Le secrétaire général de l’Onu a publié, lundi, son 19e rapport sur la crise ivoirienne et la mise en œuvre de l’Accord de Ouaga
Introduction
1. Par sa résolution 1826 (2008), le Conseil de sécurité a prorogé le mandat de l'Opération des Nations Unies en Côte d'Ivoire (ONUCI) et de la force française Licorne, et m'a prié de lui rendre compte de la situation en Côte d'Ivoire et de lui présenter des critères pour une éventuelle réduction progressive des effectifs militaires de l'ONUCI, à la lumière de l'évolution du processus électoral et de la situation sur le terrain, en particulier des conditions de sécurité. Le présent rapport rend compte des principaux événements survenus dans le pays depuis mon rapport du 13 octobre 2008 (S/2008/645) ainsi que des conclusions d'une mission d'évaluation technique qui s'est rendue en Côte d'Ivoire du 10 au 14 décembre 2008. II. Situation sur le plan de la sécurité
2. La situation sur le plan de la sécurité est restée stable dans l'ensemble. Le démantèlement de la zone de confiance, qui s'est achevée dans de bonnes conditions en juillet 2008 a rétabli la liberté de circulation des personnes, des biens et des services dans tout le pays et a contribué à l'amélioration globale de la situation sur le plan de la sécurité. Toutefois, l'existence continue de milices armées et de groupes de jeunes violents, le cantonnement incomplet des ex-combattants des Forces nouvelles, les difficultés rencontrées par le Gouvernement pour payer les allocations des ex-combattants des Forces nouvelles cantonnés, ainsi que le fait que les commandants de zone des Forces nouvelles continuent d'exercer un contrôle sur l'administration locale dans le nord, notamment la perception des recettes, sont autant de facteurs qui continuent de témoigner de la fragilité de la situation sur le plan de la sécurité dans le pays. 3. De fréquentes manifestations d'unités militaires exigeant le paiement de leurs indemnités ont été signalées aussi bien dans les zones contrôlées par les Forces nouvelles que dans celles contrôlées par le Gouver-nement. Par ailleurs, le 24 novembre, des partisans présumés d'un ancien commandant de zone des Forces nouvelles, Zacharia Koné, ont attaqué les dirigeants des Forces nouvelles installés récemment à Séguéla. Dans un autre incident survenu le 6 octobre à Abidjan, des éléments armés non identifiés ont attaqué la résidence du Ministre de la construction, de l'urbanisme et de l'habitat, M. Marcel Amon Tanoh, et se sont enfuis après un échange de tirs avec les gardes. Des perturbations des opérations d'identification des populations et d'inscription sur les listes électorales ont également été signalées, notamment le 10 octobre, date à laquelle des jeunes de la Fédération estudiantine et scolaire de Côte d'Ivoire (FESCI) ont saccagé trois bureaux d'inscription des électeurs à Abidjan et confisqué le matériel.
4. Des affrontements intercommunautaires ayant pour motif des questions foncières ont été signalés dans le district d'Abidjan, à Bondoukou, à Yocoboué et dans plusieurs villages de la région de Bas Sassandra. Ils ont opposé des personnes déplacées de retour au pays et les populations locales, et ont fait au moins 19 morts, 43 blessés et 400 personnes déplacées. D'autres incidents de sécurité ont été signalés, notamment actes de banditisme, assassinats, embuscades, cambriolages et violences sexuelles, y compris des viols. L'action menée par les services de maintien de l'ordre pour réduire la criminalité a continué d'être entravée par les problèmes d'ordre logistique, financier et humain auxquels sont aux prises les institutions nationales de sécurité et par la prolifération des armes dans le pays. III. Mise en œuvre de l'Accord de Ouagadougou. L'Accord de Ouagadougou du 4 mars 2007 cherchait à régler la crise en Côte d'Ivoire en supprimant la zone de confiance qui divisait le pays; en restaurant l'autorité de l'État et en redéployant l'administration sur l'ensemble du territoire national; en démantelant les milices, en désarmant les combattants et en les enrôlant dans un programme de service civique; en procédant à l'unification des Forces nouvelles et des forces de défense et de sécurité de Côte d'Ivoire; en simplifiant et accélérant l'identification des populations afin de faciliter l'inscription des électeurs sur les listes électorales; et en organisant une élection présidentielle libre, ouverte, démocratique et transparente. Deux accords complémentaires de l'Accord de Ouagadougou ont été signés en novembre 2007, l'un portant désignation d'une société française, la SAGEM, en qualité d'opérateur technique pour l'opération d'identification et pour l'inscription sur les listes électorales, et l'autre établissant un nouveau calendrier pour la mise en œuvre des principales opérations restantes, à savoir l'unification des forces armées, le désarmement et la réinsertion des combattants, la restauration de l'autorité de l'État, l'identification des populations, l'inscription sur les listes électorales et la tenue des élections. Le 22 décembre, le Président Gbagbo et le Premier Ministre, M. Guillaume Soro, ont signé un autre accord complémentaire qui a été facilité par le Président du Burkina Faso, Blaise Compaoré. Cet accord complémentaire précise les modalités et le calendrier pour la conduite, avant les élections, des opérations de désarmement des ex-combattants des Forces nouvelles et le démantèlement des milices, le lancement du processus de réunification des forces de défense et de sécurité ivoiriennes et l'achèvement, le 15 janvier 2009 au plus tard, du redéploiement de l'administration publique dans l'ensemble du pays, y compris du corps préfectoral, de l'appareil judiciaire et des administrations fiscales et douanières. 5. Le 10 novembre, le Facilitateur du processus de paix ivoirien, le Président Blaise Compaoré du Burkina Faso, a convoqué à Ouagadougou la quatrième réunion du Cadre permanent de concertation qui avait été créé en vertu de l'Accord de Ouagadougou pour examiner tout problème qui se poserait dans l'application de l'Accord. Le Cadre de concertation, qui se compose du Président Gbagbo, du Premier Ministre, Guillaume Soro, ainsi que du Président du Rassemblement des républicains, Alassane Ouattara, et du Président du Parti démocratique de Côte d'Ivoire, Konan Bédié, a constaté qu'il n'était pas possible de tenir les élections présidentielles le 30 novembre 2008 du fait des retards d'ordre logistique et technique qui avaient été accumulés. Il a demandé à la Commission électorale indépendante de fixer, avant le 31 décembre 2008, un calendrier précis pour l'identification des populations et l'inscription sur les listes électorales, sur la base duquel les partis conviendraient d'une nouvelle date pour le premier tour des élections présidentielles. A. Réunification du pays
7. Aux termes de l'Accord de Ouagadougou et des accords complémentaires, le Centre de commandement intégré a notamment pour mission d'assurer le maintien de l'ordre dans l'ex-zone de confiance et de sécuriser le processus de paix, y compris le redéploiement de l'administration publique dans l'ensemble du pays. Il est également responsable de l'unification et de la restructuration des forces de défense et de sécurité de Côte d'Ivoire, notamment de la création d'unités de police mixtes. Si le Centre de commandement intégré a mis en place des unités de police mixtes dans les secteurs situés précédemment dans la zone de confiance, l'unification des forces de défense et de sécurité de Côte d'Ivoire et des Forces nouvelles piétinait jusqu'à la signature du quatrième accord complémentaire le 22 décembre, essentiellement en raison du désaccord qui continue d'exister sur le nombre des membres du personnel des Forces nouvelles à intégrer dans la nouvelle armée nationale et les grades à leur attribuer. Aux termes du quatrième accord complémentaire, 4 000 membres du personnel des Forces nouvelles devraient immédiatement, mais à titre temporaire, intégrer la police et la gendarmerie ivoiriennes pour assurer la sécurité pendant le processus électoral, et 5 000 éléments des Forces nouvelles devraient être intégrés à l'armée unifiée au cours des deux prochaines années. L'ONUCI et la force Licorne continuaient de maintenir une capacité d'appui au sein du Centre de commandement intégré, qui est composé de personnel militaire, de personnel de police et de personnel civil, pour fournir un appui logistique et aider le Centre dans ses activités de planification et de coordination.
8. Au 15 décembre, les effectifs du Centre de commandement intégré étaient de 518 membres du personnel militaire provenant des forces gouvernementales et des Forces nouvelles avec 260 éléments basés à Yamoussoukro et 258 éléments déployés dans l'ex-zone de confiance. Bien que les capacités de transmissions et la mobilité du Centre se soient quelque peu améliorées, ses opérations ont continué d'être entravées par des problèmes financiers et logistiques. Autre fait nouveau intervenu dans le cadre de la sécurisation des opérations d'identification des populations et d'inscription sur les listes électorales, plus de 220 éléments des forces gouvernementales ont été déployés dans le nord tandis que des éléments des Forces nouvelles qui étaient déployés dans le sud sont retournés dans leurs bases dans le nord le 3 décembre 2008. B. Désarmement, démobilisation et réinsertion des ex-combattants et démantèlement des milices. 9. Les progrès en matière de regroupement et de démobilisation des ex-combattants des Forces nouvelles et de démobilisation des milices ont été lents. Au cours de la période considérée, 405 combattants des Forces nouvelles seulement ont été enregistrés et démobilisés à Bouaké, portant le nombre total d'ex-combattants enregistrés à 11 769, dont 7 704 ont opté pour la réinsertion. Le quatrième accord complémentaire prévoit le désarmement des ex-combattants des Forces nouvelles et des milices pro-gouvernementales au moins deux mois avant les élections, le Gouvernement versant une prime de démobilisation de 1 000 dollars à ceux qui sont admis par le Centre à en bénéficier. 10. Les institutions nationales chargées d'assurer la réintégration et la réinsertion des ex-combattants et des milices ont continué de rencontrer des problèmes d'ordre financier et logistique. Le Programme national de réinsertion et de réhabilitation communautaire (PNRRC) n'a reçu du Gouvernement que 10 millions de dollars sur
les 32,5 millions attendus en 2008 et aucune contribution directe des donateurs, ce qui a considérablement entravé ses activités, tandis que le Programme de service civique national (PSCN) a dû reporter à 2009 ses principaux projets de réinsertion. De ce fait, les deux programmes ont assuré seulement la réinsertion de 675 et 329 ex-combattants, respectivement. Afin d'aider les parties à surmonter ces difficultés, l'ONUCI a lancé, en collaboration avec le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), 98 microprojets dont ont bénéficié 842 ex-combattants au cours de la période considérée. 11.Parallèlement, il ressort d'une évaluation commne de la Mission des Nations Unies au Libéria (MINUL), de l'ONUCI et du PNUD, portant essentiellement sur les milices se trouvant au Libéria, que 1 500 à 2 000 ex-combattants libériens se trouvaient encore à la frontière libérienne et devaient être surveillés attentivement.
C. Redéploiement de l'administration sur l'ensemble du territoire
Si des progrès considérables ont été accomplis en matière de redéploiement des agents de l'État dans le nord, les progrès ont été limités en ce qui concerne la restauration des capacités opérationnelles et de la pleine autorité des responsables de l'administration publique, en raison du peu d'empressement des commandants de zone des Forces nouvelles à céder le contrôle de l'administration locale et de problèmes d'ordre financier et technique. Parallèlement, les institutions chargées de l'application des lois, de l'appareil judiciaire et du système pénitentiaire ne sont toujours pas fonctionnelles dans le nord, un seul magistrat ayant été désigné jusqu'à présent pour 10 districts. Le quatrième accord complémentaire prévoit la restauration totale de l'administration publique sur l'ensemble du territoire national avant le 15 janvier 2009, y compris le système judiciaire et l'administration fiscale, avec l'aide de l'ONUCI qui fournira des services de sécurité. 13. Les conditions de sécurité épouvantables qui règnent dans les prisons ont continué d'être une menace pour la sécurité publique malgré la remise en état de 18 établissements pénitentiaires dans le pays. Dans une série de trois grandes évasions de détenus intervenues au cours de la période considérée, plus de 70 prisonniers se sont échappés des prisons de Man, de Séguéla et de Bouaké. Cette tendance souligne combien il importe de redéployer de toute urgence les services judiciaires et pénitentiaires dans le nord du pays. Parallèlement, dans le sud contrôlé par le Gouvernement, deux prisonniers auraient été tués et six gravement blessés, à
la suite d'une mutinerie à la prison centrale d'Abidjan le 13 décembre. D. Identification des populations, inscription sur les listes électorales et processus électoral 14. Le processus d'identification des populations et d'inscription sur les listes électorales qui a été lancé le 15 septembre a été progressivement étendu à Abidjan le 29 septembre, à Bouaké le 18 novembre et à 57 autres districts à la mi-décembre 2008. Le 14 décembre, le processus était achevé dans le district d'Abidjan où 2 078 000 personnes ont été identifiées. À l'échelle nationale, près de 2,8 millions de personnes étaient identifiées et environ 3 000 sites avaient été ouverts fin décembre. Le processus a continué d'être entravé par de graves problèmes d'ordr logistique, financier et procédural. L'ONUCI a contribué à faire face aux graves problèmes logistiques en fournissant, à la demande de la Commission électorale indépendante et de l'Institut national de la statistique, d'importants moyens logistiques pour assurer le transport, notamment aérien, des agents d'identification et de leur matériel dans le cadre d'un projet intitulé « Opération transport ».
