Le lycée scientifique de Yamoussoukro, temple par excellence du savoir, est loin de retrouver ses habits d'apparat. Occupant illicitement les bâtiments de l'internat, les enseignants dits déplacés de guerre ont transformé l'établissement de référence en un véritable quartier populaire. Laissant ainsi les effets néfastes sur le rendement scolaire des élèves. Notre dernier passage le week-end sur le site nous a permis de découvrir beaucoup de choses troublantes.
Coups de pilon, bruits intempestifs de casseroles, pleurs d'enfants, constituent désormais le refrain de l'orchestre mis en place par les nouveaux occupants des chambres de l'internat du lycée scientifique. L'école chère à feu Félix Houphouët-Boigny présente un visage de tristesse et de déchirement. L'environnement auquel sont soumis les cracks montre réellement que l'enseignement n'est pas loin du rabais. La mayonnaise est loin de prendre avec la cohabitation civils-élèves. Interrogés sur cet état de fait, les responsables à charge du système éducatif à Yamoussoukro réagissent.
Les causes lointaines de l'occupation du site retracées, par l'un des secrétaires généraux de la DREN.
"La guerre est apparue, les populations des zones ex assiégées firent mouvement vers la capitale politique. Elles ont été accueillies par le préfet d'alors. Et puis, nous nous sommes rendus compte qu'il y avait beaucoup d'élèves. Puisque les parents sont venus avec leurs enfants. Et donc madame le DREN, Mme Blé Cécile, en son temps, avait écrit au ministre lui demandant d'ouvrir des salles de classes annexes qu'on appelait les classes relais. On en a ouvert partout. Quand il y a des élèves, il faut bien des professeurs. On a alors demandé aux professeurs déplacés venus des zones CNO de venir nous soutenir. Mais qu'est ce qu'ils nous ont posé comme problème ? Ils nous ont dit qu'ils étaient prêts à enseigner, mais qu'ils avaient un problème de logement. Les bâtiments étant vides, madame le DREN a encore écrit au ministre Amani pour l'obtention des chambres du lycée scientifique pour loger ces enseignants-là. Monsieur le ministre ayant accédé à notre demande, nous leur avons demandé de payer la somme de cinquante mille par an pour aider la Direction Régionale de l'Education Nationale à mettre les bâtiments en état. Car ils étaient vieux et on n'y trouvait ni l'eau ni courant. Toutefois, nous leur avions précisé que l'occupation des locaux devrait être temporaire. Voilà en clair comment les bâtiments ont été occupés jusqu'à ce jour. Actuellement où nous parlons, il n'y a plus d'enseignants déplacés de guerre. Ceux qui y vivent en ce moment sont des enseignants résidant à Yamoussoukro ajoutés à des civils qui sont attirés par le moindre coût des chambres de l'internat. "
Le proviseur du lycée scientifique : " Les nuisances sont importantes "
M. Kékémo Daniel, le premier responsable en charge de l'établissement, n'a pas manqué de déplorer cette situation relative à l'occupation des bâtiments par des civils. " Les nuisances sont importantes. Les cris d'enfants, les disputes, la gestion des ordures ménagères, les mouvements de personnes, tout cela n'est pas fait pour améliorer la qualité de l'encadrement. Alors, il faut qu'ils libèrent les bâtiments pour que les vrais ayants-droit puissent bénéficier de ces chambres. "
Egrainant le chapelet des problèmes existant dans l'enceinte pédagogique, des éducateurs d'internat enfoncent le clou : " Vous savez que dans un internat, toutes les sorties des élèves sont réglementées ainsi que leurs mouvements. Mais ici, on n'arrive pas à canaliser, à contrôler les élèves. On peut parfois trouver les civils dans les bâtiments de nos enfants ou l'inverse. L'internat est un internat de garçons. Mais les jeunes filles s'entêtent à faire la cour à nos internes. Aujourd'hui, le lycée est devenu comme un quartier de la ville. Tous les phénomènes se déroulent ici. On y trouve les drogués, des prostituées et aussi des agressions répétées. C'est vraiment dommage et déplorable car le site est incontrôlable et ça, c'est dangereux pour nos élèves. " C'est dans la même veine qu'un élève nous a crié son ras-le-bol : " On ne plus bosser. Nous sommes perturbés par les mouvements, les cris et pleurs des bébés. Aux heures d'études, nous sommes encore confrontés à certaines réalités telles que l'occupation des salles d'études par les enfants des nouveaux résidents. Cela a joué sur mon résultat de premier trimestre. Que monsieur le ministre prenne une décision pour les faire partir. " A-t-il exprimé sa colère.
