Le professeur Adjo Guebi Noel, enseignant-chercheur à l’Université de Bouaké à Abidjan, a animé le 13 juin 2009, une conférence sur le thème ‘’La légitimité naturelle de la paix par les alliances interethniques, principalement les didas et les autres peuples de la Côte d’Ivoire’’. Cette conférence a eu lieu à la salle des fêtes de la mairie d’Aboisso. Il était invité par l’Association des Néyo, Didas, Godié et Avikam d’Aboisso (Anediga). Le président de cette association, Gnapra Assoa a rappelé au cours de cette sortie officielle de son organisation, qu’elle vise à renforcer les liens entre les membres de cette association d’une part et continuer la coexistence pacifique entre les membres de l’Anedigra et les autochtones. Le maire d’Aboisso, Kadja N’Zoré a salué l’existence de ce regroupement. Le parrain Haoulé Zirimba Jacques, directeur régional de l’Education nationale du Sud-comoé a souligné les bons rapports qui existent entre l’Anediga et les autochtones. Il a invité ses membres à poursuivre sur cette lancée. Nous vous proposons l’intervention du professeur Adjo Guebi Noel, spécialiste en anthropologie, en sociologie juridiques et politiques.
LE GROUPE DIDA DANS LES KROUS
• Origine du peuple Dida
Le groupe Dida n’a pas d’origine différente de celle des groupes Krou. Autrement dit, la question qui viendrait à l’esprit serait : Les Krous sont-ils originaires du Ghana, de l’Afrique centrale ou bien du Libéria comme certaines théories se complaisent à l’affirmer ? Si la Côte d’Ivoire, avant la colonisation et selon les explorateurs était constituée de terres vides et terres occupées, il existait déjà un peuplement, c'est-à-dire un peuple vivait déjà là. Est-ce les Krou ou bien est-ce le groupe Khwa ou un autre ? Cependant, il est à noter que les Krou constituent aussi une unité sociale autonome qu’une unité à travers son homogénéité, une société globale. En dépit de la prédominance des mouvements humains en direction du Nord-Sud et de l’Est à l’Ouest, plusieurs chercheurs conviennent pour situer géographiquement à l’Ouest les Krou de la Côte d’Ivoire si les Krou de Boubélé-Bérébi portent l’accent sur les origines et leur appartenance à des gens de l’intérieur des terres. Les Dida ne sauraient qu’appartenir à ce groupe c’est-à dire qu’ils vivaient déjà sur les terres anciennes de l’actuelle Côte d’Ivoire. Cependant les facteurs endogènes et exogènes déclenchent le processus de migration mieux de mobilité de ce peuple Krou. Ces facteurs sont relatifs à la "poussée des mandés" à l’éclatement du royaume Ashanti à l’est et l’attrait de la Côte du Sud.
Le moment du mandé au Nord suscite et enclenche les déplacements du Nord vers le Sud. Ces mouvements migratoires distincts des véritables migrations, se définissent comme de simples mobilités de certaines micro-communautés ou des familles et individus. Ces mouvements sont relatifs aux politiques impérialistes des Etats qui se succèdent, du 14eme au 18eme siècle, sur les bords du Niger. Cette poussée vers la forêt influence et conduit les Krou vers la forêt.
• A partir de la fin d’année du 15ème siècle, cette poussée s’accentue avec l’arrivée des caravelles qui permettent aux côtes d’exercer un attrait particulier en raison des possibilités de commerce et d’échange avec les occidentaux voire les navires européens.
• La décomposition ou l’éclatement à partir du XVII e siècle, du royaume ashanti dont la conséquence est la migration au début du 18e siècle des Agni et des Baoulé en Côte d’Ivoire, accentuant le déplacement vers l’Ouest de certains peuples tel que le peuple Khwa et le peuple Krou vers l’Est. Ceci étant, d’où provient le peuple Krou ? L’interrogation de certaines écoles ou chercheurs permettrait d’altérer nos exigences de compréhension.
