L’Unité de formation et de recherche (UFR) Communication, Milieu et Société (CMS) de l’Université de Bouaké à Abidjan a organisé le 26 mai 2009 à la présidence de cette institution sise aux II Plateaux 7ème Tranche, un Atelier scientifique sur le thème : ’’Rédaction d’un syllabus de cours et Ecriture scientifique’’. Le Professeur Francis Akindès, Président du Conseil scientifique de l’Université et le Professeur Lazare Poamé, Doyen d’UFR ont animé cet Atelier. A la fin de cet Atelier qui a enregistré une forte participation des enseignants-chercheurs, le Professeur Lazare Poamé, dans cette interview exclusive, en situe les enjeux.
Professeur, quel est le sens de cet Atelier ?
Lazare Poamé : Nous avons organisé un Atelier scientifique qui a deux thématiques : Le syllabus et l’écriture scientifique. S’agissant du syllabus, nous avons organisé cet Atelier pour que les participants apprennent à rédiger un syllabus qui puisse être accepté, reconnu par les instances du CAMES. A compter de la prochaine session du CAMES, le syllabus sera pris en compte dans l’évaluation des dossiers. Il n’a pas la même valeur qu’une publication scientifique, mais il compte quand même.
Le syllabus permet également de faire une entrée honorable dans le LMD. En fait, au niveau du LMD, il s’agit d’apprendre à enseigner autrement. On n’enseignera plus comme on a l’habitude de le faire. Pour ces enseignements, il faut promouvoir le syllabus. Le syllabus est intéressant à la fois pour les étudiants et pour les enseignants eux-mêmes. Mais le constat est clair, tout le monde ne sait pas rédiger un syllabus. C’est un modèle anglo-saxon.
Quelles sont les caractéristiques d’un bon syllabus ?
L.P : Un bon syllabus doit avant tout énoncer clairement les objectifs généraux de l’enseignement ; il doit ensuite dégager les objectifs spécifiques de cet enseignement. Il doit faire ressortir en quelques pages, pour chaque objectif spécifique du cours, le substratum requis pour assassiner en l’étudiant l’ignorance. Il doit indiquer à l’étudiant la façon dont il sera évalué et les meilleurs ouvrages à consulter pour compléter le cours et obtenir de bons résultats aux examens. Voilà grosso modo ce que c’est qu’un bon syllabus.
Quel est le contexte qui a favorisé l’instauration du syllabus à l’Université de Bouaké ?
L.P : Il y a eu deux choses. Le CAMES qui désormais reconnaît le syllabus comme un document qu’on peut introduire dans le dossier de candidature. Deuxième chose, il y a le LMD. En examinant les exigences du système LMD, le Professeur Francis Akindès et moi-même avons eu la même pensée : les exigences pédagogiques du LMD sont telles que pour y répondre adéquatement, il faut que les enseignements soient assurés avec un support nouveau, le syllabus de type anglo-saxon. Les supports classiques doivent progressivement faire place au syllabus. Le LMD, faut-il le rappeler, est un système anglo-saxon.
Justement parlant du LMD, en quoi consiste-t-il ?
L.P : Il a trois composantes. Le ‘’L’’, ‘’M’’ et le ‘’D’’. Le L : c’est toute la formation qui part de la première année à la Licence. Le M : c’est le Master qui combine la maîtrise et le DEA. Le D, c’est le Doctorat. Avec le système LMD, le DEUG et la Maîtrise disparaitront. On entre pratiquement dans un nouveau système avec de nouvelles exigences. Dans l’ancien système encore en vigueur, vous avez deux grandes colonnes. Les cours magistraux (CM) et les Travaux dirigés (TD) ou Travaux pratiques (TP). Avec le LMD, la maquette pédagogique présente une colonne supplémentaire qui est la charge horaire de travail personnel des étudiants. En plus, les volumes horaires au niveau du LMD sont relativement réduits. Dans ces conditions, il faut faire en sorte que l’enseignant puisse donner le maximum d’informations et de connaissances en peu de temps. Il faut donc savoir aller à l’essentiel sans faire râler les étudiants. Si vous ne procédez pas ainsi, vos étudiants n’auront même pas le minimum et ils se retrouveront en fin de cycle avec un savoir étriqué. Voilà qui nécessite la rédaction, la production d’un syllabus pour un cours parce que le temps nous fait cruellement défaut. Avec le LMD, on n’aura pas les années académiques qui s’étendent sur 15 mois. Quand on dit qu’une année académique c’est en 10 mois, il faut qu’en 10 mois vous ayez terminé. Cela exige des dispositions nouvelles.
