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Faits Divers Publié le lundi 20 juillet 2009 | Nord-Sud

Ils composaient à la place des vrais candidats : Des fraudeurs au Bac condamnés à 6 mois

Le tribunal des flagrants délits d’Abidjan a frappé fort mercredi. Et un réseau de fraudeurs est tombé. Il s’agit de personnes qui usaient de manœuvres pour assurer le succès à des candidats au baccalauréat. Le réseau est constitué d’étudiants et même d’enseignants qui monnayaient leur technologie auprès des élèves et de leurs parents. A Bingerville, ces «mercenaires» ont opéré dès le début des épreuves écrites, le 7 juillet, au collège moderne. C’est André Jocelyn Mathieu Mani, chef du secrétariat du centre qui a découvert le pot-aux-roses. Au cours d’une vérification de la convocation du candidat nommé Cissé Aboubacar, 22 ans, il découvre de nombreuses irrégularités. Il conduit alors le suspect au commissariat de police. En réalité, Cissé Aboubacar était un faussaire, un mercenaire qui répond au nom de Diaby Vacaba, 24 ans, étudiant résidant à Koumassi. Approché, l’inspecteur de l’enseigne secondaire et vice-président du centre d’examen, Attoungré Kouassi Joseph, présente le mode opératoire du mercenaire et de ses acolytes. «Le nommé Diaby Vacaba s’est fait passer pour Cissé Aboubacar, le vrai élève, dans l’intention de composer en lieu et place de ce dernier», révèle-t-il. André, le chef du secrétariat, ajoute que les faux documents établis au nom de Cissé Aboubacar concernant la convocation et l’attestation d’identité comportent de fausses références. Ce qui a éveillé ses soupçons. Le candidat Cissé Aboubacar ne figurant pas sur le listing officiel du ministère de l’Education nationale, il était donc aisé de deviner la supercherie. Devant les policiers, Diaby Vacaba, reconnaît les faits. Il indique avoir été contacté par Aboubacar pour qu’il compose à sa place moyennant la somme de 45.000 Fcfa. «Ce jour-là, aux environs de neuf heures, j’étais en salle de classe pour subir l’épreuve de philosophie du baccalauréat série D pour le compte de mon ami Cissé Aboubacar, candidat régulièrement inscrit. Avant le début de l’épreuve, les examinateurs ont procédé à la vérification des convocations et pièces d’identité», raconte Diaby au poste de police. L’examinateur lui a demandé s’il avait subi les épreuves orales. Alors que lui s’apprêtait à répondre par l’affirmative, il est surpris de s’entendre dire que Cissé Aboubacar qu’il est censé être était «absent» à ce rendez-vous. «J’ai tenté de le berner avant de reconnaître que je n’étais pas présent pendant les oraux», ajoute-t-il lors de son audition. Avant d’ajouter : «Je composais effectivement pour le candidat Cissé Aboubacar moyennant la somme de 10.000 Fcfa par jour. J’ai tenté de corrompre les membres du secrétariat pour qu’ils me laissent partir». Outre Cissé er Diaby, d’autres personnes ont pris part au coup. Guy Avoce, 37 ans, professeur de mathématiques au lycée municipal de Koumassi a aussi été pris. C’est lui qui a aidé son ex-élève Cissé Aboubacar à monter le faux dossier d’examen. « Il m’a soumis son idée de passer le baccalauréat session 2009 en tant que candidat officiel. Je lui ai dit que cela n’était pas possible. Mais, sur son instance, j’ai cédé et j’ai pris la somme de 15.000 Fcfa, son extrait d’acte de naissance, quatre photos d’identité qui n’étaient pas celles de mon élève et la somme de 5.000Fcfa pour l’achat d’un livret scolaire », précise-t-il. Pour obtenir la convocation et l’attestation d’identité de son filleul, Guy avait fait appel à l’un de ses collègues. « J’ai remis la somme de 20.000 Fcfa à Antonin, professeur d’Anglais dans une école privée. C’est lui qui a établi l’attestation d’identité et déposé le dossier à la Deco », soutient Guy qui dit regretter son acte. Interrogé Cissé Aboubacar enfonce le prof. « J’ai pris contact avec lui. Il m’a dit qu’il était possible que je passe l’examen du baccalauréat en tant que candidat officiel sans m’inscrire dans une école », indique-t-il. Il reconnaît toutefois que c’est lui qui a proposé à son professeur de trouver une autre personne pour composer à sa place. « je n’ai pas fréquenté l’école cette année. C’est ainsi que j’ai fait la proposition à mon ami Diaby Vacaba qui a accepté moyennant la somme de 45.000 Fcfa », précise-t-il.

Autre lieu, même constat. A Abobo, Houphouët-Boigny, au centre d’examen Marie Blanche, les candidats recourent aux mercenaires pour espérer obtenir le sésame. Yahiri Etienne, 37 ans, instituteur, compose pour un de ses amis, Bodjo Christ Anderson Bawa, qui retente son bac A. « Je me suis présenté à sa place pour l’orale et l’écrit. J’ai donc composé dans toutes les matières », affirme l’enseignant fraudeur qui était en passe de réussir son coup. Mais, les choses se sont compliquées pour lui le 10 juillet, dernier jour des compositions écrites. « C’est lors de l’épreuve de Sciences de la Vie et de la Terre que j’ai été découvert. Le président du jury est entré en salle et s’est mis à vérifier les identités. Il m’a posé des questions auxquelles je n’ai pu répondre avec précision. Notamment, celle relative au nom du village qui figurait sur la fiche de table. Voilà comment j’ai été pris », explique-t-il. Un autre fraudeur est pris le stylo à la main au centre d’examen Sainte Foi, à Abobo Avocatier. Traoré Lacina, 31 ans, étudiant en sociologie, a pris la place de Zlebli Georges. Selon Dr. Kra Adou Koffi Mathieu, président du jury, c’est le 8 juillet, aux environs de 11 heures, qu’une information émanant de la direction des Examens et concours révèle qu’un individu serait en situation de fraude dans la salle n° 6 du centre. Le contrôle d’identité permet de démasquer Lacina. Conduit au commissariat de police du 32ème arrondissement, le «barbouze» passe aux aveux. « J’ai été contacté par Toussaint, un voisin de quartier à Abobo-BC. Il m’a proposé de passer l’examen du Bac à la place de son petit frère, nommé Zebly Bi Georges », raconte-t-il. Selon lui, c’est après plusieurs refus qu’il a fini par céder. « J’ai accepté et il a constitué les dossiers. Je me suis rendu au centre d’examen avec une convocation portant le nom de Zebly Bi Georges et ma photo. C’est à la composition de l’épreuve de Français que j’ai été interpellé par le président du jury», déclare Lacina. A la barre du tribunal des flagrants délits d’Abidjan, le 15 juillet, Traoré Lacina, Guy Avoce, Cissé Aboubacar, Diaby Vacaba, Yahiri Etienne et Kpeku Kwesi Anthony ont tous reconnu les faits de faux et usage de faux, complicité, fraude aux examens et tentative de corruption. En répression, le tribunal les a condamnés chacun à six mois de prison ferme.

Bahi K.
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