La Société nationale des transports terrestres (SONATT) serait devenue un poids pour l’Etat de Côte d’Ivoire qui continue de lui verser des subventions malgré ses résultats négatifs. Martin Ouondé, le secrétaire général du Syndicat national des agents de la Direction générale des transports terrestres (SYNADGTT), demande au président Laurent Gbagbo d’intervenir pour mettre de l’ordre.
Notre Voie : M. Martin Ouondé, vous êtes le secrétaire général du SYNADGTT. Mais il vous est, aujourd’hui, reproché de surpasser votre mission de syndicaliste en vous attaquant à la SONATT, une structure légalement constituée ?
Martin Ouondé : Quand certaines personnes parlent du syndicalisme, nous avons souvent mal. Elles méconnaissent les règles élémentaires qui fondent le syndicalisme responsable. Nous ne sommes pas un syndicat alimentaire. Quand on parle d’intérêt moral, il s’agit de l’ensemble des règles de conduite admises et pratiquées dans une société. Ces règles sont dictées par des textes de lois. Quand ces règles ne sont pas respectées, l’intérêt moral est entamé et l’on doit agir pour l’application de la légalité. C’est ce que nous faisons. S’agissant de l’intérêt matériel, un syndicat responsable ne peut revendiquer de meilleures conditions de travail que si l’entreprise prospère. La Direction générale des transports terrestres et de la circulation (DGTTC) ayant perdu ses prérogatives au profit d’une structure illégale, notre premier combat est de lutter pour la restauration de notre autorité et la rétrocession de nos activités qui enrichissent des individus qui se croient au-dessus des lois et de tout texte règlementaire en vigueur qui fonde leur existence. Nous ne surpassons donc pas notre mission de syndicaliste. S’agissant de la constitution légale de la SONATT, nous ne l’avons jamais niée. Nous décrions plutôt le fonctionnement illégal de la SONATT, en violation des dispositions de son propre décret de création, notamment l’article 3 qui fait obligation à la SONATT de conclure une convention avec l’Etat avant de fonctionner. A force de dénoncer le fonctionnement illégal de la SONATT et les détournements opérés au sein de cette structure, nous sommes menacé de mort depuis quelques jours. Nous tenons donc à prendre à témoin toute la population de ces menaces dont nous faisons l’objet. Ces menaces proviennent de numéros d’appels téléphoniques masqués.
N.V. : Vos craintes devraient être dissipées puisque le Premier ministre vient de demander un audit à la SONATT que vous avez toujours accusée de tous les noms ?
M.O. : Nous sommes d’accord avec Monsieur le Premier ministre pour cette décision courageuse et exemplaire. Seulement, nous avons des appréhensions. Le ministre chargé de la tutelle économique et financière devait effectuer des audits depuis que les premières irrégularités sont apparues dans l’entreprise. Son silence prolongé nous fait douter de la fiabilité d’un audit émanant de ses services. Nous souhaiterions plutôt qu’un audit soit diligenté par Monsieur le Premier ministre lui-même ou par le président de la République. C’est ainsi que nous pouvons espérer obtenir les résultats escomptés. Nous croyons fermement en la moralisation de la vie publique initiée par SEM. Laurent Gbagbo, président de la République de Côte d’Ivoire.
N.V. : La SONATT vient, finalement, de réagir à vos nombreuses accusations. Contrairement à ce que vous avez l’habitude de dire, elle annonce plutôt plusieurs audits de la structure qui, par ailleurs, se porterait bien. Qu’en dites-vous ?
M.O. : M. Blé Guirao veut distraire l’opinion nationale et internationale en parlant de plusieurs audits effectués au sein de sa structure. Je persiste et signe que c’est un seul audit qui a été effectué du 17 au 20 février 2006. Les résultats de cet audit demandaient la dissolution de la SONATT pour mauvaise gestion financière. Malheureusement, la tutelle économique et financière n’a jamais pris en compte ces résultats. M. Blé Guirao n’a pas fait que confirmer tout ce que nous nous évertuons à dire tout seul. Enfin, les dirigeants de la SONATT se sont décidés à nous aider à faire éclater la vérité.
