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Politique Publié le jeudi 20 août 2009 | Nord-Sud

Présidentielle 2009 : Les services secrets au secours de Gbagbo

A l`approche de la campagne électorale, Laurent Gbagbo prépare les services de renseignement à lui apporter un appui décisif et ne cesse de jeter un œil sur les activités de ses opposants.

La présidentielle de 2009 (remarquez, on ne dit plus novembre 2009) sera certainement la plus disputée de l`histoire de la Côte d`Ivoire post-indépendance. Laurent Gbagbo, le président sortant, «the sitting president», a décidé de jeter dans la bataille l`essentiel de ses ressources humaines, politiques, sociologiques, financières, policières et militaires. Selon une source très bien introduite, l`objectif que le candidat Gbagbo s`est fixé pour se mettre à l`abri de toute mauvaise surprise, c`est la victoire dès le premier tour ! Cette consigne a été donnée à tous ses lieutenants. Et bien entendu, les services secrets sont mobilisés pour apporter leur contribution à la réussite de la «mission Gbagbo». Concernant particulièrement l`utilisation des services de renseignement, nos investigations nous permettent d`affirmer aujourd`hui que grâce à l`appui de techniciens israéliens, le chef de l`Etat a fait monter une antenne de télécommunication, sur l`une des tours du Plateau. C`était il y a environ trois mois. Cette antenne a pour fonction de capter les télécommunications dans un rayon de trois kilomètres autour de son point d`installation, pour le compte de l`Agence nationale de stratégie et d`intelligence (Ansi). Son objectif est d`intercepter, de dégrouper et de traiter un certain nombre, voire un certain type de télécommunication. Il va sans dire que pour que cette technologie soit véritablement opérante, il faut au préalable le personnel humain pour la faire fonctionner. Gbagbo s`y attèle. Un groupe de militaires ivoiriens a été envoyé en stage en Allemagne pour y apprendre les voies et manières d`intercepter et de traiter une télécommunication. La dernière vague de ces spécialistes des écoutes est arrivée il y a environ une dizaine de jours. Elle comprend moins d`une dizaine de personnes, toutes triées sur le volet. Selon nos renseignements, aucun ressortissant du nord n`est parmi les sélectionnés. Un signe. Certains, selon nos sources, sont spécialisés dans l`interception des sms ou textos. D`autres ont appris à intercepter les courriels (ou emails), les communications sur Gsm (cellulaire), à casser les messages cryptés voire à vaincre les codes de stéganographie (l`art de faire passer inaperçu un message dans un autre message)…

Ansi : la menace sur les libertés individuelles

Puisqu`on ne peut vraisemblablement pas consteller Abidjan d`antennes d`interception d`ici les élections, pour écouter les communications des zones à risques et celles des leaders mis sur table d`écoute, une solution a été trouvée. Le pouvoir a pris la décision de faire ouvrir dans tous les quartiers d`Abidjan des bureaux pour l`Ansi. Officiellement, l`on a indiqué aux cadres du renseignement que c`est pour rapprocher cette superstructure des réalités du terrain. Mais d`autres croient savoir qu`en fait, il s`agit d`installer à travers ces bureaux, des cellules d`écoutes téléphoniques. Quoi qu`il en soit, selon nos informations, un décret de réorganisation de l`ensemble des services de renseignement est sur le bureau de Gbagbo. Ce texte va compléter le dispositif juridique de l`Ansi et lui donner les moyens légaux d`opérer toutes ces écoutes. De même, il va doter cet organe d`un nouveau commandement et compléter son architecture, qui, jusqu`ici était incomplète faute de textes adéquats.
On le voit, du Maroc où il se repose et d`où il a profité pour faire un bilan de santé complet avant le grand marathon de la campagne électorale, Laurent Gbagbo ne lâche pas d`un pouce sa machine. Au contraire, il la renforce chaque jour. En piétinant, au passage, quelques libertés individuelles. Notamment celle relative au secret de la correspondance.
L`espionnage électronique certes, mais aussi et surtout l`intelligence humaine est déployée sur le terrain. Selon des informations issues de l`une des dernières réunions de l`Ansi, il a été décidé de mettre sous stricte surveillance un certain nombre d`officiers akans. Les «grandes oreilles» indiquent avoir noté beaucoup d`agitations au niveau de ces militaires akans, estampillés pro-Bédié. Nos sources affirment qu`au niveau de l`état-major central, on suit de près les réunions de ce qu`il est convenu d`appeler «la Fraternelle des militaires akans». Pas tous les militaires akans, mais ceux suspectés d`être suffisamment politisés pour tenter quelque chose, au cas où. Selon le bulletin de renseignement qui est déposé chaque matin sur la table du général Philippe Mangou et sur celle du ministre Michel Amani, des réunions se tiennent régulièrement entre eux et la dernière a eu lieu à Adjamé, au quartier Dallas, non loin du domicile de l`un d`entre eux. L`objectif de ces militaires précisent nos interlocuteurs n`est pas de renverser les institutions de la République. Mais ils veulent être vigilants et se tenir prêts, en cas de troubles avant, pendant ou après le 29 novembre. Concrètement, ils veulent s`assurer que s`il y a des troubles, Henri Konan Bédié ne connaisse pas le sort d`un Guéi Robert, liquidé par des militaires «inconnus» protégés aujourd`hui par la loi d`amnistie. En outre, et comme atout-maître, ils se disent que s`il y a des troubles sérieux dans le pays et qu`un groupe quelconque réussit à s`emparer du pouvoir, eux ils seront là pour exiger que l`on tienne compte du poids politique et … militaire de Bédié. Ces hommes et une femme, selon les renseignements militaires, sont assez actifs et très volontaires. D`où la prudence observée à leur endroit. Ce n`est pas le cas de ce groupe de militaires, qui dit-on, s`organisait pour exiger le retour de Mathias Doué. Leur chef a été arrêté, menacé et le groupe s`est aussitôt dissous de lui-même. Reste que selon les mêmes sources, bien que constamment surveillé, l`on n`a pas mis à jour l`existence d`une «Fraternelle de militaire Rdr» ou pro-ADO. Aucun réseau rattaché au Rdr n`a été détecté au sein de l`armée. Est-ce un bien ? Est-ce un mal dans un pays où tout peut arriver à tout le monde ? L`avenir nous situera. Mais pour le moment Gbagbo et ses services de sécurité sont sur le qui-vive.

Touré Moussa
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