Au lendemain de la crise militaro politique survenue en Côte d'Ivoire en septembre 2002, les populations se sont déplacées massivement. Sorties des zones des ex rebelles, elles prendront la direction du sud. C'était des moments de tristesse. Des moments très pénibles pour plusieurs familles qui, après plus de 30 ans ou 50 ans de vie et de travail abattu, seront contraintes de sortir d'une ville au développement de laquelle elles ont participé pour trouver refuge, au sud, c'est-à-dire dans la zone tenue par l'armée gouvernementale. C'est environ deux (2) millions de victimes de guerre dont 800 mille déplacés qui se sont retrouvés dans la zone gouvernementale. Arrivées à Abidjan, à Yamoussoukro, à Daloa, ou dans les autres villes de l'intérieur du pays, privées de tout, ces victimes de guerre vivront un véritable calvaire, durant les six (6) ans de crise. Le gouvernement, après moult tergiversations, n'a pas pu trouver de solution à leurs besoins, en termes de logement, de santé, , etc. M. Gbaguidi Augustin, déplacé, retourné à Bouaké, donne une idée de sa souffrance : " Nous avons assez souffert dans cette crise à Abidjan. Nous sommes restés des laissés pour compte. L'Etat n'a pas eu de réponse conséquente à nos problèmes ". " Les six ans que nous avons passés dans la zone gouvernementale ont été un calvaire total pour tous les déplacés qui avaient regagné le sud. Nous n'avons jamais bénéficié de don ", rencherit M. Guéhi Michel, une autre victime de guerre. Quant à Mme Kouamé Ama Henriette, présidente du FADEREV, elle dira, " Lorsque nous sommes partis de Bouaké, aux premières heures de la crise pour Yamoussoukro, il faut reconnaître que cela n'a pas été du tout facile pour nous. Personne ne nous a pris en charge. Plusieurs d'entre nous n'étaient pas logés au centre Miégou "
après l'APO, les déplacés retournent sur la pointe des pieds
Avec l'accord politique de Ouagadougou signé le 04 mars 2007 entre les deux protagonistes de la crise ivoirienne, les déplacés vont commencer à rentrer de leur exil forcé. Par vagues successives, de façon volontaire, certains déplacés et victimes de guerre vont revenir dans les zones contrôlées par l'ex rébellion. D'autres structures tels ''Akwaba'' et ''Saint Viateur'' vont s'impliquer dans leur convoyage. Tandis que d'autres entreprendront un retour volontaire en collaboration avec le ministère des Déplacés et victimes de guerre. Mais les nombreux déplacés au nombre de 349 seront abandonnés à leur sort dans la ville de Bouaké à la gare UTB. C'était le 05 décembre 2007 dans le cadre de l'organisation du retour volontaire initié par le ministère des Déplacés et victimes de guerre. Tout ce qui leur avait été promis n'a pas été respecté. Leurs rêves seront une fois encore brisés. " Le projet de retour volontaire a été un fiasco. Nous sommes comme des personnes qui ont été déposées sur une île ", a fait savoir M. Gbaguidi.
