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Société Publié le dimanche 10 août 2025 | BBC

Les avocats de Succès Masra annoncent un appel de la décision qui le condamne à 20 ans de prison ferme

Les avocats de Succès Masra annoncent un appel de la décision qui le condamne à 20 ans de prison ferme
© BBC
Les avocats de Succès Masra annoncent un appel de la décision qui le condamne à 20 ans de prison ferme
20 ans de prison ferme et une amende de 1 milliard de francs CFA à verser à l'Etat tchadien. C'est le verdict prononcé par le tribunal de grande instance de N'Djamena à l'encontre du président du parti "Les Transformateurs".

"Ne vous inquiétez pas, on se retrouve bientôt", a lancé à ses partisans et proches, l'opposant tchadien Succès Masra, qui venait d'être condamné à 20 ans de prison ferme par le Tribunal de grande instance de N'Djamena, dans la soirée de ce samedi.

Toujours sourire aux lèvres comme il l'a affiché tout au long du procès, l'opposant est resté calme et serein après le verdict, donnant même des accolades à ses avocats qui ont crié à l'injustice, selon l'AFP.

Succès Mastra a quitté la cour entouré de gardes armés, sous les regards découragés et démoralisés de ses militants dont certains en pleurs.

Selon le tribunal de N'Djamena, Succès Masra est reconnu coupable de "diffusion de message à caractère haineux et xénophobe" et de "complicité de meurtre". Ces accusations font suite au drame de Mandakao où 42 personnes ont été tuées en mai dans un conflit inter-communautaire.

"Déception" des avocats

Outre les 20 années de prison ferme, l'opposant est également condamné à verser une somme de 1 milliard de Francs CFA d'amende (1 500 000 euros environ).

Pour le collectif des avocats qui s'est confié à l'AFP, cette condamnation est une déception.

"Notre client vient de faire l'objet d'une humiliation, d'une ignominie", a indiqué Francis Kadjilembaye, coordonnateur des avocats. Pour lui, le "dossier est totalement vide".

Succès Mastra, selon l'avocat, est "condamné aux côtés des autres citoyens sur la base d'une absence irréfutable d'une quelconque preuve".

Et d'ajouter : "Nous assistons malheureusement à une consécration d'une pratique qui consiste en l'instrumentalisation de la justice pour pouvoir régler des comptes politiques, et cela est regrettable pour notre pays. Partout où besoin sera, nous nous ferons entendre, nous ferons entendre que notre client vient de faire l'objet d'une criarde injustice et que cela ne devra pas rester impuni".

74 autres personnes ont également été condamnées dans cette affaire de Mandakao. Parmi elles, 64 écopent aussi de 20 ans de prison ferme.

La veille de cette condamnation, vendredi, le Parquet avait requis 25 ans de prison ferme à l'encontre de Succès Masra et ses coaccusés.

Selon le ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement tchadien, Gassim Cherif, la justice est indépendante et chacun doit respecter ses décisions.

"Le gouvernement tchadien n'a pas besoin de commanditer quelque chose pour éliminer politiquement Masra. La justice a tranché".

En détention provisoire depuis mai

L'ancien Premier ministre et opposant Succès Masra, candidat malheureux à la présidentielle de 2024, a été placé en détention provisoire depuis le mercredi 21 mai à la maison d'arrêt de Klessoum.

Arrêté le 16 mai, le chef du parti d'opposition les Transformateurs est soupçonné par la justice d'"incitation à la haine, à la révolte, constitution et complicité de bandes armées". Il est également accusé de "complicité d'assassinat, incendie volontaire et profanation de sépultures" lors des événements de Mandakao. Selon ses avocats Mes Oumdade Yagoua et Ngolé Mannro, Succès Masra, qui était en garde à vue depuis son arrestation, a été déféré au parquet puis devant un juge d'instruction avant d'être placé en détention provisoire par ce dernier.

Les Transformateurs, le parti de Succès Masra, avaient évoqué dans un premier temps un "enlèvement" et diffusé un extrait d'une vidéo de caméra de surveillance montrant l'intéressé sortant de son domicile, encadré par plus d'une dizaine d'hommes en uniformes et armés.

Le massacre de Mandakao

En effet, le 14 mai, 42 personnes "majoritairement des femmes et des enfants" ont été tuées à Mandakao, dans la région du Logone-Occidental (sud-ouest), dans un conflit intercommunautaire. La justice tchadienne soupçonne M. Masra d'avoir provoqué ce massacre.

"Cette implication présumée a incité la population à s'en prendre à une communauté résidant dans la même localité. Des messages ont circulé, notamment sur les réseaux sociaux, appelant la population à s'armer contre d'autres citoyens", avait déclaré le Procureur de la République, Oumar Mahamat Kedelaye.

Dans une communication transmise à l'AFP mercredi, le collectif des avocats représentant l'Etat tchadien a indiqué que M. Masra est le "principal auteur des faits" mais que 82 autres personnes ont été arrêtées pour les mêmes motifs.

Un membre du parti Les Transformateurs de Masra, Sitack Yombatina, a rejeté ces accusations, déclarant à Reuters que Masra, qui a dirigé le pays pendant cinq mois au début de l'année 2024, ne pouvait être tenu responsable de "l'incompétence du gouvernement à juguler les conflits intercommunautaires."

Le message audio mis en avant par la justice pour incriminer M. Masra daterait de mai 2023 selon ses avocats. Suivant une traduction française de l'audio en langue Ngambaye, il est dit: "apprenons-nous les uns et les autres à utiliser une arme à feu. Que ce soit fille ou garçon, que ce soit femme ou homme... soyons tous des boucliers protecteurs".

Les conseils de Succès Masra affirment que cette déclaration, prononcée "dans un contexte précis avait fait l'objet du mandat d'arrêt international" contre leur client et qui "avait été levé en date du 02 novembre 2023, suite à un abandon des poursuites".

"Une cabale politico-judiciaire"

Lors d'une conférence de presse au siège du parti mercredi après-midi, les avocats de M. Masra ont dénoncé "une cabale politico-judiciaire" et une "conspiration" contre leur client.

Le Secrétaire général du parti, Dr Tog-Yeum Nagorngar a quant à lui dénoncé la procédure qui selon lui est "purement politique".

"Les accusations ayant conduit à son enlèvement et à sa détention arbitraire sont vides et pleines de contradictions" a jouté le secrétaire général des Transformateurs.

Pour lui, cette décision vient mettre à mal un effort soutenu de refondation et de réconciliation et de reconstruction de l'État tchadien.

"Les Transformateurs expriment leur profonde préoccupation face à cette dérive totalitaire du système politico-judiciaire alors même que l'engagement du président Dr Masra en faveur de la paix, du dialogue et de la justice est reconnu de tous".

Dr Tog-Yeum Nagorngar interpelle le Président Mahamat Idriss Déby pour qu'"il prenne toutes ses responsabilités de garant de l'unité nationale afin de faire libérer Succès Masra dans les meilleurs délais".

Il a par la suite exhorté ses militants et sympathisants "à rester mobilisés, mais toujours dans la discipline, en attendant les actions futures qui viendraient à être décidées".


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