15. L'inventaire des 351 888 registres d'état civil identifiés jusqu'à présent, y compris ceux qui ont été perdus ou détruits pendant la crise, a été publié le 15 décembre. La reconstitution des registres devrait s'achever en février 2009, pour permettre aux intéressés de s'inscrire sur les listes électorales avant la fin des opérations d'inscription des électeurs. IV. Déploiement de l'Opération des Nations Unies en Côte d'Ivoire A. Composante militaire
16. Au 15 décembre 2008, l'effectif militaire de l'ONUCI se composait de 8 020 personnes, dont 7 741 soldats, 191 observateurs militaires et 88 officiers d'état-major, l'effectif total autorisé étant de 8 115 personnes. Cet effectif comprend actuellement 103 femmes. La force Licorne, avec son effectif de 1 800 personnes, continue de mettre des moyens d'intervention rapide à la disposition de l'ONUCI. Celle-ci a entrepris de regrouper ses contingents dans 24 camps, une opération qui devrait s'achever en février 2009. Deux camps sont en construction, l'un à Divo, l'autre à Issia; celui d'Adzopé a été terminé en décembre. Il faut signaler à ce sujet que la mission d'évaluation technique récente dont il est rendu compte plus loin a recommandé une plus forte concentration des bataillons. Avec le démantèlement de la ligne verte, la force a cherché à accroître sa mobilité pour faciliter l'application de l'Accord de Ouagadougou, y compris le processus électoral. Elle mène des patrouilles conjointes et synchronisées avec la MINUL le long de la frontière avec ce pays et a tenu plusieurs réunions de coordination et de liaison avec les autorités du Burkina Faso, du Ghana et de la Guinée en vue de renforcer les dispositifs de sécurisation de la frontière avant les élections. B. Composante de police
17. Au 15 décembre 2008, l'effectif de police de l'ONUCI comptait 1 137 personnes pour un effectif total autorisé de 1 200, et se composait de 387 conseillers pour les questions de police et de 750 personnes appartenant à six unités de police constituées. Cet effectif comprenait 20 femmes. La composante de police a continué d'apporter son soutien à la Police nationale ivoirienne sur l'ensemble du territoire, de lui donner des conseils stratégiques et de contribuer de manière générale à assurer la sécurité du processus de paix. Elle a aidé les 600 auxiliaires de police des Forces nouvelles formés par elle en 2006 à mener des enquêtes dans le nord du pays. En collaboration avec les parties prenantes, 30 projets de renforcement des capacités des institutions ivoiriennes de maintien de l'ordre ont été entrepris, en particulier dans les domaines de la criminalistique et des opérations antiémeutes. V. Situation humanitaire
18. Plutôt que de lancer une procédure d'appel global pour 2009, les organismes humanitaires présents en Côte d'Ivoire ont jugé préférable d'actualiser leur stratégie et de faire le point des ressources additionnelles exigées pour certaines activités, comme la protection et la réinsertion des personnes déplacées dans l'ouest du pays et l'amélioration de l'état nutritionnel des populations vulnérables dans le nord. Le Bureau de la coordination des affaires humanitaires a signalé que 76 000 personnes déplacées environ étaient rentrées volontairement dans leurs villages dans l'ouest du pays mais qu'en décembre 2008, on en dénombrait encore quelque 45 000 qui vivaient dans des familles d'accueil et avaient besoin d'une assistance. Les organismes d'aide humanitaire et les autorités ivoiriennes ont continué de collaborer à l'instauration de conditions propices à la réinstallation durable de quelque 120 000 personnes déplacées dans l'ouest du pays, en s'efforçant de remédier au manque de cohésion sociale et de régler d'interminables conflits fonciers. Par ailleurs, pour faire face aux pénuries alimentaires dans le nord, le Fonds central d'intervention pour les urgences humanitaires a affecté 1 million de dollars au Programme alimentaire mondial et au Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) fin octobre, afin de financer des projets de soins thérapeutiques et nutritionnels en faveur des enfants. Enfin, par souci de cohérence, des bureaux auxiliaires communs aux organismes des Nations Unies ont été ouverts à Guiglo et à Korhogo afin de faciliter la planification et la coordination des activités qui marqueront le passage de la phase de secours d'urgence à la phase de relèvement et de développement. VI. Droits de l'homme
19. La période considérée a de nouveau été marquée par de très graves violations des droits de l'homme, notamment des attaques perpétrées contre des civils par des individus armés, dont plusieurs se sont produites sur les axes Duékoué-Bangolo et Guiglo-Tai, dans l'ouest du pays, ainsi que dans les villes contrôlées par les Forces nouvelles. On a signalé de nombreux cas où les assaillants ont tendu des embuscades sur la route à des véhicules de transport public, pénétré de force dans des maisons particulières et violé des femmes et des filles, autant d'atteintes aux droits fondamentaux à la vie, à l'intégrité physique, à la sûreté, à la liberté de mouvement et à la propriété. Diverses violations ont également été relevées dans les zones contrôlées par les Forces nouvelles - extorsion, exécutions illégales, arrestations arbitraires, mises au secret, torture et mauvais traitements - ainsi que des atteintes aux droits de propriété et à la liberté d'expression et d'opinion. Des éléments des Forces nouvelles ont également commis de graves violations des droits de l'homme contre des éléments démobilisés à Vavoua, Séguéla, Korhogo et Bouaké, lors d'affrontements entre des factions rivales.
20. Des femmes ont été victimes d'actes de violence telle que viols, mariages forcés et traite, en particulier dans l'ouest du pays et dans la région de Vavoua. Le fait qu'une proportion très faible seulement des auteurs de ces actes font l'objet de poursuites reste un problème majeur. Un autre sujet de préoccupation est l'attitude des forces de maintien de l'ordre à l'égard des civils dans le sud du pays, où elles continuent de faire un usage excessif de la force, de recourir à la torture et d'infliger d'autres mauvais traitements. 21. En octobre, on a signalé que des membres de la FESCI avaient attaqué un professeur d'université à Abidjan et que des manifestations avaient fait des blessés, entraîné divers dégâts et obligé à fermer les écoles pendant plusieurs jours dans la préfecture de Daloa. Bien que les nouveaux dirigeants de la Fédération estudiantine se déclarent partisans de la non-violence, des extrémistes de leurs groupements et du mouvement des Jeunes patriotes ont de nouveau semé le trouble dans les universités et les écoles un peu partout dans le pays. Le 14 novembre 2008, l'ONUCI a reçu pour la première fois une visite des dirigeants de la FESCI, qui lui ont confirmé qu'ils voulaient participer de manière constructive au processus de paix ivoirien. Elle a l'intention de maintenir le dialogue avec la Fédération et les autres mouvements de jeunes. VII. Situation des femmes
22. Conformément aux résolutions 1325 (2000) et 1820 (2008) du Conseil de sécurité sur les femmes et la paix et la sécurité, l'ONUCI a continué d'incorporer une démarche soucieuse d'équité entre les sexes dans ses politiques et programmes et a dispensé une formation à la question de la parité des sexes aux militaires, au personnel de police et au personnel civil. L'Opération a également dispensé une formation et apporté un appui technique à des groupes de femmes qui encouragent les femmes à participer aux élections, et a aidé les institutions nationales à mener à bien une campagne de 16 jours sur la violence à l'égard des femmes. L'Opération a également collaboré avec l'association féminine des Forces nouvelles, dont 569 ex-combattantes ont manifesté le souhait de bénéficier des possibilités de réinsertion. VIII. Protection des enfants
23. Pour donner suite aux résolutions du Conseil de sécurité sur les enfants et les conflits armés, en particulier la résolution 1612 (2005), l'ONUCI a continué d'inclure de manière systématique un volet protection des enfants dans toutes ses activités. De janvier à décembre 2008, l'Opération a organisé 204 stages de formation et de sensibilisation à l'intention de différents partenaires ivoiriens et des membres de son propre personnel, qui ont été 6 068 à les suivre. Conformément aux dispositions adoptées par le Groupe de travail du Conseil de sécurité sur les enfants et les conflits armés, l'ONUCI a intensifié sa campagne de sensibilisation auprès des parties au conflit pour les inciter à prendre des mesures contre les violences sexuelles infligées à des enfants, notamment à formuler un plan d'action national pour la protection des enfants en situation de conflit armé. IX. VIH/sida
24. L'ONUCI a poursuivi l'intégration de la sensibilisation au VIH/sida dans ses activités. Pendant la période considérée, 4 071 membres de son personnel ont suivi des séances de sensibilisation à cette question, 219 nouveaux «pairs éducateurs» ont reçu une formation leur permettant de sensibiliser à leur tour leurs collègues au sein de leurs bataillons respectifs et 2 137 membres du personnel ont bénéficié de services de soutien psychologique et de dépistage volontaire. Dans le cadre d'un projet pour la prévention des maladies sexuellement transmissibles chez les travailleuses du sexe et les membres des forces armées ivoiriennes, réalisé en commun par l'ONUCI et le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), l'infrastructure des services de santé du Ministère de la défense a fait l'objet d'une évaluation pour déterminer les besoins et un programme de formation sur les maladies sexuellement transmissibles et la violence sexiste a été mis sur pied. L'Opération a également poursuivi, en collaboration avec le PNUD et le FNUAP, l'exécution d'un projet commun sur le VIH/sida dans le cadre du processus de désarmement, de démobilisation et de réintégration. X. Relèvement économique
25. L'économie ivoirienne a continué de se redresser et la croissance du produit intérieur brut (PIB), stimulée principalement par l'augmentation de la production de pétrole et les investissements étrangers, devrait être de 2,9 % en 2008. Toutefois, le taux d'inflation moyen annuel devrait atteindre 4,7 % à la fin de 2008 en raison de la forte hausse des prix internationaux des aliments et de l'énergie. La bonne tenue des cours des produits de base au premier semestre de 2008 devrait se traduire par un excédent de la balance des comptes courants équivalant à 4,7 % du PIB à la fin de l'année mais, en raison de leur baisse récente, on pense que l'année 2009 se soldera par un déficit budgétaire égal à 1,7 % du PIB. Les prévisions économiques pour 2008-2009 restent étroitement liées à la situation politique, ainsi qu'à la crise financière mondiale qui aura probablement une incidence négative. Il faudrait procéder d'urgence à des réformes structurelles, notamment dans les domaines de la gouvernance et de la fiscalité (taxation et collecte des impôts). Pour relancer une économie dont le relèvement est resté jusque-là limité, il faudrait que les perspectives de règlement des arriérés s'améliorent rapidement et que les autorités s'efforcent pour cela d'obtenir de nouvelles contributions des donateurs et d'utiliser les économies résultant de la réduction du service de la dette. XI. Comportement du personnel et discipline
26. L'ONUCI a redoublé d'efforts pour prévenir tout comportement répréhensible et a continué d'enquêter sur le bien-fondé des plaintes formulées à ce sujet. Afin de faire mieux connaître les dispositions visant à prévenir les cas d'exploitation et d'abus sexuels, elle a organisé un atelier à l'intention des organisations non gouvernementales locales et de l'équipe de pays des Nations Unies et mené dans les secteurs une mission d'établissement des faits qui l'a aidée à prendre des mesures pour atténuer les risques. Elle a poursuivi les consultations avec les membres de son personnel au sujet de ma circulaire interdisant la discrimination, le harcèlement, y compris le harcèlement sexuel, et l'abus de pouvoir XII. Suivi des médias et information
27. La radio de la mission, ONUCI-FM, a continué ses émissions sur le processus de paix, afin notamment d'informer ses auditeurs des opérations d'identification et d'inscription sur la liste électorale. L'ONUCI a également poursuivi sa campagne d'information visant à sensibiliser la population ivoirienne à différentes questions, telles que la protection des droits de l'homme, la culture de paix et la cohésion sociale, et a organisé dans ce cadre des réunions publiques, des ateliers et, avec le concours d'artistes, des spectacles itinérants qui ont été donnés dans 15 lieux différents. L'Opération a également appuyé les activités menées par la société civile et les organisations non gouvernementales pour lutter contre la violence sexiste. 28. Les difficultés d'accès aux médias publics ont persisté. La Radio télévision ivoirienne, en particulier, a continué de couvrir de façon très inégale les activités du camp présidentiel et celles de l'opposition. Et en dépit de nombreuses promesses, les médias ivoiriens n'ont pas fait grand-chose pour adhérer à un code de conduite pendant le processus électoral. XIII. Sûreté et sécurité du personnel
29. Comme on l'a indiqué plus haut, la situation dans le pays peut être considérée comme généralement stable. Cette stabilité est toutefois très précaire comme l'ont montré les incidents et manifestations décrits aux paragraphes 2 à 4. L'ONU n'était pas particulièrement visée, mais il est arrivé que ces événements violents perturbent les activités de son personnel et l'exécution de ses programmes. Les mesures de sécurité visant à protéger le personnel des Nations Unies continuent d'être appliquées de manière très stricte. XIV. Incidences financières
30. Par sa résolution 62/254, l'Assemblée générale a ouvert des crédits d'un montant de 475,4 millions de dollars pour financer les activités de l'ONUCI pendant l'exercice allant du 1er juillet 2008 au 30 juin 2009. Si le Conseil de sécurité décide de proroger le mandat de l'Opération au-delà du 31 janvier 2009, les ressources nécessaires à la poursuite de l'Opération jusqu'au 30 juin 2009 seront limitées aux montants approuvés par l'Assemblée. Au 30 septembre 2008, le montant non acquitté des contributions au Compte spécial de l'ONUCI s'élevait à 231 millions de dollars. Le montant total des contributions non acquittées pour l'ensemble des opérations de maintien de la paix s'élevait à cette date à 4 014 100 000 dollars. Les dépenses afférentes aux contingents et à leur matériel ont été remboursées pour les périodes allant jusqu'au 30 novembre 2008 et jusqu'au 30 juin 2008, respectivement. XV. Mission d'évaluation technique