La réorganisation
des déplacés
Des maisons inachevées, des écoles vont accueillir la plupart d'entre eux. Sans travail, ils vont sillonner chaque jour toute la ville à la recherche d’hommes de bonne volonté qui viendraient à leur secours. Certains ne pouvant plus supporter cette autre souffrance, retourneront à Abidjan. De plus en plus, la vie devenait dure pour eux. Ainsi, quelques mois après, ne voyant rien à l'horizon se dessiner pour eux, ils vont décider de s'organiser et de prendre leur destin en main. " Nous avons estimé qu'il fallait qu'on se mette ensemble pour parler d'une même voix. C'est ainsi que pour ne pas aller en rangs dispersés, nous avons décidé de mettre nos idées ensemble et prendre notre destin en main. D'où la naissance de FADEREV qui regroupe aujourd'hui plus de 45 associations et mouvements. La création de la Faderev est la démonstration de la prise de conscience des déplacés. Nous devrons nous battre pour nous réinsérer ", a expliqué Mme Kouamé Ama Henriette. Deux structures verront donc le jour à Bouaké. A savoir la coordination des déplacés et victimes de guerre de la Vallée du Bandama et le Faderev (Fédération des associations des déplacés retournés volontaires et victimes de guerre). Allah, membre de la coordination en donne les motivations, "Nous avons jugé utile à un moment donné qu'il fallait qu'on se mette ensemble puisque nous avions le même destin. Nous n'avions pas de soutien à cette époque et beaucoup d'eau a coulé sous le pont. Afin de faire face à notre situation qui s'empirait chaque jour et n'ayant plus d'interlocuteur, nous avons décidé de créer une coordination pour gérer au quotidien nos problèmes ". M. Gbaguidi Augustin Edmond a, lui, indiqué : ''Aujourd'hui, grâce au bon Dieu, nous nous débrouillons un peu. On se débrouille comme on peut. Mais beaucoup reste encore à faire. Nous avons beaucoup de problèmes. Nos enfants ne vont pas à l'école. Nous ne travaillons toujours pas. Nous nous prenons en charge nous-mêmes ".
Les déplacés et
victimes de guerre
s'auto-financent
Cette réorganisation des différents mouvements a commencé à porter ses fruits. Après l'acquisition d'un siège, son équipement et l'adhésion des membres et associations, ils projettent de créer des petits projets. Sans soutien, lâchés par tous, ils vont travailler dur durant des mois. Partout où ils sont passés, ils ont été traités de mendiants. Avec le temps, certains parmi eux ont eu de petites activités. " Aujourd'hui, grâce au bon Dieu, la Faderev se porte très bien. On se bat au quotidien et on n'a pas de soutien de qui que ce soit. C'est nous-mêmes qui nous prenons en charge par de petites cotisations. Quand on va dans des bureaux, on nous prend pour des mendiants. Cela nous choque. Aujourd'hui, à 5 heures, tout le monde est debout. Et nous nous battons chaque jour sur le terrain ", affirme Mme Kouamé Ama Henriette.
Quelques jours passés avec eux, nous permettent d'affirmer que malgré tout, ils arrivent tant bien que mal à se réinsérer dans le tissu économique et social. Avec courage et patience et grâce à leur sagacité et à leur dynamisme, des coopératives et autres activités génératrices de revenus (AGR) ont été créées. La présidente de la Faderev précise à ce propos :" Nous avons une centaine de nos femmes que nous avons financées nous-mêmes. Elles vont faire du ''Lôgôdougou'', aller en brousse pour acheter de la marchandise (maïs, baobab, arachide, tomate, etc). Avec nos petits moyens, on ne peut pas acheter les choses qui peuvent s’avarier, mais des choses qui ne pourrissent pas vite ". M. Gbaguidi énumère ici les projets réalisés " Nous avons une coopérative. On fait du vivrier. Nous avons créé un marché à la gare de M'Bahiakro ". " Nous, à notre niveau, certains se débrouillent encore. Nous avons, à travers nos cotisations, financé certains de nos camarades. Avec ce qu'on aura, par la suite, nous allons financer, si tout se passe bien, d'autres de nos camarades. Au fur et à mesure, nous allons avancer. Puisque, ces sources de financement sont nos propres cotisations ", ajoute M. Allah. Après avoir fait un tour sur des sites, à savoir, le marché situé à la gare de M'Bahiakro, au jardin potager, au centre d'élevage de poulet, etc, les déplacés et victimes de guerre, sans soutien, se sont jetés corps et âme dans le tissu économique. Ils se réinsèrent petit-à-petit dans la vie économique de Bouaké.
