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Société Publié le mercredi 18 mars 2009 | Nord-Sud

Bouaké - Sans soins, réduits à la mendicité pour survivre…: Les lépreux de Manikro en larmes

Après le départ de son personnel lors déclenchement de la crise en 2002, le centre des lépreux de Manikro s`enfonce dans la ruine au fil des ans. Privés d`assistance, ses habitants sont réduits à la mendicité.

Jour de deuil, ce 17 février à Raffierkro, village situé non loin de Manikro, à une dizaine de kilomètres de Bouaké. Les villageois pleurent Konan N`Guessan une septuagénaire décédée la veille. Atteinte de la lèpre, elle a rendu l`âme après une longue agonie. Nanan Angoua N`guessan, chef de Raffierkro dont la jambe droite a été amputée du fait de la malade « honteuse », est tourmenté par cet énième décès dans le village dû à un défaut d`assistance médicale. « C`est le cinquième décès depuis 2007. Depuis le début de la crise, il n`y a plus d`agent de santé pour suivre notre état, ni d`hôpital. Ils sont presque tous décédés dans la même condition. Aujourd`hui c`est Konan N`Guessan. A qui le tour prochainement ? », s`inquiète le chef. « L`hôpital de Manikro était comme un oasis pour nous. Nous étions régulièrement traités. Certes, nous gardions les séquelles de la maladie, mais nous n`étions pas loin de la guérison totale. On avait commencé à renouer avec les anciennes attitudes de la vie quotidienne. Mais depuis que le centre a cessé de fonctionner, l`état de santé de plusieurs malades s`est dégradé. Les plaies déjà cicatrisées se réactivent », déplore le vieillard. Après le départ du personnel de santé de la léproserie, des fils du village ont tenté de prendre le relais en s`activant comme ils pouvaient pour apporter un minimum d`assistance aux patients. Adjé Kouamé Pierre est l`un de ces agents de santé volontaire. Il travaille avec quatre « assistants ». Mais, leurs efforts sont presqu`anéantis par la dégradation avancée des installations qui portent aussi la marque de pilleurs : portes des services fracturées, appareils de pointe et accessoires de soins emportés, éclats de vitres des fenêtres gisant au sol. Les fauteuils sont en lambeaux « C`est ce qui reste de l`hôpital qui a offert une seconde vie à nos parents malades. Il leur a permis de croire, une deuxième fois à la vie, après l`apparition de la maladie. Car, le quasi totalité des premiers pensionnaires de l`hôpital étaient victimes de rejet dans leurs familles. Ici, ils avaient réussi à former une sorte de communauté basée sur l`égalité. Malheureusement, tout est à reprendre », déplore- t-il, la voix chargée de tristesse.
Désespoir

Au départ, le centre était soutenu par la Croix rouge et les ``Sœurs de la Providence``. En 2006, avec le retour de l`administration sanitaire, ces structures ont mis fin à leurs différentes prestations. Depuis lors, les malades sont livrés à eux-mêmes. Sur 587 malades, 368 viennent des villages environnants. Et le reste, d`autres régions de la zone Centre Nord et Ouest (CNO). « Ces derniers, en se rendant ici, croyaient que l`hôpital était toujours fonctionnel », fait-il remarquer. Outre les personnes atteintes de la lèpre, l`équipe de volontaires dit avoir reçu dans les locaux de l`infirmerie, des cas déclarés de l`ulcère de Burulis. « L`année dernière, ils étaient au nombre de 70. Dépourvus d`outils de soins appropriés, on les a orientés vers le Sud du pays », précise-t-il. Un fait qui suscite beaucoup d`inquiétude chez les volontaires, c`est la jeunesse des nouveaux malades. Selon Adjé Kouamé Pierre, 70 % de nouvelles personnes infectées par le bacille de Hansen, vivant aux alentours, sont des enfants. « Nous avons recommandé aux proches de les conduire aux Grandes endémies situées à Bouaké », indique-t-il. Les bénévoles manquent de produits et d`outils de soins élémentaires. « Nous n`avons pas de tensiomètre, ni de médicament. Les malades ont recours aux médicaments de la rue, pour traiter certaines infections. Ce qui constitue un autre danger », prévient-il. Abandonnés par parents et amis, tenaillés par la faim, bon nombre de malades ont pris la résolution d`émigrer dans la ville de Bouaké, pour tendre la main aux passants. Le carrefour de la rue 1, au quartier Air-France est l`endroit qu`ils fréquentent le plus. C`est là que nous rencontrons dame Konan Amoin Rosalie. Dans ses mains, des sachets remplis à moitié de cola et de poisson fumé. Mère de six enfants vivant en région forestière, la pauvre sexagénaire raconte qu`elle a été atteinte de la lèpre depuis l`adolescence. Raffierkro où son état s`est amélioré était devenu son village adoptif. A l`aide d`un chasse-mouches, la mendiante fait régulièrement des gestes pour éloigner les insectes qui survolent son pied affecté. Avec ses mains sans doigt, elle replace le voile qui protège son visage. « Depuis que l`hôpital est fermé, je n`ai rien pour me soigner et me nourrir.», avoue-t-elle. Avec les dons reçus des passants, elle achète quelques antibiotiques aux Grandes endémies, fait une petite provision en nourriture et retourne à Manikro, pour revenir en ville un autre jour. C`est sa nouvelle vie.


