Elle n’avait jamais imaginé qu’elle serait vendeuse de galettes à l’Université d’Abobo-Adjamé. Enfant, Coulibaly Mariame, la cinquantaine révolue aujourd’hui, rêvait d’aller au « pays des blancs ». Mais, celle qui est devenue l’une des doyennes des vendeuses au marché d’Abobo-Adjamé a vu ses projets contrariés très tôt. « Je n’ai pas eu la chance d’aller à l’école. Mariée très tôt, j’ai dû quitter Grand-Bassam pour venir m’installer avec mon mari à Abidjan. Il fallait bien vivre puisqu’il ne travaillait pas. C’est ainsi que j’ai commencé à vendre du « dêguê » et des galettes ici dans les années 80. C’est devant la scolarité actuelle que j’ai commencé avant qu’Aïdara Daouda, le premier président de l’Université, ne nous demande en 1996 de nous installer sur le site de l’actuel petit marché », relate-t-elle. Cette femme, mère de quatre filles et deux garçons, reconnaît entre deux éclats de rire qu’elle aurait pu avoir un carnet d’adresses fourni si elle l’avait voulu, eu égard au nombre d’étudiants, devenus des personnalités importantes qu’elle a vu passer. « Quand je me suis installée ici, c’était bien avant la construction de l’université et celle-ci a été construite devant moi en 1995. J’ai vu le Premier ministre Alassane Ouattara en ce temps-là. Blé Goudé et Soro Guillaume ont été mes clients. Blé Goudé m’appelait même sa petite femme pendant sa campagne quand il voulait être secrétaire général de la Fesci », confie-t-elle heureuse. Concernant ses relations avec les étudiants, qu’elle appelle affectueusement « mes enfants», elle avoue qu’elle prie pour que leurs relations soient toujours aussi bonnes. «Tous les étudiants me connaissent et m’appellent maman. Je les considère comme mes enfants. Certains m’invitent à leurs soutenances. Plusieurs d’entre eux sont devenus professeurs et passent de temps en temps me saluer », révèle-t-elle. Ses relations avec la Fesci ? Cordiales. « Les étudiants de la Fesci me respectent, ce sont mes enfants. L’année passée, Mian Augustin est venu spécialement me saluer. Mais une âme mal intentionnée a voulu me nuire en racontant des choses fausses sur moi. Heureusement, mes enfants me connaissent et me savent incapable de leur faire du mal », se réjouit-elle. Elle reconnaît que cette activité lui a permis de subvenir aux besoins de sa famille et d’ouvrir une petite boutique à l’Université d’Abobo-Adjamé. « Ce commerce me permet de payer les études de mes deux jeunes garçons dont l’un est en année de Bts et l’autre en terminale. Ma première fille, Yelly, est aux Etats-Unis et me vient de temps en temps en aide, mais cela n’est pas suffisant car les bénéfices se font rares, les étudiants ne sont plus nombreux comme avant à cause de la grève des enseignants et il y a trop de boutiquiers et de vendeuses maintenant. Mon mari ne travaille pas, donc je ne pense même pas laisser cela un jour», indique la maman des étudiants. Elle tient cependant à préciser qu’elle n’a pas abandonné son rêve de vivre au pays des blancs. «J’espère aller un jour au moins aux Etats-Unis pour me reposer, si Dieu le veut, avec l’aide de ma fille. Mais je ne compte pas y rester, sinon que deviendront mes enfants ? », s’interroge-t-elle.
Napargalè Marie
Napargalè Marie