Cette interview du Pr Simon Pierre Ekanza met fin à une série qui a fait le tour des grands groupes ethniques de la Côte d'Ivoire. Ce débat sur les rites initiatiques ou processus de socialisation dans nos sociétés traditionnels nous aura permis, et cela, avec les lecteurs, dont beaucoup ont manifesté leur intérêt, de découvrir ou d'approfondir nos connaissances sur les racines des différents groupes socioculturels qui composent le pays. Ils sont certainement nombreux ceux qui, avant d'avoir lu l'intervention du Dr Coulibaly Djakalidja, antropologue à l'université de Cocody, savaient que l'initiation au Poro durait normalement 21 ans avec trois périodes de sept ans chacune. L'enseignant aura également permis à beaucoup d'Ivoiriens de savoir que n'importe quel sénoufo n'est pas initié dans n'importe quel bois sacré. Chacun est formé selon le type de Poro choisi par son clan et dans le lieu propre à ce clan. Ainsi, il n'est pas possible de déplacer l'initiation. Par contre, chez les Wê, selon Angèle Gnonsoa, le masque, qui est la plus ancienne divinité de cette société, peut apparaître partout. On a aussi découvert, avec le Dr Yoro Marcel, autre enseignant au département d'Anthropologie de Cocody, que le masque n'a pas autant de puissance chez les Bété. Ici, a-t-il dit, l'accent est mis plutôt sur l'art de la guerre, les techniques de chasse, la puissance physique et morale, l'art oratoire et musical, la beauté, et l'élégance. Les chefs dozo d'Odienné ont rappelé que le « dozoya » (la pratique de la chasse traditionnelle en pays malinké) ne se limite pas à la chasse. Les dozo jouent surtout un rôle d'orientation, ont-ils dit. Grâce au Pr Simon Pierre Ekanza, l'on connait les Akan qui sont plus proches de cette appellation et ceux qui le sont le moins. De même, le pédagogue nous a mieux instruits sur la différence entre rites initiatiques et processus de socialisation. Au-delà de son apport culturel, ce débat, en cette période de renaissance de la nation ivoirienne, peut être source de rapprochement entre les différents peuples du pays. Il a permis de tirer la sonnette d'alarme sur les menaces qui guettent cet ensemble de valeurs ancestrales dont beaucoup restent indispensables à la pérennité des sociétés qui les cultivent. « Il y a des valeurs dans lesquelles nous nous retrouvons, qui s'identifient à notre personne. C'est notre identité. Et le fait de les perdre est un péril pour notre propre identité », prévient le Pr Ekanza.
C.S
C.S