La décision du ministère des Transports de retirer de la circulation les véhicules ayant leur direction à droite inquiète certains opérateurs du secteur.
Le communiqué (en date du 23 septembre) du ministère des Transports exigeant le retrait strict de la circulation «des véhicules possédant le volant à droite» aura le mérite d’irriter les opérateurs économiques du secteur. Ces automobiles dit-on, sont à la base de nombreux accidents. Si cette mesure risque d’immobiliser plusieurs automobiles déjà en circulation, force est de reconnaître que de nombreux autres véhicules de ce type, sont encore en vente chez certains importateurs ou revendeurs. Que deviendront ces voitures pour lesquelles, ces professionnels du secteur estiment avoir y investi d’importants moyens financiers pour les importer? Yedoh Akpa, importateur et revendeur de véhicule et par ailleurs président des revendeurs de véhicules d’occasion d’Abidjan-Sud, ne cache pas son indignation face à cette injonction de la tutelle. Selon lui, le ministère des Transports ne peut pas prendre une telle mesure sans avoir eu à discuter préalablement avec les responsables de la filière. «Le ministre ne peut pas prendre des décisions de ce genre sans associer les professionnels que nous sommes. Pour nous, aucune loi ne nous empêche à importer ces véhicules. Du moins même si elle existe, elle ne spécifie rien. Sinon comment comprendre qu’au port d’Abidjan, ces types de véhicules sont débarqués et sont admis sur le territoire national en longueur de journée», dénonce-t-il, ce lundi 28 septembre dans son parc auto au grand carrefour de Koumassi. Selon lui, en tant qu’opérateur économique, il paie régulièrement ses taxes et impôts. Sans compter les frais d’aconages (qui représentent au minimum 173.000 Fcfa en fonction du poids du véhicule). «Il y a au moins un millier de véhicules qui sont débarqués au port d’Abidjan chaque deux semaines. Ces véhicules sont régulièrement dédouanés. S’ils sont interdits de rouler ici, pourquoi on continue d’octroyer des laissez-passer et la visite technique aux importateurs?», s’interroge Yedoh Akpa.
“Volant à droite” moins coûteux
Convaincu que l’objectif de cette mesure, c’est de les amener à payer plus cher pour pouvoir importer ces véhicules ayant leur direction à droite. Il critique qu’au lieu d’alléger la tâche aux opérateurs, le guichet unique les dessert en complexifiant tout. «Le dédouanement se fait en principe selon la puissance du véhicule. La loi dit qu’un véhicule de plus 10 ans, ne doit pas rentrer sur le territoire. Mais il y a des véhicules qui ont près de 50 ans et qui ont accès au pays. Tout simplement parce qu’on fait payer à certains importateurs, une taxe de 10.000 Fcfa sur chaque année supplémentaire. Pourtant ces véhicules polluent excessivement l’air. Rien n’est contrôlé», dénonce-t-il. Exigeant que l’Etat leur fournisse au moins les statistiques sur les accidents provoqués par les véhicules dont le volant est à droite. Le renchérissement des coûts des véhicules d’occasion apparaît comme l’une des conséquences de cette décision ministérielle. Le secrétaire général national du Synarvo-CI (Syndicat national des revendeurs de véhicules d’occasion de Côte d’Ivoire), Amadou Doumbia, précise qu’en principe, ces véhicules ne bénéficient que d’une visite technique de trois mois, le temps que les propriétaires procèdent au réaménagement technique (changement de position de la direction). Cette modification de l’emplacement du volant engendre des coûts supplémentaires. C’est au moins 500 mille Fcfa pour certains véhicules de faible puissance et 5 millions Fcfa par exemple pour les Mercedes classe E, voire plus. «C’est clair que dans ce cas, l’importateur va en tenir compte dans la fixation du prix d’achat du véhicule. Donc les usagers paieront plus cher. Cependant, si les importateurs n’ont pas assez de moyens pour changer la position des volants, de nombreux véhicules surtout des 4X4 resteront immobilisés. Ce qui constituerait des pertes financières énormes», fait-il remarquer. Son parc auto se trouve au grand carrefour de Marcory non loin de celui de Sylla Inza, un autre importateur de véhicule d’occasion. Ce dernier relève qu’au-delà de toutes les récriminations de ces collègues, les véhicules ayant leur direction à droite, ne sont pas faciles à conduire. «La priorité en Côte d’Ivoire est à droite et le volant à gauche à l’instar des nombreux autres pays francophones. Ce sont les véhicules anglo-saxons qui ont leur volant à droite. Dans ce cas, le conducteur est obligé de se faire souvent guider. Nos virages sont difficiles à négocier avec ces types d’automobiles», laisse-t-il entendre. Mais il reconnaît que ces véhicules anglophones d’occasion sont de plus en plus prisés, du fait de leur prix très abordable sur le marché. Le secrétaire à la communication de la Fédération des importateurs de véhicules d’occasion, Karifa Ouédraogo, souhaite que le gouvernement accorde le temps nécessaire aux importateurs de régulariser leurs véhicules déjà dans les parcs. Il doit également “interdire par la suite l’importation pure et simple de ces types de véhicules”.
