La créatrice ivoirienne Odile Parel a permis, samedi, aux Suisses et à la communauté africaine de la Chaux-de-Fonds, petite localité de la ville de Neuchâtel (Suisse), de découvrir un autre visage du zagouéné, pagne tissé utilisé par les exciseuses dan de la région de Man, dans l’Ouest de la Côte d'Ivoire.
"Quand je suis devenue adulte, j'ai compris que derrière le pagne zagouéné se cachait une grande souffrance. C'est le pagne qu'utilisent les vieilles femmes de mon village pour revêtir les fillettes après les avoir excisées. J'ai donc décidé de donner un autre visage à ce pagne de la honte à travers des créations de vêtements pour le rendre plus beau. Mais surtout pour dire non à cette pratique inique qui détruit la femme, non seulement en Côte d'Ivoire, mais également dans de nombreuses contrées de la planète ". Des paroles fortes pleines d'émotion prononcées par la créatrice Odile Parel, originaire de Zagoué, village situé dans l'ouest montagneux de la Côte d’Ivoire, lors du défilé de mode qu'elle a présenté, le samedi 30 mai 2009 de 17h à 24h à la Chaux-de-Fonds , localité située dans la ville de Neuchâtel, en Suisse.
“Des vêtements chics et tendances…”
Ce sont en tout une trentaine de vêtements dont des tenues de soirée, de ville et de plage présentés par des jeunes mannequins amateurs que le public composé de suisses, de suissesses ainsi que d'une forte présence de la communauté africaine de cette région a apprécié à travers de chaudes acclamations. Notamment, des maxis, des minis jupes, des bikinis, des culottes, des corsages, des chemises, des pantalons, des robes, des boubous, cousus avec le zagouéné, pagne tissé avec du coton de la région dan, située dans l'ouest de la Côte d'Ivoire. Des vêtements chics et tendances assortis à des bonnets, des sacs à main et des chaussures réalisés avec la même matière relevée parfois avec de la soie , de la mousseline, du cuir, du jean, présentés par ces jeunes mannequins avec élégance et fierté . Une sorte de n'zassa -terme ivoirien qui signifie patchwork- à travers lequel Odile Parel veut s'inscrire dans l'ouverture des cultures sur le monde tout en préservant la spécificité de ses origines.
“Nous étions neuf ce jour-là, neuf filles excisées à la chaîne”
Pour la créatrice, le zagouéné ne doit plus incarner le symbole de la souffrance de la femme dan, voire de la femme en général qui a été excisée. Il doit être vu désormais sous le signe de la vie, de la beauté, de l'amour, du partage. D'où ce défilé, pour marquer la rupture, la négation, l'abolition de cette tradition qui avoue-t-elle, l'a détruite.
"Nous étions neuf ce jour-là, neuf filles excisées à la chaîne. On nous a menties, piégées. On nous a fait croire que l'on se rendait à la ville pour acheter des habits. Nous étions heureuses. Puis le convoi s'est arrêté dans la brousse, on nous a jeté des chiffons sur la tête pour que l'on ne voie pas ce qui se passe et l’on a été emmenées une par une. J'avais neuf ans. On appelait nos parents en hurlant de terreur. Ils n'ont pas bougé. C'est la tradition. Je n'ai rien vu, ni l'endroit où ça se passait ni le visage de l’exciseuse. Tu entends juste le bruit de ta chair qu'on coupe, l'exciseuse doit s'y reprendre à plusieurs fois...", avait témoigné Odile, dans l'Impartial du 22 mai 2009, un journal édité à la Chaux-de-Fonds depuis 1881.
Pour réussir donc son pari, Dan Odile, c'est son nom à l'état civil, a décidé de mettre sur pied Odile Créations, structure initiatrice de ce défilé de mode. Avec laquelle, elle compte aussi valoriser ce grand patrimoine culturel de la région des 18 Montagnes, très prisé en Côte d'Ivoire et qui a conquis les frontières nationales. Car a-t-elle souligné, le zagouéné, en dehors de cet usage qu'en font les exciseuses de sa région, est aussi utilisé pour la réalisation de vêtements de réjouissance.