31. À la demande de mon Représentant spécial, une mission d'évaluation technique dirigée par le Sous-Secrétaire général aux opérations de maintien de la paix, Edmond Mulet, et comprenant des représentants du Département des opérations de maintien de la paix, du Département des affaires politiques, du Haut- Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme et du Département de la sûreté et de la sécurité, s'est rendue en Côte d'Ivoire où elle a séjourné du 10 au 14 décembre pour étudier le rôle de l'ONUCI dans le processus de paix, en prévision de l'examen du mandat et des effectifs respectifs de l'ONUCI et des forces françaises que le Conseil de sécurité a l'intention d'effectuer avant le 31 janvier 2009. 32. La mission d'évaluation a reçu des éléments d'information détaillés de l'ONUCI, de l'équipe de pays des Nations Unies et de la force française Licorne. Elle a consulté un grand nombre de parties prenantes, nationales et internationales, dont le Président Gbagbo et le Premier Ministre Soro, les dirigeants de l'opposition (M. Bedié et M. Ouattara), les chefs d'état-major des Forces de défense et de sécurité de Côte d'Ivoire et des Forces nouvelles, le Président de la Commission électorale indépendante, des membres de la communauté diplomatique (y compris les représentants de l'Union africaine, de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest et de l'Union européenne), ainsi que des représentants de la société civile et du secteur privé. Les membres de la mission d'évaluation ont également rencontré le Facilitateur du processus de paix ivoirien, le Président Compaoré, du Burkina Faso, le 13 décembre à Ouagadougou, et des dirigeants français à Paris le 15 décembre. A. Processus électoral. Toutes les parties ivoiriennes ont redit à la mission d'évaluation leur attachement au principe de la tenue d'élections le plus tôt possible en 2009. Elles ont insisté sur la nécessité de veiller à ce que les conditions nécessaires pour que les élections soient crédibles et transparentes soient réunies avant de fixer une nouvelle date pour l'élection présidentielle. À ce propos, tous les interlocuteurs ont fait observer que c'était au Gouvernement et à la Commission électorale indépendante de mettre en place sans tarder les équipes d'identification et d'inscription sur les listes électorales avant la fin du mois de décembre, afin que le tout soit terminé avant la fin du mois de février 2009. Le Président de la Commission a informé la mission d'évaluation que les chances de terminer les inscriptions sur les listes électorales avant fin février 2009 dépendraient de la possibilité qu'aurait le Gouvernement de débourser immédiatement les 15 millions de dollars nécessaires pour déployer à travers tout le pays les 4 000 équipes restantes d'identification et d'inscription sur les listes électorales. 34. La mission d'évaluation a été informée qu'à la fin de la phase d'identification et d'inscription sur les listes électorales, la Commission électorale indépendante établirait une liste provisoire des électeurs, si possible pour la fin février 2009, après quoi une nouvelle date pourrait être fixée pour les élections. En ce qui concerne la publication des listes électorales définitives, la Commission comptait prévoir 30 à 40 jours pour l'examen des recours, mais le Premier Ministre, M. Soro, estime qu'il serait préférable de s'en tenir au délai de trois mois prévu par la Constitution ivoirienne pour l'examen des recours entre la publication des listes électorales provisoires et celle des listes définitives, afin de renforcer la transparence et la crédibilité du processus. La prolongation du délai permettrait de terminer le redéploiement, dans le nord du pays, du personnel judiciaire qui devrait jouer un rôle déterminant dans l'examen des recours, comme le prévoit le quatrième accord complémentaire, ainsi que la mise en place d'une police et d'une gendarmerie nationales unifiées et intégrées, couvrant la totalité du pays. Une fois que la Commission aura établi les listes électorales définitives, toutes les parties prenantes se sont accordées à penser qu'il faudrait réserver dans le calendrier des élections une période incompressible de deux à trois mois pour la production et la distribution des cartes d'identité et d'électeur. 35. Cela étant posé, la mission d'évaluation a conclu, même si toutes les parties restaient fermement attachées à la tenue d'élections, avant la fin du premier semestre 2009, on ne pouvait pas exclure la possibilité de retards supplémentaires. Vu que le quatrième accord complémentaire prévoit que le désarmement des ex combattants des Forces nouvelles et le démantèlement des milices doivent être achevés deux mois avant les élections, la maîtrise du calendrier électoral est devenue encore plus problématique. 36. L'ONUCI s'attachera à faire saisir à la Commission électorale combien il importe de fixer ensemble, le plus tôt possible et compte tenu des dispositions du quatrième accord complémentaire, un calendrier électoral nouveau et réaliste, avec l'adhésion des parties ivoiriennes et de la communauté internationale, où soient définies toutes les étapes du processus, y compris l'achèvement des activités d'identification et d'inscription sur les listes électorales, la publication des listes électorales provisoire et définitive, la production des cartes d'identité et d'électeur et leur distribution dans tout le pays et la date de l'élection elle-même, comme l'a demandé le Conseil de sécurité dans la déclaration de son président en date du 7 novembre 2008 (S/PRST/2008/42). L'ONUCI est prête à aider la Commission électorale indépendante à établir un schéma directeur intégré pour le déroulement du processus électoral, et à lui apporter un soutien technique et logistique, ainsi qu'aux techniciens concernés, afin d'éviter que les élections soient de nouveau retardées. 37. L'ONUCI vérifiera que les parties se conforment au code de conduite électoral signé, en ma présence, le 23 avril 2008, et elle engagera les autres parties prenantes, y compris la presse et les associations de la société civile, à élaborer des mécanismes analogues, qui aident à faire régner un climat de stabilité politique pendant la période électorale. L'Opération aidera la société civile à organiser les
Journées du consensus national, début 2009, et à en faire la publicité. En outre, pour tenir compte des inquiétudes exprimées par de nombreuses parties prenantes à propos de la sécurité les jours qui suivront les élections, les Nations Unies continueront à appuyer les initiatives qui aident à préserver le climat d'ouverture qui caractérise le processus de paix. 38. Parallèlement, le principal souci de l'ONUCI restera la protection du processus de paix et du résultat des élections, qui doit être assurée grâce à l'exercice du mandat de certification de mon Représentant spécial. La mission d'évaluation a confirmé, à cet égard, que toutes les parties prenantes acceptaient que ce rôle soit attribué à mon Représentant spécial et insistaient sur son importance si l'on veut garantir la crédibilité et la transparence des élections, depuis l'établissement des listes électorales jusqu'à la proclamation des résultats. Dans cette perspective, l'ONUCI continuera de s'efforcer de sensibiliser toutes les parties et de maintenir le consensus sur la nature du mandat de certification et la façon de s'en acquitter. 39. Enfin, la mission mobilisera la communauté des donateurs afin qu'elle aide le Gouvernement ivoirien, financièrement, dans l'action qu'il mène pour exécuter les tâches qui restent à accomplir pour parvenir à la tenue en 2009 d'élections présidentielles et législatives crédibles et transparentes, surtout en ce qui concerne l'achèvement des opérations d'identification et d'inscription sur les listes électorales. L'ONUCI ne cessera pas de pousser le Gouvernement à débloquer en temps voulu les fonds dont les institutions ivoiriennes concernées ont besoin, y compris pour l'opération d'importance cruciale qui consiste à reconstituer les registres d'état civil disparus ou détruits, qui a été lancée par le Ministère de la justice en mai 2008 mais retardée par le manque de financement. L'ONUCI continuera également à aider les parties ivoiriennes à élaborer pour les élections un plan de sécurité intégré, traçant les limites des responsabilités des forces de défense et de sécurité ivoiriennes, des Forces nouvelles et des forces impartiales. B.Questions touchant à la sécurité
40. Toutes les parties prenantes du pays et de l'extérieur se sont accordées à penser que les parties devraient profiter du retardement des élections pour expédier le désarmement des ex-combattants et le démantèlement des milices dans des conditions de crédibilité et de transparence, et lancer la réunification et la réorganisation des forces de défense et de sécurité ivoiriennes, y compris par la réintégration des éléments des Forces nouvelles qui remplissent les conditions. Jusqu'à présent, 34 678 membres des Forces nouvelles ont été recensés, dont seulement 11 769 ont été soumis au « cantonnement». Les efforts déployés dans l'ouest pour disperser les milices ont été surtout symboliques, et les Forces nouvelles aussi bien que les milices y restent opérationnelles. 41. La mission d'évaluation a insisté sur la nécessité de mettre en place des mécanismes efficaces de contrôle des armes rendues par les ex-combattants. Il faut que le troisième accord complémentaire aussi bien que le quatrième, ainsi que les mandats relatifs à la supervision que les forces impartiales doivent assurer des sites de cantonnement, du stockage des armes et du démantèlement des milices, acceptés par les chefs d'état-major des forces de défense et de sécurité et des Forces nouvelles, ainsi que par les commandants de l'ONUCI et de la Force Licorne, soient appliqués rapidement. À cet égard, il convient de rappeler que les Forces nouvelles et les forces nationales de défense et de sécurité sont tenues de présenter des listes d'armes détaillées au centre de commandement intégré. En outre, il faut mettre au point un schéma général plus détaillé pour encadrer l'avenir du secteur de la sécurité en Côte d'Ivoire, qui comprenne notamment des garanties concernant la responsabilité, la transparence et le contrôle des institutions du secteur. Cela inspirait à toutes les parties prenantes la confiance nécessaire dans le dispositif de sécurité et les mécanismes de gouvernance en la matière. 42. La signature du quatrième accord complémentaire devrait certes aider à surmonter certains des obstacles au désarmement des ex-combattants, à la dispersion des milices et à la réunification des deux forces précédemment en guerre l'une contre l'autre. Cependant, la mission d'évaluation a confirmé que les capacités opérationnelles des institutions ivoiriennes auxquelles il revient d'organiser l'accomplissement de ces tâches et de les exécuter, c'est-à-dire le centre de commandement intégré, le Programme national de réinsertion et de réadaptation sociales et le Programme de service civique, dépendront aussi du renforcement de l'appui fourni par le Gouvernement ivoirien et les partenaires internationaux pour aider à surmonter les lacunes structurelles et financières. Le fait que le Gouvernement ivoirien sera ou non en mesure de réunir les fonds nécessaires pour payer les primes de démobilisation prévues par le quatrième accord complémentaire sera aussi déterminant pour la réussite de ces activités, surtout vu que les partenaires internationaux sont peu enclins à appuyer la formule des versements en liquide,l'expérience ayant souvent montré que ceux-ci n'étaient pas suffisants et n'étaient pas non plus un bon moyen de réintégrer durablement les ex-combattants. 43. En ce qui concerne l'intégration des ex-combattants des Forces nouvelles dans les services de sécurité, la mission d'évaluation a noté que 300 éléments des Forces nouvelles affectés mi-novembre aux unités de police mixtes chargées d'assurer la sécurité des activités d'identification et d'inscription sur les listes électorales à Abidjan étaient retournés à Bouaké le 3 décembre, au motif que le centre de
commandement intégré n'avait pas versé leurs primes. D'autre part, 600 auxiliaires de police formés par l'ONUCI n'ont été ni intégrés dans les services de sécurité nationaux, ni équipés pour aider à assurer le contrôle du nord du pays. La signature du quatrième accord complémentaire, qui prévoit la réintégration immédiate de ces 600 personnes dans la police et la gendarmerie ivoiriennes, devrait aider à accélérer les choses. C. Recommandations concernant le rôle que l'ONUCI peut jouer à l'appui de l'application de l'Accord de Ouagadougou
44. Toutes les parties prenantes ont estimé qu'il fallait que l'ONUCI reste dotée de ses capacités actuelles pour pouvoir contribuer au maintien d'un climat de sécurité en vue de l'application de l'Accord de Ouagadougou, en particulier pour ce qui es t du processus électoral. Les éléments suivants ont été jugés déterminants pour le retour du pays à la normale : l'achèvement du désarmement, de la démobilisation et de la réintégration des ex-combattants, le désarmement et le démantèlement des milices, la restauration complète de l'autorité de l'État, l'achèvement des opérations d'identification et d'inscription sur les listes électorales, la tenue d'une élection présidentielle crédible et transparente, la réunification et la réorganisation des forces de défense et de sécurité ivoiriennes et la réalisation de progrès sur le plan des droits de l'homme. 45. En même temps, la mission d'évaluation et l'ONUCI ont toutes les deux pensé qu'il serait possible d'ajuster les effectifs et la présence de la Mission sans remettre en question sa capacité, globalement, d'assurer la sécurité du processus de paix. Les modifications proposées tiendraient compte des menaces ci-après qui pèsent sur la sécurité : la persistance de l'existence de milices armées et de jeunes adeptes de la violence; le fait que certains ex-combattants ne sont pas effectivement désarmés; le caractère inachevé de la remise sur pied de l'administration publique; le risque d'affrontements localisés, dans le nord et dans l'ouest; la limitation de la liberté de mouvement due à la persistance des postes de contrôle et des barrages; le fait que les élections pourraient attiser la violence en Côte d'Ivoire, surtout si elles paraissaient manquer de crédibilité et de transparence. 46. La mission d'évaluation a avancé l'idée de réduire d'un bataillon l'effectif de l'ONUCI au moment de la prochaine relève, c'est-à-dire de le ramener de 8 115 à 7 450 hommes, étant entendu que la mobilité de la force serait accrue grâce à l'existence de capacités aériennes adéquates, notamment des hélicoptères d'appui supplémentaires, et compte tenu du maintien de l'appui fourni à l'ONUCI par les forces françaises, en matière de capacité d'intervention rapide. Dans cette hypothèse, la force de l'ONUCI tiendrait des positions moins nombreuses mais de manière plus concentrée, positions d'où un effectif suffisant peut être déployé sans perte de temps en détachement aéroporté d'intervention rapide. 47. D'autre part, la mission d'évaluation a constaté qu'il était difficile, vu les menaces et les difficultés qui s'annonçaient et l'incertitude qui pesait sur la rapidité du processus électoral, d'envisager de réduire plus fortement les effectifs de l'ONUCI avant d'avoir progressé dans des domaines soigneusement balisés et sur le plan des conditions de sécurité sur le terrain. À cette fin, elle a proposé les critères suivants comme conditions préalables à une réduction plus importante de l'effectif de la force : a) achèvement et crédibilité des activités de désarmement, de démobilisation et de réintégration des ex-combattants et démantèlement des milices;
b) bon déroulement des élections;
c) lancement de la réforme du secteur de la sécurité et en particulier de mesures de confiance s'inscrivant dans un cadre plus général d'une gouvernance et d'un contrôle démocratiques de ce secteur, réunification de l'armée et mise en place de forces armées ivoiriennes et de services de sécurité en état de fonctionnement, dans un esprit républicain;
d) restauration de l'autorité de l'État dans la totalité du pays. 48. Entre-temps, l'ONUCI continuera de s'occuper essentiellement d'aider les parties ivoiriennes à surmonter les difficultés et à réduire les risques énumérés plus haut, par les moyens suivants : a) en appuyant l'action menée par les parties ivoiriennes et le Facilitateur pour empêcher le processus de paix de déraper;
b) en contribuant à la sécurité du climat dans lequel se déroule ront les élections, notamment en obtenant que des progrès soient accomplis quant au désarmement effectif des ex-combattants et au démantèlement des milices, notamment en contrôlant le cantonnement des ex-combattants et le stockage des armes rassemblées; c) en apportant un appui technique et logistique au processus électoral et en surveillant le bon déroulement des différents processus qui aboutiront à des élections crédibles et transparentes;
d) en contribuant, par les activités de certification de mon Représentant spécial, au renforcement de la crédibilité du processus électoral;
e) en appuyant le redressement économique recherché par le gouvernement ivoirien. 49. Pour contribuer à l'établissement d'un climat de sécurité pour les élections, compte tenu de la modification proposée de son effectif et de sa présence, la composante militaire de la Mission ne cessera pas d'examiner son concept d'opérations et de l'adapter à l'évolution de la situation sur le terrain. Elle collaborera étroitement avec la force Licorne pour ce qui est d'aider les parties ivoiriennes sur le plan des conditions de sécurité dans lesquelles se dérouleront les élections, le désarmement, la démobilisation et la réintégration des ex-combattants, le désarmement et le démantèlement des milices, la réforme du secteur de la sécurité, particulièrement en ce qui concerne la réunification des forces de défense et de sécurité ivoiriennes, et la restauration de l'autorité de l'État. 50. La mission aidera à renforcer les capacités antiémeute de la police et de la gendarmerie ivoiriennes. À ce sujet, le quatrième accord complémentaire prescrit que 4 000 éléments des Forces nouvelles, dont les 600 auxiliaires de police formés par l'ONUCI en 2005, participeront immédiatement au dispositif de sécurité mis en place pour les élections, avec des éléments de la police et de la gendarmerie nationales et sous la supervision du centre de commandement intégré. 51. La mission aidera aussi les parties ivoiriennes à prévoir comment réaliser la réunification des forces de défense et de sécurité, y compris la police et la gendarmerie, et assurera, comme le prévoit le quatrième accord complémentaire se rapportant à l'Accord de Ouagadougou, la formation de base des éléments des Forces nouvelles se qualifiant pour être réintégrés dans les forces de défense et de sécurité.