Après le syllabus, nous allons organiser un autre Atelier de formation à l’intention des collègues. C’est une formation pour laquelle certains collègues ont déjà été initiés par l’AUF. Il faut saluer au passage le dynamisme du Directeur du Campus numérique, le Dr Charles Sidibé. Il a formé 5 enseignants de notre UFR et ceux-ci, à leur tour, devront former les autres à la conception du cours en ligne. Comment présenter un cours en ligne, entendez sur Internet ? Le cours en ligne ce n’est pas le cours traditionnel qu’on se contente de (dé)poser sur la toile. Il y a des dispositions particulières, il y a une forme de présentation, il y a des normes de présentation d’un cours en ligne. C’est pourquoi, après cet Atelier, nous en aurons un autre essentiellement consacré au cours en ligne.
Cela doit nous faire gagner du temps. Avec le LMD, le temps doit être respecté. Il y a donc le syllabus, le cours en ligne pour les étudiants qui ne peuvent pas être présents physiquement. Ils iront sur le NET et y trouveront le cours.
Pour en revenir au présent Atelier, il faut souligner qu’il comporte deux dimensions : la dimension pédagogique que recouvre le syllabus. L’autre dimension est celle liée aux publications scientifiques. Le syllabus n’est pas une publication scientifique, c’est un document pédagogique que le CAMES a décidé de valoriser.
La publication scientifique et plus précisément l’écriture scientifique s’accompagne du souci de rédiger un article de façon à pouvoir le faire publier aisément dans une revue scientifique. Il y a des normes, des grilles d’évaluation qu’il faut connaître. Notre devoir, le Professeur Akindès et moi, est de porter ces normes à la connaissance des jeunes collègues pour qu’ils puissent avoir une brillante carrière universitaire. Nous, nous avions eu « la chance » à l’époque, de travailler avec de grands auteurs pendant notre séjour universitaire à l’étranger, F. Akindès à Paris avec Pierre Bourdieu, Boudon et Ignacy Sachs et moi-même à Francfort et à Bruxelles avec Jürgen Habermas, Günter Rophol et Gilbert Hottois. Il faut ajouter à cela les bonnes dispositions d’esprit des Présidents qui se sont succédés à la tête de l’Université de Bouaké, les Professeurs Kouakou N’Guessan François et Koménan A. Landry. Tout cela a fait que nous avons vite gravi les échelons et avons atteint la cime au moment où certains nous cherchaient sur le flanc de la « palme académique ». C’est aussi une chance pour les autres de voir que nous (F. Akindès et moi) sommes allés vite et que nous sommes prêts et déterminés à les aider à aller aussi vite, voire plus vite que nous.
C’est cela que nous faisons, le Professeur Francis Akindès et moi-même, pour que les collègues puissent avoir une brillante carrière à l’Université. La voie est connue : publier énormément, faire de bonnes publications dans les revues scientifiques pour passer d’un grade à un autre ; d’Assistant à Maître-assistant, de Maître-assistant à Maître de conférences, de Maître de conférences au grade de Professeur titulaire. Il faut le reconnaître, depuis plusieurs années, l’Université de Bouaké à de très bons résultats aux examens du CAMES.
Vous avez dit Professeur que dans le système LMD, le temps imparti au cours doit être respecté. Or vous savez qu’il y a souvent des grèves à l’Université. Est-ce que l’application de ce système ne posera pas de problème ?
L.P : L’application du système LMD va naturellement poser quelques problèmes au début. C’est une sorte de refonte des programmes existants. Il y aura quelques difficultés, mais elles seront très vite surmontées, parce que nous avons des échanges constants et féconds avec les autres Universités. Toutes les Universités vont bientôt passer au système LMD, parce qu’à partir de 2011, les diplômes délivrés ici, en Côte d’Ivoire, seront confrontés à un problème d’équivalence. C’est dans deux ans et nos diplômes ne serviront qu’à nos villages et campagnes comme se plaît souvent à le dire le Président de l’Université d’Abobo-Adjamé, le Professeur Etienne Ehilé, responsable sous-régional et national du LMD. Que faire alors? Il faut accélérer l’entrée dans le LMD. Nous, à notre humble niveau, pensons pouvoir relever ce défi.
