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Société Publié le mercredi 18 février 2009 | Fraternité Matin

Route d’Abobo-Baoulé : Les travaux s’embourbent

Malgré les instructions du Chef de l’Etat, la restauration de cette voie, entamée depuis juin 2008, reste incertaine. Vingt sept février 2008. Le Président de la République, Laurent Gbagbo, parrain d’une cérémonie à Abobo-Baoulé, (commune d’Abobo), s’indigne en ces termes : «Je viens de découvrir cette voie. Elle est vraiment impraticable. Ce n’est pas normal, car c’est une route nationale et départementale. Il n’y a plus de caniveaux. Tout est bouché et l’eau noirâtre, stagnante est un vecteur de maladies. Quand le mal commence, il faut le soigner rapidement, afin qu’il ne se propage.» Il se prononçait ainsi, sur l’état très dégradé de la route conduisant, non seulement dans ce quartier, mais également, à Alépé et dans bien d’autres localités de l’intérieur du pays.
Comme l’a souligné le Chef de l’Etat, cette route était devenue effectivement, impraticable. Précisément, au niveau du quartier «Etage noir» encore appelé «Monastère». Elle était couverte de boue et parsemée de nids de poule. Sur plusieurs mètres. Les eaux de pluie y stagnaient durant des jours. Tout véhicule qui s’y aventurait s’embourbait inévitablement.
Séance tenante, il a instruit MM. Djédji Amondji Pierre et Adama Tounkara, respectivement gouverneur du District d’Abidjan et maire de la commune d’Abobo, de se mettre en contact avec les services de la Présidence de la République pour trouver une solution définitive à ce problème.
Quatre mois plus tard, la voie est fermée à la circulation. Une déviation est faite dans le village voisin d’Aboboté pour permettre aux usagers de contourner le chantier. Les travaux démarrent. Ils doivent prendre fin en décembre 2008. Soit, six mois après.
Information qui suscite, tout naturellement, un grand espoir au sein des populations. Surtout chez les riverains et usagers de cette route.
Malheureusement, au fil des jours, cet espoir va se ruiner, et se transformer en désespoir. Et même en cauchemar. Simplement, parce que les travaux stagnent.
Jugez-en vous-mêmes.
29 décembre 2008, contrairement aux attentes des populations, de voir un ouvrage prêt à être livré, comme annoncé au démarrage, on découvre sur ce chantier, de gros monticules de sable et de graviers, des étages de briques, des barres de fer, quelques matériaux de maçonnerie, deux camions pour le ramassage de sable et de gravier. On y aperçoit également, une trentaine d’ouvriers, s’attelant à creuser deux caniveaux (environ deux mètres de profondeur et de largeur), de part et d’autre de la voie. Selon certains d’entre eux, ces caniveaux sont le seul ouvrage en réalisation depuis le démarrage du chantier. Et pourtant, la partie déjà creusée n’atteint même pas encore 500 mètres.
Le 9 février, le décor reste inchangé. Tas de sable de graviers et de briques par-ci. Barres de fer par-là. Matériaux de maçonnerie d’un autre côté. Les employés, eux, continuent de creuser «leurs» caniveaux. Seulement, cette fois-ci, la partie déjà réalisée est d’environ 800 m.
Selon M. Issa Ouattara, chef de service des ponts et ouvrages d’assainissement à l’Ageroute (le maître d’ouvrage), la longueur prévue pour chaque caniveau est de 1,2 km. Soit au total, 2,4 km à creuser. «C’est la première étape des travaux. Après quoi, suivront d’autres. Notamment, la construction d’un dalot de 350 m pour relier la route à un bassin d’orage, situé au quartier «Star 9 B», le bitumage de la voie sur 1,2 kilomètre et plusieurs travaux additionnels. Tels le déplacement de certains réseaux de Côte d’Ivoire Télécom et de la Sodeci. C’est après tout cela que la voie sera rouverte à la circulation.»
A en croire l’agent de l’Ageroute, tous ces travaux peuvent être réalisés en un mois et demi. «Si l’Etat met les moyens financiers à la disposition de l’entreprise. Car, en réalité, c’est sur ce point précis que se trouve le problème», ajoute-t-il.
En effet, dira-t-il, sur 1,8 milliard de francs, à débloquer par l’Etat, pour la réfection de ce tronçon, seulement 350 millions de francs ont été décaissés jusqu’au 09 février. «Mais pour montrer sa bonne foi, l’entrepreneur a déjà réalisé des travaux, à hauteur d’un milliard. C’est-à-dire que la différence a été financée sur fonds propres», témoigne M. Issa. Et de poursuivre, «D’ailleurs, l’entrepreneur s’inquiète désormais. Il se demande si l’Etat va lui rembourser son argent déjà injecté dans les travaux. Et menace de tout arrêter, si l’Etat ne se décide pas».
