Fils de Marabout, David a choisi l’art comme profession. Devant ses tableaux, pinceau en main ou sur un podium, c’est la même passion qu’il déploie. Il n’a certes pas intégré le cercle des grands, mais a 52 ans David croit en l’avenir. Portrait.
Demandez à n’importe qui à Odienné où se trouve l’atelier d’Afro David et on vous répondra spontanément : « Au grand marché, non loin de la gare des motos taxi. » Afro David ou Daouda Diakité à l’état civil est un artiste hors-pair. Le quinquagénaire, natif de Sinématiali, est un être atypique. Dans son atelier entièrement confectionné avec du bois, il est campé ce jeudi matin sur son chevalet, droit comme un pinceau, le visage en lame de couteau. Une épaisse chevelure coupée selon le modèle « Afro » et blanchie par ses 52 ans se dresse sur sa tête. Le sobriquet « Afro » qu’il porte, est lié à cette coiffure qui rappelle le look de la jeunesse noire américaine des années 1960 et 1970. Le regard de l’artiste est fixé sur le tableau qu’il peint avec dextérité. Au mur, des toiles exposées racontent maintes histoires que personne d’autre, à part David, ne peut commenter sans risquer de s’y perdre. Sur une table constellée de couleurs, règne un désordre. Un mélange de tubes à peinture et de pinceaux. Le sol cimenté de la concession est, quant à lui, jonché de tubes vides.
Daouda Diakité a une conception particulière de la vie. Il n’appartient à aucune religion. Son père, pourtant marabout, n’a pas réussi à le convaincre de cette vision des choses. « Je respecte toutes les religions, mais je n’appartiens à aucune d’elles », clame-t-il. Selon lui, il est inutile d’appartenir à une religion pour respecter des règles que l’on peut observer sans forcément se mettre sous le joug d’une contrainte. Cette liberté de penser, se reflète sur son comportement. Sa vie conjugale ? En tout cas on ne connaît de compagnie pour Afro autre que ses apprentis. Il n’a ni femme, ni enfant. Et, il semble se plaire dans cette situation. Pour cet artiste, le seul peintre d’Odienné, l’essence de la vie se trouve dans le bien. Tout homme doit donc s’atteler à faire ce qui est bien.
Peintre et chanteur
Si David est connu de tous dans la capitale du Denguélé, c’est parce qu’il est multidimensionnel. Outre le fait d’être le seul artiste peintre d’Odienné, il est propriétaire d’un orchestre : « les Sofas du développement ». Il en est le lead vocal. Le groupe est constitué d’une dizaine de jeunes, dont trois filles (choristes et danseuses). Son genre musical est l’Afro Beat. Une musique vulgarisée par le nigérian Fela Kuti. Avec une voix un peu féminine, le chef d’orchestre parle bien le français. « J’aime ce genre musical. C’est grâce à Fela Kuti, qui a été l’un des modèles à qui j’ai voulu ressembler, que je chante aujourd’hui ». Sur le plan national, David dit avoir aimé Lougah François. Les idoles du chanteur en herbe au plan inter, sont Jimmy Hendrix et Johnny Holiday. Dans ses chansons, le peintre-chanteur des « Sofas du développement » dénonce les tares de la société, notamment l’injustice et l’hypocrisie des hommes. Ce qui lui a permis de beaucoup tourner. Les spectacles ? Il en a fait à Odienné avec son orchestre. Même si son genre musical est souvent considéré comme « has been » (dépassé), les différents spectacles organisés ça et là, lui ont valu une certaine notoriété. Mordu de musique, il gagne sa vie grâce à la peinture. « La musique ne me rapporte presque rien, alors que la peinture me fait gagner autour de 35.000 Fcfa par mois ». Pour lui, il faut rendre hommage aux artistes ainsi qu’aux scientifiques de tous les domaines qui ont permis à l’humanité de progresser. « Nous devons nous consacrer au bien et condamner toutes les mauvaises choses, à savoir l’injustice, le crime », recommande-t-il.