L'antenne régionale du ministère des Déplacés et victimes de guerre refuse de nous parler
A l'antenne régionale du ministère des Déplacés et victimes de guerre, M. Silué que nous avons tenté de rencontrer, afin de faire l'état des lieux et d'échanger sur la question de ceux qu'il est censé gérer au quotidien, n'a pas souhaité s'adresser à nous, à cause du nom du journal ''Le Nouveau Réveil''.
Le cri de détresse
des déplacés et
victimes de guerre
Il faut cependant dire que beaucoup de choses restent à faire. Plusieurs familles et personnes qui ont regagné la ville de Bouaké rencontrent d'énormes difficultés. Ceux qui ont tout perdu recommencent à zéro leur vie. Avec le poids de l'âge et la fatigue pour certains d'entre eux, le bonheur n’est pas pour demain. Certaines personnes rencontrées avec qui nous avons voulu échanger ont coulé des larmes en souhaitant ne pas s'exprimer sur le sujet. Pour eux, la vie est à recommencer.
DELMAS ABIB
delmas2000@hotmail.com
après l'APO, les déplacés retournent sur la pointe des pieds
Avec l'accord politique de Ouagadougou signé le 04 mars 2007 entre les deux protagonistes de la crise ivoirienne, les déplacés vont commencer à rentrer de leur exil forcé. Par vagues successives, de façon volontaire, certains déplacés et victimes de guerre vont revenir dans les zones contrôlées par l'ex rébellion. D'autres structures tels ''Akwaba'' et ''Saint Viateur'' vont s'impliquer dans leur convoyage. Tandis que d'autres entreprendront un retour volontaire en collaboration avec le ministère des Déplacés et victimes de guerre. Mais les nombreux déplacés au nombre de 349 seront abandonnés à leur sort dans la ville de Bouaké à la gare UTB. C'était le 05 décembre 2007 dans le cadre de l'organisation du retour volontaire initié par le ministère des Déplacés et victimes de guerre. Tout ce qui leur avait été promis n'a pas été respecté. Leurs rêves seront une fois encore brisés. " Le projet de retour volontaire a été un fiasco. Nous sommes comme des personnes qui ont été déposées sur une île ", a fait savoir M. Gbaguidi.
La réorganisation
des déplacés
Des maisons inachevées, des écoles vont accueillir la plupart d'entre eux. Sans travail, ils vont sillonner chaque jour toute la ville à la recherche d’hommes de bonne volonté qui viendraient à leur secours. Certains ne pouvant plus supporter cette autre souffrance, retourneront à Abidjan. De plus en plus, la vie devenait dure pour eux. Ainsi, quelques mois après, ne voyant rien à l'horizon se dessiner pour eux, ils vont décider de s'organiser et de prendre leur destin en main. " Nous avons estimé qu'il fallait qu'on se mette ensemble pour parler d'une même voix. C'est ainsi que pour ne pas aller en rangs dispersés, nous avons décidé de mettre nos idées ensemble et prendre notre destin en main. D'où la naissance de FADEREV qui regroupe aujourd'hui plus de 45 associations et mouvements. La création de la Faderev est la démonstration de la prise de conscience des déplacés. Nous devrons nous battre pour nous réinsérer ", a expliqué Mme Kouamé Ama Henriette. Deux structures verront donc le jour à Bouaké. A savoir la coordination des déplacés et victimes de guerre de la Vallée du Bandama et le Faderev (Fédération des associations des déplacés retournés volontaires et victimes de guerre). Allah, membre de la coordination en donne les motivations, "Nous avons jugé utile à un moment donné qu'il fallait qu'on se mette ensemble puisque nous avions le même destin. Nous n'avions pas de soutien à cette époque et beaucoup d'eau a coulé sous le pont. Afin de faire face à notre situation qui s'empirait chaque jour et n'ayant plus d'interlocuteur, nous avons décidé de créer une coordination pour gérer au quotidien nos problèmes ". M. Gbaguidi Augustin Edmond a, lui, indiqué : ''Aujourd'hui, grâce au bon Dieu, nous nous débrouillons un peu. On se débrouille comme on peut. Mais beaucoup reste encore à faire. Nous avons beaucoup de problèmes. Nos enfants ne vont pas à l'école. Nous ne travaillons toujours pas. Nous nous prenons en charge nous-mêmes ".
