Dans le secret des négociations de Ouaga 2000, nous avons pu recueillir l'essentiel des interventions prononcées à huis clos devant le facilitateur Blaise Compaoré.
Le quartier est calme, cossu. Quiet. Il fleure bon la nouvelle bourgeoisie entreprenante, prospère mais sans ostentation. Ouaga 2000 est un quartier où il fait bon vivre, quand on a un compte en banque qui ne vous donne pas l'insomnie dès le 20 du mois. Peu de circulation, peu de commerces, de beaux jardins bien taillés et du gazonnage à faire pâlir de jalousie les clubs de golf britanniques. Le centre de conférence internationale de Ouaga 2000 est le reflet stylisé de cet art de vivre burkinabé émergent. Beau, propre, d'une agréable architecture et entretenu comme une maîtresse de roi, c'est-à-dire avec délicatesse. Dans ce centre pourtant, les délégations invitées à faire le point des obstacles déjà franchies dans la course de haies de l'élection présidentielle ivoirienne, n'ont pas le temps de s'extasier sur la beauté du paysage. Ils rendent compte de leurs missions.
Ce que chacun a dit
Quand les journalistes ont été mis dehors, le camp présidentiel ivoirien a été le premier à prendre la parole. Selon nos sources, l'ambassadeur Alcide Djédjé Ilahiri a axé son intervention sur la question de la sécurité des futures élections. Il a déploré ce qu'il nomme la raréfaction des ressources, c'est-à-dire le manque d'argent, pour faire face aux enjeux de sécurité. S'adressant aux bailleurs de fonds, il lance ce cri du cœur : «aidez-nous sans arrière-pensées». A sa suite, M. Alain Lobognon, chef de la délégation des Forces nouvelles, déclare que pour son mouvement, la date du 29 novembre pour le premier tour de l'élection présidentielle, est une date réaliste. «Les Forces nouvelles défendent cette date absolument», soutient-il. Toutefois, précise-t-il, cette date ne sera tenable que si tous les acteurs travaillent d'arrache-pied à cela. La phrase forte prononcée par le chef de délégation des Fn est la suivante : «le souhait des Forces nouvelles est qu'on termine 2009 avec de nouvelles institutions».
M. Bouréima Badini, représentant spécial du Facilitateur a, lui aussi, fait le point de sa mission. Il estime qu'il y a un certain nombre de textes juridiques indispensables qui auraient dû être déjà pris, alors que ce n'est toujours pas le cas. M. Badini constate que pour la bonne gestion du contentieux des listes électorales, il faudrait que l'administration judiciaire soit entièrement déployée sur toute l'étendue du territoire. Reprenant à son compte les inquiétudes de son mandant, le président Compaoré, sur la question de la sécurisation des futures élections, réclame avec insistance que soit mis en place le financement dont a besoin le Centre de commandement intégré (Cci) pour être pleinement opérationnel. Dans la foulée, il interpelle les forces impartiales pour qu'elles apportent un soutien plus actif au Cci. Pour ce qui est de la question de l'identification et de l'enrôlement électoral, Bouréima Badini s'estime satisfait des conditions dans lesquelles le processus s'est déroulé et des résultats obtenus. Pour ce qui le concerne, au vu des éléments dont il dispose, il pense que le respect de la date du 29 novembre est absolument tenable.
Le chef de la mission onusienne en Côte d'Ivoire, Young Jin-Choi, a eu une intervention assez brève, selon nos informations. Il s'est borné à déclarer qu'il n'avait pas grand-chose à déclarer, étant entendu qu'il venait de faire son rapport au Conseil de sécurité. Rapport dont chacune des parties concernées par le processus de paix a eu copie. Il invite tout le monde au respect de la dernière résolution de l'Onu (la 1880) concernant la Côte d'Ivoire. Il ajoute juste que l'Onuci continuera d'apporter son appui au processus de paix, comme elle l'a toujours fait.
Robert Beugré Mambé, le patron des élections, a eu l'intervention la plus longue. Il commence par faire un exposé des chiffres de l'identification, région par région ainsi qu'à l'étranger. Il affirme qu'au total, ce sont 6. 552.694 personnes qui ont été enregistrées au terme du processus. Après avoir fini cela, il décline le chronogramme électoral, étape par étape, jusqu'à la date de l'élection présidentielle en novembre 2009.