Gestionnaire et occupants à couteaux tirés
Face au non paiement de loyer par certains occupants, la tutelle a décidé de réguler la gestion des chambres de l'internat habité par les civils. Unis au sein d'une association dénommée CODERLYS (Coordination des Enseignants Résidant au Lycée Scientifique), le noyau en présence n'entend pas démordre. Son président, M. Yao Bruno, entend donner des explications : " Nous sommes arrivés au début de la crise, précisément en 2002. Les responsables du système éducatif ont accepté de nous loger sur le site du lycée scientifique. Au début, c'était deux bâtiments qui étaient occupés par les enseignants. Au fur et à mesure, cela s'est étendu et aujourd'hui nous sommes à sept bâtiments. Au début, il fallait payer soixante mille francs pour toute l'année. Et puis après il fallait payer quinze mille francs renouvelables et aujourd'hui nous sommes à huit mille francs par mois. On nous demande de quitter la cité en août. Selon moi, comme il y a toujours problème de logement à Yamoussoukro et que ce n'est pas tout le monde qui a construit, il serait mieux de laisser les résidents sur le site jusqu'à la fin de l'année pour que ceux qui doivent retourner retournent tranquillement. A mon avis, l'exécution de la date butoir dépend des résidents eux-mêmes. Nous allons discuter avec eux au cours d'une assemblée générale pour prendre la décision de partir ou pas. " A-t-il soutenu.
Le nouveau promu pour réglementer la situation, le gestionnaire, M. Kobena, entend appliquer les règles de la convention signée entre les deux parties, à savoir la DREN et les occupants : " Au départ, il était dit que ce sont les enseignants du public qui devraient avoir accès aux dortoirs. Mais certains de leurs collègues déplacés ont plaidé pour être là. Les déplacés sont pratiquement tous partis certes. Mais vu l'insécurité et l'instabilité dans les zones ex- assiégées, ils ont dû laisser leurs familles dans les chambres par mesure de prudence. Même si le problème de logement se pose à leur niveau, il faut qu'ils partent. C'est un lieu d'études et non une cité pour civils. Notons qu'aujourd'hui, les départs sont timides. Mais nous sommes dans une logique de respect strict du procès verbal signé le 13 octobre 2008 en présence du représentant du préfet. Même s'ils respectent les clauses de paiement, cela n'est pas une fin en soi… " A-t-il tenu à préciser.
Fauste Pierrette (Directeur régional de l'Education nationale) : "Ils seront tous vidés fin août 2009"
Le DREN de Yamoussoukro, Mme Fauste Pierrette, sans détour, a tenu à faire la lumière sur l'épineux problème d'occupation de l'internat du lycée scientifique par les civils, qui, depuis un certain temps, est devenu comme une prise en otage des élèves dans leur propre univers. Toute chose qui a amené la représentante du ministre Bleu Lainé à faire un grand déballage sur cette affaire qui mérite une attention particulière. " Je dirai que nous sommes aujourd'hui à la deuxième phase d'un feuilleton qui n'a que trop duré. Il est temps que nous prenions nos responsabilités pour mettre fin à l'anarchie qui demeure au sein du lycée. Le mois d'octobre de l'an dernier, un bras de fer nous avait opposé aux occupants des chambres de l'internat du lycée scientifique. La DREN que je dirige avait décidé d'expulser manu militari 560 familles de ces logements. Mais après plaidoyer des différentes associations (CODERLYS, CESCI…), nous avions décidé de les laisser achever l'année scolaire. Mais je crois que cela a été notre erreur car aujourd'hui, ces enseignants dont le nombre s'est accru (environ 3000 personnes), ne manifestent aucune volonté de quitter. Et pourtant, la date butoir de déguerpissement est fixée pour le 31 Août 2009 au plus tard relativement au procès verbal signé avec lesdites associations et mouvements des droits de l'Homme. Je crois que cet état de fait est intolérable pour des enseignants qui ont un salaire de plus de trois cent mille francs et une indemnité de logement de plus de quarante mille francs par mois qui s'adonnent encore à la facilité. Aujourd'hui, le lycée scientifique est devenu un site où les maîtresses sont gardées pour leurs amants. Et aussi la présence remarquable des miliciens. Toutes ces forces en présence ont entraîné les cas de viol de jeunes filles, le phénomène de la drogue et plein d'autres vices. Le lycée se meurt à petit feu. Antérieurement, nous étions à un taux de réussite qui oscillait entre 90% et 100%. Avec l'arrivée de ces derniers, nous sommes à 86%. C'est quand même important de le signaler.
Les éducateurs sont démotivés. Ils estiment que le travail est devenu difficile avec la présence des civils. Ils ne vont pratiquement plus vérifier si les enfants sont dans les chambres à partir de 22 heures de peur de se faire agresser.