Pour ce qui est des grèves qu’il faut craindre dans l’application du système LMD en Côte d’Ivoire, il convient de remarquer que les grèves sont liées à des revendications syndicales. Nous sommes ici sur un terrain académique ; les responsables académiques doivent jouer pleinement leur partition, ils doivent accomplir pleinement les tâches qui leur incombent. Si nous prenons toutes les dispositions académiques requises, nous pensons objectivement que nous entrerons dans le LMD sans trop de difficultés. C’est vrai que les revendications syndicales en milieu universitaire paraissent intempestives, mais il ne faut pas oublier qu’elles ont aussi des dimensions pédagogiques et scientifiques objectivement fondées. Nous pensons qu’en prenant les dispositions nécessaires (cours magistraux présentés sous forme de syllabus, cours en ligne), nous pouvons être certains que malgré les grèves, les exigences liées au temps de la formation et à la durée d’une année académique seront respectées. Il y a aussi les mesures d’accompagnement du LMD. Lorsque nous allons entrer dans le LMD, au niveau de chaque UFR en principe, nous aurons des salles informatiques connectées au réseau Internet. Nos étudiants auront un accès facile à Internet et de cette façon, nous pensons que le temps perdu sera facilement rattrapé. Les grèves, faut-il le souligner, ne sont pas provoquées ex nihilo. L’entrée dans le LMD sera marquée par une série de concertations avec tous les acteurs du système qui n’auront recours à la grève qu’en dernière instance.
A la suite de cet Atelier, avez-vous un appel à lancer à l’endroit des autorités ivoiriennes et de vos différents partenaires ?
L.P : A l’endroit des autorités, le Conseil des Ministres a évoqué l’entrée dans le LMD. Au niveau académique, nous pouvons dire aux autorités que nous sommes en train de prendre toutes les dispositions utiles pour entrer de façon élégante et digne dans le LMD, parce que la Côte d’Ivoire, bien que diminuée par la guerre, est à nos yeux un grand pays. Sa grandeur doit se montrer également au niveau académique. La dynamique amorcée depuis quelques décennies avec les collègues de l’Université de Bouaké nous donne des raisons d’espérer.
Quand je parle de collègues, c’est pratiquement tous les enseignants-chercheurs de l’Université de Bouaké (philosophes, sociologues, littéraires, linguistes, médecins, juristes, économistes…).
A l’endroit des autorités, nous pouvons dire qu’elles peuvent compter sur notre institution et l’expertise du Président Etienne Ehilé pour permettre à la Côte d’Ivoire de porter haut le flambeau de l’académique dans cette réforme LMD. Ce que nous leur demandons, c’est d’ouvrir grandement les yeux en direction des mesures d’accompagnement qu’appelle le LMD. Au niveau des infrastructures, nous demandons à l’Etat de fournir quelques efforts parce que durant ces 10 dernières années, on n’a pas vu grand chose au niveau des infrastructures académiques. Nous comprenons aisément la situation crisique que traverse notre pays depuis le coup d’Etat manqué du 19 septembre 2002 transformé en rébellion armée. Nous pensons qu’au sortir de cette crise, l’Etat se penchera sérieusement sur le problème des infrastructures académiques. L’Université de Bouaké en souffre particulièrement parce qu’elle a subi frontalement les effets de la guerre. C’est une institution délocalisée, voire disloquée, qui a besoin d’un véritable plan Marshall
Au niveau des collègues, je pense que l`appel a été clair, leur présence massive (salle archicomble) a montré tout l’intérêt qu’ils portent à cet Atelier. Ils ont compris qu’ils pouvaient faire d’une pierre deux coups : accroître leur performance pédagogique et maîtriser les arcanes de l’écriture scientifique. Nous montrons ainsi à nos partenaires africains et européens que l’Université de Bouaké, nonobstant son statut d’institution délocalisée, est prête à engager la compétition mondiale désormais ouverte avec la mondialisation des cursus qu’impose le système LMD. Avec des enseignants-chercheurs aussi déterminés, nous pouvons aller loin dans notre partenariat avec les Universités étrangères. Et l’idée que nos partenaires se font de nous (une haute idée) nous pensons pouvoir la mériter et cela, grâce à la dynamique collective qui est à l’œuvre au niveau de l’Université de Bouaké.