Ainsi, selon l’école cyclo-culturelle allemande, les civilisations Krou se situeraient dans le cercle Atlantique de l’Ouest ; alors que certaines auteurs notent que les tribus se suivent le long de la Côte depuis Monrovia jusqu’au Bandama inférieur en Côte d’Ivoire. Par ailleurs ; certains auteurs mentionnent que le groupe Krou appartiendrait au groupe Khwa (Kwa). Ce qui expliquerait la proximité culturelle et surtout la reconnaissance et le respect d’un groupe vis-à-vis de l’autre.
Pour des raisons d’ordre méthodologique et épistémologique, les Krou sont classés en deux groupes : On distingue les Bété et les Bakwés séparés par le fleuve Sassandra. Les Bété à l’Est, proches des lagunes, entre le Bandama et le Sassandra comprenent les Dida, les Kwaya, les Godyé, les Néyo ou Bété, Bobwa ou Wayan, fortement mélangés aux Gouro ;
Les Bakwé à l’Ouest, comprennent les Bakwés proprement dit ou Gbé et l’Est à l’Ouest jusqu’à Monrovia, les Hwine (Hwane), les Pia Abriwi (ou aliri-Néyon) Plapo, Tepo, Krâ (au Sud des Guéré) les Ubi, les Grebo, Kro (ou Krown) les Bossa et les Dè. Toutes ces communautés selon Pierre Vogler. « Les langues Krou dégagent une impression de forte unité et l’on n’éprouve aucune difficulté à distinguer ni parler quelconque issu du groupe, d’un parler mandé, Akan ou lagunaire. Par ailleurs, des hiatus séparant deux structurent logistiques, caractéristiques de deux villages proches, n’est jamais suffisant pour empêcher toute communication. L’on passe de l’Est à l’Ouest, de village en village, aux parlers voisins, de façons souvent insensible ; c’est assez dire qu’il règne un véritable continuum Linguistique, tant sur le plan lexical que phonologique ou grammatical ». Au regard de tout ce qui précède, les DIDA sont des krou et ne peuvent en aucun cas s’identifier au Khwa. Les Dida sont à la fois Godié, bété, guéré, néyo, Krou, Wobè, Gouro, Niaboua, Koya, Gagou ou Gban. La différenciation de ce grand groupe est du ressort des guerres intestinales et surtout de la protection scrupuleuse du lignage, ainsi écrit Bernard Holas « Ils forment un groupement de 16 000 à 17 000 habitants issus du rameau Krou ou Grébo et divisés en nombreuses tribus autrefois ennemies les unes des autres et en proie à des guerres incessantes, mais qui vivent en paix aujourd’hui depuis que notre prise de possession a mis fin à l’ancien état des choses ».
- Voqler. P., in traditions Krou de Bernard holas, Paris, Fernand Nathan, 1980 P. 20
- Westerman D., Bryan ; Languages of west Africa, Londres, 1930, Page 48
- Lire Delafosse, M., les langues du Monde, Paris, P. 830-834
- Bulletin de l’institut français d’Afrique noire, Tome XIII, N°4, Pages 1274-1275 Dakar Oct. 1951 »
Les diverses tribus issues des clans passifs, sont restés nettement séparés les unes des autres et forment en quelque sorte, autant de « cloisons étrangers » au point de vue politique et territorial.
Chacune de ces tribus se cantonnent jalousement sur son territoire et n’admet aucune immiscion de la part la tribu voisine : point n’est besoin ici de diviser pour régner, car la division est déjà toute faite ; et il importe au contraire de veiller surtout, dans ce pays, à éviter les conflits à propos de questions de terrains, de culture ou d’empiétements territoriaux de la part d’une tribu sur une autre ».
