Sept (7) après l'assassinat de son père Téhé Emile, par des hommes armés, le fils Ferdinand Téhé sort de sa réserve pour nous parler des rapports de son père avec Laurent Gbagbo, des raisons de son élimination physique et de la déception de la famille qu'il a laissée. Nous avons retrouvé Ferdinand Téhé dans la banlieue abidjanaise. Et nous l'avons amené à parler.
Vous êtes le fils de Téhé Emile, assassiné aux premières heures de la crise ivoirienne. Aujourd'hui, quel est le sentiment qui nous habite ?
Le sentiment qui m'habite d'abord est un sentiment de réel regret, parce que mon père ne méritait vraiment pas ce que sa famille vit aujourd'hui. Tout le combat qu'il menait était pour préparer un bon avenir pour sa famille. Mais ceux avec qui il était, de son vivant, sont aujourd'hui, tous portés disparus. Vraiment je déplore leur attitude. Je lance un appel à toutes les connaissances de mon père à secourir la famille, parce que nous en avons besoin.
Vous savez au moins ce pourquoi votre père a été assassiné ?
Je pense que c'est parce que mon père, au forum de la réconciliation, a dit haut qu'il faut reconnaître la nationalité ivoirienne de Monsieur Alassane Dramane Ouattara. " Reconnaissez la nationalité ivoirienne de Monsieur Alassane Dramane Ouattara ", avait-il lancé à la face de tout le monde. Son cœur battait pour M. Ouattara, cela, j'en suis certain. Et donc, c'est le fait de demander à ce que soit reconnue la nationalité d'un individu qui lui a coûté la vie. Je pense personnellement donc que c'est à cause d'ADO que mon père a été assassiné. Ce n'est aujourd'hui un secret pour personne. Ce qui est important que je voudrais dire, est que M. ADO (je le remercie au passage) m'a appelé moins de 48 heures après l'assassinat de mon père. Il m'a remonté le moral ainsi qu'à ma mère. Il m'a laissé entendre que quand tout sera dans l'ordre, il va chercher à me rencontrer. Malheureusement, tout est rentré en ordre, et depuis, je n'arrive pas à le rencontrer.
Aujourd'hui encore vous n'avez pas de contact avec M. Ouattara ?
Non, je n'ai toujours pas eu de contact avec lui. Je ne l'ai pas encore vu de mes deux yeux depuis le décès de mon papa. C'est quand mon père vivait que je l'ai rencontré par deux fois.
Avez-vous l'impression que votre père a été assassiné pour rien ?
J'en ai vraiment l'impression, mais en même temps je doute un peu, parce que je sais que M. Ouattara a beaucoup de dossiers, beaucoup de personnes à gérer dans cette crise. Il y a beaucoup de personnes qui ont perdu leur vie à cause de lui. Mais, je parle de mon cas particulier parce que je suis blessé. Je veux le rencontrer. Je veux le rencontrer parce que je suis comme un enfant en pleurs.
On avait dit qu'on allait ouvrir des enquêtes pour éclaircir l'assassinat de M. TEHE et des autres. Où en sont les enquêtes aujourd'hui ? Avez-vous des résultats ?
Ce sont des dossiers que je voudrais poursuivre mais, je n'ai pas de moyen. Je préfère vraiment me confier à celui que je considère comme mon père spirituel qui est ADO à qui j'ai vraiment envie de confier tout mon destin.
Le président Gbagbo avait dit qu'il connaissait M. TEHE Emile, alors avez-vous connaissance de cela ?
Le président de la République, je le connais auprès de mon père, il y a très bien longtemps de cela. Il s'est exilé avec mon père en France, en Algérie, partout, jusqu'au 18 février 1992. Il a été arrêté avec mon père et mis en prison. Et lorsque je partais voir mon père à la Maca, lui, je le voyais, je lui disais bonjour. Mais aujourd'hui, je déplore tout ce qu'il a raconté sur papa. Le président disait : "Je connais Téhé Emile. Politiquement, Téhé Emile ne m'inquiète pas pour que je le tue ". Traiter Téhé Emile qui a tout fait avec lui, d'un homme marginal, je refuse cela. Mon père n'est pas un homme marginal. Ce n'est pas parce qu'il est mort, qu'il faut le traiter ainsi. Sinon, quand il composait ensemble le front républicain, quand il menait le même combat de M. Gbagbo, il n'était pas marginal. Alors, il ne faudrait pas que M. Gbagbo réagisse de la sorte. Je suis le seul fils de Téhé Emile qu'il connaît bien.
Alors qu'est-ce que vous attendez aujourd'hui de M. Gbagbo ?
Sincèrement, de M. Gbagbo (je ne parle pas du président de la république mais du petit frère de mon papa) je souhaiterais qu'il ait une pensée pour la famille, s'il connaît bien M. Téhé Emile comme il le dit. Nous vivons très mal depuis l'assassinat de mon père. Je n'accuse personne, mais ce que je sais, ce qui lui a coûté la vie, c'est le fait de déclarer officiellement au forum de la réconciliation qu'il faut reconnaître la nationalité ivoirienne à ADO.