52. Afin que sa présence reste forte et dissuasive pendant les élections, l'ONUCI se concertera avec la MINUL sur les arrangements possibles entre missions et étudiera, sans mettre en cause l'exécution du mandat de la MINUL ni la réduction progressive de son activité, la possibilité d'utiliser sa marge de manœuvre éventuelle pour déployer en renfort, pendant une durée limitée immédiatement avant, pendant et après les élections, un appui militaire et aérien. 53. La mission collaborera étroitement avec le Facilitateur pour s'assurer que les parties sont d'accord sur des arrangements permettant de contrôler efficacement les armes stockées, conformément au rôle de supervision confié à l'ONUCI et à la force Licorne aux termes de l'Accord de Ouagadougou et des accords complémentaires s'y rapportant, et pour offrir aux parties des solutions qui soient à la fois adaptées à la situation en Côte d'Ivoire et conformes aux normes internationales en matière de désarmement, de démobilisation et de réintégration. L'ONUCI poussera les parties ivoiriennes à préciser le rôle dévolu au Programme national de réintégration et réadaptation sociales et au Programme de service civique dans le nouveau plan de réintégration. Elle impliquera la communauté des donateurs dans la conception du processus. En outre, elle aidera à formuler un plan pour l'achèvement du démantèlement des milices qui subsistent dans l'ouest et à Abidjan, et elle aidera à élaborer un programme efficace de réintégration durable des ex-combattants, y compris sa stratégie de financement. Enfin, elle travaillera en étroite collaboration avec le Facilitateur et les parties ivoiriennes à l'étude des partenariats bilatéraux susceptibles d'aider le Gouvernement ivoirien à réformer les institutions du secteur de la sécurité. 54. L'ONUCI appuiera l'action menée par les autorités ivoiriennes pour mener à bien d'autres tâches d'importance critique, par exemple le redéploiement de l'administration publique et la restauration de l'autorité de l'État dans la totalité du pays, y compris dans les domaines judiciaire et pénitentiaire et en ce qui concerne l'état de droit. Elle continuera également à collaborer avec l'équipe de pays des Nations Unies, la Banque mondiale et d'autres partenaires internationaux pour promouvoir la cohésion sociale et la réconciliation des communautés, faciliter l'acheminement de l'aide humanitaire et appuyer le relèvement, particulièrement dans les régions nord et ouest. Elle assurera la promotion du processus de paix au moyen de ses capacités d'information. Elle et ses partenaires poursuivront leurs activités de contrôle portant sur la situation en Côte d'Ivoire sur le plan des droits de l'homme, en s'intéressant tout particulièrement aux femmes et aux enfants, en même temps qu'elle dotera les institutions nationales et la société civile de capacités de promotion et de protection des droits de l'homme.
D. Appui financier à la mise en œuvre de l'Accord de Ouagadougou et aide au redressement économique 55. Comme il a déjà été indiqué, la mission d'évaluation a constaté que la plupart des processus clefs prévus par l'Accord de Ouagadougou, y compris le processus électoral, continuaient à souffrir terriblement de grosses insuffisances de financement, ce qui mettait en danger les progrès déjà accomplis. En dépit de l'importance des recettes des industries du cacao et de l'huile dans le sud, le Gouvernement n'est pas encore en mesure de percevoir des rentrées dans le nord du pays, d'où un trou considérable dans son budget. De plus, le Premier Ministre a indiqué à la mission d'évaluation qu'en décidant de payer aux institutions financières internationales des arriérés qui s'élèvent à 440 millions de dollars pour l'année passée, en plus des 400 millions réservés au programme national de sortie de crise, le Gouvernement avait tiré un trait sur plus de 20 % des 4,4 milliards du budget total. Il a confirmé que son gouvernement était décidé à mobiliser une aide internationale pour faciliter l'allégement de sa dette de 14,3 milliards de dollars par le jeu de l'Initiative en faveur des pays pauvres très endettés. L'ONUCI continuera d'aider le Gouvernement ivoirien à mobiliser les donateurs pendant qu'il s'occupera de combler les lacunes structurelles des institutions ivoiriennes chargées du processus de paix. Elle aidera à assurer une bonne coordination des donateurs. Les organismes des Nations Unies continueront aussi à s'employer, en étroite collaboration avec le Gouvernement burkinais, à trouver des appuis financiers pour la facilitation du processus de paix.
XVI. Observations
56. D'importants progrès ont été réalisés dans l'application de l'Accord de Ouagadougou depuis la signature de ce dernier il y a près de deux ans, mais beaucoup reste à faire. Les parties ivoiriennes demeurent résolues à mettre en œuvre l'Accord, et le peuple ivoirien continue à jouir d'une paix et d'une stabilité relatives. Les progrès accomplis dans l'identification de la population, qui est au cœur de la crise ivoirienne, sont très encourageants. Il y a lieu de louer les parties de ces avancées constantes et de la participation élevée observée à Abidjan, où 2 078 000 personnes ont été enregistrées en moins de trois mois. Je me félicite de les voir fermement déterminées à ce que ces importantes opérations s'étendent au reste du pays. À l'avenir, il sera essentiel de préserver le calme et la détermination manifestés jusqu'ici par le peuple ivoirien dans l'accomplissement des formalités d'identification et d'inscription sur les listes électorales. 57. Je me réjouis du consensus auquel les parties ivoiriennes ont abouti au sujet des modalités de règlement des principales questions militaires et questions de sécurité en suspens, qui a été officialisé par le quatrième accord complémentaire de l'Accord de Ouagadougou. Ces questions ont antérieurement entravé la réalisation de progrès tangibles dans le désarmement des ex-combattants et le démantèlement des milices, c'est pourquoi j'encourage les signataires de l'Accord à mettre rapidement en œuvre les dispositions de cet accord complémentaire, tout en veillant à ce que la solution convenue entre les parties soit à la fois adaptée au contexte ivoirien et conforme aux normes internationales établies pour le désarmement, la démobilisation et la réintégration des ex-combattants et des milices. L'application dans les délais voulus du quatrième accord complémentaire est indispensable pour éviter tout nouveau report des élections présidentielles, que les parties ivoiriennes lient désormais à la réussite des opérations de désarmement des ex-combattants des Forces nouvelles et de démantèlement des milices.
58. Pour préserver les progrès considérables réalisés jusqu'à présent par les parties, il sera nécessaire de régler au plus vite et dans la transparence les retards d'ordre technique et logistique qui ont conduit au report des élections présidentielles qui avaient été prévues pour le 30 novembre 2008. J'engage la Commission électorale indépendante à rendre public le plus tôt possible un nouveau calendrier électoral réaliste définissant les étapes clefs. Dès lors que les parties et le Facilitateur l'auront approuvé, ce nouveau calendrier devra être scrupuleusement respecté afin d'éviter de devoir prolonger une nouvelle fois les opérations électorales. Pendant ce temps, mon Représentant spécial continuera, au titre de son mandat de certification, à appuyer le processus électoral de sorte à en préserver le caractère sans exclusive et transparent. 59. Avec d'autres organismes des Nations Unies et partenaires internationaux, l'ONUCI continuera à offrir ses compétences et une assistance technique aux institutions ivoiriennes chargées de mener à bien les autres tâches prévues dans l'Accord de Ouagadougou et s'emploiera à mobiliser des fonds auprès de la communauté des donateurs pour promouvoir le désarmement des ex-combattants, le démantèlement des milices, la réunification des forces ivoiriennes de défense et de sécurité, le redéploiement de l'administration et le rétablissement de l'autorité de l'État. Le pays jouit actuellement d'une plus grande stabilité, mais le caractère délicat du processus électoral, en particulier durant la période qui suivra les élections, et la mise en œuvre des dernières tâches prévues dans l'accord de paix exigent que l'ONUCI maintienne ses capacités essentielles et un dispositif de dissuasion pour faire face aux risques potentiels. 60. L'ONUCI continuera à suivre les violations des droits de l'homme et à enquêter à leur sujet, en vue de contribuer aux efforts visant à mettre fin à l'impunité, s'agissant notamment de la violence à l'égard des femmes et des enfants, ainsi que de tout incident pouvant avoir une incidence sur la sécurité du processus électoral. Je demande aux parties ivoiriennes de mettre en place les mesures de confiance voulues pour prévenir ces violations, en particulier la violence électorale susceptible de compromettre la crédibilité des résultats. 61. Vu l'évolution encourageante de la situation en Côte d'Ivoire et compte tenu, cependant, des dernières tâches à exécuter au titre de l'Accord de Ouagadougou et des risques visés plus haut au paragraphe 45, je recommande au Conseil de sécurité de proroger le mandat de l'ONUCI pour une période de six mois allant jusqu'au 31 juillet 2009. Je recommande également de réduire d'un bataillon l'effectif de l'ONUCI et de modifier son dispositif et sa configuration comme indiqué aux paragraphes 46 à 54. Les ajustements proposés devraient permettre à l'Opération d'apporter une assistance aux parties ivoiriennes pour mener à bien les dernières taches prévues dans l'accord de paix, tout en préservant sa capacité de faire face à de nouveaux problèmes de sécurité. Je recommande en outre au Conseil d'adopter les objectifs de réduction des effectifs de l'ONUCI décrits au paragraphe 47. Ces objectifs ont été définis sur la base d'une analyse attentive de la situation sur le terrain et d'une évaluation des conditions nécessaires au retour à la normale en Côte d'Ivoire. Je compte, au cas où le Conseil approuverait les propositions susvisées, faire périodiquement le point de la reconfiguration des forces de l'ONUCI et des progrès réalisés par les parties ivoiriennes dans la réalisation des objectifs fixés. 62. Comme indiqué plus haut, au paragraphe 52, le renforcement temporaire de l'ONUCI, dans le cadre d'une coopération entre missions avec la MINUL, pourra s'avérer nécessaire immédiatement avant, pendant et après les élections, sous la forme d'une capacité d'appui militaire et aérienne, conformément à la résolution 1609 (2005) du Conseil de sécurité. 63. Pour conclure, je voudrais exprimer ma gratitude à mon Représentant spécial pour la Côte d'Ivoire, Choi Young-Jin, et à l'ensemble du personnel militaire et civil et des fonctionnaires de police de l'ONUCI, qui continuent résolument à appuyer le processus de paix. Je suis également reconnaissant au Facilitateur du processus de paix ivoirien, le Président du Burkina Faso, Blaise Compaoré, et à son représentant spécial à Abidjan, Boureima Badini, des efforts qu'ils déploient inlassablement. Enfin, je remercie tous les pays fournisseurs de contingents et d'effectifs de police, la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest, l'Union africaine, les organismes, fonds et programmes des Nations Unies, les organisations humanitaires et les donateurs multilatéraux et bilatéraux, ainsi que les organisations non gouvernementales internationales et locales, de leurs contributions importantes au rétablissement de la paix et de la stabilité en Côte d'Ivoire.