Forgé à la tâche
David n’a fréquenté aucun centre de formation pour devenir dessinateur, peintre et artiste musicien. « Je me suis formé sur le tas et je suis fier qu’on apprécie mes œuvres », se félicite-t-il. Mais il reste un homme d’aventure. Du fait du métier de son père, il a sillonné bien de région de la Côte d’Ivoire. Et c’est à Aboisso qu’il a fait la connaissance d’un peintre d’origine syrienne. Ce dernier lui a inculqué la passion de la peinture. « Bien qu’étant au Ce1, mon ami Ekoué Georges et moi fréquentions Gassal, un syrien. C’est lui qui nous a donné l’amour de la toile. Pendant que je suis ici à Odienné, Ekoué Georges est peintre à Marcory», a fait savoir David. A Aboisso, il était encore un admirateur de la peinture. Mais, c’est à Korhogo, alors qu’il était au secondaire, qu’il se met à la tâche. « Je faisais des toiles qu’un ami vendait pour moi et ça marchait. En 1972, j’ai arrêté mes études en classe de 4e pour me consacrer à l’art et la musique ». En 1973, Afro dépose ses valises à Abidjan où il travaille pendant deux ans avec un ami.
Le Président William
Durant ces deux années, il fait des économies pour tenter l’aventure. Il choisit le Liberia où il dépose ses valises précisément à Cap Palmas. Dans cette ville anglophone, David s’améliore en anglais et y travaille abondamment. Ce qui lui vaut la sympathie des dignitaires du palais de Monrovia. « J’ai fait des portraits du président William Tolbert et de sa femme. Et, cela m’a valu un repas avec le couple présidentiel ». David va vivre dans l’espoir d’approfondir ses relations avec le palais de Monrovia. Mais, ce rêve sera brisé par le coup d’Etat de Samuel Doe survenu en avril 1980. La chasse aux proches du président assassiné est organisée par la nouvelle junte au pouvoir. Le repas partagé avec le couple présidentiel le compromettait. Et se sentant en danger, le peintre va plier bagages pour regagner Abidjan.
Ernesto Djédjé
Revenu dans la capitale économique, David va vivre successivement dans les quartiers de Yopougon, Adjamé 220 logements et Saint Michel. Il y reste jusqu’en 1996. « A Abidjan, j’ai collaboré avec beaucoup de personnes et cela m’a permis d’apprendre plus », affirme t-il. Daouda Diakité va aussi faire la connaissance du ‘’roi du Ziglibiti’’, Ernesto Djédjé, au début des années 1980, après lui avoir fait cadeau de son portrait. Le contact avec la star de la musique ivoirienne intensifie son amour pour la musique. Malheureusement, la mort de Djédjé va mettre fin à cette relation fort prometteuse pour le musicien. C’est le seul côté positif que David dit avoir apprécié dans une ville où foisonnent des concurrents. « Je dormais dans mon atelier. Car, ce que je gagnais ne me permettait pas de louer un appartement à Abidjan », explique-il. C’est d’ailleurs ces raisons qui l’ont conduit à se replier sur l’intérieur du pays pour espérer vivre de son art. Et c’est Odienné, sa ville d’origine qu’il choisit. Il y atterrit un vendredi à bord d’un car de la compagnie ‘’Fa Trans’’ en 1996. Depuis ce jour, David s’y est accoutumé. Arrivé sur la terre de ses ancêtres, il a résolu le problème de la concurrence. N’est-il pas le seul peintre de toute la région du Denguélé ? Les toiles de David sont les seules qui sont exposées dans les luxueux hôtels de la ville. Aussi, grâce à ses économies, il a réussi à réaliser l’un de ses rêves. A savoir, monter son propre orchestre. Aujourd’hui, David souhaite que la politique de la décentralisation permette de faire la promotion des artistes de l’intérieur. En leur apportant les aides nécessaires pour leur épanouissement. « Cela contribuera à régler le problème de l’exode de la jeunesse vers Abidjan», soutient le lead vocal des « Sofas du développement » d’Odienné.