Aujourd'hui, si vous rencontrez M. Ouattara, qu'est-ce que vous lui poserez comme problème ?
Si je le rencontre, je lui exposerai la situation de la famille Téhé. Nous aurions pu au moins rencontrer M. Ouattara pour qu’il sache que notre père est mort, pour une raison, pour un combat bien précis. Et, à l'allure où vont les choses, dans quel état se retrouvent les enfants ? Personne ne s'en inquiète. Même au niveau du dossier d'héritage, tout est bloqué alors qu'au moins, il faut décanter cette situation pour que la famille puisse survivre.
7 ans après l'assassinat de votre père, M. Allassane est candidat, avez-vous l'impression que votre père a gagné ?
Je pense que cela a contribué au fait que le dossier de M. Ouattara soit accepté. Pour qu'il soit éligible.
Si on vous dit aujourd'hui, voici ceux qui ont assassiné votre père, quelle sera votre réaction ?
Ça ne sera vraiment pas facile, mais je pense que même pour aller combattre, il faut s'armer. Je n'ai pas de rancune contre qui que ce soit. Mais, celui qu'on va être désigné comme étant l'assassin de mon père, je préférerai ne pas le connaître. C'est mieux pour lui et pour moi.
Vous sortez pour parler à nouveau en tant que fils de Téhé Emile, n'avez-vous pas peur ?
J'ai enduré beaucoup de difficultés depuis le décès de mon père. J'ai préféré m'abstenir de parler à cause de l'insécurité qui prévalait depuis longtemps. Mais, j'ai décidé de rompre le silence. On doit savoir que j'existe, que mes frères existent, qui peuvent même poursuivre ce que notre père a entrepris, même si on n'a pas la même vision politique. Ce que je veux aujourd'hui, c'est de rencontrer les personnes avec qui il a vécu dans le passé pour leur dire de subvenir au besoin des enfants quand le camarade n'existe plus.
Quel est votre appel ?
Sur le plan de la réconciliation, j'appelle les gens à pardonner. On ne doit pas bloquer l'économie d'un pays, on ne doit pas être sans affinités dans un pays. Le chômage est au galop, la misère s'accentue, le pays est dans l'impasse. Il faut pardonner pour avancer. Mais je voudrais dire au Président de la République que le fait qu'il ait traité mon père d'homme marginal m'a beaucoup choqué. Ce n'est pas facile de répondre aux propos du chef de l'Etat mais, c'est son fils qui est en pleurs qui lui demande de mettre un peu d'eau dans son vin.
Interview réalisée par
Eddy Péhé
Coll : Mahi M. (Stagiaire)
Vous êtes le fils de Téhé Emile, assassiné aux premières heures de la crise ivoirienne. Aujourd'hui, quel est le sentiment qui nous habite ?
Le sentiment qui m'habite d'abord est un sentiment de réel regret, parce que mon père ne méritait vraiment pas ce que sa famille vit aujourd'hui. Tout le combat qu'il menait était pour préparer un bon avenir pour sa famille. Mais ceux avec qui il était, de son vivant, sont aujourd'hui, tous portés disparus. Vraiment je déplore leur attitude. Je lance un appel à toutes les connaissances de mon père à secourir la famille, parce que nous en avons besoin.
Vous savez au moins ce pourquoi votre père a été assassiné ?
Je pense que c'est parce que mon père, au forum de la réconciliation, a dit haut qu'il faut reconnaître la nationalité ivoirienne de Monsieur Alassane Dramane Ouattara. " Reconnaissez la nationalité ivoirienne de Monsieur Alassane Dramane Ouattara ", avait-il lancé à la face de tout le monde. Son cœur battait pour M. Ouattara, cela, j'en suis certain. Et donc, c'est le fait de demander à ce que soit reconnue la nationalité d'un individu qui lui a coûté la vie. Je pense personnellement donc que c'est à cause d'ADO que mon père a été assassiné. Ce n'est aujourd'hui un secret pour personne. Ce qui est important que je voudrais dire, est que M. ADO (je le remercie au passage) m'a appelé moins de 48 heures après l'assassinat de mon père. Il m'a remonté le moral ainsi qu'à ma mère. Il m'a laissé entendre que quand tout sera dans l'ordre, il va chercher à me rencontrer. Malheureusement, tout est rentré en ordre, et depuis, je n'arrive pas à le rencontrer.
Aujourd'hui encore vous n'avez pas de contact avec M. Ouattara ?
Non, je n'ai toujours pas eu de contact avec lui. Je ne l'ai pas encore vu de mes deux yeux depuis le décès de mon papa. C'est quand mon père vivait que je l'ai rencontré par deux fois.
Avez-vous l'impression que votre père a été assassiné pour rien ?
