«Méfions-nous des ressources naturelles même s'il ne faut pas les brûler. En Côte d'Ivoire, il y a peut-être une malédiction du café cacao », a déclaré Pierre Garello enseignant à l'université Paul Cézanne d'Aix-Marseille III à l'occasion de la conférence prononcée récemment à l'Ecole nationale de statistique et d'économie appliquée (Ensea) à Abidjan. Cette analyse sur le cas ivoirien, en présence du président de l'Assemblée nationale, Mamadou Koulibaly, M.Garello a voulu la diluer dans une vision globale. «C'est un mythe de dire que le développement doit se faire autour des ressources naturelles. On remarque que les pays qui ont le plus de ressources naturelles sont ceux qui n'arrivent pas à avancer. Certes le Produit intérieur est souvent élevé mais la qualité du développement est absente», a-t-il expliqué. Pour lui, le développement ne réside pas nécessairement dans la mise en place d'un Etat fort comme certains le pensent mais forcément dans la capacité à lever un certain nombre de blocages et de préjugés. «Un Etat fort n'aide pas au développement. L'occident ne s'est pas développé avec un Etat fort. Ce n'est pas nécessaire », a ajouté M. Garello. Par ailleurs, il s'est insurgé contre les préalables qui, dit-il, sont une fuite en avant. «Dire qu'on n'a pas assez de routes, d'aéroports, de ressources, qu'on n'a pas la base nécessaire n'est pas un débat pertinent», a observé l'économiste. Selon lui, le développement repose sur le triptyque suivant: le savoir, la technique et l'entrepreneur. Autant dire que le progrès est adossé à l'ouverture au monde et davantage à l'esprit d'entreprise. Le professeur Emmanuel Martin, un autre universitaire français, a préconisé une refonte en profondeur des mentalités africaines notamment par la mise en place de procédures transparentes, fluides, débarrassées de toutes lourdeurs artificielles. «Il y a manifestement un problème de gestion du temps. Les affectations sont incohérentes. S'il faut deux ans pour avoir les autorisations pour construire un hangar, ce n'est pas la peine. Les Ivoiriens sont entreprenants mais il ne faut pas empêcher les gens de travailler », a soutenu M. Martin, exhortant les porteurs de projets à avoir le goût du risque. «Si on n'a pas la liberté d'essayer, ça ne marche pas», affirme-t-il. Il a appelé à l'amélioration de l'environnement judiciaire d'autant que l'insécurité juridique est un frein aux investissements.
Lanciné Bakayoko
Lanciné Bakayoko