Qu'ils comprennent donc que si nous nous battons, c'est pour l'amélioration des résultats des enfants. Alors comment réussir si les enfants travaillent dans un tel environnement ? Trop c'est trop. Ils seront vidés sans exception fin Août. " S'est-elle indignée.
Jean Paul Loukou à Yamoussoukro
Coups de pilon, bruits intempestifs de casseroles, pleurs d'enfants, constituent désormais le refrain de l'orchestre mis en place par les nouveaux occupants des chambres de l'internat du lycée scientifique. L'école chère à feu Félix Houphouët-Boigny présente un visage de tristesse et de déchirement. L'environnement auquel sont soumis les cracks montre réellement que l'enseignement n'est pas loin du rabais. La mayonnaise est loin de prendre avec la cohabitation civils-élèves. Interrogés sur cet état de fait, les responsables à charge du système éducatif à Yamoussoukro réagissent.
Les causes lointaines de l'occupation du site retracées, par l'un des secrétaires généraux de la DREN.
"La guerre est apparue, les populations des zones ex assiégées firent mouvement vers la capitale politique. Elles ont été accueillies par le préfet d'alors. Et puis, nous nous sommes rendus compte qu'il y avait beaucoup d'élèves. Puisque les parents sont venus avec leurs enfants. Et donc madame le DREN, Mme Blé Cécile, en son temps, avait écrit au ministre lui demandant d'ouvrir des salles de classes annexes qu'on appelait les classes relais. On en a ouvert partout. Quand il y a des élèves, il faut bien des professeurs. On a alors demandé aux professeurs déplacés venus des zones CNO de venir nous soutenir. Mais qu'est ce qu'ils nous ont posé comme problème ? Ils nous ont dit qu'ils étaient prêts à enseigner, mais qu'ils avaient un problème de logement. Les bâtiments étant vides, madame le DREN a encore écrit au ministre Amani pour l'obtention des chambres du lycée scientifique pour loger ces enseignants-là. Monsieur le ministre ayant accédé à notre demande, nous leur avons demandé de payer la somme de cinquante mille par an pour aider la Direction Régionale de l'Education Nationale à mettre les bâtiments en état. Car ils étaient vieux et on n'y trouvait ni l'eau ni courant. Toutefois, nous leur avions précisé que l'occupation des locaux devrait être temporaire. Voilà en clair comment les bâtiments ont été occupés jusqu'à ce jour. Actuellement où nous parlons, il n'y a plus d'enseignants déplacés de guerre. Ceux qui y vivent en ce moment sont des enseignants résidant à Yamoussoukro ajoutés à des civils qui sont attirés par le moindre coût des chambres de l'internat. "
Le proviseur du lycée scientifique : " Les nuisances sont importantes "
M. Kékémo Daniel, le premier responsable en charge de l'établissement, n'a pas manqué de déplorer cette situation relative à l'occupation des bâtiments par des civils. " Les nuisances sont importantes. Les cris d'enfants, les disputes, la gestion des ordures ménagères, les mouvements de personnes, tout cela n'est pas fait pour améliorer la qualité de l'encadrement. Alors, il faut qu'ils libèrent les bâtiments pour que les vrais ayants-droit puissent bénéficier de ces chambres. "
Egrainant le chapelet des problèmes existant dans l'enceinte pédagogique, des éducateurs d'internat enfoncent le clou : " Vous savez que dans un internat, toutes les sorties des élèves sont réglementées ainsi que leurs mouvements. Mais ici, on n'arrive pas à canaliser, à contrôler les élèves. On peut parfois trouver les civils dans les bâtiments de nos enfants ou l'inverse. L'internat est un internat de garçons. Mais les jeunes filles s'entêtent à faire la cour à nos internes. Aujourd'hui, le lycée est devenu comme un quartier de la ville. Tous les phénomènes se déroulent ici. On y trouve les drogués, des prostituées et aussi des agressions répétées. C'est vraiment dommage et déplorable car le site est incontrôlable et ça, c'est dangereux pour nos élèves. " C'est dans la même veine qu'un élève nous a crié son ras-le-bol : " On ne plus bosser. Nous sommes perturbés par les mouvements, les cris et pleurs des bébés. Aux heures d'études, nous sommes encore confrontés à certaines réalités telles que l'occupation des salles d'études par les enfants des nouveaux résidents. Cela a joué sur mon résultat de premier trimestre. Que monsieur le ministre prenne une décision pour les faire partir. " A-t-il exprimé sa colère.