C’est dans ces conditions que sur le territoire krou, on trouvera des lignages maximaux ayant les mêmes appellations aussi bien chez les Bété, les Néyo, les Godié que chez les Dida. C’est en cela que l’on peut se poser la question de savoir l’origine de l’appellation de ces grands groupes. D’abord, on peut dire en accord avec Emmanuel Terray qu’il ne s’agit que de lignage « qui est un groupe de personnes descendant, de façon réelle ou fictive, d’un ancêtre commun, soit en ligne masculine, soit en ligne féminine ; il peut être décomposé en segments de différents niveaux, rassemblant les personnes issues de tel ou tel descendant du fondateur. Dans une société lignagère et segmentaire, les groupes locaux-villages, quartiers, etc. sont constitués sur la base de l’apparence lignagère : le lignage ou le segment est le noyau du groupe local ; entre les divers groupes locaux, la relation d’antagonisme et de complémentarité ; il n’existe pas d’autorité politique centralisée. »
C’est la raison pour laquelle, ces lignages s’identifiant à un ancêtre mythique porte des noms soit des ancêtres soit des noms significatifs. Le mot Dida que certains penseurs ou chercheurs ont accordés un sens Baoulé (DI-DA) n’en n’est aucun cas Baoulé. Il signifie « NA LI DA » qui veut dire l’endroit où je mange, c'est-à-dire mon grenier qu’aucune autre personne ne peut me pendre ou ne me séparera. C’est là aussi que provient l’effort des pactes accomplis par les Dida avec des groupes qui l’entourent. Il est fallacieux d’indiquer que ce groupe est issu du groupe Akan pour des raisons de voisinage. Connaissant la localité géographique des Dida et le processus de mobilité des autres groupes il est d’hors et déjà important d’asseoir un modèle d’analyse réactif aux alliances interethniques entre Dida et les autres peuples.
II. LES ALLIANCES INTERETHNIQUES
Elles sont des types de contrats ou traités passés entre Dida et les autres peuples après de longues et douloureuses périodes d’affrontements. Elles procèdent alors de situations conflictuelles et permettent d’asseoir une paix définitive. On distingue alors les alliances religieuses et mystiques et les parentés à plaisanterie.
1) Les alliances mystiques et religieuses
Elles sont entourées d’un culte spécial, méticuleux et ressemblent à un exorcisme. Au cours de la cérémonie, un individu est choisit ou appréhendé et fait l’objet de la cérémonie, il est fendu en deux, entouré de tout les rituel possible et chaque partie à la cérémonie récupère sa partie qu’il inhume. Ce culte est le pacte de sang, le sacrifice suprême auquel les deux groupes auraient consenti pour ne plus jamais s’affronter. Ils sont frères et ne peuvent plus commettre l’inceste prescrit par ce culte. Cela veut dire que même les mariages entre fils et filles de ces deux groupes sont interdits.
2) Les parentés à plaisanterie
Elles sont aussi des formes de contrat, qui recèlent à la fois un caractère mystique et un caractère social, sauf que l’on ne les différencie pas des alliances mystiques et religieuses. Elles sont nombreuses et diverses et permettent de maintenir et d’améliorer les bonnes relations entre différents groupes. Pour exemple, l’offrande d’un tam-tam sacré à un autre groupe constitue un pacte de non agression, le mariage constitue aussi un pacte, la référence à un ancêtre mythique en est un autre.
Ainsi, il conviendrait de savoir les alliances que les Dida auraient conclues ou passés avec les autres peuples de Côte d’Ivoire.
LES ALLIANCES INTERETHNIQUES ENTRE LES DIDA ET LES AUTRES PEUPLES DE LA COTE D’IVOIRE
Les Krou compris, dans cette zone qui part de Tabou à l’actuel Monrovia jusqu’à Guiglo en passant par Daloa, Zouenoula jusqu’à Divo, Lakota et Grand-Lahou, limité au Sud par l’Océan Atlantique, représentait le territoire des Bakwé, des Bété, des Dida, des Néyo, Peu importe comment on pouvait l’appeler, autrement dit celui des Krou. Le Dida dans son déplacement vers l’arrière pays plus précisément vers le Sud-est a connu des affrontements avec certains lignages tels que les Krou eux-mêmes, les Néyo de Sassandra, les Godié de Lakota avec lesquels ils concluent des alliances à plaisanterie dans le but de maintenir et d’améliorer les relations et surtout dans le but d’exclure tout affrontement au cours de sa mobilité et son installation dans les nouvelles localités que représentent Divo et Lakota.
Ces alliances n’ont pas la même teneur que celles qu’il passera au cours des migrations des Khwa avec deux peuples représentatifs. Le Dida conclut des alliances mystiques et religieuses avec les Abbey entourées d’un culte spécial de sorte que l’ Abbey puisse en toute quiétude, s’installer davantage vers le Sud-Est. Cette même alliance est passée avec les Abidji, un ptetit peuple situé dans la région de Sikensi.
