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Art et Culture Publié le lundi 2 février 2009 | Fraternité Matin

Le monde de la presse en deuil : Diégou Bailly hélàs!

Le président du Conseil national de la communication audiovisuelle (Cnca) s’est éteint hier matin, dans la capitale tunisienne. La grande famille de la presse ivoirienne est à nouveau frappée par le deuil. Après le décès, le 6 janvier dernier, de l’ancien ministre de l’Information Amadou Thiam à Rabat, c’est Jérôme Diégou Bailly, président du Conseil national de la Communication audiovisuelle, qui a tiré sa révérence hier à 7 h à Tunis, capitale de la Tunisie. Où il avait été admis le 25 décembre 2008 dans un état critique pour des examens et soins médicaux.

Depuis quelques années, Diégou Bailly, âgé de 57 ans, souffrait, selon des sources bien informées, d’une insuffisance rénale qui avait nécessité une transplantation, toujours à Tunis, lui permettant de mieux se porter. L’homme avait même pris de l’embonpoint et vaquait à sa haute mission de contrôle et de régulation de l’espace audiovisuel. Cela se matérialisait par de fréquents communiqués de presse qui faisaient l’état des activités des partis et mouvements politiques en termes de couverture par les médias notamment la télévision nationale. Sans oublier les saisines faites au niveau de certains médias étrangers (Rfi, Africa N°1, etc.) auxquels il était reproché quelques entorses aux règles régissant le métier et aussi leurs cahiers des charges.
A travers, donc, ces différentes activités, on savait que le Cnca s’acquittait plutôt bien de son devoir et ce, grâce à son président Diégou Bailly, son secrétaire général Franck Anderson Kouassi et toute l’équipe qui les entoure. En dehors des missions classiques du Cnca, Diégou était à toutes les rencontres qui nécessitaient sa présence et, parfois, sa contribution de grand homme de presse au talent avéré et à l’esprit critique dont les prises de position permettaient toujours d’orienter et de clarifier les débats. Après une formation à l’Université d’Abidjan et à celle de Lille III (France) où il obtint respectivement une maîtrise d’histoire (ancienne) et une maîtrise de sciences de la communication, Jérôme Diégou Bailly était diplômé de l’Ecole supérieure de journalisme (toujours) de Lille. Sa carrière professionnelle démarre avec l’hebdomadaire Ivoire Dimanche dont il fut le rédacteur en chef. Avec l’avènement du multipartisme suivi de la pluralité de la presse, Diégou Bailly et certains confrères et amis vont créer Nouvel Horizon dont il sera le secrétaire général de la rédaction. Sa volonté de promouvoir une presse véritablement indépendante des chapelles idéologiques, va l’amener à fonder Notre Temps en compagnie de plusieurs journalistes, intellectuels et universitaires parmi lesquels, Pr Séri Bally, ancien ministre de la Communication. Il créera ensuite Le Jour et Sentier, ses dernières trouvailles avant d’être nommé en juin 2001 président du Conseil national de la communication audiovisuelle. Comme pour confirmer la thèse selon laquelle une bonne plume finit toujours dans l’édition, Diégou Bailly fut auteur de plusieurs publications et productions. On citera, pêle-mêle : «Secret d’Etat» qui est un roman ; «La restauration du multipartisme en Côte d’Ivoire» (essai) ; «La fille du silence» (roman) ; «La traversée du guerrier» (roman) ; «Monoko-Zohi» (pièce de théâtre publiée en 2004 par Puci et jouée le 19 octobre 2004 au Palais de la culture par Sijiri Bakaba) ; «Hérémankono» (une autre pièce de théâtre mise en scène le 10 juin toujours par Sijiri Bakaba).
Au titre des distinctions, Diégou Bailly fut chevalier du mérite culturel ivoirien ; officier et commandeur de l’ordre du mérite ivoirien ; Prix Bernard B. Dadié pour la culture (2004) ; Ebony d’honneur décerné par l’Union nationale des journalistes de Côte d’Ivoire (Unjci) en 2004 ; diplôme d’honneur de l’Unjci (2007) ; diplôme d’honneur de l’Observatoire de la liberté de la presse, de l’éthique et de la déontologie (Olped) en 2005. Ses activités associatives lui ont permis d’être le tout premier président de l’Unjci dont il fut membre-fondateur ; vice-président de la Mutuelle pour le développement de Gbadi-Est ; membre de l’Association des anciens élèves de l’Ecole supérieure de journalisme de Lille ; président de la Mutuelle pour le développement du village de Bayékou-Bassi (Mudebab). Du 18 au 21 août 2008, il a organisé avec succès à Abidjan et Yamoussoukro, le colloque du Réseau des instances africaines de régulation et de communication (Riarc). Diégou Bailly laisse derrière lui quatre orphelins et une veuve qui était à ses chevets à Tunis. Et qui, depuis son décès, est à pied d’œuvre avec le soutien de l’ambassadeur de Côte d’Ivoire en Tunisie pour le rapatriement du corps. Cela, selon des sources proches de la famille, devrait s’effectuer d’ici à jeudi prochain.

