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Politique Publié le dimanche 12 avril 2009 | AFP

Côte d`Ivoire: des miliciens frustrés de ne pouvoir intégrer l`armée

YAMOUSSOUKRO — Entre la vie de fermier et celle de soldat, des miliciens favorables au président ivoirien Laurent Gbagbo auraient, sans hésiter, préféré le port du treillis. Mais pour leur réinsertion, le gouvernement leur propose uniquement de retrouver la vie civile.

"On est resté sur notre faim. Ce n'est pas ce qu'on nous avait promis", affirme à l'AFP le "commandant" Dié Bamba, chef de la compagnie des "Scorpions guetteurs", dans leur quartier général à Yamoussoukro (centre), la capitale politique du pays.

Comme leurs "frères d'armes" du Sud, ces miliciens se sont regroupés en 2003. Aux côtés des Forces de défense et de sécurité (FDS, loyalistes), ils ont défendu le président Gbagbo à la suite du coup d'Etat manqué de la rébellion des Forces nouvelles (FN) en septembre 2002.

Après avoir combattu les rebelles installés à Bouaké (100 km au nord de Yamoussoukro), ces quelque 750 hommes espéraient, une fois la guerre finie, intégrer l'armée.

Mais leur rêve militaire a tourné court.

"On nous dit qu'on ne peut pas rentrer dans l'armée et qu'il faut plutôt nous orienter dans la vie active", regrette Dié Bamba, entouré d'une poignée de ses "chefs de guerre" dans leur Poste de commandement (PC).

En fait de PC, il s'agit de la concession familiale du commandant, point de ralliement de ces "Scorpions" âgés de 25 à 30 ans.

Les "micro-projets" financés par l'ONU qu'on leur présente lui inspirent de l'amertume: "Comment peut-on proposer ça à des gens qui ont combattu pendant la guerre?"

Au début du conflit, "on infiltrait le camp ennemi pour donner des renseignements sur ses positions aux loyalistes", se souvient le chef milicien.

"Puis on s'est dit qu'on pouvait les aider directement en participant aux combats", comme en novembre 2004, lors d'une opération-éclair lancée par Abidjan pour tenter, en vain, de reprendre le nord aux FN.

Depuis, les accords de paix se sont succédé. Le dernier en date, signé en mars 2007 à Ouagadougou et complété fin 2008, prévoit le désarmement des ex-rebelles (45.000 revendiqués par les FN), le démantèlement des milices (25.000 hommes recensés au sud, au centre et à l'ouest) et une prime de démobilisation de 500.000 FCFA (762 euros) par combattant.

Désarmement et démantèlement doivent s'achever "au plus tard deux mois" avant l'élection présidentielle, reportée depuis 2005 et dont la date reste inconnue.

Alors que 5.000 ex-rebelles doivent entrer dans la nouvelle armée, les miliciens n'ont d'autre perspective que dans la vie civile.

"C'est injuste, tout ça!", fulmine Justin Brou, commandant en second des "Scorpions guetteurs", qui se dit "récompensé en monnaie de singe".

Malgré tout, ses amis et lui ont accepté de passer par les différentes étapes de leur démantèlement, à commencer par le "profilage" en février dernier. Ils s'orientent vers les "micro-projets" professionnels des Nations unies.

"J'ai choisi la mode et la couture", indique Justin, écouteur de téléphone portable à l'oreille.

Son collègue Dabila Yao, responsable du "centre opérationnel", a décidé de s'investir dans le commerce du charbon de bois, tandis que Christophe Brou, un autre responsable du PC, veut devenir fermier.

Quant au "commandant" Bamba, il songe à vendre jus de fruits et eau minérale.

"On prend de l'âge et c'est plus une question de survie", justifie-t-il, l'air sombre.
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