La migration des Khwa faite d’Ouest à l’Est en provenance de Mangwé, une région habitée par les Krou, les Godié, les Dida a permis certaines parentés à plaisanterie. Ainsi le Dida s’allie aux Adjoukrou, aux Alladjan, aux Ahizi appelé les gens de Trendé ; les Abourés appelés les Assokua c’est-à-dire aux peuples d’Agbogo Doumin, d’Azurety, de Manfibé, de vitré, d’Ebra. Ces alliances à caractère symbolique n’ont fait que apaiser les tensions de sorte que le déplacement vers l’Est se fasse sans encombre et dans la paix. C’est à ce moment que au cours de l’éclatement du royaume Ashanti, interviennent les peuples Agnis et Baoulé. Les baoulé, dans leur processus de mobilité et leur stratégie de guerre, envoient des éclaireurs qui sont les Godê (Ko n’dê n’dê) qui trouvent sur leur chemin les Dida, peuple guerrier, près à entreprendre les hostilités contre les Baoulé. Les Godê proviennent à signer des alliances avec les Dida, leur permettant d’avancer vers le centre avec quelques installations à Tiassalé, à Toumodi, à Sakassou et à Béoumi. Au regard de cette thèse selon laquelle les Gwa seraient venus de l’Est permet de poser la question suivante Pourquoi les considère-t-on comme des Akan ? Ne seraient-ils pas d’origine Bantou ou krou ?
INTERET DES ALLIANCE INTERETHNIQUES ENTRE LES DIDA
ET LES AUTRES PEUPLES
Selon Koffi Adou l’intérêt repose sur plusieurs socles :
1- La prise de conscience de chaque groupe ethnique de sa propre identité irréductible.
2- La proclamation unilatérale, à des fins non bellicistes, de la suprématie de culture de chaque groupe ethnique sur les autres.
3- L’acceptation de l’idée que l’autre puisse, à son tour, proclamé la suprématie de sa propre culture.
4- La proclamation du droit de chacun des groupes de railler un autre groupe à qui il est signifié qu’il aurait dû accepter la « culture supérieure » qu’est la notre ; d’où découle le principe de l’autodérision, dans la mesure où l’ont est disposé à accueillir, sans animosité, le regard critique et même acerbe porté par l’autre sur sa propre culture.
5- Le principe de tolérance des autres cultures
6- Le principe d’absence de complexe vis-à-vis des autres cultures
7- Le principe d’humilité découlant de l’acceptation de la faillibilité de son propre groupe ethnique qui ne présente pas que des qualités, puisqu’il présente des points faibles très opportunément révélés par les autres.
De ces principes découlent la fraternisation, le respect mutuel, l’assistance mutuelle, le désamorçage à l’avance de tout conflit naissant, avec au bout du compte la paix.
Les alliances interethniques ont ainsi pour fonction, en définitive, d’interdire de façon absolue tout recours à un conflit ouvert en vue de résoudre quelque problème social que ce soit.
