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Faits Divers Publié le mardi 5 mai 2009 | Nord-Sud

De Yopougon-Wassakara à “Offoumou Yapo" : Un conflit foncier vieux de 16 ans

Déguerpies en 1993 de Yopougon-Wassakara à cause de la construction d’un hôpital, 500 familles recasées par la mairie au quartier « Offoumou Yapo » dorment toujours d'un œil. Le conflit foncier qui les oppose aux autorités municipales, par personnes interposées, s'est transformé en une bataille juridique qui connaîtra son épilogue le 25 mai, au tribunal de Yopougon.


L'exode de Dagnogo Mamadou est loin de prendre fin. Pour la seconde fois, sa maison vient d'être détruite. La première démolition, c'était en 1993, à Yopougon-Wassakara. Cette année-là, des bulldozers ont balayé sa maison et celles de 500 autres familles. C'était pour l’intérêt général : l'espace devait accueillir l'hôpital général du quartier. Les déguerpis ont été recasés au quartier « Offomou Yapo » toujours dans la même commune. Aidé par son épouse et ses enfants, M. Dagnogo n'a pas baissé les bras. Il s'est bâti une concession sur une superficie de 25m2. D'autres familles ont été logées à Yopougon Attié, 9ème tranche, au « Toits rouges », entre la Poste et le collège Offomou Yapo. Mais, le 25 septembre 2007, des dizaines de maisons sont démolies par des machines. Dagnogo et sa famille se sont retrouvés à la belle étoile. Avec eux, une centaine de personnes. «Cette maison représentait toute ma vie. Ce n'est pas juste de s'en prendre aux pauvres. C'est méchant !», raconte Mme N'Goran Ahou Rose, veuve et mère de six enfants. Elle estime son préjudice à 13,8 millions de Fcfa. « J'ai reçu une lettre de mise en demeure le 21 septembre 2007. Je devais quitter les lieux dans les 24 heures qui suivaient sous le prétexte que je n'avais pas l'autorisation de construire sur cet espace. Or, j'ai bénéficié de ce terrain à titre de dommages et intérêts », témoigne Gbamélé Diakaridia. Aujourd'hui, la plupart de ces familles chassées de Wassakara, puis de nouveau déguerpies d'Offoumo Yapo, n'ont plus d'abris.

Un problème mal réglé

Le site de Yopougon Offoumo-Yapo, où ces familles de Wassakara ont été relogées, est le patrimoine de la famille Zallo, à Abobo-Doumé. Il s'étend sur une superficie de 4,5 hectares. Des travaux y ont été entrepris pour le viabiliser. A cet effet, un organe de supervision a été institué. M. Kané Massoma, entrepreneur en bâtiment, a été désigné pour présider le comité d'aide à la restructuration et de gestion des familles à réinstaller. « C'est sous M. Bédji Joseph, ancien maire de Yopougon, que nous avons été recasés ici. Mais, c'était une forêt. Nous avons loti le site en 1995 sur fonds propres. Cela nous a coûté 12 millions Fcfa», explique M. Kané. La superficie des terrains attribués variait entre 25 et 100 m2. « Nous avons assuré les frais de carburant des agents de la mairie à raison de 25.000 Fcfa par jour. Il y avait aussi la main d'œuvre pour ceux qui venaient défricher l'espace : 20.000 Fcfa par jour. Nous avons supporté tous ces coûts sans que la mairie ne nous vienne en aide », ajoute le président du comité d'aide. Petit-à-petit, les déguerpis ont réussi à sortir leurs maisons de terre.
Les dessous de l'affaire