N.V. : Pourquoi dites-vous cela ?
M.O. : Les dirigeants de la SONATT reconnaissent enfin avoir abusivement spolié la DGTTC au mépris de la décision de la Cour suprême. Ils confirment la scission de l’objet social de la SONATT par la concession de l’édition du permis de conduire format carte de crédit à la société Interflex Africard-CI. Ils confirment également que la SONATT, créée par le décret n° 2001-377 du 27 juin 2001, n’a effectivement commencé à fonctionner qu’en septembre 2004 sur la base d’un arrêté ministériel en lieu et place d’une convention de concession à conclure obligatoirement avec l’Etat…
N.V. : A quel arrêté faites-vous allusion ?
M.O. : Il s’agit de l’arrêté n° 254/MEMT/CAB du 18 août 2004 de mise en puissance de la SONATT qui l’autorisait à exercer quatre activités, selon M. Blé Guirao. Aujourd’hui, le directeur général, M. Assi Agnar, et associés, en exécutent quinze contre vents et marrées, malgré les deux arrêts de la Cour suprême qui annulent l’arrêté n°066/MEMT/CAB du 24 mars 2005 sur la base duquel la SONATT bénéficie aujourd’hui de onze activités qui ne relèvent pas de sa compétence. Voici ce que nous condamnons depuis toujours. A savoir la violation des mesures suspensives telles que la convention de concession et son décret d’approbation pris en Conseil des ministres conformément aux dispositions des textes en vigueur.
N.V. : Pouvez-vous être un peu plus explicite ?
M.O. : Une société d’Etat créée par décret, devant fonctionner exclusivement avec une convention de concession conclue entre elle et l’Etat, est mise en puissance par un arrêté ministériel. Cette même société gruge la population en percevant des redevances non autorisées auprès des usagers, en violation des dispositions de l’ordonnance n° 2000-35 du 1er février 2000, autorisant les sociétés délégataires de services ou d’ouvrages publics à percevoir des redevances. Bien que n’ayant pas conclu de convention avec l’Etat, la SONATT s’arroge le droit d’abroger celle qui est en cours de validité entre l’Etat de Côte d’Ivoire représenté par deux ministres du gouvernement d’alors et la SICTA. Elle a conclu une nouvelle qui lui procure d’énormes recettes. Ces recettes qui ne sont pas reversées dans les caisses de l’Etat ont rendu les dirigeants de la SONATT suffisants, arrogants et irrespectueux de leur hiérarchie. C’est donc vrai que le pouvoir de l’argent grise les gens.
N.V. : Les accusations que vous portez contre les responsables de la SONATT sont graves. Mais, selon vous, pourquoi le gouvernement actuel laisse donc faire SONATT ?
M.O. : Vous savez, pendant cette crise, certains se comportent comme des hors-la-loi. Sinon comment comprendre que l’Inspection générale d’Etat existe et fonctionne, que la Chambre des comptes de la Cour suprême existe et fonctionne, et que la police économique ne réagisse pas aux malversations dénoncées des dirigeants de la SONATT ?
N.V. : Mais c’est toujours votre syndicat seul qui porte des accusations. Avez-vous la preuve de tout ce que vous reprochez à la SONATT ?
M.O. : Nous n’accusons pas mais dénonçons des malversations et des violations des dispositions législatives et réglementaires qui fondent l’existence de la SONATT. L’ex-PCA de la SONATT, M. Gouaméné Gnogbo Gabriel, avait dénoncé, en son temps, la mauvaise gestion et les détournements de fonds de l’actuel directeur général de la SONATT, M. Assié Agnar Amon. Ce qui lui avait même valu sa révocation par le conseil d’administration d’alors. Pouvez-vous nous dire ce qu’a été la réaction des deux tutelles, le ministère de l’Economie et des Finances et le ministère des Transports ?
N.V. : C’est nous qui posons les questions !