Plus de dérogation!
Selon Kouamé Daniel sous-directeur des études de la circulation à la Dgttc, contrairement à ce que peut avancer certains importateurs, la législation existe «même si elle ne parle pas spécifiquement de volant à droite.» Il en veut pour preuve la disposition de l’article 81 du décret N°64-212 du 26 mai 1964 qui stipule que «Tout véhicule doit être tel que le champ de visibilité du conducteur, vers l’avant, vers la droite et vers la gauche soit suffisant pour que celui-ci puisse conduire avec sûreté.» Pour lui, c’est un problème de sécurité routière et de bon sens. Un automobiliste qui conduit par exemple un véhicule «volant à droite», explique-t-il, peut croiser un camion en panne sur la chaussée. «Ce dernier ne va pas attendre à ce que ce camion soit dépanné, avant qu’il ne continue son chemin. Donc pour qu’il puisse voir le véhicule qui vient en face, il faudrait qu’il soit carrément déporté sur la demi-chaussée de gauche, sans avoir vu celui qui arrive. Cela démontre que la conduite de ces véhicules est dangereuse en Côte d’Ivoire», argumente le sous-directeur. Avant de concéder aux importateurs qu’aucune décision d’interdiction n’empêche l’importation de ces véhicules en Côte d’Ivoire. «Au niveau du port, aucun document ne leur dit que ces véhicules sont interdits», précise-t-il. M. Kouamé indique que tous les importateurs savent que pour ce type de véhicule, la tutelle leur accorde une dérogation de trois mois afin qu’ils puissent effecteur les changements techniques exigés. L’Etat ayant consenti à ces facilités du fait de la crise sociopolitique. «Malheureusement, quand on leur donne cette dérogation et qu’ils réussissent à passer la première visite technique (très compliquée), qui leur permet de sortir leur véhicule du guichet unique, c’est terminer. Un an ou voire deux ans après on les retrouve dans la circulation sans que ces véhicules n’aient subi le moindre changement. Comment s’y prennent-ils ? On n’en sait rien», déplore-t-il. A l’en croire tous les gros importateurs savent que la priorité est à droite en Côte d’Ivoire, ce qui implique le volant à gauche. D’ailleurs, souligne Kouamé Daniel, de nombreux pays dans le monde sont en train de s’aligner sur cette disposition. L’Union africaine des transports publics (Uatp) est en train d’harmoniser toutes ces procédures. «Un pays comme le Ghana vient de terminer ces aménagements techniques. Aujourd’hui, les véhicules que nous voyons ici, sont des rejets et coûtent excessivement moins cher. Vous pouvez avoir une grosse cylindrée en Allemagne à 500 mille Fcfa. Des importateurs viennent avec ces voitures en Côte d’Ivoire parce qu’on leur accorde une dérogation», relève le sous-directeur avant d’ajouter que la Direction générale des transports terrestres a décidé de ne plus délivrer de dérogation. «Tous les véhicules qui ne seront pas en règle prendront la direction de la fourrière», avertit-il.