Les déplacés et
victimes de guerre
s'auto-financent
Cette réorganisation des différents mouvements a commencé à porter ses fruits. Après l'acquisition d'un siège, son équipement et l'adhésion des membres et associations, ils projettent de créer des petits projets. Sans soutien, lâchés par tous, ils vont travailler dur durant des mois. Partout où ils sont passés, ils ont été traités de mendiants. Avec le temps, certains parmi eux ont eu de petites activités. " Aujourd'hui, grâce au bon Dieu, la Faderev se porte très bien. On se bat au quotidien et on n'a pas de soutien de qui que ce soit. C'est nous-mêmes qui nous prenons en charge par de petites cotisations. Quand on va dans des bureaux, on nous prend pour des mendiants. Cela nous choque. Aujourd'hui, à 5 heures, tout le monde est debout. Et nous nous battons chaque jour sur le terrain ", affirme Mme Kouamé Ama Henriette.
Quelques jours passés avec eux, nous permettent d'affirmer que malgré tout, ils arrivent tant bien que mal à se réinsérer dans le tissu économique et social. Avec courage et patience et grâce à leur sagacité et à leur dynamisme, des coopératives et autres activités génératrices de revenus (AGR) ont été créées. La présidente de la Faderev précise à ce propos :" Nous avons une centaine de nos femmes que nous avons financées nous-mêmes. Elles vont faire du ''Lôgôdougou'', aller en brousse pour acheter de la marchandise (maïs, baobab, arachide, tomate, etc). Avec nos petits moyens, on ne peut pas acheter les choses qui peuvent s’avarier, mais des choses qui ne pourrissent pas vite ". M. Gbaguidi énumère ici les projets réalisés " Nous avons une coopérative. On fait du vivrier. Nous avons créé un marché à la gare de M'Bahiakro ". " Nous, à notre niveau, certains se débrouillent encore. Nous avons, à travers nos cotisations, financé certains de nos camarades. Avec ce qu'on aura, par la suite, nous allons financer, si tout se passe bien, d'autres de nos camarades. Au fur et à mesure, nous allons avancer. Puisque, ces sources de financement sont nos propres cotisations ", ajoute M. Allah. Après avoir fait un tour sur des sites, à savoir, le marché situé à la gare de M'Bahiakro, au jardin potager, au centre d'élevage de poulet, etc, les déplacés et victimes de guerre, sans soutien, se sont jetés corps et âme dans le tissu économique. Ils se réinsèrent petit-à-petit dans la vie économique de Bouaké.
L'antenne régionale du ministère des Déplacés et victimes de guerre refuse de nous parler
A l'antenne régionale du ministère des Déplacés et victimes de guerre, M. Silué que nous avons tenté de rencontrer, afin de faire l'état des lieux et d'échanger sur la question de ceux qu'il est censé gérer au quotidien, n'a pas souhaité s'adresser à nous, à cause du nom du journal ''Le Nouveau Réveil''.
Le cri de détresse
des déplacés et
victimes de guerre
Il faut cependant dire que beaucoup de choses restent à faire. Plusieurs familles et personnes qui ont regagné la ville de Bouaké rencontrent d'énormes difficultés. Ceux qui ont tout perdu recommencent à zéro leur vie. Avec le poids de l'âge et la fatigue pour certains d'entre eux, le bonheur n’est pas pour demain. Certaines personnes rencontrées avec qui nous avons voulu échanger ont coulé des larmes en souhaitant ne pas s'exprimer sur le sujet. Pour eux, la vie est à recommencer.
DELMAS ABIB
delmas2000@hotmail.com