Réalisée par K.P
Professeur Lazare Poamé (Doyen de l’UFR CMS/ poamepublications@yahoo.fr)
Professeur, quel est le sens de cet Atelier ?
Lazare Poamé : Nous avons organisé un Atelier scientifique qui a deux thématiques : Le syllabus et l’écriture scientifique. S’agissant du syllabus, nous avons organisé cet Atelier pour que les participants apprennent à rédiger un syllabus qui puisse être accepté, reconnu par les instances du CAMES. A compter de la prochaine session du CAMES, le syllabus sera pris en compte dans l’évaluation des dossiers. Il n’a pas la même valeur qu’une publication scientifique, mais il compte quand même.
Le syllabus permet également de faire une entrée honorable dans le LMD. En fait, au niveau du LMD, il s’agit d’apprendre à enseigner autrement. On n’enseignera plus comme on a l’habitude de le faire. Pour ces enseignements, il faut promouvoir le syllabus. Le syllabus est intéressant à la fois pour les étudiants et pour les enseignants eux-mêmes. Mais le constat est clair, tout le monde ne sait pas rédiger un syllabus. C’est un modèle anglo-saxon.
Quelles sont les caractéristiques d’un bon syllabus ?
L.P : Un bon syllabus doit avant tout énoncer clairement les objectifs généraux de l’enseignement ; il doit ensuite dégager les objectifs spécifiques de cet enseignement. Il doit faire ressortir en quelques pages, pour chaque objectif spécifique du cours, le substratum requis pour assassiner en l’étudiant l’ignorance. Il doit indiquer à l’étudiant la façon dont il sera évalué et les meilleurs ouvrages à consulter pour compléter le cours et obtenir de bons résultats aux examens. Voilà grosso modo ce que c’est qu’un bon syllabus.
Quel est le contexte qui a favorisé l’instauration du syllabus à l’Université de Bouaké ?
L.P : Il y a eu deux choses. Le CAMES qui désormais reconnaît le syllabus comme un document qu’on peut introduire dans le dossier de candidature. Deuxième chose, il y a le LMD. En examinant les exigences du système LMD, le Professeur Francis Akindès et moi-même avons eu la même pensée : les exigences pédagogiques du LMD sont telles que pour y répondre adéquatement, il faut que les enseignements soient assurés avec un support nouveau, le syllabus de type anglo-saxon. Les supports classiques doivent progressivement faire place au syllabus. Le LMD, faut-il le rappeler, est un système anglo-saxon.
Justement parlant du LMD, en quoi consiste-t-il ?
L.P : Il a trois composantes. Le ‘’L’’, ‘’M’’ et le ‘’D’’. Le L : c’est toute la formation qui part de la première année à la Licence. Le M : c’est le Master qui combine la maîtrise et le DEA. Le D, c’est le Doctorat. Avec le système LMD, le DEUG et la Maîtrise disparaitront. On entre pratiquement dans un nouveau système avec de nouvelles exigences. Dans l’ancien système encore en vigueur, vous avez deux grandes colonnes. Les cours magistraux (CM) et les Travaux dirigés (TD) ou Travaux pratiques (TP). Avec le LMD, la maquette pédagogique présente une colonne supplémentaire qui est la charge horaire de travail personnel des étudiants. En plus, les volumes horaires au niveau du LMD sont relativement réduits. Dans ces conditions, il faut faire en sorte que l’enseignant puisse donner le maximum d’informations et de connaissances en peu de temps. Il faut donc savoir aller à l’essentiel sans faire râler les étudiants. Si vous ne procédez pas ainsi, vos étudiants n’auront même pas le minimum et ils se retrouveront en fin de cycle avec un savoir étriqué. Voilà qui nécessite la rédaction, la production d’un syllabus pour un cours parce que le temps nous fait cruellement défaut. Avec le LMD, on n’aura pas les années académiques qui s’étendent sur 15 mois. Quand on dit qu’une année académique c’est en 10 mois, il faut qu’en 10 mois vous ayez terminé. Cela exige des dispositions nouvelles.
