La gestion du terminal à conteneurs du port autonome de Conakry en Guinée est désormais l'affaire de l'Ivoirien, Abdel Aziz Thiam, ancien ministre des Transports, que nous avons rencontré il y a quelques jours, dans ses bureaux à Conakry. Entretien.
Après la Sitarail et le ministère des Transports, vous avez presque disparu. Aujourd'hui, on vous retrouve à Conakry. Que faites-vous en Guinée, un pays en crise ?
Je travaille pour le groupe Getma international depuis mon départ du gouvernement. J'étais dans le groupe Bolloré. Nous sommes un petit groupe qui n'est pas côté en bourse. Après deux années avec ce groupe, j'ai été nommé vice-président. Hormis cela, nous avons un certain nombre d'activités dont je préside la branche infrastructures (routière, ferroviaire et logistique). Nous faisons la manutention portuaire, l'aconage, les transits… Il y a une filiale intra groupe qui s'occupe de tous les projets de développement. Parce qu'actuellement, il y a un mouvement de privatisation et d'exploitation des terminaux à conteneurs des ports africains. C'est dans ce cadre là que l'année dernière, nous avons répondu à l'appel d'offres de la mise en construction du terminal à conteneurs de Conakry que nous avons remporté. Nous avons signé une convention de concession et d'exploitation du terminal à conteneurs pour 25 ans depuis le 22 septembre 2008. Nous avons donc créé une société dénommée Stcc (Société de terminal à conteneurs de Conakry) qui gère le terminal et dont je suis le Président du conseil d'administration.
Qu'est-ce qui a milité en votre faveur, alors qu'il y avait des candidats sérieux tels que Maersk et Bolloré, votre ancien employeur ?
Nous pensons que nous avons fait une très bonne offre. En outre, je crois savoir que nous étions les seuls qui avaient présenté un projet sérieux du développement du trafic avec le Mali. Il faut savoir que du point de vue des distances, Conakry est le port le plus proche de Bamako, avec un peu moins de 1000 kilomètres. Et cette voie vient d'être achevée. Vous savez qu'à la suite des évènements en Côte d'Ivoire, certains pays ont mis en place des voies de contournement. C'est comme cela que la voie de Conakry-Bamako a été bitumée. A côté de cela, vous avez Abidjan-Bamako longue de 1200 km et Dakar-Bamako, 1600 km. Il y a donc l'avantage de la distance et la route, mais aussi des liens historiques entre les populations maliennes et guinéennes. Nous avons donc présenté un projet qui intégrait le développement du trafic avec le Mali. Et dès que nous avons commencé l'exploitation depuis le 1er juin, nous avons commencé à mettre automatiquement ce plan en œuvre et nous espérons que dans le courant du mois de décembre, les premières exploitations maliennes de coton vont descendre au port de Conakry. Nous sommes en liaison avec la Compagnie malienne pour le développement des textiles (Cmdt) et nous avons espoir.
N'est-ce pas là une matière de détourner le coton malien de son port naturel qui est Abidjan ?
Nous sommes dans le business. C'est le plus compétitif qui l'emporte. Le port d'Abidjan a beaucoup d'atouts. C'est à lui de les faire valoir. Je suis dans cet état d'esprit. Pour l'instant, nous présentons un certain nombre d'avantages. Je sais que le port d'Abidjan ne va pas rester les bras croisés. On va se battre. C'est une compétition et on espère gagner. Pour l'instant, le trafic répond à nos attentes. Il faut savoir que pendant 25 ans, nous avons l'exclusivité de la manutention des conteneurs sur le port de Conakry. Nous ne détournons pas le coton malien vers le port de Conakry. La décision dépendra des clients. Nous visons les mêmes clients. Nous, nous souhaitons avoir les clients au Mali et nous souhaitons exporter ou importer depuis le mali ou à destination du Mali à partir du port de Conakry. Je vous disais tantôt, qu'Abidjan a des avantages et des inconvénients comme Conakry aussi. Il revient à chacun dans cette compétition de faire valoir ses atouts pour emporter la décision.
