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Société Publié le jeudi 5 mars 2009 | Le Nouveau Réveil

Soro Mamadou (Porte-parole des enseignants du secondaire et du technique) : “Notre grève sera limitée par la bonne volonté du gouvernement”

Les syndicats du secondaire public et ceux de l`enseignement technique observent, depuis lundi dernier, un arrêt de travail pour connaître les raisons de cet énième débrayage des enseignants dans les écoles. Soro Mamadou, secrétaire général du Synesci et porte-parole des enseignants grévistes, nous donne, dans cet entretien, les raisons de leur mouvement.

Soro Mamadou, on constate que le lundi 2 mars 2009 matin, les écoles ont été fermées, malgré l`appel du ministre de l`Education nationale. Qu`est-ce qui explique cette situation ?
Je pense que si vous avez suivi l`intervention du ministre de l`Education nationale, ce n`est pas un appel. Ce sont des injures gratuites ajoutées à un tissu de mensonges. Partant de sa déclaration d`hier (ndlr : lundi dernier), de façon spontanée, les enseignants sentant que leur intelligence a été insultée, ils ont voulu dire non à M. le ministre de l`Education nationale. C`est un signal fort pour exprimer toute la détermination des enseignants à voir réaliser en l`état leur plate-forme revendicative qui a fait l`objet de l`arrêt de travail du 20 au 30 janvier 2009. Deuxième élément, c`est d`exprimer face à l`opinion et à toute la communauté éducative qu`en tant que creuset de formation des citoyens, les enseignants ne peuvent accepter d`être injuriés gratuitement par un amas de gros mensonges. Troisième élément, c`est de signifier au gouvernement d`ouvrir immédiatement les négociations pour que nous allions à un accord. Nous sommes au regret de dire que les jours à venir seront marqués par des actions de masse.

Comment jugez-vous l`attitude du gouvernement à travers sa méthode de prélèvement sur les salaires de certains enseignants à la suite de la grève que vous avez faite du 20 au 30 janvier 2009 dernier?
Ce n`est pas une méthode du gouvernement. Nous, enseignement technique et enseignement secondaire général, avons observé le même arrêt de travail. C`était le même préavis. L`enseignement technique n`a pas connu de ponction salariale. Donc c`est un acte d`un ministre isolé, qui a ses intentions criminelles. Sa démarche, pour nous, ne répond à aucune logique. Sa logique est contraire au bon sens. Si le gouvernement était logique, depuis le 31 août, les questions qui sont à l`ordre du jour devraient avoir été résolues par un décret. L`article 16 de l`arrêté 94-82 est clair sur ce point, qu`au plus tard le 31 août 2008, nous devrions avoir eu notre décret adoptant la nouvelle grille indiciaire et la date des effets financiers de ce profil. Sept mois après, il est incongru qu`au moment où les enseignants crient leur ras-le-bol, on puisse leur servir des mesures de rétention. Ces mesures sont totalement en déphasage avec la logique. Pour une grève qui a été faite en janvier, il est inadmissible qu`on vienne ponctionner en février. Alors que pour les mouvements de février, nous n`avons pas encore observé des arrêts de travail. Et cette fois, nous continuons jusqu`à ce que le décret soit pris et adopté.

Certains de vos collaborateurs disent que vous allez vers une grève illimitée. Est-ce vrai ?
Nous n`allons pas vers une grève illimitée, mais la grève est limitée par le gouvernement. Si le gouvernement ouvre les négociations et que nous allons à un compromis, tout sera parfait. Ce qui veut dire que la grève n`est pas illimitée. Si le gouvernement accepte de négocier et va à l`adoption par voie de décret de notre grille salariale, reverse les 17 mois de salaires dûs aux enseignants du fait du profil de carrière, reverse tous les salaires ponctionnés des enseignants depuis novembre 2007 jusqu`à ce jour, vous verrez que nous allons reprendre le chemin de l`école. Donc la grève est limitée par la volonté du gouvernement.