Cependant, leurs démarches pour obtenir les titres fonciers n'ont pas abouti. L'opération de recensement des propriétés foncières, lancée en 2001 par le maire Gbamanan Djidan, est venue mettre le feu aux poudres. « Chaque propriétaire a payé 25.000 Fcfa pour chaque terrain. C'est la régie de la mairie qui a encaissé l'argent. L'opération a engrangé 800.000 Fcfa », rapporte T.K, un habitant de ce quartier. Cette opération d'identification marque ainsi le début d'une longue et interminable instabilité au sein des membres du comité des déguerpis de Wassakara.
L'entente entre les résidents vole en éclats. Le 27 janvier 2007, à la mairie de Yopougon, M. Méité Lassana, un habitant du quartier, mène une fronde contre Kané Massoma, accusé d'avoir détourné 51 millions Fcfa des caisses du comité. « Cet argument est utilisé pour tenter de destituer M. Kané. Devant les autorités policières et militaires, M. Gbamanan Djidan, le maire de Yopougon, a désigné Bouan-Bi Djè Carlos, comme président du comité. Or, ce poste est électif. Nous n'avons pas adhéré à cette nomination », s'indigne un résident qui a requis l'anonymat. Ce coup de force entraîne une guerre interne. Méité Lassana conteste la légitimité du nouveau président. « M. Méité a organisé une rébellion contre Bouan-Bi. Il a donc été désigné par l'autorité municipale comme président du comité d'aide à la restructuration et de gestion (Arrêté municipal n°2006-06/MY/SG du 17 février 2006). Le quartier, avec ces intrigues, a été rebaptisé. Il porte aujourd'hui le nom du maire : Gbamanan Djidan Jean Félicien. Ce n'est pas normal tout ceci», proteste Diarra M., un autre résident. Le 25 septembre 2007, M. Méité lance une opération « coup de marteau » dans le quartier. Des dizaines de maisons sont détruites. « Il a entrepris de casser nos maisons avec le soutien du maire. Nous avons intenté une action en justice contre lui. Nous faisons entièrement confiance à la justice pour qu'elle puisse dire le droit. Ce sont 500 familles qui habitent ici. On demande tout simplement réparation pour tous les préjudices. Nous, nous sommes investis, toute notre vie, pour avoir un toit. Que deviendrons-nous si d'aventure nous sommes dépossédés de nos biens ?», s'interroge Gbamélé. L'affaire est devant le tribunal des flagrants délits de Yopougon depuis le 3 octobre 2007. Elle oppose Kané Massoma, président du comité d'aide à la restructuration et de gestion du quartier Offomou Yapo, à Méité Lassana qui revendique également la présidence du même comité. M. Méité est accusé de « destruction de biens immobiliers, expropriation et vente de terrains» par le camp de M. Kané.
L'accusé rejette en bloc les accusations

Méité Lassana, le principal mis en cause, rejette en bloc toutes ces accusations. «Les accusations de destruction de maisons et de biens ne sont pas fondées. Des travaux entrepris pour doter le quartier de rues et de lampadaires ont fait l'objet d'une série de séances de travail avec tout le monde », affirme-t-il. Selon lui, en octobre 2003, le projet de lotissement du quartier est entré dans sa phase active pour prendre fin en mai 2004. Il y a eu l'ouverture des routes et l'électrification des voies publiques. « Pendant que nous étions en train d'achever les travaux, Kané Massoma a demandé aux gens de reconstruire sur les routes déjà tracé. C'est le même individu qui a vendu les espaces se trouvant sur le tracé des routes», explique-t-il. Selon M. Méité, les travaux de construction des maisons ne pouvaient pas continuer. « Nous avons alerté donc le maire qui leur a demandé de cesser d'occuper ces endroits. C'est ainsi qu'un arrêté municipal en date du 28 août 2007 a autorisé la démolition de toutes les constructions non autorisées mettant en cause le lotissement. Le commandant de la Brigade anti-émeute (BAE) d'alors a été saisi le 13 septembre 2007 par le maire pour sécuriser l'opération de démolition de ces constructions anarchiques. C'est donc une action légale. Nous n'avons pas cassé les maisons. Nous sommes pour le développement de ce quartier car il représente un test pour les autres sites qui devront être restructurés dans la commune de Yopougon », ajoute Méité Lassana. Nos tentatives pour entendre la version de la mairie sont restées vaines. Le délibéré du tribunal de Yopougon, prévu le 25 mai, apportera sans doute la lumière dans cette affaire.

OM
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