Cette exclusivité du terminal à conteneurs de Conakry signifie qu'il vous faut des investissements pour le rendre plus compétitif.
C'est normal. Nous sommes tenu de faire de gros investissements sur le port. Nous devons construire dans les mois à venir, un quai de trois cents mètres de long avec un tirant d'eau de 16 mètres de profondeur et faire une zone de stockage de 12 hectares pour les conteneurs. Nous devons réhabiliter le quai actuel qui mesure 250 mètres et la surface de stockage couvre 7 hectares environs. L'ensemble de ces investissements sur les trois ans, est évalué à 100 millions d'euros, soit 65 milliards de Fcfa. Sur cette somme, il y a 25 millions d'euros déjà disponibles avec des grues et plusieurs autres investissements en matériel que nous avons acheminés avec lequel nous travaillons. Ce qui nous a déjà permis d'augmenter les cadences et de ressentir vraiment une différence par rapport à l'ancien mode de gestion. Maintenant, nous allons entrer dans la phase d'investissement en infrastructure. Nous espérons démarrer les travaux début novembre pour une période de 36 mois. Ces travaux devraient démarrer un peu plus tôt n'eût été la mort du Général Lanssana Conté. Car, après ces évènements, notre contrat a été attaqué par des concurrents au point que le nouveau Président, le Capitaine Moussa Dadis Camara a décidé de suspendre l'exécution des travaux pour un contrôle de tous les documents. Et, c'est le 14 avril après vérification qu'on nous a remis officiellement les clés du port.
Quel est le niveau du trafic de Conakry par rapport au port d'Abidjan ?
Le trafic à Conakry est beaucoup moins dense qu'Abidjan. Ici, nous sommes à 100 000 conteneurs par an contre plus de 600 000 à Abidjan.
Qu'est-ce qui explique ce faible taux de trafic ?
Ecoutez, la vigueur d'un port reflète l'économie du pays. Et l'économie ivoirienne, ce n'est pas un secret, elle est plus efficace et plus avancée. Elle représente 40% de l'économie sous-régionale. Elle dispose d'un marché local pour l'importation et exporte beaucoup de matières premières, notamment le cacao et bien d'autres produits qui se font avec des conteneurs. Seulement avec les évènements que la Côte d'Ivoire a vécus, d'autres ports ont cherché à se positionner. Si vous prenez par exemple, le port de Lomé au Togo, il est passé de 60 000 conteneurs, il y a six ans à 200 000 conteneurs. Parce que, beaucoup de trafics à destination du Niger, du Burkina Faso et du Mali ont été détournés par le port de Lomé. Ce qui fait que Abidjan a perdu un peu de son rayonnement à cause de la situation qui prévaut dans notre pays. C'est malheureux. Et un pays comme la Guinée va également bénéficier de cette situation. Parce que, c'est à la faveur de la crise que la route qui relie Conakry à Bamako a été bitumée. Avant le grand désavantage de Conakry, c'était que d'abord, l'économie n'était pas capable de soutenir un port important à cause du faible niveau de la consommation des populations. Mais, en plus, vous ne pouvez pas prendre le trafic de l'Hinterland, parce qu'il n'y avait pas de voies de communication. Donc, Conakry était un peu comme une île isolée et ne pouvait pas développer le trafic.
Que faut-il faire pour rendre le port de Conakry attractif pour les armateurs ?
La modernisation des infrastructures et du matériel est l'un de nos objectifs. Cela, pour permettre aux armateurs d'être satisfaits et capter une clientèle. A cet effet, nous avons créé une société de logistique dont l'objectif est d'assurer les prestations de bout en bout pour booster les activités du port de Conakry. Nous pensons qu'avec les investissements prévus dans les mois à venir, le port de Conakry se fera entendre.
