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Société Publié le mardi 7 avril 2009 | Nord-Sud

Crise autour de l`organisation du hadj - La vérité sur la “guerre” entre Tagro Désiré et les imams

Le Conseil supérieur des imams veut que le hadj soit organisé par une structure autonome dirigée par la communauté islamique avec un préfinancement de l`Etat. Le ministre de l`Intérieur dit « non ».

Nul ne peut nier le désaccord actuel entre le ministère de l`Intérieur et les imams au sujet de l`organisation du hadj. Le rapport du pré bilan de l`édition précédente organisé les 24, 25 et 26 mars à l`hôtel du district d`Abidjan le démontre clairement. Au chapitre des difficultés, il ressort que la direction des cultes reproche au Conseil supérieur des imams (Cosim) d`avoir été « un partenaire difficile, suspicieux, intransigeant imposant à la limite ses points de vue.» Le même document rapporte que le Cosim est mécontent d’avoir été « exclu de la prise des grandes décisions.» La réalité de cette crise se résume en ceci : la tutelle trouve son partenaire trop regardant dans sa gestion du hadj, quand le Cosim, de son côté, ne veut pas jouer les seconds rôles dans un processus où certaines décisions peuvent être préjudiciables aux pèlerins. Les imams estiment par exemple que le changement de calendrier à l`origine du blocage des pèlerins à La Mecque n`aurait pas eu lieu s`ils étaient représentés au comité exécutif qui a pris les grandes décisions du hadj. Le Cosim a publiquement dénoncé un « manque de transparence » avant même le départ des pèlerins l`année dernière.


Depuis 2008, les imams avaient prévenu

Dans un article que nous publions le 5 novembre 2008 (Nord-Sud N°1041), les guides prenaient déjà à témoin la communauté nationale de ce qu`ils n`avaient pas été associés à l`instauration d`une franchise de 32 kg de bagages auxquels chaque pèlerin était astreint. L`imam Ousmane Diakité, represantant du Cheick Aboubacar Fofana au sein du comité de pilotage, avait clairement expliqué que cette mesure n`aurait pas été bien accueillie par les pèlerins musulmans habitués à revenir de la Terre sainte avec des présents pour leurs proches. Pour ce faire, le Cosim était pour un minimum de 50 Kg. «Il y a des aspects du hadj que seule la communauté musulmane maîtrise. Il faut permettre aux pèlerins de ramener des cadeaux à leurs parents. Cela est très important. Si nous avions été saisis dès le départ, nous aurions demandé qu`on choisisse un autre avion qui aurait permis de transporter une quantité plus élevée de bagages », avait affirmé l`imam de la Riviera-Bonoumin. Dans le même article, la directrice de la vie cultuelle, Mme Koffi Florentine, avait en effet indiqué que la franchise répondait à des impératifs techniques : «Air Ivoire nous a expliqué que le poids autorisable pour les bagages est fonction du taux de remplissage de l`avion. Or, l`avion de 581 places qui sera utilisé sera rempli à chacun de ses voyages. Le poids total de bagages que cela autorise a été divisé entre les passagers pour obtenir la franchise qui a été fixée. » Elle a ajouté que cette décision ne relevait pas du ressort du comité de pilotage. « Ce point n`a jamais fait l`objet d`une discussion préalable. Air Ivoire n`a pas été choisie par le comité de pilotage, mais, par le gouvernement. Ce sont des questions techniques de sécurité en matière de transport aérien. Nous n`avions pas à nous immiscer. Avant le lancement du hadj, nous avons convoqué une réunion du comité de pilotage au cours de laquelle Air Ivoire a donné l`information. Les imams ont voulu que le poids soit revu à la hausse, mais cela n`a pas été acquis », a poursuivi Mme Koffi. Aujourd`hui, les pèlerins attendent toujours les valises uniformisées qu`ils devaient utiliser dans le cadre de cette franchise, valises qui leur ont été facturées à 39.000 Fcfa par personne. Le Cosim n`était pas organisateur du hadj. Il s`y est impliqué à la demande des candidats malheureux du hadj 2006 bis et avec la caution du chef de l`Etat qui était alors heureux d`avoir « désormais un interlocuteur au sein de la communauté musulmane.»


