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Société Publié le mercredi 11 mars 2009 | Nord-Sud

Salaires coupés dans le secondaire public - Le drame des enseignants

Plus de 10.000 enseignants du secondaire public qui n`ont pas perçu leurs salaires de février pour fait de grève, broient du noir. Incursion dans la galère des professeurs.

T.K. enseignant au lycée moderne d`Akoupé est en deuil depuis une semaine. Son épouse est décédée pour 59.000 Fcfa qu`il n`a pu trouver pour la soigner d`une crise subite survenue en pleine nuit. Ses collègues ont tenté de voler à son secours, mais leur bonne foi n`a pas suffi à réunir le montant nécessaire pour sauver la malade. Qui laisse derrière elle un mari désemparé, sans un rond et qui ne sait à quel saint se vouer. Ce professeur a été privé de son salaire du mois de février suite à la grève qui a duré du 20 au 30 janvier à l`appel de l`Union des syndicats de l`enseignement général et technique. Autre lieu, même problème. Ce week-end, les enseignants du Collège moderne Bad de N`Douci ont assisté impuissant à la mort d`un des leurs. S.M. est décédé parce qu`il n`avait pas la somme 100.000 Fcfa nécessaire pour ses soins.

Des cas de décès

Ses amis ont voulu l`aider. Ils ont cotisé des fonds, mais le montant obtenu était largement en deçà de la somme recherchée. Il a rendu l`âme. Comme de nombreux salariés ivoiriens, ces deux chefs de familles n`avaient pas d`épargne. Leurs revenus qui stagnent sont engloutis par les charges qui ne cessent d`augmenter. Dans la majorité des cas, le salaire ne suffit plus, au point où le travailleur est obligé d`aller de dette en dette pour survivre. Pour ce salarié qui avait autant de difficultés, toute suspension de salaire est synonyme du pire. A côté des quelques enseignants dont la galère a déjà tourné au drame, il y a la grande majorité qui broie du noir. C`est le cas Traoré S. enseignant de lettres dans un lycée de la banlieue abidjanaise. « C`est très très difficile. J`ai dû négocier avec le propriétaire de ma maison pour différer le paiement du loyer », révèle-t-il. Il ajoute : « Mon épouse qui n`a pas de revenu consistant, a été mise à contribution. Pour éviter l`humiliation dans le quartier, je me suis endetté pour régler la facture d`électricité qui s`élève à plus de 40.000 Fcfa ». Toute la maisonnée a été mise au régime : le petit déjeuner a disparu, le riz de qualité approximative appelée « déni cacha » a remplacé le riz thaïlandais, la viande et le poisson se font rares dans la sauce. Un autre formateur dit avoir soumis sa famille à la pratique de la « la mort subite », c`est-à-dire qu`un seul repas est consommé par jour aux environs de 17h. « Celui qui rate ce rendez-vous doit attendre le lendemain à la même heure », souligne l`enseignant. La situation n`est guère reluisante pour ceux dont le salaire a été ponctionné de plus de la moitié. Professeur au lycée I de Gagnoa, Ouattara I. a constaté un « trou » de 152.000 Fcfa sur son salaire. Avec ses engagements, il n`a pu toucher que 80.000 vite dépensés pour régler les factures d`eau et d`électricité qui ont atteint 47.000. « Avec le découvert bancaire, j`ai acheté un sac de riz, donné la popote et réglé d`autres dépenses.

Les repas revus à la baisse

Mon loyer n`a pas été payé ce mois, le propriétaire a accepté ma proposition de le régler quand la situation va se normaliser », explique le professeur certifié. Dans la cité du Fromager, un professeur de Cafop a par solidarité, ouvert « une ligne de crédit » qui permet aux professeurs de manger et de payer après. Mais combien de temps cela va-t-il durer ? Certains grévistes doivent leur salut au portefeuille de leur conjointe. Professeur de maths dans un collège d`Abobo, K.M dont le salaire a été ponctionné à hauteur de 130.000 Fcfa, est sauvé par son épouse. « Elle a accepté de contribuer aux charges domestiques. Ce n`est pas un prêt », se soulage l`enseignant. Ses heures de vacation, « le gombo », qui devait lui permettre de tenir le coup, n`a malheureusement pas « glissé » le mois de février. « Avec les congés, je n`ai pas pu effectuer assez d`heures. Ce qui constitue un sérieux manque à gagner », se plaint-il. Mamadou D a quant à lui bénéficié d`un soutien conditionné de son épouse qui se débrouille dans la vente d`habits pour bébés. Après avoir payé un sac de riz et réglé le salaire de la domestique, sa femme a fait le reste. « Elle m`a fait un prêt pour régler le loyer pour éviter que le propriétaire, connu pour sa grande intransigeance, vienne nous humilier. L`argent de la popote étant épuisé, c`est elle qui assure les repas quotidiens », explique le professeur. Mais certains de ses collègues disent accepter à contrecœur cette aide de leur moitié. « Il suffit d`une petite brouille pour qu`elle vous crache à la figure et en public son soutien », craint un doyen du corps enseignant.


Nomel Essis
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