduire le développement local, et Patrick Achi est un choix judicieux et stratégique pour La Mé. Ce que nous devons prioriser aujourd’hui, c’est de rassembler pour développer, s’unir pour bâtir durablement et faire preuve de solidarité et de partage. La Côte d’Ivoire a besoin de tous ses enfants pour se développer et aller encore plus loin.
On vous connait comme un fervent et brillant serviteur de Gbagbo. Comment allez-vous faire pour soutenir Patrick Achi qui est Rhdp ?
« Fervent et brillant serviteur du Président Gbagbo » (Rires). Ma demande d’audience au Président Laurent Gbagbo reste encore sans suite. Disons qu’il aménage certainement son emploi du temps pour m’accorder cette audience, donc je patiente. Pour dire que ça m’aurait plu d’être un fervent et brillant serviteur de Laurent Gbagbo mais hélas je ne l’ai pas été hier et je ne le suis pas non plus aujourd’hui. Comme les Ivoiriens, je m’interroge : « à quand ma victoire ? ». J’attends donc mon heure de gloire.
Votre démarche pourrait être vue comme une trahison
Qui aurais-je trahi ? Je n’ai été et je ne suis en deal avec personne. Je n’avais même pas été là que ces mêmes personnes qui prétendent détenir la jauge de trahison m’avaient déjà jugé comme tel. Dans ce pays, si l’on devait frémir à chaque fois que l’on est médit, on serait depuis là, tous dans une tombe, pour pathologies mentales et psychologiques. Je ne dois à personne. Mes convictions et mes opinions, je les ai toujours assumées. Je laisse les gens penser ce qu’ils voudront de moi. C’est aussi leur droit.
Votre soutien à Patrick Achi est-il calculé ? Voyez-vous un poste nominatif, un tabouret comme on le dit après ?
En tant que cartésien, j’analyse toute situation dans la démarche scientifique. Donc oui, ce soutien lors des régionales dans la Mé au Premier-ministre Patrick Achi est bien calculé. Cependant, cette démarche n’est pas opportuniste. Je ne le soutiens pas pour obtenir une quelconque ristourne. Ceux qui me connaissent bien ou qui me sont proches savent que je ne marchande pas ces choses-là. Le Premier-ministre Patrick Achi est selon moi celui qu’il faut à la tête de notre région pour insuffler une réelle dynamique de développement. Nos parents sont restés longtemps, plusieurs décennies durant, à attendre que leurs localités changent de visage. Je ne vais pas rentrer dans des comparaisons inopportunes et indécentes, mais je reste convaincu, vu le passif et l’actif des nombreux cadres de notre région qui, dans un passé pas trop lointain, avaient occupé de hautes fonctions au sommet de l’Etat. Les quelques actions de développement menées par le Premier-ministre redonnent de l’espoir aux populations, à nos parents, à nos frères et sœurs, ainsi qu’aux jeunes. Certes, beaucoup reste à faire mais il fallait commencer.
Que pensez-vous de la candidature de Laurent Gbagbo en 2025 ?
C’est un citoyen ivoirien qui a un parti politique et surtout sa vision pour la Côte d’Ivoire. Il est libre et c’est son droit de chercher à briguer à nouveau la magistrature suprême. Il faut juste laisser se dérouler sainement le jeu politique pour que le meilleur gagne.
Et s'il n'est pas retenu ?
S’il n’est pas retenu, ses conseils juridiques et sa famille politique sauront quoi faire pour lui obtenir ce à quoi il a droit. Pour ma part, j’ai à plusieurs reprises soutenu qu’on fixe la limite d’âge pour se présenter à l’élection présidentielle à 70 ans. Je reste accroché au fait que certains hommes politiques dont on entend les noms depuis plus de trente années sur la scène méritent d’aller se reposer. Bien évidemment, j’affiche cette position en ne ciblant personne individuellement. J’estime juste qu’il faut faire de la place à de nouveaux acteurs, avec leurs qualités et défauts, pour voir autre chose. Mais visiblement, le peuple ivoirien n’en est pas encore là. J’attends donc de voir où tout ceci nous mènera-t-il.
Entretien réalisé par Yapi Coulibaly