CONCLUSION
Les alliances interethniques dans les communautés traditionnelles légitiment la paix et permettent la circulation des biens et des personnes, développent et améliorent les relations entre les Dida et les autres groupes ethniques. Etant qu’instrument juridique qui obligent des parties au respect des volontés, elles apparaissent comme des moyens de règlement des conflits, de gestion des conflits et surtout d’absence de conflits. Les Dida sur les côtes de l’Est à l’intérieur du pays en remontant vers le sud-est, connait cette liberté de faire ce qu’il veut par le respect des autres selon des principes liés aux alliances interethniques. Ici, le problème exposé est l’incompatibilité du droit, des principes juridiques hérités de la colonisation et des valeurs ancestrales ! Faut il revoir notre droit par rapport aux valeurs, aux principes traditionnels ou bien faut il valoriser ce droit par la légitimation des principes d’antan qui ont permis les sociétés, les communautés de fonctionner sans rupture réelle. la recherche de la paix par l’initiative du président de la république avec l’instauration de l’accord de Ouagadougou, n’est-il pas la déconsécration de l’empire néo-colonialiste et la prise de conscience de tout africain qu’il a une culture, des représentation et des visions du monde ? Cette alliance avec les forces nouvelles n’est elle pas significative et instructive. La tolérance, la non violence, le pardon, l’absence d’hypocrisie et la présence permanente d’humilité reste les vertus qu’incarnes les alliances interethniques. Là est le comportement du Dida
KOFFI A., Quelle démarche pour la création de nouvelles alliances interethniques en Côte d’Ivoire, Abidjan, 9/4/06 P. 1-3
LE GROUPE DIDA DANS LES KROUS
• Origine du peuple Dida
Le groupe Dida n’a pas d’origine différente de celle des groupes Krou. Autrement dit, la question qui viendrait à l’esprit serait : Les Krous sont-ils originaires du Ghana, de l’Afrique centrale ou bien du Libéria comme certaines théories se complaisent à l’affirmer ? Si la Côte d’Ivoire, avant la colonisation et selon les explorateurs était constituée de terres vides et terres occupées, il existait déjà un peuplement, c'est-à-dire un peuple vivait déjà là. Est-ce les Krou ou bien est-ce le groupe Khwa ou un autre ? Cependant, il est à noter que les Krou constituent aussi une unité sociale autonome qu’une unité à travers son homogénéité, une société globale. En dépit de la prédominance des mouvements humains en direction du Nord-Sud et de l’Est à l’Ouest, plusieurs chercheurs conviennent pour situer géographiquement à l’Ouest les Krou de la Côte d’Ivoire si les Krou de Boubélé-Bérébi portent l’accent sur les origines et leur appartenance à des gens de l’intérieur des terres. Les Dida ne sauraient qu’appartenir à ce groupe c’est-à dire qu’ils vivaient déjà sur les terres anciennes de l’actuelle Côte d’Ivoire. Cependant les facteurs endogènes et exogènes déclenchent le processus de migration mieux de mobilité de ce peuple Krou. Ces facteurs sont relatifs à la "poussée des mandés" à l’éclatement du royaume Ashanti à l’est et l’attrait de la Côte du Sud.
Le moment du mandé au Nord suscite et enclenche les déplacements du Nord vers le Sud. Ces mouvements migratoires distincts des véritables migrations, se définissent comme de simples mobilités de certaines micro-communautés ou des familles et individus. Ces mouvements sont relatifs aux politiques impérialistes des Etats qui se succèdent, du 14eme au 18eme siècle, sur les bords du Niger. Cette poussée vers la forêt influence et conduit les Krou vers la forêt.
• A partir de la fin d’année du 15ème siècle, cette poussée s’accentue avec l’arrivée des caravelles qui permettent aux côtes d’exercer un attrait particulier en raison des possibilités de commerce et d’échange avec les occidentaux voire les navires européens.
• La décomposition ou l’éclatement à partir du XVII e siècle, du royaume ashanti dont la conséquence est la migration au début du 18e siècle des Agni et des Baoulé en Côte d’Ivoire, accentuant le déplacement vers l’Ouest de certains peuples tel que le peuple Khwa et le peuple Krou vers l’Est. Ceci étant, d’où provient le peuple Krou ? L’interrogation de certaines écoles ou chercheurs permettrait d’altérer nos exigences de compréhension.
Ainsi, selon l’école cyclo-culturelle allemande, les civilisations Krou se situeraient dans le cercle Atlantique de l’Ouest ; alors que certaines auteurs notent que les tribus se suivent le long de la Côte depuis Monrovia jusqu’au Bandama inférieur en Côte d’Ivoire. Par ailleurs ; certains auteurs mentionnent que le groupe Krou appartiendrait au groupe Khwa (Kwa). Ce qui expliquerait la proximité culturelle et surtout la reconnaissance et le respect d’un groupe vis-à-vis de l’autre.