M.O. : Qu’elle soit financière ou technique, la tutelle n’a jamais réagi. La preuve, les nombreuses pertes enregistrées au cours des exercices précédents sont alarmantes. Les résultats nets négatifs de 129 millions de FCFA en 2002, de 392 millions de FCFA en 2003, de 509 millions de FCFA en 2004, le tout couronné par l’absorption du capital social de 300 millions de FCFA, n’ont pu émouvoir la tutelle économique et financière qui est sensée veiller à la gestion des sociétés à participation financière publique. Mais plus, conformément aux dispositions de la loi n° 97-519 portant définition et organisation des sociétés d’Etat, notamment à son article 50, la SONATT devait être dissoute ou restructurée avec un nouvel objet social. Cette même disposition est reprise par l’article 664 de l’acte uniforme de l’OHADA relatif aux sociétés commerciales.
N.V. : Que devrait dire la tutelle économique et financière en ce qui concerne les résultats des différents exercices de la SONATT ?
M.O. : Les dispositions de la loi n° 97-519 du 4 septembre 1997 portant définition et organisation des sociétés d’Etat énoncent que chaque société d’Etat a l’obligation de publier son bilan dans un journal d’annonces légales dans le mois suivant son approbation par le ministre chargé de l’Economie et des Finances. Si le bilan et les documents comptables de fin d’exercice ne sont pas arrêtés, établis et transmis dans les délais et conformément à la législation en vigueur, ou si le budget et le compte d’exploitation n’ont pas été approuvés, ou s’il est constaté une inobservation d’une disposition législative, réglementaire ou statutaire susceptible d’affecter le fonctionnement normal de la société, les commissaires aux comptes ont l’obligation de saisir le ministre de l’Economie et des Finances par un rapport motivé. Celui-ci est habilité à faire effectuer par des professionnels qualifiés et indépendants un audit des sociétés d’Etat dans des conditions et selon une fréquence qu’il fixe. Si du fait des pertes constatées dans le bilan et les documents comptables de fin d’exercice, l’actif net de la société devient inférieur à la moitié du capital, un décret, pris dans les quatre mois, décide de la dissolution de la société ou de la continuation de ses activités.
N.V. : Qu’aurait dû faire le ministre de l’Economie et des Finances ?
M.O. : La tutelle économique et financière devrait punir les administrateurs ou le directeur général de la société d’Etat qui n’ont pas établi, à la clôture de l’exercice social, l’inventaire des actifs et passifs et la situation de la société. Or, ici, dans le cas de la SONATT, aucun bilan n’a été publié dans un journal d’annonces légales. Est-ce à dire que les commissaires aux comptes de la SONATT n’ont pas déposé un rapport motivé auprès du ministre de l’Economie et des Finances ? Sinon, pourquoi le ministre de l’Economie et des Finances n’effectue-t-il pas des audits de la SONATT malgré les dénonciations de malversations commises dans cette structure ? Pourquoi continue-t-il de subventionner chaque année une société d’Etat dont il ignore les résultats des exercices précédents ? La SONATT et ses dirigeants sont-ils au-dessus des lois et règlements en Côte d’Ivoire ? Le silence de la tutelle économique et financière nous inquiète et nous la dénonçons également.
N.V. : Et pourquoi donc ?
M.O. : Parce que l’article 59 de la loi précitée dispose qu’il est établi par le ministre chargé de l’Economie et des Finances, chaque année, et communiqué à l’Assemblée nationale pour information, en annexe à la loi de finances, un rapport sur la situation économique et financière des sociétés d’Etat. En annexe à ce rapport, il est joint pour chaque société d’Etat, le montant des bénéfices réalisés et des dividendes versés ou des pertes constatées, pour l’exercice social antérieur à celui de l’exercice écoulé et les engagements financiers à l’égard de l’Etat en sa qualité de prêteur ou de garant. Le ministre de l’Economie et des Finances a-t-il établi chaque année et communiqué à l’Assemblée nationale un rapport sur la situation économique et financière de la SONATT ? Nous disons non. Si cela avait été, la SONATT n’aurait plus existé ou aurait été restructurée. Et les nombreuses dettes mises au compte du contribuable à travers le Trésor public auraient pris fin.