J'en ai vraiment l'impression, mais en même temps je doute un peu, parce que je sais que M. Ouattara a beaucoup de dossiers, beaucoup de personnes à gérer dans cette crise. Il y a beaucoup de personnes qui ont perdu leur vie à cause de lui. Mais, je parle de mon cas particulier parce que je suis blessé. Je veux le rencontrer. Je veux le rencontrer parce que je suis comme un enfant en pleurs.
On avait dit qu'on allait ouvrir des enquêtes pour éclaircir l'assassinat de M. TEHE et des autres. Où en sont les enquêtes aujourd'hui ? Avez-vous des résultats ?
Ce sont des dossiers que je voudrais poursuivre mais, je n'ai pas de moyen. Je préfère vraiment me confier à celui que je considère comme mon père spirituel qui est ADO à qui j'ai vraiment envie de confier tout mon destin.
Le président Gbagbo avait dit qu'il connaissait M. TEHE Emile, alors avez-vous connaissance de cela ?
Le président de la République, je le connais auprès de mon père, il y a très bien longtemps de cela. Il s'est exilé avec mon père en France, en Algérie, partout, jusqu'au 18 février 1992. Il a été arrêté avec mon père et mis en prison. Et lorsque je partais voir mon père à la Maca, lui, je le voyais, je lui disais bonjour. Mais aujourd'hui, je déplore tout ce qu'il a raconté sur papa. Le président disait : "Je connais Téhé Emile. Politiquement, Téhé Emile ne m'inquiète pas pour que je le tue ". Traiter Téhé Emile qui a tout fait avec lui, d'un homme marginal, je refuse cela. Mon père n'est pas un homme marginal. Ce n'est pas parce qu'il est mort, qu'il faut le traiter ainsi. Sinon, quand il composait ensemble le front républicain, quand il menait le même combat de M. Gbagbo, il n'était pas marginal. Alors, il ne faudrait pas que M. Gbagbo réagisse de la sorte. Je suis le seul fils de Téhé Emile qu'il connaît bien.
Alors qu'est-ce que vous attendez aujourd'hui de M. Gbagbo ?
Sincèrement, de M. Gbagbo (je ne parle pas du président de la république mais du petit frère de mon papa) je souhaiterais qu'il ait une pensée pour la famille, s'il connaît bien M. Téhé Emile comme il le dit. Nous vivons très mal depuis l'assassinat de mon père. Je n'accuse personne, mais ce que je sais, ce qui lui a coûté la vie, c'est le fait de déclarer officiellement au forum de la réconciliation qu'il faut reconnaître la nationalité ivoirienne à ADO.
Aujourd'hui, si vous rencontrez M. Ouattara, qu'est-ce que vous lui poserez comme problème ?
Si je le rencontre, je lui exposerai la situation de la famille Téhé. Nous aurions pu au moins rencontrer M. Ouattara pour qu’il sache que notre père est mort, pour une raison, pour un combat bien précis. Et, à l'allure où vont les choses, dans quel état se retrouvent les enfants ? Personne ne s'en inquiète. Même au niveau du dossier d'héritage, tout est bloqué alors qu'au moins, il faut décanter cette situation pour que la famille puisse survivre.
7 ans après l'assassinat de votre père, M. Allassane est candidat, avez-vous l'impression que votre père a gagné ?
Je pense que cela a contribué au fait que le dossier de M. Ouattara soit accepté. Pour qu'il soit éligible.
Si on vous dit aujourd'hui, voici ceux qui ont assassiné votre père, quelle sera votre réaction ?
Ça ne sera vraiment pas facile, mais je pense que même pour aller combattre, il faut s'armer. Je n'ai pas de rancune contre qui que ce soit. Mais, celui qu'on va être désigné comme étant l'assassin de mon père, je préférerai ne pas le connaître. C'est mieux pour lui et pour moi.
Vous sortez pour parler à nouveau en tant que fils de Téhé Emile, n'avez-vous pas peur ?
J'ai enduré beaucoup de difficultés depuis le décès de mon père. J'ai préféré m'abstenir de parler à cause de l'insécurité qui prévalait depuis longtemps. Mais, j'ai décidé de rompre le silence. On doit savoir que j'existe, que mes frères existent, qui peuvent même poursuivre ce que notre père a entrepris, même si on n'a pas la même vision politique. Ce que je veux aujourd'hui, c'est de rencontrer les personnes avec qui il a vécu dans le passé pour leur dire de subvenir au besoin des enfants quand le camarade n'existe plus.
Quel est votre appel ?
Sur le plan de la réconciliation, j'appelle les gens à pardonner. On ne doit pas bloquer l'économie d'un pays, on ne doit pas être sans affinités dans un pays. Le chômage est au galop, la misère s'accentue, le pays est dans l'impasse. Il faut pardonner pour avancer. Mais je voudrais dire au Président de la République que le fait qu'il ait traité mon père d'homme marginal m'a beaucoup choqué. Ce n'est pas facile de répondre aux propos du chef de l'Etat mais, c'est son fils qui est en pleurs qui lui demande de mettre un peu d'eau dans son vin.
Interview réalisée par
Eddy Péhé
Coll : Mahi M. (Stagiaire)