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Société Publié le mardi 27 juin 2023 | AIP

Déplacés maliens et burkinabés : Entre méfiance et accueil, la Côte d’Ivoire à l’épreuve de son hospitalité offerte (Reportage)

© AIP Par dr
Un camp de réfugiés

Abidjan, 27 juin 2023 (AIP)-Les actes terroristes perpétrés à l’endroit des populations Burkinabés et Malienne, et qui aujourd’hui ont fait plusieurs morts, ont redessiné l’hospitalité légendaire de la Côte d’Ivoire qui accueille depuis un moment de nombreux réfugiés sur son sol.


La méfiance des populations autochtones


L’annonce de l’arrivée des réfugiés venus du Burkina-Faso et du Mali a créé une psychose dans la population du département de Ferkessédougou et Ouangolodougou. Ces personnes ont encore en mémoire les attaques terroristes de Kafolo et Tougbo. Il était donc difficile de trouver des villages désireux d’accueillir des personnes issues de zones de conflit.


« Il faut être honnête, on a tous eu peur de les accueillir, on ne se sait pas qui est qui dans ce groupe. En plus, il n’y a pas à manger pour tout ce monde dans notre village », a relevé un chef de village sous couvert de l’anonymat.


La peur, la méfiance et la précarité sociale se ressentaient chez les populations. Dès lors, il paraissait difficile de trouver un lieu d’accueil à tout ce flux de personnes en détresse.


Mais la mise en route du dispositif national de solidarité et la mobilisation des organismes internationaux ont fini par convaincre et lever toutes les inquiétudes au sein des populations.


Des organismes internationaux tels que le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) et son partenaire, le Comité international pour l’aide d’urgence et le développement (CIAUD) du Canada, ont apporté un appui sur le plan logistique et humain.


Dans le département de Ferkessédougou, plusieurs réunions de concertation avec les chefs traditionnels et les leaders communautaires ont été tenues en vue de faciliter l’accueil des réfugiés.


La première réunion dans le mois de janvier 2023, a permis aux populations de faire preuve de plus d’ouverture, de solidarité et d’hospitalité envers les réfugiés.


« Il faut remercier à ce niveau l’Etat et le corps préfectoral de la région du Tchologo. Car au début des villages refusaient de recevoir des réfugiés. Certains fils de la diaspora de ces villages interdisaient à leur notabilité de se rendre à des réunions qui avaient pour ordre du jour l’accueil des réfugiés. Mais nous avons rassuré tout le monde et je pense que la méfiance a disparu », a expliqué le coordonnateur du projet Résilience des populations rurales sur le territoire transfrontalier (REPOT) au sein de l’Organisation professionnelle des éleveurs de Ferkessédougou (OPEF), Amadou Coulibaly.


Du doute à “l’hospitalité légendaire” des villages d’accueil


Aujourd’hui certains villages, comme Touplevogo accordent à leurs hôtes cette possibilité de travailler la terre.


Les réfugiés qui affluent depuis le milieu d’année 2022 dans la zone septentrionale de la Côte d’Ivoire vivent en parfaite symbiose avec les populations riveraines, leurs tuteurs. Comme un seul homme, les populations autochtones en accord avec les autorités préfectorales se sont mobilisées sur place pour les accueillir dans leurs familles respectives.


De Ferkessédougou en passant par Ouangolodougou et Bouna, c’est l’ambiance bon enfant. Le visiteur lambda ne peut faire la différence entre les populations autochtones et leurs hôtes, au regard de l'intégration réussie.


Dans le département de Ferkessédougou, la plupart des villages ont activé ce que l’on pourrait appeler leur « hospitalité légendaire ». Ce sont, entre autres, les villages de Touplevogo et certaines autres localité alentours comme Tiekpe, kissivogo, etc., à l’ouest du département. Tiepogovogo, Fangakaha, Nambonkaha etc, un peu plus au sud, sans compter le quartier douanes de la commune de Ferkessédougou.


Tous ces villages et quartier de Ferkessédougou ont accueilli des centaines de réfugiés. D’autres villages sont désormais disposés à l’accueil. Aujourd’hui certains villages, comme Touplevogo accordent à leurs hôtes cette possibilité de travailler la terre, de faire paître les quelques bêtes qu’elles ont convoyées. Il s’agit maintenant d’une intégration totale de ces réfugiés susceptible de leur faire passer le traumatisme de la crise.


« Nous avons dans notre éducation et notre tradition l’accueille de l’étranger. Surtout celui qui est en danger. Nous avons donc été rassurés par le gouvernement ivoirien par le biais du préfet de région », a confié le chef d’un des villages d’accueil, Sekongo N.


A Diallo confirme également que les réfugiés sont relativement soulagés depuis qu’ils ont foulé le sol du village.


« Dès que nous avons été accueillis dans ces villages et que nous avons bu les premières gorgées d’eau, nous avons senti nos cœurs s’apaiser. Nous remercions nos frères ivoiriens surtout les villages qui nous accueillent. Nous ne demandons uniquement qu’à vivre comme des êtres humains », a-t-il souhaité.