Introduction
1. Par sa résolution 1826 (2008), le Conseil de sécurité a prorogé le mandat de l'Opération des Nations Unies en Côte d'Ivoire (ONUCI) et de la force française Licorne, et m'a prié de lui rendre compte de la situation en Côte d'Ivoire et de lui présenter des critères pour une éventuelle réduction progressive des effectifs militaires de l'ONUCI, à la lumière de l'évolution du processus électoral et de la situation sur le terrain, en particulier des conditions de sécurité. Le présent rapport rend compte des principaux événements survenus dans le pays depuis mon rapport du 13 octobre 2008 (S/2008/645) ainsi que des conclusions d'une mission d'évaluation technique qui s'est rendue en Côte d'Ivoire du 10 au 14 décembre 2008. II. Situation sur le plan de la sécurité
2. La situation sur le plan de la sécurité est restée stable dans l'ensemble. Le démantèlement de la zone de confiance, qui s'est achevée dans de bonnes conditions en juillet 2008 a rétabli la liberté de circulation des personnes, des biens et des services dans tout le pays et a contribué à l'amélioration globale de la situation sur le plan de la sécurité. Toutefois, l'existence continue de milices armées et de groupes de jeunes violents, le cantonnement incomplet des ex-combattants des Forces nouvelles, les difficultés rencontrées par le Gouvernement pour payer les allocations des ex-combattants des Forces nouvelles cantonnés, ainsi que le fait que les commandants de zone des Forces nouvelles continuent d'exercer un contrôle sur l'administration locale dans le nord, notamment la perception des recettes, sont autant de facteurs qui continuent de témoigner de la fragilité de la situation sur le plan de la sécurité dans le pays. 3. De fréquentes manifestations d'unités militaires exigeant le paiement de leurs indemnités ont été signalées aussi bien dans les zones contrôlées par les Forces nouvelles que dans celles contrôlées par le Gouver-nement. Par ailleurs, le 24 novembre, des partisans présumés d'un ancien commandant de zone des Forces nouvelles, Zacharia Koné, ont attaqué les dirigeants des Forces nouvelles installés récemment à Séguéla. Dans un autre incident survenu le 6 octobre à Abidjan, des éléments armés non identifiés ont attaqué la résidence du Ministre de la construction, de l'urbanisme et de l'habitat, M. Marcel Amon Tanoh, et se sont enfuis après un échange de tirs avec les gardes. Des perturbations des opérations d'identification des populations et d'inscription sur les listes électorales ont également été signalées, notamment le 10 octobre, date à laquelle des jeunes de la Fédération estudiantine et scolaire de Côte d'Ivoire (FESCI) ont saccagé trois bureaux d'inscription des électeurs à Abidjan et confisqué le matériel.
4. Des affrontements intercommunautaires ayant pour motif des questions foncières ont été signalés dans le district d'Abidjan, à Bondoukou, à Yocoboué et dans plusieurs villages de la région de Bas Sassandra. Ils ont opposé des personnes déplacées de retour au pays et les populations locales, et ont fait au moins 19 morts, 43 blessés et 400 personnes déplacées. D'autres incidents de sécurité ont été signalés, notamment actes de banditisme, assassinats, embuscades, cambriolages et violences sexuelles, y compris des viols. L'action menée par les services de maintien de l'ordre pour réduire la criminalité a continué d'être entravée par les problèmes d'ordre logistique, financier et humain auxquels sont aux prises les institutions nationales de sécurité et par la prolifération des armes dans le pays. III. Mise en œuvre de l'Accord de Ouagadougou. L'Accord de Ouagadougou du 4 mars 2007 cherchait à régler la crise en Côte d'Ivoire en supprimant la zone de confiance qui divisait le pays; en restaurant l'autorité de l'État et en redéployant l'administration sur l'ensemble du territoire national; en démantelant les milices, en désarmant les combattants et en les enrôlant dans un programme de service civique; en procédant à l'unification des Forces nouvelles et des forces de défense et de sécurité de Côte d'Ivoire; en simplifiant et accélérant l'identification des populations afin de faciliter l'inscription des électeurs sur les listes électorales; et en organisant une élection présidentielle libre, ouverte, démocratique et transparente. Deux accords complémentaires de l'Accord de Ouagadougou ont été signés en novembre 2007, l'un portant désignation d'une société française, la SAGEM, en qualité d'opérateur technique pour l'opération d'identification et pour l'inscription sur les listes électorales, et l'autre établissant un nouveau calendrier pour la mise en œuvre des principales opérations restantes, à savoir l'unification des forces armées, le désarmement et la réinsertion des combattants, la restauration de l'autorité de l'État, l'identification des populations, l'inscription sur les listes électorales et la tenue des élections. Le 22 décembre, le Président Gbagbo et le Premier Ministre, M. Guillaume Soro, ont signé un autre accord complémentaire qui a été facilité par le Président du Burkina Faso, Blaise Compaoré. Cet accord complémentaire précise les modalités et le calendrier pour la conduite, avant les élections, des opérations de désarmement des ex-combattants des Forces nouvelles et le démantèlement des milices, le lancement du processus de réunification des forces de défense et de sécurité ivoiriennes et l'achèvement, le 15 janvier 2009 au plus tard, du redéploiement de l'administration publique dans l'ensemble du pays, y compris du corps préfectoral, de l'appareil judiciaire et des administrations fiscales et douanières. 5. Le 10 novembre, le Facilitateur du processus de paix ivoirien, le Président Blaise Compaoré du Burkina Faso, a convoqué à Ouagadougou la quatrième réunion du Cadre permanent de concertation qui avait été créé en vertu de l'Accord de Ouagadougou pour examiner tout problème qui se poserait dans l'application de l'Accord. Le Cadre de concertation, qui se compose du Président Gbagbo, du Premier Ministre, Guillaume Soro, ainsi que du Président du Rassemblement des républicains, Alassane Ouattara, et du Président du Parti démocratique de Côte d'Ivoire, Konan Bédié, a constaté qu'il n'était pas possible de tenir les élections présidentielles le 30 novembre 2008 du fait des retards d'ordre logistique et technique qui avaient été accumulés. Il a demandé à la Commission électorale indépendante de fixer, avant le 31 décembre 2008, un calendrier précis pour l'identification des populations et l'inscription sur les listes électorales, sur la base duquel les partis conviendraient d'une nouvelle date pour le premier tour des élections présidentielles. A. Réunification du pays
7. Aux termes de l'Accord de Ouagadougou et des accords complémentaires, le Centre de commandement intégré a notamment pour mission d'assurer le maintien de l'ordre dans l'ex-zone de confiance et de sécuriser le processus de paix, y compris le redéploiement de l'administration publique dans l'ensemble du pays. Il est également responsable de l'unification et de la restructuration des forces de défense et de sécurité de Côte d'Ivoire, notamment de la création d'unités de police mixtes. Si le Centre de commandement intégré a mis en place des unités de police mixtes dans les secteurs situés précédemment dans la zone de confiance, l'unification des forces de défense et de sécurité de Côte d'Ivoire et des Forces nouvelles piétinait jusqu'à la signature du quatrième accord complémentaire le 22 décembre, essentiellement en raison du désaccord qui continue d'exister sur le nombre des membres du personnel des Forces nouvelles à intégrer dans la nouvelle armée nationale et les grades à leur attribuer. Aux termes du quatrième accord complémentaire, 4 000 membres du personnel des Forces nouvelles devraient immédiatement, mais à titre temporaire, intégrer la police et la gendarmerie ivoiriennes pour assurer la sécurité pendant le processus électoral, et 5 000 éléments des Forces nouvelles devraient être intégrés à l'armée unifiée au cours des deux prochaines années. L'ONUCI et la force Licorne continuaient de maintenir une capacité d'appui au sein du Centre de commandement intégré, qui est composé de personnel militaire, de personnel de police et de personnel civil, pour fournir un appui logistique et aider le Centre dans ses activités de planification et de coordination.
8. Au 15 décembre, les effectifs du Centre de commandement intégré étaient de 518 membres du personnel militaire provenant des forces gouvernementales et des Forces nouvelles avec 260 éléments basés à Yamoussoukro et 258 éléments déployés dans l'ex-zone de confiance. Bien que les capacités de transmissions et la mobilité du Centre se soient quelque peu améliorées, ses opérations ont continué d'être entravées par des problèmes financiers et logistiques. Autre fait nouveau intervenu dans le cadre de la sécurisation des opérations d'identification des populations et d'inscription sur les listes électorales, plus de 220 éléments des forces gouvernementales ont été déployés dans le nord tandis que des éléments des Forces nouvelles qui étaient déployés dans le sud sont retournés dans leurs bases dans le nord le 3 décembre 2008. B. Désarmement, démobilisation et réinsertion des ex-combattants et démantèlement des milices. 9. Les progrès en matière de regroupement et de démobilisation des ex-combattants des Forces nouvelles et de démobilisation des milices ont été lents. Au cours de la période considérée, 405 combattants des Forces nouvelles seulement ont été enregistrés et démobilisés à Bouaké, portant le nombre total d'ex-combattants enregistrés à 11 769, dont 7 704 ont opté pour la réinsertion. Le quatrième accord complémentaire prévoit le désarmement des ex-combattants des Forces nouvelles et des milices pro-gouvernementales au moins deux mois avant les élections, le Gouvernement versant une prime de démobilisation de 1 000 dollars à ceux qui sont admis par le Centre à en bénéficier. 10. Les institutions nationales chargées d'assurer la réintégration et la réinsertion des ex-combattants et des milices ont continué de rencontrer des problèmes d'ordre financier et logistique. Le Programme national de réinsertion et de réhabilitation communautaire (PNRRC) n'a reçu du Gouvernement que 10 millions de dollars sur
les 32,5 millions attendus en 2008 et aucune contribution directe des donateurs, ce qui a considérablement entravé ses activités, tandis que le Programme de service civique national (PSCN) a dû reporter à 2009 ses principaux projets de réinsertion. De ce fait, les deux programmes ont assuré seulement la réinsertion de 675 et 329 ex-combattants, respectivement. Afin d'aider les parties à surmonter ces difficultés, l'ONUCI a lancé, en collaboration avec le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), 98 microprojets dont ont bénéficié 842 ex-combattants au cours de la période considérée. 11.Parallèlement, il ressort d'une évaluation commne de la Mission des Nations Unies au Libéria (MINUL), de l'ONUCI et du PNUD, portant essentiellement sur les milices se trouvant au Libéria, que 1 500 à 2 000 ex-combattants libériens se trouvaient encore à la frontière libérienne et devaient être surveillés attentivement.
C. Redéploiement de l'administration sur l'ensemble du territoire
Si des progrès considérables ont été accomplis en matière de redéploiement des agents de l'État dans le nord, les progrès ont été limités en ce qui concerne la restauration des capacités opérationnelles et de la pleine autorité des responsables de l'administration publique, en raison du peu d'empressement des commandants de zone des Forces nouvelles à céder le contrôle de l'administration locale et de problèmes d'ordre financier et technique. Parallèlement, les institutions chargées de l'application des lois, de l'appareil judiciaire et du système pénitentiaire ne sont toujours pas fonctionnelles dans le nord, un seul magistrat ayant été désigné jusqu'à présent pour 10 districts. Le quatrième accord complémentaire prévoit la restauration totale de l'administration publique sur l'ensemble du territoire national avant le 15 janvier 2009, y compris le système judiciaire et l'administration fiscale, avec l'aide de l'ONUCI qui fournira des services de sécurité. 13. Les conditions de sécurité épouvantables qui règnent dans les prisons ont continué d'être une menace pour la sécurité publique malgré la remise en état de 18 établissements pénitentiaires dans le pays. Dans une série de trois grandes évasions de détenus intervenues au cours de la période considérée, plus de 70 prisonniers se sont échappés des prisons de Man, de Séguéla et de Bouaké. Cette tendance souligne combien il importe de redéployer de toute urgence les services judiciaires et pénitentiaires dans le nord du pays. Parallèlement, dans le sud contrôlé par le Gouvernement, deux prisonniers auraient été tués et six gravement blessés, à
la suite d'une mutinerie à la prison centrale d'Abidjan le 13 décembre. D. Identification des populations, inscription sur les listes électorales et processus électoral 14. Le processus d'identification des populations et d'inscription sur les listes électorales qui a été lancé le 15 septembre a été progressivement étendu à Abidjan le 29 septembre, à Bouaké le 18 novembre et à 57 autres districts à la mi-décembre 2008. Le 14 décembre, le processus était achevé dans le district d'Abidjan où 2 078 000 personnes ont été identifiées. À l'échelle nationale, près de 2,8 millions de personnes étaient identifiées et environ 3 000 sites avaient été ouverts fin décembre. Le processus a continué d'être entravé par de graves problèmes d'ordr logistique, financier et procédural. L'ONUCI a contribué à faire face aux graves problèmes logistiques en fournissant, à la demande de la Commission électorale indépendante et de l'Institut national de la statistique, d'importants moyens logistiques pour assurer le transport, notamment aérien, des agents d'identification et de leur matériel dans le cadre d'un projet intitulé « Opération transport ».
