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Société Publié le lundi 12 mai 2025 | Abidjan.net

Côte d’Ivoire : ''En Côte d’Ivoire, où nous avons perdu près de 80 % de notre couvert forestier en six décennies'' (Koffi Alloua experte en agroforesterie)

© Abidjan.net Par DR
Côte d’Ivoire : Entretien avec Mme Koffi Alloua sur l’impact de l’agroforesterie

Alors que la Côte d’Ivoire s’est engagée à restaurer 5 millions d’hectares de forêts d’ici 2030, l’agroforesterie se présente comme une alternative durable pour conjuguer production agricole et préservation de l’environnement. Spécialiste Engagement des partis prenantes de l’Unité de Coordination du Projet d’Investissement Forestier, Mme Koffi Alloua accompagne depuis plus de 3 ans des coopératives agricoles dans la mise en place de systèmes agroforestiers. Elle nous éclaire sur les enjeux, les réussites et les défis de cette approche encore méconnue.


Abidjan.net : Mme Koffi Alloua, comment définiriez-vous simplement l’agroforesterie, et pourquoi est-elle pertinente pour la Côte d’Ivoire ?


Mme Koffi Alloua : L’agroforesterie, c’est l’art d’associer les arbres aux cultures agricoles ou à l’élevage sur une même parcelle. Contrairement à l’agriculture intensive classique, elle favorise la biodiversité, protège les sols, régule le climat local et améliore les rendements à long terme. En Côte d’Ivoire, où nous avons perdu près de 80 % de notre couvert forestier en six décennies, cette approche est particulièrement pertinente pour restaurer les écosystèmes tout en maintenant les revenus agricoles.


Abidjan.net : Quels sont les bénéfices concrets pour les producteurs qui adoptent ce système ?


Mme Koffi Alloua : Ils sont nombreux. D’abord, les arbres d’ombrage protègent les cultures comme le cacao ou le café contre les fortes chaleurs. Ensuite, certaines espèces fixent l’azote dans le sol, ce qui réduit la dépendance aux engrais chimiques. Les feuilles mortes enrichissent la terre, et les arbres peuvent également produire du bois de chauffe, des fruits ou des produits médicinaux. Cela diversifie les sources de revenus des agriculteurs, renforce leur résilience et améliore leur sécurité alimentaire.


Abidjan.net : Avez-vous un exemple de réussite en agroforesterie en Côte d’Ivoire ?


Mme Koffi Alloua : Oui, je peux citer l’expérience de la forêt classée de Beki à Abengourou, dans l’Est de la Côte d’Ivoire. Avec le projet Pif2, plusieurs producteurs de cacao ont vu insérer des champs planté d' arbres tels que le framiré, l’acajou ou le fraké au sein de leurs plantations. En quelques années, ils ont constaté une amélioration de la qualité du cacao, une baisse de l’érosion des sols et des revenus supplémentaires grâce à la vente de fruits. Cela montre que l’agroforesterie n’est pas qu’un concept théorique, c’est une pratique rentable.


Abidjan.net : Quels sont les obstacles à sa vulgarisation à grande échelle ?


Mme Koffi Alloua : Le principal obstacle reste la méconnaissance. Beaucoup de producteurs pensent encore qu’un arbre dans une plantation est un obstacle à la lumière ou à l’espace. Il y a aussi des freins liés au foncier : certains agriculteurs ne sont pas propriétaires des terres qu’ils exploitent, donc ils hésitent à investir dans des arbres à croissance lente. Enfin, l’absence de politiques incitatives ou de subventions freine le développement à grande échelle de l’agroforesterie.


Abidjan.net : Le gouvernement ivoirien a-t-il intégré l’agroforesterie dans sa stratégie nationale ?


Mme Koffi Alloua : Oui, de plus en plus. La Stratégie nationale de préservation, de réhabilitation et d’extension des forêts (PNIAF) encourage l’agroforesterie, notamment dans les zones cacaoyères. Le code forestier révisé en 2019 reconnaît aussi les droits des planteurs sur les arbres qu’ils plantent, ce qui est une avancée. Mais il faut aller plus loin en formant les producteurs, en facilitant l’accès aux plants forestiers et en créant un cadre incitatif plus fort.


Abidjan.net : Un dernier mot pour les jeunes agriculteurs ou futurs acteurs du monde rural ?


Mme Koffi Alloua : Je leur dirais que l’agriculture de demain doit être durable. L’agroforesterie, c’est un moyen de produire mieux tout en respectant la nature. C’est aussi une voie d’innovation, où la technologie, les savoirs traditionnels et l’écologie peuvent se rejoindre. Il ne faut pas avoir peur d’essayer et de se former, car c’est en innovant que nous relèverons les défis agricoles et climatiques de notre pays.


Cyprien K.

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