Respecter le 29 novembre
Lui aussi aborde le volet du financement. Selon la dernière réunion du Cpc, l'Etat devait mettre à la disposition de la Cei la somme de 5 milliards de Fcfa pour ses opérations, au plus tard le 31 juillet 2009. Cette somme n'est jamais venue. Le président de la Cei indique qu'il a rencontré le ministre de l'Economie et des Finances, qui a promis de lui tenir des sommes disponibles dès ce lundi 10 août. Pour ce qui concerne le volet de la sécurisation des élections, qui cristallise toutes les attentions, lui aussi en a rajouté une couche. Il souhaite que la sécurisation s'étende aussi bien aux candidats, qu'au matériel électoral, aux commissaires de la Cei, aux électeurs… Et commence dès la publication de la liste électorale. Relativement à la question du traitement informatique de la liste électorale, il répond que contrairement aux critiques dont elle est l'objet dans la presse, la Cei a fait tout ce qui lui a été demandé. Notamment la mise à la disposition des opérateurs techniques de locaux entièrement fonctionnels. Il informe l'assemblée que l'ensemble du matériel électoral (ordinateurs, imprimantes, cartouches d'encre, isoloirs, urnes…) est arrivé et qu'il est entreposé sur deux sites différents. Nous croyons savoir qu'il s'agit d'Abidjan et de Yamoussoukro. Beugré Mambé termine en certifiant que pour la Cei, «le respect du 29 novembre est indéniable».
Le commandant du Centre de commandement intégré, le colonel-major Kouassi Nicolas, quand il prend la parole, intervient pour situer les missions du Cci. Cela fait, il présente son budget qu'il évalue à 11 milliards de Fcfa. La non-mise en place de ce budget fait qu'il n'arrive pas à remplir ses missions et à équiper ses troupes convenablement.
A la suite des techniciens, Guillaume Soro prend la parole en tant que chef du gouvernement chargé d'implémenter l'ensemble des mesures arrêtées.
Il estime que tout a été dit et bien dit. Il apprend cependant au Facilitateur que l'opération de reconstitution des registres d'état civils détruits ou endommagés est achevée. Selon les chiffres qu'il communique, 251.275 attestations de plumitifs ont été délivrées sur une estimation initiale de plus de 257.000. Intervenant en dernier, le président du Burkina Faso a félicité tous les intervenants pour leur implication dans le processus de sortie de crise. Il estime que chacun a une claire vision de ce qui a été fait et de ce qu'il reste à faire. Il insiste sur le fait que le processus électoral est à une étape décisive et qu'il faudrait tout faire pour tenir les délais fixés. Cela pour lui est un impératif capital. Après une légère pause, les travaux reprennent pour cette fois, laisser libre cours aux débats.
Touré Moussa, envoyé spécial
Le quartier est calme, cossu. Quiet. Il fleure bon la nouvelle bourgeoisie entreprenante, prospère mais sans ostentation. Ouaga 2000 est un quartier où il fait bon vivre, quand on a un compte en banque qui ne vous donne pas l'insomnie dès le 20 du mois. Peu de circulation, peu de commerces, de beaux jardins bien taillés et du gazonnage à faire pâlir de jalousie les clubs de golf britanniques. Le centre de conférence internationale de Ouaga 2000 est le reflet stylisé de cet art de vivre burkinabé émergent. Beau, propre, d'une agréable architecture et entretenu comme une maîtresse de roi, c'est-à-dire avec délicatesse. Dans ce centre pourtant, les délégations invitées à faire le point des obstacles déjà franchies dans la course de haies de l'élection présidentielle ivoirienne, n'ont pas le temps de s'extasier sur la beauté du paysage. Ils rendent compte de leurs missions.
Ce que chacun a dit
Quand les journalistes ont été mis dehors, le camp présidentiel ivoirien a été le premier à prendre la parole. Selon nos sources, l'ambassadeur Alcide Djédjé Ilahiri a axé son intervention sur la question de la sécurité des futures élections. Il a déploré ce qu'il nomme la raréfaction des ressources, c'est-à-dire le manque d'argent, pour faire face aux enjeux de sécurité. S'adressant aux bailleurs de fonds, il lance ce cri du cœur : «aidez-nous sans arrière-pensées». A sa suite, M. Alain Lobognon, chef de la délégation des Forces nouvelles, déclare que pour son mouvement, la date du 29 novembre pour le premier tour de l'élection présidentielle, est une date réaliste. «Les Forces nouvelles défendent cette date absolument», soutient-il. Toutefois, précise-t-il, cette date ne sera tenable que si tous les acteurs travaillent d'arrache-pied à cela. La phrase forte prononcée par le chef de délégation des Fn est la suivante : «le souhait des Forces nouvelles est qu'on termine 2009 avec de nouvelles institutions».