Dans ce combat contre l'excision, c'est-à-dire l'ablation du clitoris, elle a bénéficié du soutien de SEM Emmanuel Diarrassouba Mamadou, ambassadeur de la Côte d'Ivoire en Suisse, présent à cette cérémonie avec son épouse et ses collaborateurs. A travers une allocution succincte, le représentant du président Laurent Gbagbo dans la confédération des Etats helvétiques, a félicité la créatrice pour la noble lutte qu'elle mène contre cette vicissitude sociale, tout en rappelant que depuis 1998 , l'Etat ivoirien a voté une loi pour mettre fin à ce phénomène qui "porte atteinte à l'intégrité physique des femmes" dans certaines parties du monde.
«L’excision touche 2 millions de femmes chaque année dans le monde»
Son discours a été soutenu par celui de Gisèle Ory, conseillère d’Etat à Neuchâtel. Pour elle, c'est une excellente initiative, qui mérite d'être encouragée, voire rééditée, pour permettre à toutes les populations concernées d'être sensibilisées contre ces travers qui s'opposent aux droits de la femme.
Quant à Mme Pillonel de la Fondation Sentinelle basée dans le canton de Vaud, en Suisse, à travers une communication, elle a fait remarquer que l'excision touche deux millions de femmes chaque année en Afrique .Selon elle, cette pratique qui consiste à ôter le clitoris, partie génitale de la femme, sans son consentement, dans des conditions dangereuses qui parfois lui coûtent la vie, devrait s’arrêter.
Cette belle soirée animée par Aimé Dali, enseignant-chercheur ivoirien, résidant à Fribourg, en Suisse, a également été marquée par la présentation des tableaux de la galerie d'art contemporain Sokoura, installée à Saint-Imier en Suisse, de l'ivoirienne Martine Tra Prêtre, ainsi que par des dégustations de mets la Côte d'Ivoire, à savoir le foufou banane, l'alloco, l'attiéké, l'igname, la carpe, le poulet frits, le gnamankoudji (jus de gingembre). Les organisateurs et leurs convives se sont séparés dans l'allegresse après avoir dansé au rythme des sonorités du bord de la lagune ébrié, comme le kpango, le coupé-décalé, le bobaraba, le tématé, le seka-seka et le zouglou .
Sérikpa Benson(Envoyé spécial en Suisse)
"Quand je suis devenue adulte, j'ai compris que derrière le pagne zagouéné se cachait une grande souffrance. C'est le pagne qu'utilisent les vieilles femmes de mon village pour revêtir les fillettes après les avoir excisées. J'ai donc décidé de donner un autre visage à ce pagne de la honte à travers des créations de vêtements pour le rendre plus beau. Mais surtout pour dire non à cette pratique inique qui détruit la femme, non seulement en Côte d'Ivoire, mais également dans de nombreuses contrées de la planète ". Des paroles fortes pleines d'émotion prononcées par la créatrice Odile Parel, originaire de Zagoué, village situé dans l'ouest montagneux de la Côte d’Ivoire, lors du défilé de mode qu'elle a présenté, le samedi 30 mai 2009 de 17h à 24h à la Chaux-de-Fonds , localité située dans la ville de Neuchâtel, en Suisse.
“Des vêtements chics et tendances…”
Ce sont en tout une trentaine de vêtements dont des tenues de soirée, de ville et de plage présentés par des jeunes mannequins amateurs que le public composé de suisses, de suissesses ainsi que d'une forte présence de la communauté africaine de cette région a apprécié à travers de chaudes acclamations. Notamment, des maxis, des minis jupes, des bikinis, des culottes, des corsages, des chemises, des pantalons, des robes, des boubous, cousus avec le zagouéné, pagne tissé avec du coton de la région dan, située dans l'ouest de la Côte d'Ivoire. Des vêtements chics et tendances assortis à des bonnets, des sacs à main et des chaussures réalisés avec la même matière relevée parfois avec de la soie , de la mousseline, du cuir, du jean, présentés par ces jeunes mannequins avec élégance et fierté . Une sorte de n'zassa -terme ivoirien qui signifie patchwork- à travers lequel Odile Parel veut s'inscrire dans l'ouverture des cultures sur le monde tout en préservant la spécificité de ses origines.