Tenin Bè Ousmane à Odienné.
Demandez à n’importe qui à Odienné où se trouve l’atelier d’Afro David et on vous répondra spontanément : « Au grand marché, non loin de la gare des motos taxi. » Afro David ou Daouda Diakité à l’état civil est un artiste hors-pair. Le quinquagénaire, natif de Sinématiali, est un être atypique. Dans son atelier entièrement confectionné avec du bois, il est campé ce jeudi matin sur son chevalet, droit comme un pinceau, le visage en lame de couteau. Une épaisse chevelure coupée selon le modèle « Afro » et blanchie par ses 52 ans se dresse sur sa tête. Le sobriquet « Afro » qu’il porte, est lié à cette coiffure qui rappelle le look de la jeunesse noire américaine des années 1960 et 1970. Le regard de l’artiste est fixé sur le tableau qu’il peint avec dextérité. Au mur, des toiles exposées racontent maintes histoires que personne d’autre, à part David, ne peut commenter sans risquer de s’y perdre. Sur une table constellée de couleurs, règne un désordre. Un mélange de tubes à peinture et de pinceaux. Le sol cimenté de la concession est, quant à lui, jonché de tubes vides.
Daouda Diakité a une conception particulière de la vie. Il n’appartient à aucune religion. Son père, pourtant marabout, n’a pas réussi à le convaincre de cette vision des choses. « Je respecte toutes les religions, mais je n’appartiens à aucune d’elles », clame-t-il. Selon lui, il est inutile d’appartenir à une religion pour respecter des règles que l’on peut observer sans forcément se mettre sous le joug d’une contrainte. Cette liberté de penser, se reflète sur son comportement. Sa vie conjugale ? En tout cas on ne connaît de compagnie pour Afro autre que ses apprentis. Il n’a ni femme, ni enfant. Et, il semble se plaire dans cette situation. Pour cet artiste, le seul peintre d’Odienné, l’essence de la vie se trouve dans le bien. Tout homme doit donc s’atteler à faire ce qui est bien.
Peintre et chanteur
Si David est connu de tous dans la capitale du Denguélé, c’est parce qu’il est multidimensionnel. Outre le fait d’être le seul artiste peintre d’Odienné, il est propriétaire d’un orchestre : « les Sofas du développement ». Il en est le lead vocal. Le groupe est constitué d’une dizaine de jeunes, dont trois filles (choristes et danseuses). Son genre musical est l’Afro Beat. Une musique vulgarisée par le nigérian Fela Kuti. Avec une voix un peu féminine, le chef d’orchestre parle bien le français. « J’aime ce genre musical. C’est grâce à Fela Kuti, qui a été l’un des modèles à qui j’ai voulu ressembler, que je chante aujourd’hui ». Sur le plan national, David dit avoir aimé Lougah François. Les idoles du chanteur en herbe au plan inter, sont Jimmy Hendrix et Johnny Holiday. Dans ses chansons, le peintre-chanteur des « Sofas du développement » dénonce les tares de la société, notamment l’injustice et l’hypocrisie des hommes. Ce qui lui a permis de beaucoup tourner. Les spectacles ? Il en a fait à Odienné avec son orchestre. Même si son genre musical est souvent considéré comme « has been » (dépassé), les différents spectacles organisés ça et là, lui ont valu une certaine notoriété. Mordu de musique, il gagne sa vie grâce à la peinture. « La musique ne me rapporte presque rien, alors que la peinture me fait gagner autour de 35.000 Fcfa par mois ». Pour lui, il faut rendre hommage aux artistes ainsi qu’aux scientifiques de tous les domaines qui ont permis à l’humanité de progresser. « Nous devons nous consacrer au bien et condamner toutes les mauvaises choses, à savoir l’injustice, le crime », recommande-t-il.
