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Société Publié le samedi 10 octobre 2009 | Le Temps

Dr. Fanny Adama, Président des ophtalmologues (Chef de service au Chu de Treichville) -“Les Ong sont des fraudeurs”

Pr. Fanny Adama est ophtalmologue. Il s'insurge contre la pratique frauduleuse des Ong sur le marché de la santé de la vue.

Il se raconte que les Ong se livrent en Côte d’Ivoire à des pratiques peu orthodoxes en matière de Santé de la vue. Est-ce votre avis...
Le problème posé est très pertinent. Il s'agit de l'adéquation entre le coût des lunettes et l'offre des lunettes. Vous savez, l'offre chez les Ong est la baisse d'impôt. Ceux qui sont logiquement habilité à prescrire des verres correcteurs, ce sont des professionnels qui ont des obligations par rapport aux charges qui, quelquefois, les écrasent. Il faut donc savoir que les prix à ce niveau ne sont pas les mêmes. Les Ong n'ont donc pas d'obligations. Quelquefois, l'entrée des fournitures comme les lunettes le plus souvent est faite de manière frauduleuse. Il faut être à ce niveau honnête et objectif avec soit même. Les entrées de ces produits sont frauduleuses. Et cela va contre le développement de l'économie ivoirienne. Mais en même temps, il se pose un réel problème. C'est celui du coût des verres correcteurs. Les verres en côte d'Ivoire coûtent excessivement cher. C'est pourquoi, en tant que Société, nous faisons des propositions à l'Etat de Côte d'Ivoire. Nous en avons fait, et nous continuons de le faire. Pour que, les taxes et surtout les marges de taxes dont il est question, soient partout les mêmes. Que ce soient les Ong ou les professionnels, le coût soit le même. C’est après les marges que l'Etat prélève sur chaque marchandise que les verres entrent sur le territoire de la Côte d'Ivoire. Ensuite, il y a les charges de celui qui a un magasin d'optique. Il est obligé de payer des taxes qui augmentent naturellement ses charges. Alors nous militons ensemble pour que les coûts des charges soient réduits pour permettre à tout le monde d'avoir accès aux verres correcteurs. Notre responsabilité est de faire en sorte que l'Etat de Côte d'Ivoire prenne à son niveau des décisions pour que, le port de verres correcteurs soit une question de santé publique. Parce que ce qui devait être cher c'est l'entretien, c'est-à-dire le service après vente. C'est une question dans laquelle l'Etat doit intervenir pour écraser les prix, et faire en sorte que les lunettes soient accessibles à tous.

Votre association dénommée "Société ivoirienne des ophtalmologues", dispose-t-elle des moyens pour parer à cet état de désagrément que nous cause les Ong ?
Je voudrais dire que les Ong pilulent partout. Je dirai même qu'elles sont dans tous les établissements professionnels. Il en existe dans tous les villages. Il y a d'autres qui se baladent avec des valises en main bourrées de lunettes qu'elles proposent aux populations. D'autres font des consultations en longueur de journée à des prix hors concurrence. Malheureusement, ce sont des lunettes de mauvaises qualités qui peuvent à la longue altérer les yeux de nos compatriotes et patients. Il faut alors les éviter au maximum. Nous ne disposons malheureusement pas de moyens pour les combattre.

Certains professionnels de santé de la vue sont de mèche dit-on avec ces Ong pour écouler leurs marchandises, tandis que d'autres disent faire du social avec elles pour aider les populations. Que dites-vous à ce propos ?
Je voudrais vous dire qu'un ophtalmologue est un Docteur qui a fait des études sérieuses et qui n'a même pas le temps de faire ce qu'il a à faire. Je ne pense pas du tout qu'il aille faire quelque chose ailleurs qui ne puisse être ce qu'il a appris en fac de médecine. Il est trop occupé pour faire autre chose. Mais je suis certain qu'il y a dans certaines institutions, des agents de santé, qui malheureusement contribuent à la prolifération de ces Ong dont vous parliez. Ils arrivent avec leurs valises et vous demandent d'essayer. Evidemment le client prend ce qui va avec ses yeux selon la numérotation. De cette façon, on n'a pas besoin d'aller à l'Université pour devenir médecin. Malheureusement, beaucoup de verres sont de mauvaises qualités qui, à la longue, détériorent la vision de ceux qui ont la malchance de les porter. Parce qu'il manque la technique à savoir la mesure du centrage et la qualité des verres, il faut noter que les verres, ne se montent pas n'importe comment. Son port obéit à une règle donnée. Et du fait que les gens n'ont pas les moyens de s'acheter de nouveaux verres, les Ong continueront d'abîmer leurs yeux.

Quels sorts réservez-vous à ces gens qui ont un tel comportement ?
Nous, nous aurions voulu avoir un appui derrière pour agir. Vous connaissez la Côte d'Ivoire ? Je prends le cas des tradipraticiens qui disent qu'ils peuvent guérir en une minute la cataracte. Moi ? Je fais cela en vingt ou trente minutes, quelquefois en une heure. Parce que je ne suis pas trop huppé. Nous les ophtalmologues, nous sommes habilités à faire cela. C'est notre métier. Les tradipraticiens, eux, peuvent abîmer votre vue. Nous avons organisé ici, en Afrique de l'Ouest, une société dénommée "Société ouest-africaine d'ophtalmologie". Des résolutions ont été prises. Il a été dit que chaque pays va être contacté par la société pour voir si on ne peut pas au niveau juridique et au niveau santé, contribuer à son interdiction. Nous avons approché le ministre de la santé en son temps et il nous a dit : “ Nous sommes en train d'organiser les Ong. Pouvez-vous interdire une femme à Abobo qui soigne le Bobodouman ? Celui qui a été blessé et qui vient à nous on règle le problème ”. Mais s'ils refusent de venir à vous parce qu'ils sont partis d'eux-mêmes se faire soigner, que peux-tu faire à leur place ?

Propos recueillis par
Jean-Baptiste Essis
Jbessi06525881@gmail.com
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