“Nous étions neuf ce jour-là, neuf filles excisées à la chaîne”
Pour la créatrice, le zagouéné ne doit plus incarner le symbole de la souffrance de la femme dan, voire de la femme en général qui a été excisée. Il doit être vu désormais sous le signe de la vie, de la beauté, de l'amour, du partage. D'où ce défilé, pour marquer la rupture, la négation, l'abolition de cette tradition qui avoue-t-elle, l'a détruite.
"Nous étions neuf ce jour-là, neuf filles excisées à la chaîne. On nous a menties, piégées. On nous a fait croire que l'on se rendait à la ville pour acheter des habits. Nous étions heureuses. Puis le convoi s'est arrêté dans la brousse, on nous a jeté des chiffons sur la tête pour que l'on ne voie pas ce qui se passe et l’on a été emmenées une par une. J'avais neuf ans. On appelait nos parents en hurlant de terreur. Ils n'ont pas bougé. C'est la tradition. Je n'ai rien vu, ni l'endroit où ça se passait ni le visage de l’exciseuse. Tu entends juste le bruit de ta chair qu'on coupe, l'exciseuse doit s'y reprendre à plusieurs fois...", avait témoigné Odile, dans l'Impartial du 22 mai 2009, un journal édité à la Chaux-de-Fonds depuis 1881.
Pour réussir donc son pari, Dan Odile, c'est son nom à l'état civil, a décidé de mettre sur pied Odile Créations, structure initiatrice de ce défilé de mode. Avec laquelle, elle compte aussi valoriser ce grand patrimoine culturel de la région des 18 Montagnes, très prisé en Côte d'Ivoire et qui a conquis les frontières nationales. Car a-t-elle souligné, le zagouéné, en dehors de cet usage qu'en font les exciseuses de sa région, est aussi utilisé pour la réalisation de vêtements de réjouissance.
Dans ce combat contre l'excision, c'est-à-dire l'ablation du clitoris, elle a bénéficié du soutien de SEM Emmanuel Diarrassouba Mamadou, ambassadeur de la Côte d'Ivoire en Suisse, présent à cette cérémonie avec son épouse et ses collaborateurs. A travers une allocution succincte, le représentant du président Laurent Gbagbo dans la confédération des Etats helvétiques, a félicité la créatrice pour la noble lutte qu'elle mène contre cette vicissitude sociale, tout en rappelant que depuis 1998 , l'Etat ivoirien a voté une loi pour mettre fin à ce phénomène qui "porte atteinte à l'intégrité physique des femmes" dans certaines parties du monde.
«L’excision touche 2 millions de femmes chaque année dans le monde»
Son discours a été soutenu par celui de Gisèle Ory, conseillère d’Etat à Neuchâtel. Pour elle, c'est une excellente initiative, qui mérite d'être encouragée, voire rééditée, pour permettre à toutes les populations concernées d'être sensibilisées contre ces travers qui s'opposent aux droits de la femme.
Quant à Mme Pillonel de la Fondation Sentinelle basée dans le canton de Vaud, en Suisse, à travers une communication, elle a fait remarquer que l'excision touche deux millions de femmes chaque année en Afrique .Selon elle, cette pratique qui consiste à ôter le clitoris, partie génitale de la femme, sans son consentement, dans des conditions dangereuses qui parfois lui coûtent la vie, devrait s’arrêter.
Cette belle soirée animée par Aimé Dali, enseignant-chercheur ivoirien, résidant à Fribourg, en Suisse, a également été marquée par la présentation des tableaux de la galerie d'art contemporain Sokoura, installée à Saint-Imier en Suisse, de l'ivoirienne Martine Tra Prêtre, ainsi que par des dégustations de mets la Côte d'Ivoire, à savoir le foufou banane, l'alloco, l'attiéké, l'igname, la carpe, le poulet frits, le gnamankoudji (jus de gingembre). Les organisateurs et leurs convives se sont séparés dans l'allegresse après avoir dansé au rythme des sonorités du bord de la lagune ébrié, comme le kpango, le coupé-décalé, le bobaraba, le tématé, le seka-seka et le zouglou .
Sérikpa Benson(Envoyé spécial en Suisse)