Gestionnaire et occupants à couteaux tirés
Face au non paiement de loyer par certains occupants, la tutelle a décidé de réguler la gestion des chambres de l'internat habité par les civils. Unis au sein d'une association dénommée CODERLYS (Coordination des Enseignants Résidant au Lycée Scientifique), le noyau en présence n'entend pas démordre. Son président, M. Yao Bruno, entend donner des explications : " Nous sommes arrivés au début de la crise, précisément en 2002. Les responsables du système éducatif ont accepté de nous loger sur le site du lycée scientifique. Au début, c'était deux bâtiments qui étaient occupés par les enseignants. Au fur et à mesure, cela s'est étendu et aujourd'hui nous sommes à sept bâtiments. Au début, il fallait payer soixante mille francs pour toute l'année. Et puis après il fallait payer quinze mille francs renouvelables et aujourd'hui nous sommes à huit mille francs par mois. On nous demande de quitter la cité en août. Selon moi, comme il y a toujours problème de logement à Yamoussoukro et que ce n'est pas tout le monde qui a construit, il serait mieux de laisser les résidents sur le site jusqu'à la fin de l'année pour que ceux qui doivent retourner retournent tranquillement. A mon avis, l'exécution de la date butoir dépend des résidents eux-mêmes. Nous allons discuter avec eux au cours d'une assemblée générale pour prendre la décision de partir ou pas. " A-t-il soutenu.
Le nouveau promu pour réglementer la situation, le gestionnaire, M. Kobena, entend appliquer les règles de la convention signée entre les deux parties, à savoir la DREN et les occupants : " Au départ, il était dit que ce sont les enseignants du public qui devraient avoir accès aux dortoirs. Mais certains de leurs collègues déplacés ont plaidé pour être là. Les déplacés sont pratiquement tous partis certes. Mais vu l'insécurité et l'instabilité dans les zones ex- assiégées, ils ont dû laisser leurs familles dans les chambres par mesure de prudence. Même si le problème de logement se pose à leur niveau, il faut qu'ils partent. C'est un lieu d'études et non une cité pour civils. Notons qu'aujourd'hui, les départs sont timides. Mais nous sommes dans une logique de respect strict du procès verbal signé le 13 octobre 2008 en présence du représentant du préfet. Même s'ils respectent les clauses de paiement, cela n'est pas une fin en soi… " A-t-il tenu à préciser.
Fauste Pierrette (Directeur régional de l'Education nationale) : "Ils seront tous vidés fin août 2009"
Le DREN de Yamoussoukro, Mme Fauste Pierrette, sans détour, a tenu à faire la lumière sur l'épineux problème d'occupation de l'internat du lycée scientifique par les civils, qui, depuis un certain temps, est devenu comme une prise en otage des élèves dans leur propre univers. Toute chose qui a amené la représentante du ministre Bleu Lainé à faire un grand déballage sur cette affaire qui mérite une attention particulière. " Je dirai que nous sommes aujourd'hui à la deuxième phase d'un feuilleton qui n'a que trop duré. Il est temps que nous prenions nos responsabilités pour mettre fin à l'anarchie qui demeure au sein du lycée. Le mois d'octobre de l'an dernier, un bras de fer nous avait opposé aux occupants des chambres de l'internat du lycée scientifique. La DREN que je dirige avait décidé d'expulser manu militari 560 familles de ces logements. Mais après plaidoyer des différentes associations (CODERLYS, CESCI…), nous avions décidé de les laisser achever l'année scolaire. Mais je crois que cela a été notre erreur car aujourd'hui, ces enseignants dont le nombre s'est accru (environ 3000 personnes), ne manifestent aucune volonté de quitter. Et pourtant, la date butoir de déguerpissement est fixée pour le 31 Août 2009 au plus tard relativement au procès verbal signé avec lesdites associations et mouvements des droits de l'Homme. Je crois que cet état de fait est intolérable pour des enseignants qui ont un salaire de plus de trois cent mille francs et une indemnité de logement de plus de quarante mille francs par mois qui s'adonnent encore à la facilité. Aujourd'hui, le lycée scientifique est devenu un site où les maîtresses sont gardées pour leurs amants. Et aussi la présence remarquable des miliciens. Toutes ces forces en présence ont entraîné les cas de viol de jeunes filles, le phénomène de la drogue et plein d'autres vices. Le lycée se meurt à petit feu. Antérieurement, nous étions à un taux de réussite qui oscillait entre 90% et 100%. Avec l'arrivée de ces derniers, nous sommes à 86%. C'est quand même important de le signaler.
Les éducateurs sont démotivés. Ils estiment que le travail est devenu difficile avec la présence des civils. Ils ne vont pratiquement plus vérifier si les enfants sont dans les chambres à partir de 22 heures de peur de se faire agresser.
Qu'ils comprennent donc que si nous nous battons, c'est pour l'amélioration des résultats des enfants. Alors comment réussir si les enfants travaillent dans un tel environnement ? Trop c'est trop. Ils seront vidés sans exception fin Août. " S'est-elle indignée.
Jean Paul Loukou à Yamoussoukro