Après le syllabus, nous allons organiser un autre Atelier de formation à l’intention des collègues. C’est une formation pour laquelle certains collègues ont déjà été initiés par l’AUF. Il faut saluer au passage le dynamisme du Directeur du Campus numérique, le Dr Charles Sidibé. Il a formé 5 enseignants de notre UFR et ceux-ci, à leur tour, devront former les autres à la conception du cours en ligne. Comment présenter un cours en ligne, entendez sur Internet ? Le cours en ligne ce n’est pas le cours traditionnel qu’on se contente de (dé)poser sur la toile. Il y a des dispositions particulières, il y a une forme de présentation, il y a des normes de présentation d’un cours en ligne. C’est pourquoi, après cet Atelier, nous en aurons un autre essentiellement consacré au cours en ligne.
Cela doit nous faire gagner du temps. Avec le LMD, le temps doit être respecté. Il y a donc le syllabus, le cours en ligne pour les étudiants qui ne peuvent pas être présents physiquement. Ils iront sur le NET et y trouveront le cours.
Pour en revenir au présent Atelier, il faut souligner qu’il comporte deux dimensions : la dimension pédagogique que recouvre le syllabus. L’autre dimension est celle liée aux publications scientifiques. Le syllabus n’est pas une publication scientifique, c’est un document pédagogique que le CAMES a décidé de valoriser.
La publication scientifique et plus précisément l’écriture scientifique s’accompagne du souci de rédiger un article de façon à pouvoir le faire publier aisément dans une revue scientifique. Il y a des normes, des grilles d’évaluation qu’il faut connaître. Notre devoir, le Professeur Akindès et moi, est de porter ces normes à la connaissance des jeunes collègues pour qu’ils puissent avoir une brillante carrière universitaire. Nous, nous avions eu « la chance » à l’époque, de travailler avec de grands auteurs pendant notre séjour universitaire à l’étranger, F. Akindès à Paris avec Pierre Bourdieu, Boudon et Ignacy Sachs et moi-même à Francfort et à Bruxelles avec Jürgen Habermas, Günter Rophol et Gilbert Hottois. Il faut ajouter à cela les bonnes dispositions d’esprit des Présidents qui se sont succédés à la tête de l’Université de Bouaké, les Professeurs Kouakou N’Guessan François et Koménan A. Landry. Tout cela a fait que nous avons vite gravi les échelons et avons atteint la cime au moment où certains nous cherchaient sur le flanc de la « palme académique ». C’est aussi une chance pour les autres de voir que nous (F. Akindès et moi) sommes allés vite et que nous sommes prêts et déterminés à les aider à aller aussi vite, voire plus vite que nous.
C’est cela que nous faisons, le Professeur Francis Akindès et moi-même, pour que les collègues puissent avoir une brillante carrière à l’Université. La voie est connue : publier énormément, faire de bonnes publications dans les revues scientifiques pour passer d’un grade à un autre ; d’Assistant à Maître-assistant, de Maître-assistant à Maître de conférences, de Maître de conférences au grade de Professeur titulaire. Il faut le reconnaître, depuis plusieurs années, l’Université de Bouaké à de très bons résultats aux examens du CAMES.
Vous avez dit Professeur que dans le système LMD, le temps imparti au cours doit être respecté. Or vous savez qu’il y a souvent des grèves à l’Université. Est-ce que l’application de ce système ne posera pas de problème ?
L.P : L’application du système LMD va naturellement poser quelques problèmes au début. C’est une sorte de refonte des programmes existants. Il y aura quelques difficultés, mais elles seront très vite surmontées, parce que nous avons des échanges constants et féconds avec les autres Universités. Toutes les Universités vont bientôt passer au système LMD, parce qu’à partir de 2011, les diplômes délivrés ici, en Côte d’Ivoire, seront confrontés à un problème d’équivalence. C’est dans deux ans et nos diplômes ne serviront qu’à nos villages et campagnes comme se plaît souvent à le dire le Président de l’Université d’Abobo-Adjamé, le Professeur Etienne Ehilé, responsable sous-régional et national du LMD. Que faire alors? Il faut accélérer l’entrée dans le LMD. Nous, à notre humble niveau, pensons pouvoir relever ce défi.