15. L'inventaire des 351 888 registres d'état civil identifiés jusqu'à présent, y compris ceux qui ont été perdus ou détruits pendant la crise, a été publié le 15 décembre. La reconstitution des registres devrait s'achever en février 2009, pour permettre aux intéressés de s'inscrire sur les listes électorales avant la fin des opérations d'inscription des électeurs. IV. Déploiement de l'Opération des Nations Unies en Côte d'Ivoire A. Composante militaire
16. Au 15 décembre 2008, l'effectif militaire de l'ONUCI se composait de 8 020 personnes, dont 7 741 soldats, 191 observateurs militaires et 88 officiers d'état-major, l'effectif total autorisé étant de 8 115 personnes. Cet effectif comprend actuellement 103 femmes. La force Licorne, avec son effectif de 1 800 personnes, continue de mettre des moyens d'intervention rapide à la disposition de l'ONUCI. Celle-ci a entrepris de regrouper ses contingents dans 24 camps, une opération qui devrait s'achever en février 2009. Deux camps sont en construction, l'un à Divo, l'autre à Issia; celui d'Adzopé a été terminé en décembre. Il faut signaler à ce sujet que la mission d'évaluation technique récente dont il est rendu compte plus loin a recommandé une plus forte concentration des bataillons. Avec le démantèlement de la ligne verte, la force a cherché à accroître sa mobilité pour faciliter l'application de l'Accord de Ouagadougou, y compris le processus électoral. Elle mène des patrouilles conjointes et synchronisées avec la MINUL le long de la frontière avec ce pays et a tenu plusieurs réunions de coordination et de liaison avec les autorités du Burkina Faso, du Ghana et de la Guinée en vue de renforcer les dispositifs de sécurisation de la frontière avant les élections. B. Composante de police
17. Au 15 décembre 2008, l'effectif de police de l'ONUCI comptait 1 137 personnes pour un effectif total autorisé de 1 200, et se composait de 387 conseillers pour les questions de police et de 750 personnes appartenant à six unités de police constituées. Cet effectif comprenait 20 femmes. La composante de police a continué d'apporter son soutien à la Police nationale ivoirienne sur l'ensemble du territoire, de lui donner des conseils stratégiques et de contribuer de manière générale à assurer la sécurité du processus de paix. Elle a aidé les 600 auxiliaires de police des Forces nouvelles formés par elle en 2006 à mener des enquêtes dans le nord du pays. En collaboration avec les parties prenantes, 30 projets de renforcement des capacités des institutions ivoiriennes de maintien de l'ordre ont été entrepris, en particulier dans les domaines de la criminalistique et des opérations antiémeutes. V. Situation humanitaire
18. Plutôt que de lancer une procédure d'appel global pour 2009, les organismes humanitaires présents en Côte d'Ivoire ont jugé préférable d'actualiser leur stratégie et de faire le point des ressources additionnelles exigées pour certaines activités, comme la protection et la réinsertion des personnes déplacées dans l'ouest du pays et l'amélioration de l'état nutritionnel des populations vulnérables dans le nord. Le Bureau de la coordination des affaires humanitaires a signalé que 76 000 personnes déplacées environ étaient rentrées volontairement dans leurs villages dans l'ouest du pays mais qu'en décembre 2008, on en dénombrait encore quelque 45 000 qui vivaient dans des familles d'accueil et avaient besoin d'une assistance. Les organismes d'aide humanitaire et les autorités ivoiriennes ont continué de collaborer à l'instauration de conditions propices à la réinstallation durable de quelque 120 000 personnes déplacées dans l'ouest du pays, en s'efforçant de remédier au manque de cohésion sociale et de régler d'interminables conflits fonciers. Par ailleurs, pour faire face aux pénuries alimentaires dans le nord, le Fonds central d'intervention pour les urgences humanitaires a affecté 1 million de dollars au Programme alimentaire mondial et au Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) fin octobre, afin de financer des projets de soins thérapeutiques et nutritionnels en faveur des enfants. Enfin, par souci de cohérence, des bureaux auxiliaires communs aux organismes des Nations Unies ont été ouverts à Guiglo et à Korhogo afin de faciliter la planification et la coordination des activités qui marqueront le passage de la phase de secours d'urgence à la phase de relèvement et de développement. VI. Droits de l'homme
19. La période considérée a de nouveau été marquée par de très graves violations des droits de l'homme, notamment des attaques perpétrées contre des civils par des individus armés, dont plusieurs se sont produites sur les axes Duékoué-Bangolo et Guiglo-Tai, dans l'ouest du pays, ainsi que dans les villes contrôlées par les Forces nouvelles. On a signalé de nombreux cas où les assaillants ont tendu des embuscades sur la route à des véhicules de transport public, pénétré de force dans des maisons particulières et violé des femmes et des filles, autant d'atteintes aux droits fondamentaux à la vie, à l'intégrité physique, à la sûreté, à la liberté de mouvement et à la propriété. Diverses violations ont également été relevées dans les zones contrôlées par les Forces nouvelles - extorsion, exécutions illégales, arrestations arbitraires, mises au secret, torture et mauvais traitements - ainsi que des atteintes aux droits de propriété et à la liberté d'expression et d'opinion. Des éléments des Forces nouvelles ont également commis de graves violations des droits de l'homme contre des éléments démobilisés à Vavoua, Séguéla, Korhogo et Bouaké, lors d'affrontements entre des factions rivales.
20. Des femmes ont été victimes d'actes de violence telle que viols, mariages forcés et traite, en particulier dans l'ouest du pays et dans la région de Vavoua. Le fait qu'une proportion très faible seulement des auteurs de ces actes font l'objet de poursuites reste un problème majeur. Un autre sujet de préoccupation est l'attitude des forces de maintien de l'ordre à l'égard des civils dans le sud du pays, où elles continuent de faire un usage excessif de la force, de recourir à la torture et d'infliger d'autres mauvais traitements. 21. En octobre, on a signalé que des membres de la FESCI avaient attaqué un professeur d'université à Abidjan et que des manifestations avaient fait des blessés, entraîné divers dégâts et obligé à fermer les écoles pendant plusieurs jours dans la préfecture de Daloa. Bien que les nouveaux dirigeants de la Fédération estudiantine se déclarent partisans de la non-violence, des extrémistes de leurs groupements et du mouvement des Jeunes patriotes ont de nouveau semé le trouble dans les universités et les écoles un peu partout dans le pays. Le 14 novembre 2008, l'ONUCI a reçu pour la première fois une visite des dirigeants de la FESCI, qui lui ont confirmé qu'ils voulaient participer de manière constructive au processus de paix ivoirien. Elle a l'intention de maintenir le dialogue avec la Fédération et les autres mouvements de jeunes. VII. Situation des femmes
22. Conformément aux résolutions 1325 (2000) et 1820 (2008) du Conseil de sécurité sur les femmes et la paix et la sécurité, l'ONUCI a continué d'incorporer une démarche soucieuse d'équité entre les sexes dans ses politiques et programmes et a dispensé une formation à la question de la parité des sexes aux militaires, au personnel de police et au personnel civil. L'Opération a également dispensé une formation et apporté un appui technique à des groupes de femmes qui encouragent les femmes à participer aux élections, et a aidé les institutions nationales à mener à bien une campagne de 16 jours sur la violence à l'égard des femmes. L'Opération a également collaboré avec l'association féminine des Forces nouvelles, dont 569 ex-combattantes ont manifesté le souhait de bénéficier des possibilités de réinsertion. VIII. Protection des enfants
23. Pour donner suite aux résolutions du Conseil de sécurité sur les enfants et les conflits armés, en particulier la résolution 1612 (2005), l'ONUCI a continué d'inclure de manière systématique un volet protection des enfants dans toutes ses activités. De janvier à décembre 2008, l'Opération a organisé 204 stages de formation et de sensibilisation à l'intention de différents partenaires ivoiriens et des membres de son propre personnel, qui ont été 6 068 à les suivre. Conformément aux dispositions adoptées par le Groupe de travail du Conseil de sécurité sur les enfants et les conflits armés, l'ONUCI a intensifié sa campagne de sensibilisation auprès des parties au conflit pour les inciter à prendre des mesures contre les violences sexuelles infligées à des enfants, notamment à formuler un plan d'action national pour la protection des enfants en situation de conflit armé. IX. VIH/sida
24. L'ONUCI a poursuivi l'intégration de la sensibilisation au VIH/sida dans ses activités. Pendant la période considérée, 4 071 membres de son personnel ont suivi des séances de sensibilisation à cette question, 219 nouveaux «pairs éducateurs» ont reçu une formation leur permettant de sensibiliser à leur tour leurs collègues au sein de leurs bataillons respectifs et 2 137 membres du personnel ont bénéficié de services de soutien psychologique et de dépistage volontaire. Dans le cadre d'un projet pour la prévention des maladies sexuellement transmissibles chez les travailleuses du sexe et les membres des forces armées ivoiriennes, réalisé en commun par l'ONUCI et le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), l'infrastructure des services de santé du Ministère de la défense a fait l'objet d'une évaluation pour déterminer les besoins et un programme de formation sur les maladies sexuellement transmissibles et la violence sexiste a été mis sur pied. L'Opération a également poursuivi, en collaboration avec le PNUD et le FNUAP, l'exécution d'un projet commun sur le VIH/sida dans le cadre du processus de désarmement, de démobilisation et de réintégration. X. Relèvement économique
25. L'économie ivoirienne a continué de se redresser et la croissance du produit intérieur brut (PIB), stimulée principalement par l'augmentation de la production de pétrole et les investissements étrangers, devrait être de 2,9 % en 2008. Toutefois, le taux d'inflation moyen annuel devrait atteindre 4,7 % à la fin de 2008 en raison de la forte hausse des prix internationaux des aliments et de l'énergie. La bonne tenue des cours des produits de base au premier semestre de 2008 devrait se traduire par un excédent de la balance des comptes courants équivalant à 4,7 % du PIB à la fin de l'année mais, en raison de leur baisse récente, on pense que l'année 2009 se soldera par un déficit budgétaire égal à 1,7 % du PIB. Les prévisions économiques pour 2008-2009 restent étroitement liées à la situation politique, ainsi qu'à la crise financière mondiale qui aura probablement une incidence négative. Il faudrait procéder d'urgence à des réformes structurelles, notamment dans les domaines de la gouvernance et de la fiscalité (taxation et collecte des impôts). Pour relancer une économie dont le relèvement est resté jusque-là limité, il faudrait que les perspectives de règlement des arriérés s'améliorent rapidement et que les autorités s'efforcent pour cela d'obtenir de nouvelles contributions des donateurs et d'utiliser les économies résultant de la réduction du service de la dette. XI. Comportement du personnel et discipline
26. L'ONUCI a redoublé d'efforts pour prévenir tout comportement répréhensible et a continué d'enquêter sur le bien-fondé des plaintes formulées à ce sujet. Afin de faire mieux connaître les dispositions visant à prévenir les cas d'exploitation et d'abus sexuels, elle a organisé un atelier à l'intention des organisations non gouvernementales locales et de l'équipe de pays des Nations Unies et mené dans les secteurs une mission d'établissement des faits qui l'a aidée à prendre des mesures pour atténuer les risques. Elle a poursuivi les consultations avec les membres de son personnel au sujet de ma circulaire interdisant la discrimination, le harcèlement, y compris le harcèlement sexuel, et l'abus de pouvoir XII. Suivi des médias et information
27. La radio de la mission, ONUCI-FM, a continué ses émissions sur le processus de paix, afin notamment d'informer ses auditeurs des opérations d'identification et d'inscription sur la liste électorale. L'ONUCI a également poursuivi sa campagne d'information visant à sensibiliser la population ivoirienne à différentes questions, telles que la protection des droits de l'homme, la culture de paix et la cohésion sociale, et a organisé dans ce cadre des réunions publiques, des ateliers et, avec le concours d'artistes, des spectacles itinérants qui ont été donnés dans 15 lieux différents. L'Opération a également appuyé les activités menées par la société civile et les organisations non gouvernementales pour lutter contre la violence sexiste. 28. Les difficultés d'accès aux médias publics ont persisté. La Radio télévision ivoirienne, en particulier, a continué de couvrir de façon très inégale les activités du camp présidentiel et celles de l'opposition. Et en dépit de nombreuses promesses, les médias ivoiriens n'ont pas fait grand-chose pour adhérer à un code de conduite pendant le processus électoral. XIII. Sûreté et sécurité du personnel
29. Comme on l'a indiqué plus haut, la situation dans le pays peut être considérée comme généralement stable. Cette stabilité est toutefois très précaire comme l'ont montré les incidents et manifestations décrits aux paragraphes 2 à 4. L'ONU n'était pas particulièrement visée, mais il est arrivé que ces événements violents perturbent les activités de son personnel et l'exécution de ses programmes. Les mesures de sécurité visant à protéger le personnel des Nations Unies continuent d'être appliquées de manière très stricte. XIV. Incidences financières
30. Par sa résolution 62/254, l'Assemblée générale a ouvert des crédits d'un montant de 475,4 millions de dollars pour financer les activités de l'ONUCI pendant l'exercice allant du 1er juillet 2008 au 30 juin 2009. Si le Conseil de sécurité décide de proroger le mandat de l'Opération au-delà du 31 janvier 2009, les ressources nécessaires à la poursuite de l'Opération jusqu'au 30 juin 2009 seront limitées aux montants approuvés par l'Assemblée. Au 30 septembre 2008, le montant non acquitté des contributions au Compte spécial de l'ONUCI s'élevait à 231 millions de dollars. Le montant total des contributions non acquittées pour l'ensemble des opérations de maintien de la paix s'élevait à cette date à 4 014 100 000 dollars. Les dépenses afférentes aux contingents et à leur matériel ont été remboursées pour les périodes allant jusqu'au 30 novembre 2008 et jusqu'au 30 juin 2008, respectivement. XV. Mission d'évaluation technique
