C’est assurément la grande surprise de la semaine. Le chef de l’Etat et ses proches ne veulent pas faire comme d’habitude et comme les autres. L’annonce de la candidature à l’élection présidentielle du 29 novembre de Laurent Gbagbo va obéir, cette année, à une certaine éthique. Elle sera, principalement, le fait des Ivoiriens eux-mêmes, notamment les paysans. Depuis le début de la semaine, 19 délégations parties d’Abidjan, sont allées à la rencontre du pays profond pour échanger avec les 19 régions sur la candidature de celui qui se considère toujours comme le fils du peuple. Selon des sources proches du palais présidentiel, devant les incessants et récurrents appels du pied des partis politiques, de clubs de soutien, des associations de jeunes, de femmes, et autres ONG, Laurent Gbagbo aurait donné son accord mais de principe. Il aurait répondu à tous ceux qui l’invitent à faire acte de candidature qu’il a bien compris leur préoccupation. Mais, il aurait argumenté qu’il n’est pas seul dans cette aventure. Le putatif candidat à sa propre succession aurait ajouté que depuis qu’il s’est engagé dans la politique, et surtout depuis le déclenchement de la crise, il a avec lui, les femmes, les jeunes mais aussi et surtout, les paysans. Il a donc demandé à ses amis de patienter, le temps qu’il prenne l’avis de sa base. C’est, nous dit-on, le sens des 19 missions parties à l’intérieur du pays et dans les circonscriptions d’Abidjan à la rencontre des compagnons fidèles, de Laurent Gbagbo. Pour être une innovation, c’en est une véritablement. Car, cette façon de faire de Laurent Gbagbo remet au goût du jour sa stabilité intellectuelle (il a la suite dans les idées), son flair politique, son humilité mais aussi son sens inné du savoir-communiquer. Quelle région du pays ne se sentirait pas émue et concernée par la candidature du “Fils du peuple” après avoir reçu la délégation avec laquelle elle échangera ? Les hommes ne sont en fait pas compliqués. Il suffit seulement de les connaître pour savoir sur le bout des doigts ce qu’ils veulent et se lier d’amitié avec eux. L’amitié que Laurent Gbagbo va sceller avec les peuples de Côte d’Ivoire sera si forte que même l’aiguille de la plus petite taille ne pourra plus s’insérer entre les deux. A travers cette élégance politique, le chef de l’Etat facilite la tâche à ses lieutenants qui iront sur le terrain pour la campagne. Non seulement ils n’auront plus assez de difficultés pour passer leurs messages, mais ils ont entre les mains un thème de campagne qui rassemblera tout le monde. C’est que, contrairement à ses adversaires dont les candidatures sont adoubées de l’extérieur, notamment de la France, la candidature de Laurent Gbagbo est intérieure. C’est une affaire des Ivoiriens, du pays profond jusqu’à la capitale. Exactement comme les candidatures de Sarkozy et d’Obama sont une affaire des Français et des Américains. Il ne reste plus au président de la République et à ses lieutenants qu’à laisser le pays profond faire ce qu’il s’apprêterait à faire. C’est-à-dire, réunir les 20 millions de FCFA, rassembler toute la paperasse dont a besoin la CEI et déposer lui-même la candidature de Laurent Gbagbo dans une ambiance populaire digne de la tradition ivoirienne. Une fête avant la lettre quoi.
Abdoulaye Villard Sanogo
Abdoulaye Villard Sanogo