Joseph Atoumgbré
attjoseph@yahoo.fr
Envoyé spécial à Conakry
Après la Sitarail et le ministère des Transports, vous avez presque disparu. Aujourd'hui, on vous retrouve à Conakry. Que faites-vous en Guinée, un pays en crise ?
Je travaille pour le groupe Getma international depuis mon départ du gouvernement. J'étais dans le groupe Bolloré. Nous sommes un petit groupe qui n'est pas côté en bourse. Après deux années avec ce groupe, j'ai été nommé vice-président. Hormis cela, nous avons un certain nombre d'activités dont je préside la branche infrastructures (routière, ferroviaire et logistique). Nous faisons la manutention portuaire, l'aconage, les transits… Il y a une filiale intra groupe qui s'occupe de tous les projets de développement. Parce qu'actuellement, il y a un mouvement de privatisation et d'exploitation des terminaux à conteneurs des ports africains. C'est dans ce cadre là que l'année dernière, nous avons répondu à l'appel d'offres de la mise en construction du terminal à conteneurs de Conakry que nous avons remporté. Nous avons signé une convention de concession et d'exploitation du terminal à conteneurs pour 25 ans depuis le 22 septembre 2008. Nous avons donc créé une société dénommée Stcc (Société de terminal à conteneurs de Conakry) qui gère le terminal et dont je suis le Président du conseil d'administration.
Qu'est-ce qui a milité en votre faveur, alors qu'il y avait des candidats sérieux tels que Maersk et Bolloré, votre ancien employeur ?
Nous pensons que nous avons fait une très bonne offre. En outre, je crois savoir que nous étions les seuls qui avaient présenté un projet sérieux du développement du trafic avec le Mali. Il faut savoir que du point de vue des distances, Conakry est le port le plus proche de Bamako, avec un peu moins de 1000 kilomètres. Et cette voie vient d'être achevée. Vous savez qu'à la suite des évènements en Côte d'Ivoire, certains pays ont mis en place des voies de contournement. C'est comme cela que la voie de Conakry-Bamako a été bitumée. A côté de cela, vous avez Abidjan-Bamako longue de 1200 km et Dakar-Bamako, 1600 km. Il y a donc l'avantage de la distance et la route, mais aussi des liens historiques entre les populations maliennes et guinéennes. Nous avons donc présenté un projet qui intégrait le développement du trafic avec le Mali. Et dès que nous avons commencé l'exploitation depuis le 1er juin, nous avons commencé à mettre automatiquement ce plan en œuvre et nous espérons que dans le courant du mois de décembre, les premières exploitations maliennes de coton vont descendre au port de Conakry. Nous sommes en liaison avec la Compagnie malienne pour le développement des textiles (Cmdt) et nous avons espoir.
N'est-ce pas là une matière de détourner le coton malien de son port naturel qui est Abidjan ?
Nous sommes dans le business. C'est le plus compétitif qui l'emporte. Le port d'Abidjan a beaucoup d'atouts. C'est à lui de les faire valoir. Je suis dans cet état d'esprit. Pour l'instant, nous présentons un certain nombre d'avantages. Je sais que le port d'Abidjan ne va pas rester les bras croisés. On va se battre. C'est une compétition et on espère gagner. Pour l'instant, le trafic répond à nos attentes. Il faut savoir que pendant 25 ans, nous avons l'exclusivité de la manutention des conteneurs sur le port de Conakry. Nous ne détournons pas le coton malien vers le port de Conakry. La décision dépendra des clients. Nous visons les mêmes clients. Nous, nous souhaitons avoir les clients au Mali et nous souhaitons exporter ou importer depuis le mali ou à destination du Mali à partir du port de Conakry. Je vous disais tantôt, qu'Abidjan a des avantages et des inconvénients comme Conakry aussi. Il revient à chacun dans cette compétition de faire valoir ses atouts pour emporter la décision.
