Une jeune fille hurle. Elle vient d'entendre son nom des lèvres du chef du secrétariat. Elle a le Bepc. Elle court se jeter sur le dos de sa mère venue la soutenir. « Viens faire dos dos ma fille. Je suis très fière de toi. Après l'échec de ta sœur au Bac, tu viens d'apporter un peu de rayonnement dans la famille », se réjouit la mère. Soutenue par les regards de ses amies la fille se met sur le dos de la mère. A l'aide d'un pagne, celle-ci recouvre sa fille. Elles prennent la direction du portail, du collège moderne du Plateau. Il était 14 h 30. Des centaines d'élèves, convocation en main, ont le regard fixé sur le chef du secrétariat. Celui-ci, micro en main, procède à la lecture des noms des admis. Une autre fille crie, folle de joie : « Je ne vais plus retourner dans ce désert ». C'est Yao Karelle. Une autre clameur fait retourner l'auditoire. Un garçon vient d'entendre son nom. Il fend la foule, court vers l'une des salles de classe, manquant sur son passage de renverser une fille. « C'est propre, ce n'est pas donné à n'importe qui ! A nous deux la seconde », se vante-t-il. Le garçon ressort de la salle et se dirige vers un gérant de cabine. Il appelle les parents pour annoncer la bonne nouvelle. Mais la joie ne dure pas. Aussitôt les pleurs prennent le dessus dans cette ambiance. Un jeune garçon écrase une larme. C'est un non-voyant et il tient une canne. Yves vient d'échouer pour la deuxième fois au Bepc. Dans ce centre, les non-voyants sont en grand nombre. Avant la proclamation des résultats, Ba Enoc, aveugle, dans un optimisme a affirmé : « Nous sommes 19 non-voyants. Et nous allons faire un 100% de réussite ». Malheureusement, Enoc a échoué. Parmi les 19 non-voyants, 4 viennent de Toumodi et 15 de l'Institut des aveugles de Yopougon. Fomba Aminata, l'une des aveugles a deux téléphones portables collés aux oreilles. Elle annonce la bonne nouvelle à ses proches. Un autre candidat, en tee-shirt et avec un short est assis à même le sol. Son visage est recouvert de larmes. Soutenu par ses camarades, ce jeune garçon pleure son échec. « Ça va aller. Ne désespère pas», lui disent-ils. Selon le chef du secrétariat, Makré Léopold, il y a 735 candidats dans ce centre. « Seulement 142 sont admis, soit un taux de 22,26% », détaille-t-il. À 15 heures, la liste des admis est affichée. Yao Amena, après avoir regardé les différentes listes, s'interroge : « J'ai bossé pour rien, toutes ces nuits en train d'étudier. Pourquoi ?». C'est cette question que les malheureux candidats se sont posée. La Direction des examens et concours annonce 23,03% de réussite au Bepc, sur toute l'étendue du territoire.
Soro Sita (Stagiaire)
Soro Sita (Stagiaire)