Pour ce qui est des grèves qu’il faut craindre dans l’application du système LMD en Côte d’Ivoire, il convient de remarquer que les grèves sont liées à des revendications syndicales. Nous sommes ici sur un terrain académique ; les responsables académiques doivent jouer pleinement leur partition, ils doivent accomplir pleinement les tâches qui leur incombent. Si nous prenons toutes les dispositions académiques requises, nous pensons objectivement que nous entrerons dans le LMD sans trop de difficultés. C’est vrai que les revendications syndicales en milieu universitaire paraissent intempestives, mais il ne faut pas oublier qu’elles ont aussi des dimensions pédagogiques et scientifiques objectivement fondées. Nous pensons qu’en prenant les dispositions nécessaires (cours magistraux présentés sous forme de syllabus, cours en ligne), nous pouvons être certains que malgré les grèves, les exigences liées au temps de la formation et à la durée d’une année académique seront respectées. Il y a aussi les mesures d’accompagnement du LMD. Lorsque nous allons entrer dans le LMD, au niveau de chaque UFR en principe, nous aurons des salles informatiques connectées au réseau Internet. Nos étudiants auront un accès facile à Internet et de cette façon, nous pensons que le temps perdu sera facilement rattrapé. Les grèves, faut-il le souligner, ne sont pas provoquées ex nihilo. L’entrée dans le LMD sera marquée par une série de concertations avec tous les acteurs du système qui n’auront recours à la grève qu’en dernière instance.
A la suite de cet Atelier, avez-vous un appel à lancer à l’endroit des autorités ivoiriennes et de vos différents partenaires ?
L.P : A l’endroit des autorités, le Conseil des Ministres a évoqué l’entrée dans le LMD. Au niveau académique, nous pouvons dire aux autorités que nous sommes en train de prendre toutes les dispositions utiles pour entrer de façon élégante et digne dans le LMD, parce que la Côte d’Ivoire, bien que diminuée par la guerre, est à nos yeux un grand pays. Sa grandeur doit se montrer également au niveau académique. La dynamique amorcée depuis quelques décennies avec les collègues de l’Université de Bouaké nous donne des raisons d’espérer.
Quand je parle de collègues, c’est pratiquement tous les enseignants-chercheurs de l’Université de Bouaké (philosophes, sociologues, littéraires, linguistes, médecins, juristes, économistes…).
A l’endroit des autorités, nous pouvons dire qu’elles peuvent compter sur notre institution et l’expertise du Président Etienne Ehilé pour permettre à la Côte d’Ivoire de porter haut le flambeau de l’académique dans cette réforme LMD. Ce que nous leur demandons, c’est d’ouvrir grandement les yeux en direction des mesures d’accompagnement qu’appelle le LMD. Au niveau des infrastructures, nous demandons à l’Etat de fournir quelques efforts parce que durant ces 10 dernières années, on n’a pas vu grand chose au niveau des infrastructures académiques. Nous comprenons aisément la situation crisique que traverse notre pays depuis le coup d’Etat manqué du 19 septembre 2002 transformé en rébellion armée. Nous pensons qu’au sortir de cette crise, l’Etat se penchera sérieusement sur le problème des infrastructures académiques. L’Université de Bouaké en souffre particulièrement parce qu’elle a subi frontalement les effets de la guerre. C’est une institution délocalisée, voire disloquée, qui a besoin d’un véritable plan Marshall
Au niveau des collègues, je pense que l`appel a été clair, leur présence massive (salle archicomble) a montré tout l’intérêt qu’ils portent à cet Atelier. Ils ont compris qu’ils pouvaient faire d’une pierre deux coups : accroître leur performance pédagogique et maîtriser les arcanes de l’écriture scientifique. Nous montrons ainsi à nos partenaires africains et européens que l’Université de Bouaké, nonobstant son statut d’institution délocalisée, est prête à engager la compétition mondiale désormais ouverte avec la mondialisation des cursus qu’impose le système LMD. Avec des enseignants-chercheurs aussi déterminés, nous pouvons aller loin dans notre partenariat avec les Universités étrangères. Et l’idée que nos partenaires se font de nous (une haute idée) nous pensons pouvoir la mériter et cela, grâce à la dynamique collective qui est à l’œuvre au niveau de l’Université de Bouaké.
Réalisée par K.P
Professeur Lazare Poamé (Doyen de l’UFR CMS/ poamepublications@yahoo.fr)