Abel Doualy



Profonde affliction

A notre passage hier après-midi au domicile du défunt à la Riviera Golf au rez-de –chaussée du bâtiment Fromager, c’était la désolation totale. Parents et beaux-parents, inconsolables, s’activaient à mettre de l’ordre dans la maison où commençaient à défiler diverses connaissances du disparu. Nos confrères et aînés Raphaël Lakpé et Maurice Lorougnon, anciens collaborateurs et promotionnaires de Jérôme, avaient les larmes aux yeux. Maurice Lorougnon, qui s’apprêtait à se retirer pour revenir à 18 h pour la première grande réunion relative aux préparatifs des obsèques (à commencer par le rapatriement de la dépouille) a rebroussé chemin à notre arrivée dans la cour. Il nous accompagne dans la maison et nous présente aux parents déjà installés.
Quelques instants plus tard, Raphaël Lapké fait son entrée et fond en larmes. Profonde affliction ! Il n’en fallait pas plus pour que la sœur de la veuve soit à son tour en larmes. «C’est une grande douleur. Que voulez-vous ? Ma sœur a tout fait, mais elle revient les bras ballants, hélas !», fait remarquer la belle-sœur du défunt entre deux sanglots. Devant le bâtiment, est dressée une bâche pour accueillir les visiteurs. Au moment où nous sortons de la cour, M. Bertin Kadet, ancien ministre de la Défense, conseiller spécial du Président de la République, y fait son entrée. Il marque un arrêt à notre niveau, descend la vitre de sa voiture pour nous saluer. «Condoléances», dit-il avant de demander qu’on lui indique le domicile. Nous avons perçu en ces propos des condoléances adressées à la grande famille de la presse qui perd ainsi une figure de proue. Repose en paix cher confrère ! Repose en paix grand-frère, comme je t’avais toujours appelé.

A. Doualy



Douleur d’anciens compagnons

Raphaël Lakpé (ancien collaborateur): “Une grande plume a disparu”

«Diégou Bailly n’était pas un ami mais un frère. Nous sommes restés ensemble depuis le lycée. Nous nous sommes retrouvés dans le même organe de presse pendant longtemps. C’est cet après-midi qu’un journaliste m’a appelé pour demander mes impressions à la suite de son décès, alors que je n’avais pas encore l’information. Voilà comment j’ai appris sa mort. C’est une partie de moi-même qui part. Une grande plume a disparu. Quand quelqu’un disparaît, il a toujours des qualités, mais les qualités professionnelles de Bailly sont indéniables, immenses. Je suis tellement troublé que je ne sais quoi dire d’autre. Nous sommes de la 52ème Promotion des anciens de Lille. Sa mort me touche de très, très, très près».

Maurice Lorougnon (ancien collaborateur): “La Côte d’Ivoire perd un grand combattant”

«Je ressens une profonde tristesse, pour la famille, pour le frère et ami. Je suis un élève de Bailly parce que c’est lui qui m’a amené à la presse. C’est une grande tristesse surtout pour la Côte d’Ivoire qui perd un grand combattant. C’est la démocratie qui vient de prendre un coup. C’est beaucoup de larmes pour la Côte d’Ivoire».

Honorat de Yédagne (ancien DG de Frat-Mat, interrogé par téléphone): “Un homme d’engagement, de conviction et de foi”

«La première chose que je peux dire, c’est que Diégou a été pour moi un maître. Il m’a permis de me fixer et de fixer mes repères dans la profession. A la suite d’une série de papiers publiés dans Fraternité Matin au début de ma carrière de journaliste, il m’a appelé pour me féliciter. Cet appel était pour moi comme une consécration étant donné que je n’avais pas fait d’école de journalisme. Depuis cette date, nous avons eu de la proximité et de l’intimité. J’ai usé de toutes mes relations pour lui permettre d’être là où il était. Diégou Bailly était un homme d’engagement, de conviction et de foi. Cela s’est traduit à tous les niveaux même dans son village où il m’a fait l’honneur de m’inviter. Tout récemment il y a installé un bouquet pour permettre aux populations de suivre l’actualité dans le monde. Ce que je retiens de Diégou Bailly c’est ce que chacun retient de lui à savoir qu’il fut une grande plume, un grand homme que nous perdons hélas».

Franck Andersson Kouassi (SG du Cnca, interrogé par téléphone): “Trop tôt pour me prononcer”

«C’est trop tôt pour moi pour me prononcer. L’émotion est trop forte. Nous verrons plus tard.»

Charles Diagne (Frat-Mat): “Plus qu’un ami et un confrère, c’était un frère”

J’étais son «frère sénégalais». On se connaît depuis 1984. Il était à «Ivoire Dimanche» et moi à «Famille et Développement» à Dakar. Je lui ai commandé des papiers, qu’il m’a remis dans les délais. De très bons papiers. Il m’a fait venir à «Ivoire Dimanche», comme consultant, quelques mois après. Juste pour un mois. Dix ans plus tard, avec Abdoulaye Sangaré, Franck Andersson Kouassi et Séri Bailly, entres autres, on lançait «Notre Temps», qui deviendra «Le Jour». Ses deux derniers livres sont en fabrication à Frat-Mat Editions. Il s’agit de : «Laurent Gbagbo Le verbe en action» et «Epitre aux gens d’Adjouffou».

Propos recueillis par Abel Doualy
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