Le ministre de l`Education nationale disait aussi qu`il se battait, qu`il est conscient de la situation mais que le manque d`argent constitue le problème. Alors, face à cette situation économique difficile, il demande l`indulgence des grévistes. Quelle est votre opinion sur cette question?
C`est normal ce que dit le ministre, mais ce raisonnement est une escroquerie intellectuelle et morale de notre revendication. Nous disons qu`il devait avoir depuis le 31 août 2008, un acte administratif réglementaire, fixant un cadre d`action. C`est cet acte réglementaire que nous demandons. Nous n`avons pas demandé qu`on nous reverse des milliards dans le cadre de notre revendication. Nous avons demandé simplement la prise du décret indiquant notre nouvelle grille indiciaire, ainsi que la date à laquelle vont suivre les effets financiers. Nous demandons une réglementation administrative. Donc de l`encre sur du papier. Nous ne sommes pas encore au stade où on demande de payer notre argent. D`où vient le fait qu`on puisse nous parler de problème financier? On a commencé un processus en 2002, qui est l`adoption du profil de carrière, qui a été adopté en 2007, il y a eu l`arrêté, mais il faut la grille pour en finir avec. Où est la grille? Il n`y a pas eu de grille. Quand est-ce qu`on va l`appliquer? On ne sait rien. Nous demandons ici et maintenant la régularisation administrative par un acte réglementaire qui est le décret au regard du parallélisme des formes, parce que c`est le décret 7622 qui a poussé la première grille, et qui est en train d`être modifié. C`est donc un décret qui va modifier cette grille. Voilà ce que nous demandons tout simplement. Nous disons aussi qu`il y a environ 133 camarades qui, depuis 17 mois, du fait de leur nouveau reclassement en A4, les licenciés, certifiés vont désormais à la retraite à 60 ans. Ils ont été maintenus. Et contrairement à cette décision que le gouvernement lui-même a prise, il a suspendu leur salaire. Voyez-vous ce genre de paradoxe! Il y a eu un accord pour qu`il puisse les payer fin février. Le même gouvernement et la Fonction publique disent non. Ils ont refusé de respecter leur engagement. Tous ceux qui ont été fonctionnaires, que ce soit les médecins, les enseignants du supérieur, qui ont fait des grèves, ont été restitués dans leur droit. Les instituteurs ont fait des grèves, il n`y a pas eu de ponction. Et, ce ne sont que les enseignants du secondaire général qui veulent utiliser l`article 18 de la Constitution qui leur confère le droit de grève qui sont aujourd`hui sanctionnés. On viole la Constitution en venant les brimer. La loi dit: “un jour de grève, un jour de ponction”. D`où est venue la décision 10 jours de grève un mois de ponction ? Tout cela, c`est de l`arbitraire. Nous sommes en train d`aller tout droit en suivant le droit. Si le gouvernement même ne prend garde des attitudes du ministre Bleu Lainé, il sera conduit, dans la boue du fascisme. Les enseignants ont l`obligation d`instaurer la démocratie à l`intérieur du ministère de l`Education nationale. Nous sommes pour la démocratie. Alors, nous disons non à ces pratiques indigestes qui n`honorent pas notre pays

Certains de vos camarades font la sourde oreille à votre mot d`ordre de réplique aux injures, selon vous, du ministre de l`Education nationale en allant dispenser les cours. Comment jugez-vous l`attitude de ces derniers?
Aujourd`hui, il n`y en a pas. Sauf le lycée Sainte-Marie de Cocody, qui a été cadré par les pratiques fascistes avec l`armée. Le lycée classique est fermé au moment où on vous parle. Tous les établissements sont fermés d`ici jusqu`à Tengrela, d`Ayamé jusqu`à Grabo, de Tai à Bondoukou et de Bouna à San-Pedro. Tout est fermé actuellement. A Bouaké, les enseignants sont en train de faire une marche en direction de la préfecture pour lire une motion, demandant la démission du ministre de l`Education nationale. Car celui-ci refuse de s`asseoir à la table de négociations. Voilà un compromis. Nous disons aussi que le jour où un enseignant sera conduit devant le conseil de discipline, ce jour consacrera la brûlure nationale des notes, des copies et de toutes les moyennes qui ont été sciemment retenues. La rétention des copies est un acte conscient. Le gouvernement avait été informé depuis le 4 octobre. On le lui a rappelé le 16 novembre 2008. Ils n`ont jamais trouvé cela important. Ils n`ont jamais discuté avec nous sur cette question.

Face à tout cela, on constate une réticence du Premier ministre et du Président de la République. Quel est votre sentiment face à cela ?
Notre sentiment, c`est qu`ils sont intoxiqués par le ministre de l`Education nationale. Parce que, si nous discutons bien sur le dossier, ils verront que la raison est du côté des enseignants qui ont su, dans un contexte logique, après que la date du 31 Août est arrivée à expliration, relancé le gouvernement à travers le ministre de l`Education nationale pour que les négociations puissent reprendre. Donc, jusqu`à aujourd`hui, ce sont les enseignants qui sont en train d`attendre du gouvernement des pas. Si le Premier ministre, Soro Guillaume et le Président de la République, Laurent Gbagbo, se laissent intoxiquer par un ministre hostile à la négociation et aux compromis, c`est tant mieux ou tant pis selon le cas qu`on voudrait voir se réaliser. Si on veut voir se réaliser une année blanche ou pas, c`est au Premier ministre et au Président de la République de décider. Mais, nous enseignants, sommes décidés, devant les injures graves, devant l`attitude méprisante du ministre Bleu Lainé, devant les dérives fascistes, en tant que pédagogues, d`instruire non seulement le ministre et toute la nation. C`est ce que nous faisons par ce mouvement de protestation.

Interview réalisée par
Jean-Prisca et I.Y (Stagiaire)
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