Pour des raisons d’ordre méthodologique et épistémologique, les Krou sont classés en deux groupes : On distingue les Bété et les Bakwés séparés par le fleuve Sassandra. Les Bété à l’Est, proches des lagunes, entre le Bandama et le Sassandra comprenent les Dida, les Kwaya, les Godyé, les Néyo ou Bété, Bobwa ou Wayan, fortement mélangés aux Gouro ;
Les Bakwé à l’Ouest, comprennent les Bakwés proprement dit ou Gbé et l’Est à l’Ouest jusqu’à Monrovia, les Hwine (Hwane), les Pia Abriwi (ou aliri-Néyon) Plapo, Tepo, Krâ (au Sud des Guéré) les Ubi, les Grebo, Kro (ou Krown) les Bossa et les Dè. Toutes ces communautés selon Pierre Vogler. « Les langues Krou dégagent une impression de forte unité et l’on n’éprouve aucune difficulté à distinguer ni parler quelconque issu du groupe, d’un parler mandé, Akan ou lagunaire. Par ailleurs, des hiatus séparant deux structurent logistiques, caractéristiques de deux villages proches, n’est jamais suffisant pour empêcher toute communication. L’on passe de l’Est à l’Ouest, de village en village, aux parlers voisins, de façons souvent insensible ; c’est assez dire qu’il règne un véritable continuum Linguistique, tant sur le plan lexical que phonologique ou grammatical ». Au regard de tout ce qui précède, les DIDA sont des krou et ne peuvent en aucun cas s’identifier au Khwa. Les Dida sont à la fois Godié, bété, guéré, néyo, Krou, Wobè, Gouro, Niaboua, Koya, Gagou ou Gban. La différenciation de ce grand groupe est du ressort des guerres intestinales et surtout de la protection scrupuleuse du lignage, ainsi écrit Bernard Holas « Ils forment un groupement de 16 000 à 17 000 habitants issus du rameau Krou ou Grébo et divisés en nombreuses tribus autrefois ennemies les unes des autres et en proie à des guerres incessantes, mais qui vivent en paix aujourd’hui depuis que notre prise de possession a mis fin à l’ancien état des choses ».
- Voqler. P., in traditions Krou de Bernard holas, Paris, Fernand Nathan, 1980 P. 20
- Westerman D., Bryan ; Languages of west Africa, Londres, 1930, Page 48
- Lire Delafosse, M., les langues du Monde, Paris, P. 830-834
- Bulletin de l’institut français d’Afrique noire, Tome XIII, N°4, Pages 1274-1275 Dakar Oct. 1951 »
Les diverses tribus issues des clans passifs, sont restés nettement séparés les unes des autres et forment en quelque sorte, autant de « cloisons étrangers » au point de vue politique et territorial.
Chacune de ces tribus se cantonnent jalousement sur son territoire et n’admet aucune immiscion de la part la tribu voisine : point n’est besoin ici de diviser pour régner, car la division est déjà toute faite ; et il importe au contraire de veiller surtout, dans ce pays, à éviter les conflits à propos de questions de terrains, de culture ou d’empiétements territoriaux de la part d’une tribu sur une autre ».
C’est dans ces conditions que sur le territoire krou, on trouvera des lignages maximaux ayant les mêmes appellations aussi bien chez les Bété, les Néyo, les Godié que chez les Dida. C’est en cela que l’on peut se poser la question de savoir l’origine de l’appellation de ces grands groupes. D’abord, on peut dire en accord avec Emmanuel Terray qu’il ne s’agit que de lignage « qui est un groupe de personnes descendant, de façon réelle ou fictive, d’un ancêtre commun, soit en ligne masculine, soit en ligne féminine ; il peut être décomposé en segments de différents niveaux, rassemblant les personnes issues de tel ou tel descendant du fondateur. Dans une société lignagère et segmentaire, les groupes locaux-villages, quartiers, etc. sont constitués sur la base de l’apparence lignagère : le lignage ou le segment est le noyau du groupe local ; entre les divers groupes locaux, la relation d’antagonisme et de complémentarité ; il n’existe pas d’autorité politique centralisée. »
C’est la raison pour laquelle, ces lignages s’identifiant à un ancêtre mythique porte des noms soit des ancêtres soit des noms significatifs. Le mot Dida que certains penseurs ou chercheurs ont accordés un sens Baoulé (DI-DA) n’en n’est aucun cas Baoulé. Il signifie « NA LI DA » qui veut dire l’endroit où je mange, c'est-à-dire mon grenier qu’aucune autre personne ne peut me pendre ou ne me séparera. C’est là aussi que provient l’effort des pactes accomplis par les Dida avec des groupes qui l’entourent. Il est fallacieux d’indiquer que ce groupe est issu du groupe Akan pour des raisons de voisinage. Connaissant la localité géographique des Dida et le processus de mobilité des autres groupes il est d’hors et déjà important d’asseoir un modèle d’analyse réactif aux alliances interethniques entre Dida et les autres peuples.