Marcel Konan Correspondant regional



Le rêve brisé

Gilbert Raffier n`a pas rêvé d`un tel dénuement pour les habitants du village qui porte son nom. Ce médecin militaire français à la retraite s`est battu durant sa vie active pour l`épanouissement des personnes handicapées par la lèpre. Il découvre l`Afrique dès sa sortie de l`Ecole de santé navale, en 1955. Il décide de lutter contre les grandes endémies dont le paludisme et la lèpre. Son premier séjour en Côte d`Ivoire, de 1963 à 1970, lui permet de découvrir un campement, en pleine brousse, près de Bouaké, où étaient isolés des malades de la lèpre. Touché par leurs conditions de vie déplorables, le jeune militaire se met à la tâche en vue de les aider à guérir et à se réinsérer. Il réalise un centre comprenant un hôpital, 65 maisons en dur, une école primaire, un réseau d`alimentation en eau et d`électricité. « Pour avoir permis la création de cet oasis pour des malades lépreux, le village fut baptisé en son nom», rappelle Adjé Kouamé Pierre. Outre ce nouveau cadre social, l`hôpital offrait aux malades des services de qualité. « Avant la crise, les lépreux bénéficiaient de l`expertise de trois médecins, d`une dizaine d`infirmiers, d`une sage femme, d`un bloc opératoire de pointe, de cuisines et de logements pour les malades. En 1991, « le bon Samaritain détecte les premiers cas de l`ulcère de Burulis. Trois ans plus tard, une association voit le jour, afin de poursuivre son œuvre. Les travaux pour la création d`une retenue d`eau sur la rivière Balloba, sise à proximité du village, est à mettre à son actif. La construction de ce barrage répond au souci de favoriser le développement de l`activité agricole et la pisciculture » raconte Nanan Angoua N`guessan, chef de Raffierkro, lui aussi nostalgique de cette époque de tranquillité, pour les lépreux. « Chaque année, lors de la célébration de la Journée internationale de la lèpre, les autorités venaient nous rendre visite ici. Outre les cadeaux qu`ils nous apportaient, ces visites nous emplissaient de joie. On était vraiment entourés d`affection et de soins » se souvient-il. Et d`ajouter : « Tout ce bonheur s`est volatilisé avec la crise. Notre hôpital, nous manque. Notre survie est intimement liée à sa réhabilitation. Les espoirs placés à la visite du ministre de la Santé, lors de la Journée mondiale de 2007, ont fondu comme du beurre au soleil. Depuis son départ, rien n`a été fait », regrette le chef. Les lépreux de Raffierkro et ceux des villages environnants, représentent, estime le chef, une frange non négligeable de la population de la zone « Cette population est en train de mourir à petit feu. Notre léproserie est restée jusqu`à présent en marge des programmes de réhabilitation des structures sanitaires, les zones CNO », déplore-t-il. Dans l`attente d`une main salvatrice, les larmes des lépreux de Manikro coulent.

M.K.


Pluie diluvienne à Bouaké : Un mort, de nombreux dégâts


Les Bouakois attendaient les premières pluies de l`année avec impatience. Mais ils étaient loin de s`imaginer que celle de la nuit du lundi au mardi s`abattrait avec tant d`intensité et surtout de cruauté. Elle a causé un mort et de nombreux dégâts matériels. C`est le triste bilan de cette averse. Un conducteur de moto-taxi qui empruntait l`axe Grand marché-Air France a trouvé la mort juste après les bureaux de la Radio. Le vent avait fait tomber deux arbres sur la route. Vers 21 heures, le motocycliste a été surpris par ces obstacles. Le choc fut inévitable.

Spectacle désolant partout dans la cité de Gbèkékro. De nombreuses voies fermées à la circulation par des arbres obstruent le passage. Les panneaux publicitaires récemment installés par une régie publicitaire de la place ont été déterrés. « Je me demande ce que nous allons faire. C`est environ une vingtaine de panneaux que nous avons fixés la semaine dernière. Si le vent vient tout emporter de la sorte, je me demande où avoir de l`argent pour reprendre ce boulot », se lamente un des responsables des travaux de la régie. Sur les boulevards de la mairie et de la reine Pokou, le spectacle est le même. Le pont Ranhôtel menant au rond-point central du marché est resté fermé à la circulation sur une voie. L`eau de ruissellement ayant bouché cet axe. Les usagers sont obligés de faire un détour pour ressortir soit par le centre culturel Jacques Aka, soit par Koko. Les ordures ont envahi toute la ville provoquant le retour de l`insalubrité. Des femmes au niveau du marché tentent de nettoyer les abords de leur cadre de vente. Au niveau du centre commercial le Capitole des jeunes s`évertuent à découper et retirer de la voie, des branchages qui obstruent le passage. De nombreuses personnes ont témoigné avoir déplacé plusieurs fois leur matelas tant l`eau coulait du plafond dans les maisons. « Hier nuit, j`ai déplacé mon matelas parce que l`eau entrait de partout. J`ai encore de la chance, mon voisin a eu son toit en partie emporté », rapporte Konan Aristide.

Allah Kouamé.
Correspondant régional
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