Interview réalisée par Robert Krassault: ciurbaine@yahoo.fr
Notre Voie : M. Martin Ouondé, vous êtes le secrétaire général du SYNADGTT. Mais il vous est, aujourd’hui, reproché de surpasser votre mission de syndicaliste en vous attaquant à la SONATT, une structure légalement constituée ?
Martin Ouondé : Quand certaines personnes parlent du syndicalisme, nous avons souvent mal. Elles méconnaissent les règles élémentaires qui fondent le syndicalisme responsable. Nous ne sommes pas un syndicat alimentaire. Quand on parle d’intérêt moral, il s’agit de l’ensemble des règles de conduite admises et pratiquées dans une société. Ces règles sont dictées par des textes de lois. Quand ces règles ne sont pas respectées, l’intérêt moral est entamé et l’on doit agir pour l’application de la légalité. C’est ce que nous faisons. S’agissant de l’intérêt matériel, un syndicat responsable ne peut revendiquer de meilleures conditions de travail que si l’entreprise prospère. La Direction générale des transports terrestres et de la circulation (DGTTC) ayant perdu ses prérogatives au profit d’une structure illégale, notre premier combat est de lutter pour la restauration de notre autorité et la rétrocession de nos activités qui enrichissent des individus qui se croient au-dessus des lois et de tout texte règlementaire en vigueur qui fonde leur existence. Nous ne surpassons donc pas notre mission de syndicaliste. S’agissant de la constitution légale de la SONATT, nous ne l’avons jamais niée. Nous décrions plutôt le fonctionnement illégal de la SONATT, en violation des dispositions de son propre décret de création, notamment l’article 3 qui fait obligation à la SONATT de conclure une convention avec l’Etat avant de fonctionner. A force de dénoncer le fonctionnement illégal de la SONATT et les détournements opérés au sein de cette structure, nous sommes menacé de mort depuis quelques jours. Nous tenons donc à prendre à témoin toute la population de ces menaces dont nous faisons l’objet. Ces menaces proviennent de numéros d’appels téléphoniques masqués.
N.V. : Vos craintes devraient être dissipées puisque le Premier ministre vient de demander un audit à la SONATT que vous avez toujours accusée de tous les noms ?
M.O. : Nous sommes d’accord avec Monsieur le Premier ministre pour cette décision courageuse et exemplaire. Seulement, nous avons des appréhensions. Le ministre chargé de la tutelle économique et financière devait effectuer des audits depuis que les premières irrégularités sont apparues dans l’entreprise. Son silence prolongé nous fait douter de la fiabilité d’un audit émanant de ses services. Nous souhaiterions plutôt qu’un audit soit diligenté par Monsieur le Premier ministre lui-même ou par le président de la République. C’est ainsi que nous pouvons espérer obtenir les résultats escomptés. Nous croyons fermement en la moralisation de la vie publique initiée par SEM. Laurent Gbagbo, président de la République de Côte d’Ivoire.
N.V. : La SONATT vient, finalement, de réagir à vos nombreuses accusations. Contrairement à ce que vous avez l’habitude de dire, elle annonce plutôt plusieurs audits de la structure qui, par ailleurs, se porterait bien. Qu’en dites-vous ?
M.O. : M. Blé Guirao veut distraire l’opinion nationale et internationale en parlant de plusieurs audits effectués au sein de sa structure. Je persiste et signe que c’est un seul audit qui a été effectué du 17 au 20 février 2006. Les résultats de cet audit demandaient la dissolution de la SONATT pour mauvaise gestion financière. Malheureusement, la tutelle économique et financière n’a jamais pris en compte ces résultats. M. Blé Guirao n’a pas fait que confirmer tout ce que nous nous évertuons à dire tout seul. Enfin, les dirigeants de la SONATT se sont décidés à nous aider à faire éclater la vérité.
N.V. : Pourquoi dites-vous cela ?