II. LES ALLIANCES INTERETHNIQUES
Elles sont des types de contrats ou traités passés entre Dida et les autres peuples après de longues et douloureuses périodes d’affrontements. Elles procèdent alors de situations conflictuelles et permettent d’asseoir une paix définitive. On distingue alors les alliances religieuses et mystiques et les parentés à plaisanterie.
1) Les alliances mystiques et religieuses
Elles sont entourées d’un culte spécial, méticuleux et ressemblent à un exorcisme. Au cours de la cérémonie, un individu est choisit ou appréhendé et fait l’objet de la cérémonie, il est fendu en deux, entouré de tout les rituel possible et chaque partie à la cérémonie récupère sa partie qu’il inhume. Ce culte est le pacte de sang, le sacrifice suprême auquel les deux groupes auraient consenti pour ne plus jamais s’affronter. Ils sont frères et ne peuvent plus commettre l’inceste prescrit par ce culte. Cela veut dire que même les mariages entre fils et filles de ces deux groupes sont interdits.
2) Les parentés à plaisanterie
Elles sont aussi des formes de contrat, qui recèlent à la fois un caractère mystique et un caractère social, sauf que l’on ne les différencie pas des alliances mystiques et religieuses. Elles sont nombreuses et diverses et permettent de maintenir et d’améliorer les bonnes relations entre différents groupes. Pour exemple, l’offrande d’un tam-tam sacré à un autre groupe constitue un pacte de non agression, le mariage constitue aussi un pacte, la référence à un ancêtre mythique en est un autre.
Ainsi, il conviendrait de savoir les alliances que les Dida auraient conclues ou passés avec les autres peuples de Côte d’Ivoire.
LES ALLIANCES INTERETHNIQUES ENTRE LES DIDA ET LES AUTRES PEUPLES DE LA COTE D’IVOIRE
Les Krou compris, dans cette zone qui part de Tabou à l’actuel Monrovia jusqu’à Guiglo en passant par Daloa, Zouenoula jusqu’à Divo, Lakota et Grand-Lahou, limité au Sud par l’Océan Atlantique, représentait le territoire des Bakwé, des Bété, des Dida, des Néyo, Peu importe comment on pouvait l’appeler, autrement dit celui des Krou. Le Dida dans son déplacement vers l’arrière pays plus précisément vers le Sud-est a connu des affrontements avec certains lignages tels que les Krou eux-mêmes, les Néyo de Sassandra, les Godié de Lakota avec lesquels ils concluent des alliances à plaisanterie dans le but de maintenir et d’améliorer les relations et surtout dans le but d’exclure tout affrontement au cours de sa mobilité et son installation dans les nouvelles localités que représentent Divo et Lakota.
Ces alliances n’ont pas la même teneur que celles qu’il passera au cours des migrations des Khwa avec deux peuples représentatifs. Le Dida conclut des alliances mystiques et religieuses avec les Abbey entourées d’un culte spécial de sorte que l’ Abbey puisse en toute quiétude, s’installer davantage vers le Sud-Est. Cette même alliance est passée avec les Abidji, un ptetit peuple situé dans la région de Sikensi.