M. Bouréima Badini, représentant spécial du Facilitateur a, lui aussi, fait le point de sa mission. Il estime qu'il y a un certain nombre de textes juridiques indispensables qui auraient dû être déjà pris, alors que ce n'est toujours pas le cas. M. Badini constate que pour la bonne gestion du contentieux des listes électorales, il faudrait que l'administration judiciaire soit entièrement déployée sur toute l'étendue du territoire. Reprenant à son compte les inquiétudes de son mandant, le président Compaoré, sur la question de la sécurisation des futures élections, réclame avec insistance que soit mis en place le financement dont a besoin le Centre de commandement intégré (Cci) pour être pleinement opérationnel. Dans la foulée, il interpelle les forces impartiales pour qu'elles apportent un soutien plus actif au Cci. Pour ce qui est de la question de l'identification et de l'enrôlement électoral, Bouréima Badini s'estime satisfait des conditions dans lesquelles le processus s'est déroulé et des résultats obtenus. Pour ce qui le concerne, au vu des éléments dont il dispose, il pense que le respect de la date du 29 novembre est absolument tenable.
Le chef de la mission onusienne en Côte d'Ivoire, Young Jin-Choi, a eu une intervention assez brève, selon nos informations. Il s'est borné à déclarer qu'il n'avait pas grand-chose à déclarer, étant entendu qu'il venait de faire son rapport au Conseil de sécurité. Rapport dont chacune des parties concernées par le processus de paix a eu copie. Il invite tout le monde au respect de la dernière résolution de l'Onu (la 1880) concernant la Côte d'Ivoire. Il ajoute juste que l'Onuci continuera d'apporter son appui au processus de paix, comme elle l'a toujours fait.
Robert Beugré Mambé, le patron des élections, a eu l'intervention la plus longue. Il commence par faire un exposé des chiffres de l'identification, région par région ainsi qu'à l'étranger. Il affirme qu'au total, ce sont 6. 552.694 personnes qui ont été enregistrées au terme du processus. Après avoir fini cela, il décline le chronogramme électoral, étape par étape, jusqu'à la date de l'élection présidentielle en novembre 2009.
Respecter le 29 novembre
Lui aussi aborde le volet du financement. Selon la dernière réunion du Cpc, l'Etat devait mettre à la disposition de la Cei la somme de 5 milliards de Fcfa pour ses opérations, au plus tard le 31 juillet 2009. Cette somme n'est jamais venue. Le président de la Cei indique qu'il a rencontré le ministre de l'Economie et des Finances, qui a promis de lui tenir des sommes disponibles dès ce lundi 10 août. Pour ce qui concerne le volet de la sécurisation des élections, qui cristallise toutes les attentions, lui aussi en a rajouté une couche. Il souhaite que la sécurisation s'étende aussi bien aux candidats, qu'au matériel électoral, aux commissaires de la Cei, aux électeurs… Et commence dès la publication de la liste électorale. Relativement à la question du traitement informatique de la liste électorale, il répond que contrairement aux critiques dont elle est l'objet dans la presse, la Cei a fait tout ce qui lui a été demandé. Notamment la mise à la disposition des opérateurs techniques de locaux entièrement fonctionnels. Il informe l'assemblée que l'ensemble du matériel électoral (ordinateurs, imprimantes, cartouches d'encre, isoloirs, urnes…) est arrivé et qu'il est entreposé sur deux sites différents. Nous croyons savoir qu'il s'agit d'Abidjan et de Yamoussoukro. Beugré Mambé termine en certifiant que pour la Cei, «le respect du 29 novembre est indéniable».
Le commandant du Centre de commandement intégré, le colonel-major Kouassi Nicolas, quand il prend la parole, intervient pour situer les missions du Cci. Cela fait, il présente son budget qu'il évalue à 11 milliards de Fcfa. La non-mise en place de ce budget fait qu'il n'arrive pas à remplir ses missions et à équiper ses troupes convenablement.
A la suite des techniciens, Guillaume Soro prend la parole en tant que chef du gouvernement chargé d'implémenter l'ensemble des mesures arrêtées.
Il estime que tout a été dit et bien dit. Il apprend cependant au Facilitateur que l'opération de reconstitution des registres d'état civils détruits ou endommagés est achevée. Selon les chiffres qu'il communique, 251.275 attestations de plumitifs ont été délivrées sur une estimation initiale de plus de 257.000. Intervenant en dernier, le président du Burkina Faso a félicité tous les intervenants pour leur implication dans le processus de sortie de crise. Il estime que chacun a une claire vision de ce qui a été fait et de ce qu'il reste à faire. Il insiste sur le fait que le processus électoral est à une étape décisive et qu'il faudrait tout faire pour tenir les délais fixés. Cela pour lui est un impératif capital. Après une légère pause, les travaux reprennent pour cette fois, laisser libre cours aux débats.
Touré Moussa, envoyé spécial