« En décembre 2022, nous étions dans une situation de désespoir. On n'était pas habitué à recevoir autant de frères en provenance des pays voisins notamment du Burkina-Faso. Un peu partout, nous avons lancé des cris et nous sommes très heureux de tous ceux qui passent pour aider à porter assistance à nos frères », a exprimé le préfet du département de Ouangolodougou, Dongo Kobenan mercredi 17 mai 2023 dans sa localité. Cet élan de solidarité est bien apprécié par le secrétaire exécutif du Conseil national de sécurité (CNS), Fidèle Sarrasoro qui appelle les populations à continuer sur cette dynamique.  « Nous disons que dans sa philosophie de pays hospitalier, il était nécessaire de venir en aide aux réfugiés », a-t-il fait savoir. En plus de la mobilisation sur le terrain, le soutien de l'Etat ne faiblit pas.


Pour preuve depuis le début de l'année 2023, plusieurs tonnes de vivres ont été mis à la disposition des familles d'accueil pour recevoir les réfugiés. Outre les localités de Bouna, Ouangolodougou et Ferkessédougou. Cet élan de solidarité est également visible dans tous les villages d’accueil entre autres Kadarvogo, Mandougou et Soungalovogo (sous-préfeture de Kaouara, département de Ouangolodougou) et ceux de Tiepogovo, Fangakaha, Nambonkaha dans le département de Ferkessédougou. Le Secrétaire exécutif du CNS, Fidèle Sarassoro a annoncé à Ouangolodougou des dons en vivres pour les populations d'accueil et les réfugiés d'un montant de 233 millions FCFA.


Une avance de 40 tonnes a été offerte aux communautés dont 20 tonnes aux populations d'accueil et 20 tonnes aux réfugiés. « Nous sommes très heureux de la mobilisation des ivoiriens qui sont à nos petits soins. Chacun de nous a eu un tuteur sur place. Nous sommes très bien intégrés. Je peux dire que nous ne manquons de rien », s’est réjoui un des responsables de la communauté des réfugiés Burkinabès à Ouangolodougou, Ousmane Tall.


Quelques 2.000 logements pour les réfugiés


Deux sites de 10 hectares ont été identifiés à Nioronigué situé à environ trois kilomètres de Ouangolodougou et à Notadoua à environ 13 kilomètres de Bouna pour réaliser des abris pour les réfugiés dont les travaux ont débuté depuis le 23 mars 2023. A Nioronigué, 1000 abris sont prévus dont 208 déjà achevés et 258 en cours. Soit un taux de réalisation de 47%. Idem à Notadoua où 1000 abris seront réalisés dont 217 achevés et 241 en cours donnant un taux de réalisation de 46%.


Sur les sites, des voies de contournement de 2 kilomètres sont en cours de réalisation. Huit forages réalisés surmontés de pompes à motricité humaine dont quatre chaque site.


Sur le site de Nioronigué où nous avons effectué une visite, les premiers logements pour la plupart en deux pièces sont prêts à accueillir les réfugiés. Selon le coordonnateur du projet de la réalisation des abris, Yéwé Paulin, 22 opérateurs travaillent ardemment sur le site.


« Nous aurons une réunion avec le Haut-Commissariat des Nations Unies et les agences des Nations unies pour arrêter des dispositions pour définir les règles de gestion des sites qui répondent aux normes internationales. Dès que ce processus finira, nous allons déployer les réfugiés sur le site », a assuré M. Sarassoro.


Il a ajouté que le gouvernement a décidé de loger ces personnes en détresse dans des maisons assez confortables et non dans des tentes ou des camps comme on le voit souvent afin de les mettre dans de bonnes conditions et plus tard transformer ces sites en lieu de service civique.


« Le souhait du gouvernement est le retour normal rapide de la situation au Burkina et au Mali pour que nos frères puissent retourner », a-t-il souhaité promettant que le gouvernement mettra tout en œuvre pour une meilleure cohabitation entre les deux peuples.


Au total 21.792 réfugiés recensés à la date du 08 avril 2023


La dégradation continuelle de la situation sécuritaire au Burkina Faso a engendré le déplacement de plusieurs milliers de personnes en quête d'asile vers la Côte d'Ivoire. Nombreux sont ceux qui ont trouvé refuge dans les régions du Bounkani et du Tchologo. Au 08 avril 2023, ce sont 21.792 réfugiés estimés en Côte d'Ivoire dont 12.856 dans le Bounkani, 8.416 dans le Tchologo, 255 dans le Folon, 148 dans la Bagoué et 117 dans le Poro. Cette population cible se caractérise par une prépondérance de personnes vulnérables (femmes et enfants). On enregistre 55% de sexe féminin contre 45% de sexe masculin dont 58% d’enfants de moins de 17 ans et 38% d’adultes compris entre 18 et 59 ans. Parmi cette population, l’on retrouve 4% de personnes indigentes. Pour faire face à cette situation, le gouvernement a mis en place un dispositif d'assistance humanitaire, de sécuritaire et de surveillance des régions concernés qui intègre l'identification et l'aménagement de sites d'accueil des réfugiés.


Ce dispositif est placé sous la coordination centrale du secrétariat exécutif du CNS et sous la coordination locale du corps préfectoral. Le recensement biométrique et alphanumérique des réfugiés conduit par le CNS a débuté dans les régions du Bounkani et du Tchologo avec l’appui de l'Office national, la Direction d'aide et d'assistance aux réfugiés et apatrides (DAARA) et le Haut-commissariat pour les réfugiés (HCR).Il a permis d’enregistrer 10.886 réfugiés avec biométries à raison de 5.244 dans le Bounkani et 5.642 dans le Tchologo avec 57% de femmes, 43% d'hommes, 44% d'adultes et 56% d'enfants.


(AIP)


Bsp/bsb/gak/tm

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