Forgé à la tâche
David n’a fréquenté aucun centre de formation pour devenir dessinateur, peintre et artiste musicien. « Je me suis formé sur le tas et je suis fier qu’on apprécie mes œuvres », se félicite-t-il. Mais il reste un homme d’aventure. Du fait du métier de son père, il a sillonné bien de région de la Côte d’Ivoire. Et c’est à Aboisso qu’il a fait la connaissance d’un peintre d’origine syrienne. Ce dernier lui a inculqué la passion de la peinture. « Bien qu’étant au Ce1, mon ami Ekoué Georges et moi fréquentions Gassal, un syrien. C’est lui qui nous a donné l’amour de la toile. Pendant que je suis ici à Odienné, Ekoué Georges est peintre à Marcory», a fait savoir David. A Aboisso, il était encore un admirateur de la peinture. Mais, c’est à Korhogo, alors qu’il était au secondaire, qu’il se met à la tâche. « Je faisais des toiles qu’un ami vendait pour moi et ça marchait. En 1972, j’ai arrêté mes études en classe de 4e pour me consacrer à l’art et la musique ». En 1973, Afro dépose ses valises à Abidjan où il travaille pendant deux ans avec un ami.
Le Président William
Durant ces deux années, il fait des économies pour tenter l’aventure. Il choisit le Liberia où il dépose ses valises précisément à Cap Palmas. Dans cette ville anglophone, David s’améliore en anglais et y travaille abondamment. Ce qui lui vaut la sympathie des dignitaires du palais de Monrovia. « J’ai fait des portraits du président William Tolbert et de sa femme. Et, cela m’a valu un repas avec le couple présidentiel ». David va vivre dans l’espoir d’approfondir ses relations avec le palais de Monrovia. Mais, ce rêve sera brisé par le coup d’Etat de Samuel Doe survenu en avril 1980. La chasse aux proches du président assassiné est organisée par la nouvelle junte au pouvoir. Le repas partagé avec le couple présidentiel le compromettait. Et se sentant en danger, le peintre va plier bagages pour regagner Abidjan.
Ernesto Djédjé
Revenu dans la capitale économique, David va vivre successivement dans les quartiers de Yopougon, Adjamé 220 logements et Saint Michel. Il y reste jusqu’en 1996. « A Abidjan, j’ai collaboré avec beaucoup de personnes et cela m’a permis d’apprendre plus », affirme t-il. Daouda Diakité va aussi faire la connaissance du ‘’roi du Ziglibiti’’, Ernesto Djédjé, au début des années 1980, après lui avoir fait cadeau de son portrait. Le contact avec la star de la musique ivoirienne intensifie son amour pour la musique. Malheureusement, la mort de Djédjé va mettre fin à cette relation fort prometteuse pour le musicien. C’est le seul côté positif que David dit avoir apprécié dans une ville où foisonnent des concurrents. « Je dormais dans mon atelier. Car, ce que je gagnais ne me permettait pas de louer un appartement à Abidjan », explique-il. C’est d’ailleurs ces raisons qui l’ont conduit à se replier sur l’intérieur du pays pour espérer vivre de son art. Et c’est Odienné, sa ville d’origine qu’il choisit. Il y atterrit un vendredi à bord d’un car de la compagnie ‘’Fa Trans’’ en 1996. Depuis ce jour, David s’y est accoutumé. Arrivé sur la terre de ses ancêtres, il a résolu le problème de la concurrence. N’est-il pas le seul peintre de toute la région du Denguélé ? Les toiles de David sont les seules qui sont exposées dans les luxueux hôtels de la ville. Aussi, grâce à ses économies, il a réussi à réaliser l’un de ses rêves. A savoir, monter son propre orchestre. Aujourd’hui, David souhaite que la politique de la décentralisation permette de faire la promotion des artistes de l’intérieur. En leur apportant les aides nécessaires pour leur épanouissement. « Cela contribuera à régler le problème de l’exode de la jeunesse vers Abidjan», soutient le lead vocal des « Sofas du développement » d’Odienné.
Tenin Bè Ousmane à Odienné.