Vendredi 7 mars 2008, 8 heures 30 minutes. Les détenus, comme d'habitude, sont heureux de retrouver l'air frais de la cour de la prison après une nuit horrible passée dans la chaleur volcanique des cellules. Construites pour 10 personnes, chaque soir, plus de 80 détenus s'y retrouvent dont les plus chanceux dorment débout, de 18 heures à 8 heures 30 du matin. En rang, les déférés de la veille se dirigent vers l'administration pour les formalités administratives. Soudain, des cris menaçants fusent : " c'est lui, c'est lui, attrapez-le, attrapez-le… ". Le destinataire des cris, du nom de Kabirou, en habitué de la prison, réalise que sa fin est proche et prend ses jambes à son cou. Mais, abandonné par la chance, il oublie de prendre la direction du greffe où se trouvent les gardes pénitentiaires et préfère aller se cacher dans sa cellule. Une mauvaise appréciation de la situation qui va lui coûter la vie : une libération finale comme on le dit à la MACA. Kabirou était un détenu utilisé par le chef de la sécurité de la prison comme un "agent de renseignements". Son rôle consistait à écouter les conversations jugées suspectes des autres détenus, à dénoncer ceux s'adonnant à la consommation de drogue ou à la vente de la cigarette, ou encore possédant un objet jugé dangereux ou un portable, etc. Kabirou faisait bien son travail. Il le faisait si bien qu'il n'hésitait pas à soumettre même des gardes pénitentiaires à une fouille en règle. Il réussissait parfois à saisir des paquets de cigarette ici et là. Il faisait si bien son travail qu'il ne se passait pas plus d'un jour, sans qu'un détenu dénoncé proprement par ses soins, ne soit livré aux "requins " pour être sauvagement battu par ces derniers. Parfois, jusqu'à ce que le dénoncé s'évanouisse sous la pluie des coups, avant de se retrouver dans une cellule blindée du bâtiment C pour 10 ou 15 jours de punition, sans soins voire sans nourriture. Les "requins" sont des détenus (généralement condamnés à de lourdes peines de prison) qui sont utilisés par l'administration de la MACA pour assurer la sécurité ou plutôt pour faire leur loi, dans la cour de la prison désertée par les gardes pénitentiaires. Kabirou faisait donc bien son travail et comme tout homme qui a une parcelle de pouvoir a une tendance naturelle à en abuser, Kabirou usait de la protection dont il bénéficiait pour se livrer au chantage et à la délation ; faisant punir des détenus y compris les "requins", pour un oui ou pour un non, oubliant qu'il se trouvait dans une prison de plus de 5000 personnes. Et, ce qui devait arriver, arriva. Poursuivi, ce vendredi-là, au matin, par une horde de détenus excités, Kabirou fut rattrapé au 3ème étage du bâtiment B, tiré par les pieds jusqu'au rez-de-chaussée et exposé dans la cour, avant d'être battu à mort sous le regard impuissant des gardes pénitentiaires et du mandant de Kabirou qui observaient tous la scène depuis le greffe. Ainsi mourut KABIROU qui croyait naïvement que la vie d'un détenu avait de la valeur à la MACA.
A mercredi prochain !
Par Assale Tiémoko (sosjusticeci@live.fr)
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