La migration des Khwa faite d’Ouest à l’Est en provenance de Mangwé, une région habitée par les Krou, les Godié, les Dida a permis certaines parentés à plaisanterie. Ainsi le Dida s’allie aux Adjoukrou, aux Alladjan, aux Ahizi appelé les gens de Trendé ; les Abourés appelés les Assokua c’est-à-dire aux peuples d’Agbogo Doumin, d’Azurety, de Manfibé, de vitré, d’Ebra. Ces alliances à caractère symbolique n’ont fait que apaiser les tensions de sorte que le déplacement vers l’Est se fasse sans encombre et dans la paix. C’est à ce moment que au cours de l’éclatement du royaume Ashanti, interviennent les peuples Agnis et Baoulé. Les baoulé, dans leur processus de mobilité et leur stratégie de guerre, envoient des éclaireurs qui sont les Godê (Ko n’dê n’dê) qui trouvent sur leur chemin les Dida, peuple guerrier, près à entreprendre les hostilités contre les Baoulé. Les Godê proviennent à signer des alliances avec les Dida, leur permettant d’avancer vers le centre avec quelques installations à Tiassalé, à Toumodi, à Sakassou et à Béoumi. Au regard de cette thèse selon laquelle les Gwa seraient venus de l’Est permet de poser la question suivante Pourquoi les considère-t-on comme des Akan ? Ne seraient-ils pas d’origine Bantou ou krou ?
INTERET DES ALLIANCE INTERETHNIQUES ENTRE LES DIDA
ET LES AUTRES PEUPLES
Selon Koffi Adou l’intérêt repose sur plusieurs socles :
1- La prise de conscience de chaque groupe ethnique de sa propre identité irréductible.
2- La proclamation unilatérale, à des fins non bellicistes, de la suprématie de culture de chaque groupe ethnique sur les autres.
3- L’acceptation de l’idée que l’autre puisse, à son tour, proclamé la suprématie de sa propre culture.
4- La proclamation du droit de chacun des groupes de railler un autre groupe à qui il est signifié qu’il aurait dû accepter la « culture supérieure » qu’est la notre ; d’où découle le principe de l’autodérision, dans la mesure où l’ont est disposé à accueillir, sans animosité, le regard critique et même acerbe porté par l’autre sur sa propre culture.
5- Le principe de tolérance des autres cultures
6- Le principe d’absence de complexe vis-à-vis des autres cultures
7- Le principe d’humilité découlant de l’acceptation de la faillibilité de son propre groupe ethnique qui ne présente pas que des qualités, puisqu’il présente des points faibles très opportunément révélés par les autres.
De ces principes découlent la fraternisation, le respect mutuel, l’assistance mutuelle, le désamorçage à l’avance de tout conflit naissant, avec au bout du compte la paix.
Les alliances interethniques ont ainsi pour fonction, en définitive, d’interdire de façon absolue tout recours à un conflit ouvert en vue de résoudre quelque problème social que ce soit.
CONCLUSION
Les alliances interethniques dans les communautés traditionnelles légitiment la paix et permettent la circulation des biens et des personnes, développent et améliorent les relations entre les Dida et les autres groupes ethniques. Etant qu’instrument juridique qui obligent des parties au respect des volontés, elles apparaissent comme des moyens de règlement des conflits, de gestion des conflits et surtout d’absence de conflits. Les Dida sur les côtes de l’Est à l’intérieur du pays en remontant vers le sud-est, connait cette liberté de faire ce qu’il veut par le respect des autres selon des principes liés aux alliances interethniques. Ici, le problème exposé est l’incompatibilité du droit, des principes juridiques hérités de la colonisation et des valeurs ancestrales ! Faut il revoir notre droit par rapport aux valeurs, aux principes traditionnels ou bien faut il valoriser ce droit par la légitimation des principes d’antan qui ont permis les sociétés, les communautés de fonctionner sans rupture réelle. la recherche de la paix par l’initiative du président de la république avec l’instauration de l’accord de Ouagadougou, n’est-il pas la déconsécration de l’empire néo-colonialiste et la prise de conscience de tout africain qu’il a une culture, des représentation et des visions du monde ? Cette alliance avec les forces nouvelles n’est elle pas significative et instructive. La tolérance, la non violence, le pardon, l’absence d’hypocrisie et la présence permanente d’humilité reste les vertus qu’incarnes les alliances interethniques. Là est le comportement du Dida
KOFFI A., Quelle démarche pour la création de nouvelles alliances interethniques en Côte d’Ivoire, Abidjan, 9/4/06 P. 1-3