Cissé Cheick Ely
Le communiqué (en date du 23 septembre) du ministère des Transports exigeant le retrait strict de la circulation «des véhicules possédant le volant à droite» aura le mérite d’irriter les opérateurs économiques du secteur. Ces automobiles dit-on, sont à la base de nombreux accidents. Si cette mesure risque d’immobiliser plusieurs automobiles déjà en circulation, force est de reconnaître que de nombreux autres véhicules de ce type, sont encore en vente chez certains importateurs ou revendeurs. Que deviendront ces voitures pour lesquelles, ces professionnels du secteur estiment avoir y investi d’importants moyens financiers pour les importer? Yedoh Akpa, importateur et revendeur de véhicule et par ailleurs président des revendeurs de véhicules d’occasion d’Abidjan-Sud, ne cache pas son indignation face à cette injonction de la tutelle. Selon lui, le ministère des Transports ne peut pas prendre une telle mesure sans avoir eu à discuter préalablement avec les responsables de la filière. «Le ministre ne peut pas prendre des décisions de ce genre sans associer les professionnels que nous sommes. Pour nous, aucune loi ne nous empêche à importer ces véhicules. Du moins même si elle existe, elle ne spécifie rien. Sinon comment comprendre qu’au port d’Abidjan, ces types de véhicules sont débarqués et sont admis sur le territoire national en longueur de journée», dénonce-t-il, ce lundi 28 septembre dans son parc auto au grand carrefour de Koumassi. Selon lui, en tant qu’opérateur économique, il paie régulièrement ses taxes et impôts. Sans compter les frais d’aconages (qui représentent au minimum 173.000 Fcfa en fonction du poids du véhicule). «Il y a au moins un millier de véhicules qui sont débarqués au port d’Abidjan chaque deux semaines. Ces véhicules sont régulièrement dédouanés. S’ils sont interdits de rouler ici, pourquoi on continue d’octroyer des laissez-passer et la visite technique aux importateurs?», s’interroge Yedoh Akpa.
“Volant à droite” moins coûteux
Convaincu que l’objectif de cette mesure, c’est de les amener à payer plus cher pour pouvoir importer ces véhicules ayant leur direction à droite. Il critique qu’au lieu d’alléger la tâche aux opérateurs, le guichet unique les dessert en complexifiant tout. «Le dédouanement se fait en principe selon la puissance du véhicule. La loi dit qu’un véhicule de plus 10 ans, ne doit pas rentrer sur le territoire. Mais il y a des véhicules qui ont près de 50 ans et qui ont accès au pays. Tout simplement parce qu’on fait payer à certains importateurs, une taxe de 10.000 Fcfa sur chaque année supplémentaire. Pourtant ces véhicules polluent excessivement l’air. Rien n’est contrôlé», dénonce-t-il. Exigeant que l’Etat leur fournisse au moins les statistiques sur les accidents provoqués par les véhicules dont le volant est à droite. Le renchérissement des coûts des véhicules d’occasion apparaît comme l’une des conséquences de cette décision ministérielle. Le secrétaire général national du Synarvo-CI (Syndicat national des revendeurs de véhicules d’occasion de Côte d’Ivoire), Amadou Doumbia, précise qu’en principe, ces véhicules ne bénéficient que d’une visite technique de trois mois, le temps que les propriétaires procèdent au réaménagement technique (changement de position de la direction). Cette modification de l’emplacement du volant engendre des coûts supplémentaires. C’est au moins 500 mille Fcfa pour certains véhicules de faible puissance et 5 millions Fcfa par exemple pour les Mercedes classe E, voire plus. «C’est clair que dans ce cas, l’importateur va en tenir compte dans la fixation du prix d’achat du véhicule. Donc les usagers paieront plus cher. Cependant, si les importateurs n’ont pas assez de moyens pour changer la position des volants, de nombreux véhicules surtout des 4X4 resteront immobilisés. Ce qui constituerait des pertes financières énormes», fait-il remarquer. Son parc auto se trouve au grand carrefour de Marcory non loin de celui de Sylla Inza, un autre importateur de véhicule d’occasion. Ce dernier relève qu’au-delà de toutes les récriminations de ces collègues, les véhicules ayant leur direction à droite, ne sont pas faciles à conduire. «La priorité en Côte d’Ivoire est à droite et le volant à gauche à l’instar des nombreux autres pays francophones. Ce sont les véhicules anglo-saxons qui ont leur volant à droite. Dans ce cas, le conducteur est obligé de se faire souvent guider. Nos virages sont difficiles à négocier avec ces types d’automobiles», laisse-t-il entendre. Mais il reconnaît que ces véhicules anglophones d’occasion sont de plus en plus prisés, du fait de leur prix très abordable sur le marché. Le secrétaire à la communication de la Fédération des importateurs de véhicules d’occasion, Karifa Ouédraogo, souhaite que le gouvernement accorde le temps nécessaire aux importateurs de régulariser leurs véhicules déjà dans les parcs. Il doit également “interdire par la suite l’importation pure et simple de ces types de véhicules”.