Pendant ce temps, la voie, elle, reste fermée. Au grand dam des 2800 véhicules qui l’empruntent pendant la journée (selon une estimation).
Ce qui apparaît plus inquiétant, c’est l’effectif des ouvriers qui ne cesse de diminuer. A ce jour, on en compte à peine 20. Selon des informations anonymes recueillies sur place, la majorité des employés recrutés sur ce chantier a «fui». Pour une seule raison : les salaires ne sont pas payés régulièrement. «Au début, nous étions une centaine. Au fur et mesure, beaucoup se sont retirés. Parce que nos salaires ne sont pas payés régulièrement. Depuis près de 3 mois, nous n’atteignons plus trente personnes. Malgré cela, rien ne change. Nous sommes tous découragés et allons bientôt quitter les lieux, nous aussi», se plaint un ouvrier.
En tout cas, le travail avance de moins en moins vite sur le chantier.
Au grand dam des populations riveraines pour qui la situation est devenue intenable.
«Ce chantier est devenu un véritable cauchemar pour nous qui vivons dans les environs.
En saison pluvieuse, nos magasins, ateliers domiciles et même nos maisons sont inondés par l’eau de ruissellement. Avec tout ce que cela comporte comme déchets. Le passage habituel de l’eau étant bloqué par les ouvrages en construction.», déplore M Traoré Dognimé, agent immobilier au quartier «Etage noir».
Il poursuit pour dire que la population est à la merci des bandits depuis l’ouverture de ce chantier. Puisque la voie en réhabilitation, est la seule bitumée. Elle reste donc meilleure que celle qui mène audit quartier. Surtout en saison pluvieuse. Les autres, non bitumées, étant couvertes de boue, de poubelles, et de broussailles. De sorte qu’il est difficile, voire impossible, aux forces de l’ordre d’y aller en intervention, de façon efficace, en cas de nécessité. Surtout que les lampadaires de ce quartier ne fonctionnent plus. «Les taxis et gbaka (mini cars) refusent de s’aventurer ici. Ceux qui acceptent doublent carrément le tarif, car l’itinéraire qu’ils empruntent pour venir est long et tortueux. A plusieurs reprises, nous avons vécu des situations dramatiques ici. Nous avons été obligés, plusieurs fois, de mettre au dos, des femmes en travail, et des personnes malades, sur plusieurs mètres, avant de trouver un véhicule pour les évacuer à l’hôpital. Lorsque les braqueurs viennent ici, et c’est régulièrement, ils prennent leur temps pour opérer. Sans aucune crainte», ajoute M. Ouattara Yaya, un autre riverain.
Depuis le début de la saison sèche, ce sont les populations d’Aboboté qui se plaignent de plus en plus de la poussière. Puisque la déviation passe par leur village.
Aujourd’hui, ils sont nombreux, ceux qui sont déçus de ce projet et qui n’y croient même plus. La plupart souhaitent que le Chef de l’Etat intervienne à nouveau, pour mettre fin à leur calvaire.
«Cette situation montre qu’en Côte d’Ivoire, on prend tout à la légère. Même les ordres du Chef de l’Etat», grogne M. Mobio Joachim, enseignant, résidant à Aboboté.
Combien de temps, les populations devront-elles attendre encore avant la livraison de ce «petit» tronçon? Difficile de le savoir.
Casimir Djézou
Entre nous : Simplement révoltant
Comme si elle a eu tort d’avoir désiré la réhabilitation de ce tronçon de route, la population d’Abobo-Baoulé est en train de souffrir des travaux que cela nécessite. Un fait assez paradoxal et révoltant, qu’on va encore une fois s’empresser d’expliquer par la désormais classique difficulté de trésorerie. Un argument à nul autre pareil, parce que réel en soi, mais qui, dans le même temps, semble être devenu l’excuse toute trouvée pour voiler certains laxismes, manque de volonté, ou de compétence à gérer tel ou tel projet. Tous les Ivoiriens sont à ce jour d’accord pour dire que les caisses de l’Etat sont vides, pour diverses raisons. Cependant, nous ne pouvons pas affirmer que, devant cette réduction drastique des ressources financières, les techniciens des dépenses publiques ont toujours su définir les ordres de priorité des décaissements. Que les ordonnateurs des crédits ont régulièrement su privilégier l’intérêt de la communauté. Ou encore que la gestion des projets déjà initiés n’a jamais été entachée d’irrégularités, lorsqu’il s’est agi de leur financement. Pour tout dire, il y a bien quelque chose qui cloche, au niveau de ce projet d’Abobo pour qu’il soit subitement laissé ainsi à l’abandon, après avoir suscité tant d’espoir dans les cœurs à son démarrage. Le Chef de l’Etat en est-il informé ?



Par Moussa Touré
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