Cette exclusivité du terminal à conteneurs de Conakry signifie qu'il vous faut des investissements pour le rendre plus compétitif.
C'est normal. Nous sommes tenu de faire de gros investissements sur le port. Nous devons construire dans les mois à venir, un quai de trois cents mètres de long avec un tirant d'eau de 16 mètres de profondeur et faire une zone de stockage de 12 hectares pour les conteneurs. Nous devons réhabiliter le quai actuel qui mesure 250 mètres et la surface de stockage couvre 7 hectares environs. L'ensemble de ces investissements sur les trois ans, est évalué à 100 millions d'euros, soit 65 milliards de Fcfa. Sur cette somme, il y a 25 millions d'euros déjà disponibles avec des grues et plusieurs autres investissements en matériel que nous avons acheminés avec lequel nous travaillons. Ce qui nous a déjà permis d'augmenter les cadences et de ressentir vraiment une différence par rapport à l'ancien mode de gestion. Maintenant, nous allons entrer dans la phase d'investissement en infrastructure. Nous espérons démarrer les travaux début novembre pour une période de 36 mois. Ces travaux devraient démarrer un peu plus tôt n'eût été la mort du Général Lanssana Conté. Car, après ces évènements, notre contrat a été attaqué par des concurrents au point que le nouveau Président, le Capitaine Moussa Dadis Camara a décidé de suspendre l'exécution des travaux pour un contrôle de tous les documents. Et, c'est le 14 avril après vérification qu'on nous a remis officiellement les clés du port.
Quel est le niveau du trafic de Conakry par rapport au port d'Abidjan ?
Le trafic à Conakry est beaucoup moins dense qu'Abidjan. Ici, nous sommes à 100 000 conteneurs par an contre plus de 600 000 à Abidjan.
Qu'est-ce qui explique ce faible taux de trafic ?
Ecoutez, la vigueur d'un port reflète l'économie du pays. Et l'économie ivoirienne, ce n'est pas un secret, elle est plus efficace et plus avancée. Elle représente 40% de l'économie sous-régionale. Elle dispose d'un marché local pour l'importation et exporte beaucoup de matières premières, notamment le cacao et bien d'autres produits qui se font avec des conteneurs. Seulement avec les évènements que la Côte d'Ivoire a vécus, d'autres ports ont cherché à se positionner. Si vous prenez par exemple, le port de Lomé au Togo, il est passé de 60 000 conteneurs, il y a six ans à 200 000 conteneurs. Parce que, beaucoup de trafics à destination du Niger, du Burkina Faso et du Mali ont été détournés par le port de Lomé. Ce qui fait que Abidjan a perdu un peu de son rayonnement à cause de la situation qui prévaut dans notre pays. C'est malheureux. Et un pays comme la Guinée va également bénéficier de cette situation. Parce que, c'est à la faveur de la crise que la route qui relie Conakry à Bamako a été bitumée. Avant le grand désavantage de Conakry, c'était que d'abord, l'économie n'était pas capable de soutenir un port important à cause du faible niveau de la consommation des populations. Mais, en plus, vous ne pouvez pas prendre le trafic de l'Hinterland, parce qu'il n'y avait pas de voies de communication. Donc, Conakry était un peu comme une île isolée et ne pouvait pas développer le trafic.
Que faut-il faire pour rendre le port de Conakry attractif pour les armateurs ?
La modernisation des infrastructures et du matériel est l'un de nos objectifs. Cela, pour permettre aux armateurs d'être satisfaits et capter une clientèle. A cet effet, nous avons créé une société de logistique dont l'objectif est d'assurer les prestations de bout en bout pour booster les activités du port de Conakry. Nous pensons qu'avec les investissements prévus dans les mois à venir, le port de Conakry se fera entendre.
Joseph Atoumgbré
attjoseph@yahoo.fr
Envoyé spécial à Conakry