31. À la demande de mon Représentant spécial, une mission d'évaluation technique dirigée par le Sous-Secrétaire général aux opérations de maintien de la paix, Edmond Mulet, et comprenant des représentants du Département des opérations de maintien de la paix, du Département des affaires politiques, du Haut- Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme et du Département de la sûreté et de la sécurité, s'est rendue en Côte d'Ivoire où elle a séjourné du 10 au 14 décembre pour étudier le rôle de l'ONUCI dans le processus de paix, en prévision de l'examen du mandat et des effectifs respectifs de l'ONUCI et des forces françaises que le Conseil de sécurité a l'intention d'effectuer avant le 31 janvier 2009. 32. La mission d'évaluation a reçu des éléments d'information détaillés de l'ONUCI, de l'équipe de pays des Nations Unies et de la force française Licorne. Elle a consulté un grand nombre de parties prenantes, nationales et internationales, dont le Président Gbagbo et le Premier Ministre Soro, les dirigeants de l'opposition (M. Bedié et M. Ouattara), les chefs d'état-major des Forces de défense et de sécurité de Côte d'Ivoire et des Forces nouvelles, le Président de la Commission électorale indépendante, des membres de la communauté diplomatique (y compris les représentants de l'Union africaine, de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest et de l'Union européenne), ainsi que des représentants de la société civile et du secteur privé. Les membres de la mission d'évaluation ont également rencontré le Facilitateur du processus de paix ivoirien, le Président Compaoré, du Burkina Faso, le 13 décembre à Ouagadougou, et des dirigeants français à Paris le 15 décembre. A. Processus électoral. Toutes les parties ivoiriennes ont redit à la mission d'évaluation leur attachement au principe de la tenue d'élections le plus tôt possible en 2009. Elles ont insisté sur la nécessité de veiller à ce que les conditions nécessaires pour que les élections soient crédibles et transparentes soient réunies avant de fixer une nouvelle date pour l'élection présidentielle. À ce propos, tous les interlocuteurs ont fait observer que c'était au Gouvernement et à la Commission électorale indépendante de mettre en place sans tarder les équipes d'identification et d'inscription sur les listes électorales avant la fin du mois de décembre, afin que le tout soit terminé avant la fin du mois de février 2009. Le Président de la Commission a informé la mission d'évaluation que les chances de terminer les inscriptions sur les listes électorales avant fin février 2009 dépendraient de la possibilité qu'aurait le Gouvernement de débourser immédiatement les 15 millions de dollars nécessaires pour déployer à travers tout le pays les 4 000 équipes restantes d'identification et d'inscription sur les listes électorales. 34. La mission d'évaluation a été informée qu'à la fin de la phase d'identification et d'inscription sur les listes électorales, la Commission électorale indépendante établirait une liste provisoire des électeurs, si possible pour la fin février 2009, après quoi une nouvelle date pourrait être fixée pour les élections. En ce qui concerne la publication des listes électorales définitives, la Commission comptait prévoir 30 à 40 jours pour l'examen des recours, mais le Premier Ministre, M. Soro, estime qu'il serait préférable de s'en tenir au délai de trois mois prévu par la Constitution ivoirienne pour l'examen des recours entre la publication des listes électorales provisoires et celle des listes définitives, afin de renforcer la transparence et la crédibilité du processus. La prolongation du délai permettrait de terminer le redéploiement, dans le nord du pays, du personnel judiciaire qui devrait jouer un rôle déterminant dans l'examen des recours, comme le prévoit le quatrième accord complémentaire, ainsi que la mise en place d'une police et d'une gendarmerie nationales unifiées et intégrées, couvrant la totalité du pays. Une fois que la Commission aura établi les listes électorales définitives, toutes les parties prenantes se sont accordées à penser qu'il faudrait réserver dans le calendrier des élections une période incompressible de deux à trois mois pour la production et la distribution des cartes d'identité et d'électeur. 35. Cela étant posé, la mission d'évaluation a conclu, même si toutes les parties restaient fermement attachées à la tenue d'élections, avant la fin du premier semestre 2009, on ne pouvait pas exclure la possibilité de retards supplémentaires. Vu que le quatrième accord complémentaire prévoit que le désarmement des ex combattants des Forces nouvelles et le démantèlement des milices doivent être achevés deux mois avant les élections, la maîtrise du calendrier électoral est devenue encore plus problématique. 36. L'ONUCI s'attachera à faire saisir à la Commission électorale combien il importe de fixer ensemble, le plus tôt possible et compte tenu des dispositions du quatrième accord complémentaire, un calendrier électoral nouveau et réaliste, avec l'adhésion des parties ivoiriennes et de la communauté internationale, où soient définies toutes les étapes du processus, y compris l'achèvement des activités d'identification et d'inscription sur les listes électorales, la publication des listes électorales provisoire et définitive, la production des cartes d'identité et d'électeur et leur distribution dans tout le pays et la date de l'élection elle-même, comme l'a demandé le Conseil de sécurité dans la déclaration de son président en date du 7 novembre 2008 (S/PRST/2008/42). L'ONUCI est prête à aider la Commission électorale indépendante à établir un schéma directeur intégré pour le déroulement du processus électoral, et à lui apporter un soutien technique et logistique, ainsi qu'aux techniciens concernés, afin d'éviter que les élections soient de nouveau retardées. 37. L'ONUCI vérifiera que les parties se conforment au code de conduite électoral signé, en ma présence, le 23 avril 2008, et elle engagera les autres parties prenantes, y compris la presse et les associations de la société civile, à élaborer des mécanismes analogues, qui aident à faire régner un climat de stabilité politique pendant la période électorale. L'Opération aidera la société civile à organiser les
Journées du consensus national, début 2009, et à en faire la publicité. En outre, pour tenir compte des inquiétudes exprimées par de nombreuses parties prenantes à propos de la sécurité les jours qui suivront les élections, les Nations Unies continueront à appuyer les initiatives qui aident à préserver le climat d'ouverture qui caractérise le processus de paix. 38. Parallèlement, le principal souci de l'ONUCI restera la protection du processus de paix et du résultat des élections, qui doit être assurée grâce à l'exercice du mandat de certification de mon Représentant spécial. La mission d'évaluation a confirmé, à cet égard, que toutes les parties prenantes acceptaient que ce rôle soit attribué à mon Représentant spécial et insistaient sur son importance si l'on veut garantir la crédibilité et la transparence des élections, depuis l'établissement des listes électorales jusqu'à la proclamation des résultats. Dans cette perspective, l'ONUCI continuera de s'efforcer de sensibiliser toutes les parties et de maintenir le consensus sur la nature du mandat de certification et la façon de s'en acquitter. 39. Enfin, la mission mobilisera la communauté des donateurs afin qu'elle aide le Gouvernement ivoirien, financièrement, dans l'action qu'il mène pour exécuter les tâches qui restent à accomplir pour parvenir à la tenue en 2009 d'élections présidentielles et législatives crédibles et transparentes, surtout en ce qui concerne l'achèvement des opérations d'identification et d'inscription sur les listes électorales. L'ONUCI ne cessera pas de pousser le Gouvernement à débloquer en temps voulu les fonds dont les institutions ivoiriennes concernées ont besoin, y compris pour l'opération d'importance cruciale qui consiste à reconstituer les registres d'état civil disparus ou détruits, qui a été lancée par le Ministère de la justice en mai 2008 mais retardée par le manque de financement. L'ONUCI continuera également à aider les parties ivoiriennes à élaborer pour les élections un plan de sécurité intégré, traçant les limites des responsabilités des forces de défense et de sécurité ivoiriennes, des Forces nouvelles et des forces impartiales. B.Questions touchant à la sécurité
40. Toutes les parties prenantes du pays et de l'extérieur se sont accordées à penser que les parties devraient profiter du retardement des élections pour expédier le désarmement des ex-combattants et le démantèlement des milices dans des conditions de crédibilité et de transparence, et lancer la réunification et la réorganisation des forces de défense et de sécurité ivoiriennes, y compris par la réintégration des éléments des Forces nouvelles qui remplissent les conditions. Jusqu'à présent, 34 678 membres des Forces nouvelles ont été recensés, dont seulement 11 769 ont été soumis au « cantonnement». Les efforts déployés dans l'ouest pour disperser les milices ont été surtout symboliques, et les Forces nouvelles aussi bien que les milices y restent opérationnelles. 41. La mission d'évaluation a insisté sur la nécessité de mettre en place des mécanismes efficaces de contrôle des armes rendues par les ex-combattants. Il faut que le troisième accord complémentaire aussi bien que le quatrième, ainsi que les mandats relatifs à la supervision que les forces impartiales doivent assurer des sites de cantonnement, du stockage des armes et du démantèlement des milices, acceptés par les chefs d'état-major des forces de défense et de sécurité et des Forces nouvelles, ainsi que par les commandants de l'ONUCI et de la Force Licorne, soient appliqués rapidement. À cet égard, il convient de rappeler que les Forces nouvelles et les forces nationales de défense et de sécurité sont tenues de présenter des listes d'armes détaillées au centre de commandement intégré. En outre, il faut mettre au point un schéma général plus détaillé pour encadrer l'avenir du secteur de la sécurité en Côte d'Ivoire, qui comprenne notamment des garanties concernant la responsabilité, la transparence et le contrôle des institutions du secteur. Cela inspirait à toutes les parties prenantes la confiance nécessaire dans le dispositif de sécurité et les mécanismes de gouvernance en la matière. 42. La signature du quatrième accord complémentaire devrait certes aider à surmonter certains des obstacles au désarmement des ex-combattants, à la dispersion des milices et à la réunification des deux forces précédemment en guerre l'une contre l'autre. Cependant, la mission d'évaluation a confirmé que les capacités opérationnelles des institutions ivoiriennes auxquelles il revient d'organiser l'accomplissement de ces tâches et de les exécuter, c'est-à-dire le centre de commandement intégré, le Programme national de réinsertion et de réadaptation sociales et le Programme de service civique, dépendront aussi du renforcement de l'appui fourni par le Gouvernement ivoirien et les partenaires internationaux pour aider à surmonter les lacunes structurelles et financières. Le fait que le Gouvernement ivoirien sera ou non en mesure de réunir les fonds nécessaires pour payer les primes de démobilisation prévues par le quatrième accord complémentaire sera aussi déterminant pour la réussite de ces activités, surtout vu que les partenaires internationaux sont peu enclins à appuyer la formule des versements en liquide,l'expérience ayant souvent montré que ceux-ci n'étaient pas suffisants et n'étaient pas non plus un bon moyen de réintégrer durablement les ex-combattants. 43. En ce qui concerne l'intégration des ex-combattants des Forces nouvelles dans les services de sécurité, la mission d'évaluation a noté que 300 éléments des Forces nouvelles affectés mi-novembre aux unités de police mixtes chargées d'assurer la sécurité des activités d'identification et d'inscription sur les listes électorales à Abidjan étaient retournés à Bouaké le 3 décembre, au motif que le centre de
commandement intégré n'avait pas versé leurs primes. D'autre part, 600 auxiliaires de police formés par l'ONUCI n'ont été ni intégrés dans les services de sécurité nationaux, ni équipés pour aider à assurer le contrôle du nord du pays. La signature du quatrième accord complémentaire, qui prévoit la réintégration immédiate de ces 600 personnes dans la police et la gendarmerie ivoiriennes, devrait aider à accélérer les choses. C. Recommandations concernant le rôle que l'ONUCI peut jouer à l'appui de l'application de l'Accord de Ouagadougou
44. Toutes les parties prenantes ont estimé qu'il fallait que l'ONUCI reste dotée de ses capacités actuelles pour pouvoir contribuer au maintien d'un climat de sécurité en vue de l'application de l'Accord de Ouagadougou, en particulier pour ce qui es t du processus électoral. Les éléments suivants ont été jugés déterminants pour le retour du pays à la normale : l'achèvement du désarmement, de la démobilisation et de la réintégration des ex-combattants, le désarmement et le démantèlement des milices, la restauration complète de l'autorité de l'État, l'achèvement des opérations d'identification et d'inscription sur les listes électorales, la tenue d'une élection présidentielle crédible et transparente, la réunification et la réorganisation des forces de défense et de sécurité ivoiriennes et la réalisation de progrès sur le plan des droits de l'homme. 45. En même temps, la mission d'évaluation et l'ONUCI ont toutes les deux pensé qu'il serait possible d'ajuster les effectifs et la présence de la Mission sans remettre en question sa capacité, globalement, d'assurer la sécurité du processus de paix. Les modifications proposées tiendraient compte des menaces ci-après qui pèsent sur la sécurité : la persistance de l'existence de milices armées et de jeunes adeptes de la violence; le fait que certains ex-combattants ne sont pas effectivement désarmés; le caractère inachevé de la remise sur pied de l'administration publique; le risque d'affrontements localisés, dans le nord et dans l'ouest; la limitation de la liberté de mouvement due à la persistance des postes de contrôle et des barrages; le fait que les élections pourraient attiser la violence en Côte d'Ivoire, surtout si elles paraissaient manquer de crédibilité et de transparence. 46. La mission d'évaluation a avancé l'idée de réduire d'un bataillon l'effectif de l'ONUCI au moment de la prochaine relève, c'est-à-dire de le ramener de 8 115 à 7 450 hommes, étant entendu que la mobilité de la force serait accrue grâce à l'existence de capacités aériennes adéquates, notamment des hélicoptères d'appui supplémentaires, et compte tenu du maintien de l'appui fourni à l'ONUCI par les forces françaises, en matière de capacité d'intervention rapide. Dans cette hypothèse, la force de l'ONUCI tiendrait des positions moins nombreuses mais de manière plus concentrée, positions d'où un effectif suffisant peut être déployé sans perte de temps en détachement aéroporté d'intervention rapide. 47. D'autre part, la mission d'évaluation a constaté qu'il était difficile, vu les menaces et les difficultés qui s'annonçaient et l'incertitude qui pesait sur la rapidité du processus électoral, d'envisager de réduire plus fortement les effectifs de l'ONUCI avant d'avoir progressé dans des domaines soigneusement balisés et sur le plan des conditions de sécurité sur le terrain. À cette fin, elle a proposé les critères suivants comme conditions préalables à une réduction plus importante de l'effectif de la force : a) achèvement et crédibilité des activités de désarmement, de démobilisation et de réintégration des ex-combattants et démantèlement des milices;
b) bon déroulement des élections;
c) lancement de la réforme du secteur de la sécurité et en particulier de mesures de confiance s'inscrivant dans un cadre plus général d'une gouvernance et d'un contrôle démocratiques de ce secteur, réunification de l'armée et mise en place de forces armées ivoiriennes et de services de sécurité en état de fonctionnement, dans un esprit républicain;
d) restauration de l'autorité de l'État dans la totalité du pays. 48. Entre-temps, l'ONUCI continuera de s'occuper essentiellement d'aider les parties ivoiriennes à surmonter les difficultés et à réduire les risques énumérés plus haut, par les moyens suivants : a) en appuyant l'action menée par les parties ivoiriennes et le Facilitateur pour empêcher le processus de paix de déraper;
b) en contribuant à la sécurité du climat dans lequel se déroule ront les élections, notamment en obtenant que des progrès soient accomplis quant au désarmement effectif des ex-combattants et au démantèlement des milices, notamment en contrôlant le cantonnement des ex-combattants et le stockage des armes rassemblées; c) en apportant un appui technique et logistique au processus électoral et en surveillant le bon déroulement des différents processus qui aboutiront à des élections crédibles et transparentes;
d) en contribuant, par les activités de certification de mon Représentant spécial, au renforcement de la crédibilité du processus électoral;
e) en appuyant le redressement économique recherché par le gouvernement ivoirien. 49. Pour contribuer à l'établissement d'un climat de sécurité pour les élections, compte tenu de la modification proposée de son effectif et de sa présence, la composante militaire de la Mission ne cessera pas d'examiner son concept d'opérations et de l'adapter à l'évolution de la situation sur le terrain. Elle collaborera étroitement avec la force Licorne pour ce qui est d'aider les parties ivoiriennes sur le plan des conditions de sécurité dans lesquelles se dérouleront les élections, le désarmement, la démobilisation et la réintégration des ex-combattants, le désarmement et le démantèlement des milices, la réforme du secteur de la sécurité, particulièrement en ce qui concerne la réunification des forces de défense et de sécurité ivoiriennes, et la restauration de l'autorité de l'État. 50. La mission aidera à renforcer les capacités antiémeute de la police et de la gendarmerie ivoiriennes. À ce sujet, le quatrième accord complémentaire prescrit que 4 000 éléments des Forces nouvelles, dont les 600 auxiliaires de police formés par l'ONUCI en 2005, participeront immédiatement au dispositif de sécurité mis en place pour les élections, avec des éléments de la police et de la gendarmerie nationales et sous la supervision du centre de commandement intégré. 51. La mission aidera aussi les parties ivoiriennes à prévoir comment réaliser la réunification des forces de défense et de sécurité, y compris la police et la gendarmerie, et assurera, comme le prévoit le quatrième accord complémentaire se rapportant à l'Accord de Ouagadougou, la formation de base des éléments des Forces nouvelles se qualifiant pour être réintégrés dans les forces de défense et de sécurité.