Le retour des associations

Les imams ne veulent plus continuer à jouer ce rôle dans les conditions qui ont conduit au malheur d`une grande partie des pèlerins de 2008. Il estime que ces désagréments auraient pu être évités si les musulmans avaient été impliqués dans la prise de grandes décisions du hadj comme celle relative au calendrier du retour. Il souhaite la mise en place d`un cadre institutionnel et la création d`une structure autonome et unique de l`organisation du hadj, confiée à la communauté musulmane. Ce sont les recommandations majeures d`un séminaire que le conseil a organisé sur le sujet les 21 et 22 mars. Au fond, les guides musulmans veulent qu`en attendant l`autonomie financière du « Bureau du hadj et de la Oumra » les opérations du pèlerinage musulman soient préfinancées par l`Etat à titre régalien. En face, le ministère de l`Intérieur rétorque qu`une telle structure ne peut pas fonctionner avec un financement public. « Si la communauté musulmane veut organiser le hadj, elle doit le préfinancer elle-même », répète le ministre Désiré Tagro. En d`autres termes, l`Etat ne préfinancera que s`il est le principal organisateur. Pour mieux affronter le Cosim qui pose trop de questions sur les bilans financier et moral du hadj 2008 et qui exige même un audit de toutes les opérations du pèlerinage à La Mecque depuis 2004, la tutelle a fait appel aux associations islamiques qui ruminent encore leur éloignement depuis la catastrophe de décembre 2006. Jusqu`à cette date, le hadj était organisé par 13 organisations agréées qui recrutaient les pèlerins et les amenaient à La Mecque en réalisant des bénéfices. Malheureusement, cette année-là, n`ayant pas reçu à temps la totalité de l`acompte que ces associations devaient lui verser, l`avionneur qu`elles avaient choisi a résilié le contrat. Tous les efforts pour obtenir d`autres appareils sont restés vains, et plus de 2000 candidats qui avaient payé chacun 1,7 million Fcfa pour le voyage sont restés bloqués à Abidjan. En larmes. L`année suivante, l`Etat s`est engagé à combler les trous financiers causés par ce désastre pour permettre aux victimes d`effectuer le hadj sans débourser de nouveaux frais. Le hadj 2007 qui fut un succès total a été donc organisé sans ces associations, mais, avec le Cosim « l`interlocuteur.» Restées silencieuses en 2007, leur échec étant encore trop frais dans les esprits, les intermédiaires ont retrouvé de la voix en 2008. Ils ont demandé à être réintégrés dans le hadj, estimant que les imams ne sont pas représentatifs de l`ensemble de la communauté musulmane. Au-delà des objectifs matériels, ce réveil rentrait dans le cadre de la rébellion dirigée par certains imams qui ont voulu conduire aux destinées du Cosim, suite au décès de son précédent président, le Cheick Anzoumana Konaté, ex-imam de la mosquée de l`avenue 8 de Treichville. Ils refusent de se soumettre à l`autorité du Cheick Aboubacar Fofana choisi par la majorité des imams. La grogne n`a pas été entendue, et l`Etat a continué à travailler avec le Cosim. Opposé aujourd`hui à cette structure, Tagro sait qu`il peut compter sur l`aide de ses ennemis. C`est donc sans surprise, que ceux-ci, appelés à se prononcer sur l`avenir du hadj, ont vite fait de prendre le contre-pied du conseil des imams. Si leur avis est retenu, il n`est pas à exclure que le Cosim décide de se retirer. Ce sera le retour à la case départ, et l`Etat devra assumer les conséquences de son choix. Ne dit-on pas que les mêmes causes entrainent les mêmes effets?

Cissé Sindou
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