Plus de dérogation!
Selon Kouamé Daniel sous-directeur des études de la circulation à la Dgttc, contrairement à ce que peut avancer certains importateurs, la législation existe «même si elle ne parle pas spécifiquement de volant à droite.» Il en veut pour preuve la disposition de l’article 81 du décret N°64-212 du 26 mai 1964 qui stipule que «Tout véhicule doit être tel que le champ de visibilité du conducteur, vers l’avant, vers la droite et vers la gauche soit suffisant pour que celui-ci puisse conduire avec sûreté.» Pour lui, c’est un problème de sécurité routière et de bon sens. Un automobiliste qui conduit par exemple un véhicule «volant à droite», explique-t-il, peut croiser un camion en panne sur la chaussée. «Ce dernier ne va pas attendre à ce que ce camion soit dépanné, avant qu’il ne continue son chemin. Donc pour qu’il puisse voir le véhicule qui vient en face, il faudrait qu’il soit carrément déporté sur la demi-chaussée de gauche, sans avoir vu celui qui arrive. Cela démontre que la conduite de ces véhicules est dangereuse en Côte d’Ivoire», argumente le sous-directeur. Avant de concéder aux importateurs qu’aucune décision d’interdiction n’empêche l’importation de ces véhicules en Côte d’Ivoire. «Au niveau du port, aucun document ne leur dit que ces véhicules sont interdits», précise-t-il. M. Kouamé indique que tous les importateurs savent que pour ce type de véhicule, la tutelle leur accorde une dérogation de trois mois afin qu’ils puissent effecteur les changements techniques exigés. L’Etat ayant consenti à ces facilités du fait de la crise sociopolitique. «Malheureusement, quand on leur donne cette dérogation et qu’ils réussissent à passer la première visite technique (très compliquée), qui leur permet de sortir leur véhicule du guichet unique, c’est terminer. Un an ou voire deux ans après on les retrouve dans la circulation sans que ces véhicules n’aient subi le moindre changement. Comment s’y prennent-ils ? On n’en sait rien», déplore-t-il. A l’en croire tous les gros importateurs savent que la priorité est à droite en Côte d’Ivoire, ce qui implique le volant à gauche. D’ailleurs, souligne Kouamé Daniel, de nombreux pays dans le monde sont en train de s’aligner sur cette disposition. L’Union africaine des transports publics (Uatp) est en train d’harmoniser toutes ces procédures. «Un pays comme le Ghana vient de terminer ces aménagements techniques. Aujourd’hui, les véhicules que nous voyons ici, sont des rejets et coûtent excessivement moins cher. Vous pouvez avoir une grosse cylindrée en Allemagne à 500 mille Fcfa. Des importateurs viennent avec ces voitures en Côte d’Ivoire parce qu’on leur accorde une dérogation», relève le sous-directeur avant d’ajouter que la Direction générale des transports terrestres a décidé de ne plus délivrer de dérogation. «Tous les véhicules qui ne seront pas en règle prendront la direction de la fourrière», avertit-il.
Cissé Cheick Ely