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Société Publié le jeudi 28 mai 2009 | Le Patriote

Saison pluvieuse : Aghien Bas-fond, Bidjanté, Colombie - Des morts en sursis en ce mois de juin

Aghien bas-fond, mardi 26 mai. Il est exactement 19h. Le bout de bitume qui mène au campement est occupé dans le côté droit par de petits commerces de nuit. Deux kiosques voisins accueillent quelques personnes qui dégustent pour la plupart des spaghettis. A côté, des vendeuses de repas chaud, notamment du tô, du haricot, du riz et de beignets sont submergées par les clients. En descendant la pente du bas-fond, on aperçoit une blanchisserie puis une mosquée. A cette heure-là, le campement est très animé comme le jour. Tous ceux qui l’avaient quitté le matin pour des activités diverses sont en train de rentrer. Des maisons, fusent des bruits qui déchirent la nuit ; tantôt des éclats de rire d’adultes, tantôt des pleurs d’enfants.
Sur le chemin principal qui relie les maisons les unes aux autres, des femmes pressent le pas pour s’acheter les condiments manquant à l’assaisonnement de leur cuisine. Occupées tout la journée à leur commerce, la famille ne devient une préoccupation pour ces mères de famille qu’une fois rentrée à la maison, la nuit. Heureusement, le marché de rattrapage se trouve au bout de la collectivité, chez une vendeuse de condiments. Mais pour s’y rendre, il faut traverser un virage à risque. Les pluies ont tellement « bouffé » la terre que les dernières maisons jouxtant l’énorme bas-fond n’offrent plus qu’un étroit passage. Cette maison à l’évidence ne résistera pas aux prochaines pluies. Le moindre faux pas et vous atterrissez au fond du trou. Mais vous pouvez être sûr que si votre chute se fait la nuit, à moins d’être suivi par quelqu’un, le fracas que vous enclencherez sera couvert par la musique que distille sans discontinuer le maquis Choco juste en face.

Le danger demeure permanent

Onze mois, jour pour jour après la tragédie de l’éboulement qui a causé six morts sur ce site, rien n’a vraiment changé dans le vécu quotidien de ces populations. Pour mémoire, le dimanche 29 juin 2008, un pan de la gigantesque clôture de la cour de Me Mondon qui obstruait le passage de l’eau de ruissellement des pluies s’était s’effondré. Ballottant ainsi les planques voisines qu’elle entraîne dans sa chute avec la latérite. Un éboulement meurtrier qui s’est joué en cinq minutes. Onze mois après ce drame qui a ému le chef de l’Etat, la première dame Simone Ehivet et les autorités diplomatiques Burkinabè en Côte d’Ivoire, force est de reconnaître que la mort de Bintou, Adjaratou, Bah Cissé, Mariam et Mathieu n’a pas servi à une prise de conscience. Le danger demeure permanent. Le mur de la résidence des Mondon a été réhabilité et tout autour, comme avant la date fatidique du 29 juin 2008, des colonies de maisons ont été construites autour. La trajectoire des ruissellements des eaux de pluies n’a pas pour autant changé. Il faut avoir le courage de le dire, l’on court immanquablement vers un autre drame. Pis, l’enquête commanditée par le ministère de l’Intérieur sur ce drame, en vue de situer les responsabilités, a été rangée aux oubliettes. Pourtant, le ministre de l’Intérieur, Désiré Tagro, en remettant les cinq millions du Chef de l’Etat pour soutenir les victimes de ce drame avait posé, à son cabinet, la problématique de l’occupation de ce site dangereux, en ces termes : « ce n’est pas un endroit où l’on doit habiter. Mais comme ce sont des ressortissants de la sous région si vous les chassez de là, les gens vont mal interpréter l’action ».
En effet, la présence de ces personnes sur le site d’Aghien Bas-fond interpelle à plus d’un titre. Mais, il n’y a pas que ce site, car le quartier Colombie à proximité du Zoo, et bien d’autres comme Boribana et Bidjanté dans la commune d’Attécoubé, présentent un décor dont les conséquences peuvent être irréparables en cette saison des pluies. C’est qu’à l’évidence, ces maisons ne respectent en rien les normes de construction qu’imposent la nature du sol et de l’emplacement du terrain généralement en pente. Aucun nivelage du terrain en relief. Les eaux de ruissèlement et l’érosion finissement par avoir raison de ces maisons constamment inondées qui cèdent avec le temps. Mais le drame de ces familles ne s’arrête pas là. Elles sont aussi guettées par le péril de l’insalubrité. Car Boribana, Aghien Bas-fond et Colombie, pour ne citer que ces taudis, sont de véritables sanctuaires de l’insalubrité. Cet univers où la mort rode et fauche tantôt par les eaux, tantôt par les incendies, ne traduit ni plus ni moins que l’échec de la politique de l’habitat de l’Etat de Côte d’Ivoire. Faut-il le rappeler, en juin 2005, un éboulement a causé la mort de six membres de la famille Kpan Gilbert à Attécoubé. Les 04 et 05 juin 2007, la pluie provoque à nouveau un drame à Mossikro Santé 3, trois morts dans la famille Lingane et à Boribana Sebroko huit morts. Le 29 juin 2008, un éboulement tue six personnes majoritairement des enfants à Aghien Bas-fond aux II Plateaux. Qu’attend-on pour assainir les quartiers précaires ? Des morts certainement encore. Et revoilà le mois de juin qui pointe ! Alexandre Lebel Ilboudo
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