M.O. : Les dirigeants de la SONATT reconnaissent enfin avoir abusivement spolié la DGTTC au mépris de la décision de la Cour suprême. Ils confirment la scission de l’objet social de la SONATT par la concession de l’édition du permis de conduire format carte de crédit à la société Interflex Africard-CI. Ils confirment également que la SONATT, créée par le décret n° 2001-377 du 27 juin 2001, n’a effectivement commencé à fonctionner qu’en septembre 2004 sur la base d’un arrêté ministériel en lieu et place d’une convention de concession à conclure obligatoirement avec l’Etat…
N.V. : A quel arrêté faites-vous allusion ?
M.O. : Il s’agit de l’arrêté n° 254/MEMT/CAB du 18 août 2004 de mise en puissance de la SONATT qui l’autorisait à exercer quatre activités, selon M. Blé Guirao. Aujourd’hui, le directeur général, M. Assi Agnar, et associés, en exécutent quinze contre vents et marrées, malgré les deux arrêts de la Cour suprême qui annulent l’arrêté n°066/MEMT/CAB du 24 mars 2005 sur la base duquel la SONATT bénéficie aujourd’hui de onze activités qui ne relèvent pas de sa compétence. Voici ce que nous condamnons depuis toujours. A savoir la violation des mesures suspensives telles que la convention de concession et son décret d’approbation pris en Conseil des ministres conformément aux dispositions des textes en vigueur.
N.V. : Pouvez-vous être un peu plus explicite ?
M.O. : Une société d’Etat créée par décret, devant fonctionner exclusivement avec une convention de concession conclue entre elle et l’Etat, est mise en puissance par un arrêté ministériel. Cette même société gruge la population en percevant des redevances non autorisées auprès des usagers, en violation des dispositions de l’ordonnance n° 2000-35 du 1er février 2000, autorisant les sociétés délégataires de services ou d’ouvrages publics à percevoir des redevances. Bien que n’ayant pas conclu de convention avec l’Etat, la SONATT s’arroge le droit d’abroger celle qui est en cours de validité entre l’Etat de Côte d’Ivoire représenté par deux ministres du gouvernement d’alors et la SICTA. Elle a conclu une nouvelle qui lui procure d’énormes recettes. Ces recettes qui ne sont pas reversées dans les caisses de l’Etat ont rendu les dirigeants de la SONATT suffisants, arrogants et irrespectueux de leur hiérarchie. C’est donc vrai que le pouvoir de l’argent grise les gens.
N.V. : Les accusations que vous portez contre les responsables de la SONATT sont graves. Mais, selon vous, pourquoi le gouvernement actuel laisse donc faire SONATT ?
M.O. : Vous savez, pendant cette crise, certains se comportent comme des hors-la-loi. Sinon comment comprendre que l’Inspection générale d’Etat existe et fonctionne, que la Chambre des comptes de la Cour suprême existe et fonctionne, et que la police économique ne réagisse pas aux malversations dénoncées des dirigeants de la SONATT ?
N.V. : Mais c’est toujours votre syndicat seul qui porte des accusations. Avez-vous la preuve de tout ce que vous reprochez à la SONATT ?
M.O. : Nous n’accusons pas mais dénonçons des malversations et des violations des dispositions législatives et réglementaires qui fondent l’existence de la SONATT. L’ex-PCA de la SONATT, M. Gouaméné Gnogbo Gabriel, avait dénoncé, en son temps, la mauvaise gestion et les détournements de fonds de l’actuel directeur général de la SONATT, M. Assié Agnar Amon. Ce qui lui avait même valu sa révocation par le conseil d’administration d’alors. Pouvez-vous nous dire ce qu’a été la réaction des deux tutelles, le ministère de l’Economie et des Finances et le ministère des Transports ?
N.V. : C’est nous qui posons les questions !