52. Afin que sa présence reste forte et dissuasive pendant les élections, l'ONUCI se concertera avec la MINUL sur les arrangements possibles entre missions et étudiera, sans mettre en cause l'exécution du mandat de la MINUL ni la réduction progressive de son activité, la possibilité d'utiliser sa marge de manœuvre éventuelle pour déployer en renfort, pendant une durée limitée immédiatement avant, pendant et après les élections, un appui militaire et aérien. 53. La mission collaborera étroitement avec le Facilitateur pour s'assurer que les parties sont d'accord sur des arrangements permettant de contrôler efficacement les armes stockées, conformément au rôle de supervision confié à l'ONUCI et à la force Licorne aux termes de l'Accord de Ouagadougou et des accords complémentaires s'y rapportant, et pour offrir aux parties des solutions qui soient à la fois adaptées à la situation en Côte d'Ivoire et conformes aux normes internationales en matière de désarmement, de démobilisation et de réintégration. L'ONUCI poussera les parties ivoiriennes à préciser le rôle dévolu au Programme national de réintégration et réadaptation sociales et au Programme de service civique dans le nouveau plan de réintégration. Elle impliquera la communauté des donateurs dans la conception du processus. En outre, elle aidera à formuler un plan pour l'achèvement du démantèlement des milices qui subsistent dans l'ouest et à Abidjan, et elle aidera à élaborer un programme efficace de réintégration durable des ex-combattants, y compris sa stratégie de financement. Enfin, elle travaillera en étroite collaboration avec le Facilitateur et les parties ivoiriennes à l'étude des partenariats bilatéraux susceptibles d'aider le Gouvernement ivoirien à réformer les institutions du secteur de la sécurité. 54. L'ONUCI appuiera l'action menée par les autorités ivoiriennes pour mener à bien d'autres tâches d'importance critique, par exemple le redéploiement de l'administration publique et la restauration de l'autorité de l'État dans la totalité du pays, y compris dans les domaines judiciaire et pénitentiaire et en ce qui concerne l'état de droit. Elle continuera également à collaborer avec l'équipe de pays des Nations Unies, la Banque mondiale et d'autres partenaires internationaux pour promouvoir la cohésion sociale et la réconciliation des communautés, faciliter l'acheminement de l'aide humanitaire et appuyer le relèvement, particulièrement dans les régions nord et ouest. Elle assurera la promotion du processus de paix au moyen de ses capacités d'information. Elle et ses partenaires poursuivront leurs activités de contrôle portant sur la situation en Côte d'Ivoire sur le plan des droits de l'homme, en s'intéressant tout particulièrement aux femmes et aux enfants, en même temps qu'elle dotera les institutions nationales et la société civile de capacités de promotion et de protection des droits de l'homme.
D. Appui financier à la mise en œuvre de l'Accord de Ouagadougou et aide au redressement économique 55. Comme il a déjà été indiqué, la mission d'évaluation a constaté que la plupart des processus clefs prévus par l'Accord de Ouagadougou, y compris le processus électoral, continuaient à souffrir terriblement de grosses insuffisances de financement, ce qui mettait en danger les progrès déjà accomplis. En dépit de l'importance des recettes des industries du cacao et de l'huile dans le sud, le Gouvernement n'est pas encore en mesure de percevoir des rentrées dans le nord du pays, d'où un trou considérable dans son budget. De plus, le Premier Ministre a indiqué à la mission d'évaluation qu'en décidant de payer aux institutions financières internationales des arriérés qui s'élèvent à 440 millions de dollars pour l'année passée, en plus des 400 millions réservés au programme national de sortie de crise, le Gouvernement avait tiré un trait sur plus de 20 % des 4,4 milliards du budget total. Il a confirmé que son gouvernement était décidé à mobiliser une aide internationale pour faciliter l'allégement de sa dette de 14,3 milliards de dollars par le jeu de l'Initiative en faveur des pays pauvres très endettés. L'ONUCI continuera d'aider le Gouvernement ivoirien à mobiliser les donateurs pendant qu'il s'occupera de combler les lacunes structurelles des institutions ivoiriennes chargées du processus de paix. Elle aidera à assurer une bonne coordination des donateurs. Les organismes des Nations Unies continueront aussi à s'employer, en étroite collaboration avec le Gouvernement burkinais, à trouver des appuis financiers pour la facilitation du processus de paix.
XVI. Observations
56. D'importants progrès ont été réalisés dans l'application de l'Accord de Ouagadougou depuis la signature de ce dernier il y a près de deux ans, mais beaucoup reste à faire. Les parties ivoiriennes demeurent résolues à mettre en œuvre l'Accord, et le peuple ivoirien continue à jouir d'une paix et d'une stabilité relatives. Les progrès accomplis dans l'identification de la population, qui est au cœur de la crise ivoirienne, sont très encourageants. Il y a lieu de louer les parties de ces avancées constantes et de la participation élevée observée à Abidjan, où 2 078 000 personnes ont été enregistrées en moins de trois mois. Je me félicite de les voir fermement déterminées à ce que ces importantes opérations s'étendent au reste du pays. À l'avenir, il sera essentiel de préserver le calme et la détermination manifestés jusqu'ici par le peuple ivoirien dans l'accomplissement des formalités d'identification et d'inscription sur les listes électorales. 57. Je me réjouis du consensus auquel les parties ivoiriennes ont abouti au sujet des modalités de règlement des principales questions militaires et questions de sécurité en suspens, qui a été officialisé par le quatrième accord complémentaire de l'Accord de Ouagadougou. Ces questions ont antérieurement entravé la réalisation de progrès tangibles dans le désarmement des ex-combattants et le démantèlement des milices, c'est pourquoi j'encourage les signataires de l'Accord à mettre rapidement en œuvre les dispositions de cet accord complémentaire, tout en veillant à ce que la solution convenue entre les parties soit à la fois adaptée au contexte ivoirien et conforme aux normes internationales établies pour le désarmement, la démobilisation et la réintégration des ex-combattants et des milices. L'application dans les délais voulus du quatrième accord complémentaire est indispensable pour éviter tout nouveau report des élections présidentielles, que les parties ivoiriennes lient désormais à la réussite des opérations de désarmement des ex-combattants des Forces nouvelles et de démantèlement des milices.
58. Pour préserver les progrès considérables réalisés jusqu'à présent par les parties, il sera nécessaire de régler au plus vite et dans la transparence les retards d'ordre technique et logistique qui ont conduit au report des élections présidentielles qui avaient été prévues pour le 30 novembre 2008. J'engage la Commission électorale indépendante à rendre public le plus tôt possible un nouveau calendrier électoral réaliste définissant les étapes clefs. Dès lors que les parties et le Facilitateur l'auront approuvé, ce nouveau calendrier devra être scrupuleusement respecté afin d'éviter de devoir prolonger une nouvelle fois les opérations électorales. Pendant ce temps, mon Représentant spécial continuera, au titre de son mandat de certification, à appuyer le processus électoral de sorte à en préserver le caractère sans exclusive et transparent. 59. Avec d'autres organismes des Nations Unies et partenaires internationaux, l'ONUCI continuera à offrir ses compétences et une assistance technique aux institutions ivoiriennes chargées de mener à bien les autres tâches prévues dans l'Accord de Ouagadougou et s'emploiera à mobiliser des fonds auprès de la communauté des donateurs pour promouvoir le désarmement des ex-combattants, le démantèlement des milices, la réunification des forces ivoiriennes de défense et de sécurité, le redéploiement de l'administration et le rétablissement de l'autorité de l'État. Le pays jouit actuellement d'une plus grande stabilité, mais le caractère délicat du processus électoral, en particulier durant la période qui suivra les élections, et la mise en œuvre des dernières tâches prévues dans l'accord de paix exigent que l'ONUCI maintienne ses capacités essentielles et un dispositif de dissuasion pour faire face aux risques potentiels. 60. L'ONUCI continuera à suivre les violations des droits de l'homme et à enquêter à leur sujet, en vue de contribuer aux efforts visant à mettre fin à l'impunité, s'agissant notamment de la violence à l'égard des femmes et des enfants, ainsi que de tout incident pouvant avoir une incidence sur la sécurité du processus électoral. Je demande aux parties ivoiriennes de mettre en place les mesures de confiance voulues pour prévenir ces violations, en particulier la violence électorale susceptible de compromettre la crédibilité des résultats. 61. Vu l'évolution encourageante de la situation en Côte d'Ivoire et compte tenu, cependant, des dernières tâches à exécuter au titre de l'Accord de Ouagadougou et des risques visés plus haut au paragraphe 45, je recommande au Conseil de sécurité de proroger le mandat de l'ONUCI pour une période de six mois allant jusqu'au 31 juillet 2009. Je recommande également de réduire d'un bataillon l'effectif de l'ONUCI et de modifier son dispositif et sa configuration comme indiqué aux paragraphes 46 à 54. Les ajustements proposés devraient permettre à l'Opération d'apporter une assistance aux parties ivoiriennes pour mener à bien les dernières taches prévues dans l'accord de paix, tout en préservant sa capacité de faire face à de nouveaux problèmes de sécurité. Je recommande en outre au Conseil d'adopter les objectifs de réduction des effectifs de l'ONUCI décrits au paragraphe 47. Ces objectifs ont été définis sur la base d'une analyse attentive de la situation sur le terrain et d'une évaluation des conditions nécessaires au retour à la normale en Côte d'Ivoire. Je compte, au cas où le Conseil approuverait les propositions susvisées, faire périodiquement le point de la reconfiguration des forces de l'ONUCI et des progrès réalisés par les parties ivoiriennes dans la réalisation des objectifs fixés. 62. Comme indiqué plus haut, au paragraphe 52, le renforcement temporaire de l'ONUCI, dans le cadre d'une coopération entre missions avec la MINUL, pourra s'avérer nécessaire immédiatement avant, pendant et après les élections, sous la forme d'une capacité d'appui militaire et aérienne, conformément à la résolution 1609 (2005) du Conseil de sécurité. 63. Pour conclure, je voudrais exprimer ma gratitude à mon Représentant spécial pour la Côte d'Ivoire, Choi Young-Jin, et à l'ensemble du personnel militaire et civil et des fonctionnaires de police de l'ONUCI, qui continuent résolument à appuyer le processus de paix. Je suis également reconnaissant au Facilitateur du processus de paix ivoirien, le Président du Burkina Faso, Blaise Compaoré, et à son représentant spécial à Abidjan, Boureima Badini, des efforts qu'ils déploient inlassablement. Enfin, je remercie tous les pays fournisseurs de contingents et d'effectifs de police, la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest, l'Union africaine, les organismes, fonds et programmes des Nations Unies, les organisations humanitaires et les donateurs multilatéraux et bilatéraux, ainsi que les organisations non gouvernementales internationales et locales, de leurs contributions importantes au rétablissement de la paix et de la stabilité en Côte d'Ivoire.