M.O. : Qu’elle soit financière ou technique, la tutelle n’a jamais réagi. La preuve, les nombreuses pertes enregistrées au cours des exercices précédents sont alarmantes. Les résultats nets négatifs de 129 millions de FCFA en 2002, de 392 millions de FCFA en 2003, de 509 millions de FCFA en 2004, le tout couronné par l’absorption du capital social de 300 millions de FCFA, n’ont pu émouvoir la tutelle économique et financière qui est sensée veiller à la gestion des sociétés à participation financière publique. Mais plus, conformément aux dispositions de la loi n° 97-519 portant définition et organisation des sociétés d’Etat, notamment à son article 50, la SONATT devait être dissoute ou restructurée avec un nouvel objet social. Cette même disposition est reprise par l’article 664 de l’acte uniforme de l’OHADA relatif aux sociétés commerciales.
N.V. : Que devrait dire la tutelle économique et financière en ce qui concerne les résultats des différents exercices de la SONATT ?
M.O. : Les dispositions de la loi n° 97-519 du 4 septembre 1997 portant définition et organisation des sociétés d’Etat énoncent que chaque société d’Etat a l’obligation de publier son bilan dans un journal d’annonces légales dans le mois suivant son approbation par le ministre chargé de l’Economie et des Finances. Si le bilan et les documents comptables de fin d’exercice ne sont pas arrêtés, établis et transmis dans les délais et conformément à la législation en vigueur, ou si le budget et le compte d’exploitation n’ont pas été approuvés, ou s’il est constaté une inobservation d’une disposition législative, réglementaire ou statutaire susceptible d’affecter le fonctionnement normal de la société, les commissaires aux comptes ont l’obligation de saisir le ministre de l’Economie et des Finances par un rapport motivé. Celui-ci est habilité à faire effectuer par des professionnels qualifiés et indépendants un audit des sociétés d’Etat dans des conditions et selon une fréquence qu’il fixe. Si du fait des pertes constatées dans le bilan et les documents comptables de fin d’exercice, l’actif net de la société devient inférieur à la moitié du capital, un décret, pris dans les quatre mois, décide de la dissolution de la société ou de la continuation de ses activités.
N.V. : Qu’aurait dû faire le ministre de l’Economie et des Finances ?
M.O. : La tutelle économique et financière devrait punir les administrateurs ou le directeur général de la société d’Etat qui n’ont pas établi, à la clôture de l’exercice social, l’inventaire des actifs et passifs et la situation de la société. Or, ici, dans le cas de la SONATT, aucun bilan n’a été publié dans un journal d’annonces légales. Est-ce à dire que les commissaires aux comptes de la SONATT n’ont pas déposé un rapport motivé auprès du ministre de l’Economie et des Finances ? Sinon, pourquoi le ministre de l’Economie et des Finances n’effectue-t-il pas des audits de la SONATT malgré les dénonciations de malversations commises dans cette structure ? Pourquoi continue-t-il de subventionner chaque année une société d’Etat dont il ignore les résultats des exercices précédents ? La SONATT et ses dirigeants sont-ils au-dessus des lois et règlements en Côte d’Ivoire ? Le silence de la tutelle économique et financière nous inquiète et nous la dénonçons également.
N.V. : Et pourquoi donc ?
M.O. : Parce que l’article 59 de la loi précitée dispose qu’il est établi par le ministre chargé de l’Economie et des Finances, chaque année, et communiqué à l’Assemblée nationale pour information, en annexe à la loi de finances, un rapport sur la situation économique et financière des sociétés d’Etat. En annexe à ce rapport, il est joint pour chaque société d’Etat, le montant des bénéfices réalisés et des dividendes versés ou des pertes constatées, pour l’exercice social antérieur à celui de l’exercice écoulé et les engagements financiers à l’égard de l’Etat en sa qualité de prêteur ou de garant. Le ministre de l’Economie et des Finances a-t-il établi chaque année et communiqué à l’Assemblée nationale un rapport sur la situation économique et financière de la SONATT ? Nous disons non. Si cela avait été, la SONATT n’aurait plus existé ou aurait été restructurée. Et les nombreuses dettes mises au compte du contribuable à travers le Trésor public auraient pris fin.
Interview réalisée par Robert Krassault: ciurbaine@yahoo.fr