Le ministre des Transports, Albert Mabri Toikeusse, par ailleurs candidat de l’UDPCI à cette importante échéance, recherche sans arrêt des fonds. Il a créé, pour ce faire, une curieuse taxe dans le secteur du transport. Tous les détails de l’opération. Face à la recrudescence des accidents de la circulation sur nos routes, impliquant souvent des véhicules en stationnement dangereux (non signalés), le ministre des transports a eu l’idée de rappeler aux conducteurs, l’existence de textes imposant la possession à titre préventif d’équipements et d’accessoires de sécurité. Il a dans ce sens, pris un arrêté comme nous l’écrivions dans notre édition du samedi, et a fixé la date butoir du 17 décembre 2009 pour voir obligatoirement tous les véhicules immatriculés en Côte d’Ivoire dotés de ces accessoires. Il a chargé l’Office de la sécurité routière (OSER) de sensibiliser les automobilistes à l’usage de ces instruments qu’il devra au préalable homologuer. Mabri Toikeusse a, par ailleurs instruit, le service autonome du guichet unique automobile (GUA) de vérifier la disponibilité à bord des véhicules importés, des accessoires homologués par l’OSER avant de les immatriculer. Cette mesure d’homologation posera des problèmes pour plusieurs raisons. Marquage et personnalisation des accessoires Primo, si l’arrêté N° 297/MT/CAB pris le 25 juin 2009 par le ministre des Transports, Albert Mabri Toikeusse énumère pour chaque type de véhicules, les équipements dont il doit être obligatoirement équipé, il ne précise pas, en revanche, sur quoi doit porter leur homologation et surtout les normes de références auxquelles devront satisfaire ces équipements pour être reconnus comme aptes à être utilisés par les véhicules en circulation sur les routes ivoiriennes. Secundo, les équipements dont il s’agit, sont fabriqués par des entreprises agréées, conformément à des normes fixées par les conférences ministérielles mondiales sur la sécurité routière, et livrés aux concessionnaires de toutes les marques mondialement connues (telles Mercédès, Mazda, Datsun, BMW, etc.) qui en équipent leurs véhicules au sortir des usines. Tercio, à quelle fin M. Mabri veut-il que ces équipements soient marqués et personnalisés ? Les accessoires en question n’étant pas des éléments constitutifs du véhicule, il est donc incompréhensible qu’à travers l’article 6 de son arrêté, Mabri exige leur marquage par rapport au véhicule qu’ils équipent et leur personnalisation en rapport avec le propriétaire dudit véhicule. Voici ce que stipule ce fameux article 6 : «l’homologation, le marquage et la personnalisation des accessoires de sécurité sont exécutés par l’OSER sur toute l’étendue du territoire national. Le montant des frais acquittés pour cette prestation est fixé par arrêté conjoint du ministre des Transports et du ministre de l’Economie et des Finances». En réalité, l’exigence du marquage et de la personnalisation des accessoires de sécurité est à but lucratif. Elle vise à réduire les déperditions de chiffre d’affaires du business. Mabri ne veut pas, par exemple, qu’une famille qui utilise alternativement deux voitures de même catégorie dont elle dispose, se serve d’un seul équipement pour ces deux véhicules. Le désavantage serait de réduire l’impact financier de l’opération ; il faut donc un marquage de sorte qu’à chaque carte grise corresponde un équipement avec pour conséquence de maximiser le chiffre d’affaires de l’opération. L’OSER comme paravent Que pourra apporter de nouveau et d’utile à ces équipements, l’homologation arrêtée par Albert Mabri Toikeusse ? Une tracasserie administrative de plus et, bien évidemment, elle servira de prétexte au candidat de l’UDPCI à l’élection présidentielle de soutirer à des fins personnelles de l’argent aux contribuables. Mabri Toikeusse a-t-il, à peine, indiqué l’OSER comme devant homologuer les équipements de sécurité, moyennant des frais à acquitter par le demandeur, qu’il a entrouvert la porte à un subtil détournement de deniers publics attendus de cette opération via un complice bien docile. Mabri ouvre à l’article 10 de son arrêté, la possibilité à l’OSER de passer des accords avec des partenaires visant à réaliser à sa place, sur toute l’étendue du territoire national, les opérations d’homologation des accessoires de sécurité. Le ministre des Transports se substituant à l’OSER a conclu sans crier gare un contrat de concession avec une société privée. Assurément tenu par les impératifs d’une campagne électorale qui s’annonce palpitante, Mabri Toikeusse décide d’aller vite en foulant aux pieds les règles les plus élémentaires des concessions de service public. Il a fixé les frais d’homologation sans s’en référer à son collègue de l’Economie et des Finances, violant ainsi l’article 6 de son propre arrêté qui stipule, en son alinéa 2, que «le montant des frais acquittés pour cette prestation est fixé par arrêté conjoint du ministre des Transports et du ministre de l’Economie et des Finances». Se croyant certainement dans une pétaudière où chacun fait ce que bon lui semble, M. Mabri s’est aussi reconnu le droit, sans y être dûment autorisé, de conclure au nom de l’Etat de Côte d’Ivoire un contrat de concession avec une entreprise privée dénommée Société Développement et Technologie (D&T) à laquelle il a confié l’activité de contrôle et d’homologation des équipements et accessoires. Cette société est dirigée par son ami et complice, Jean Marie HOGGART. Plus de 10 milliards de Fcfa à empocher L’opération menée tambour battant, rapportera si tout se passe selon les prévisions du ministre affairiste, la somme de 10 milliards de F CFA sinon bien plus si D&T devrait fournir les équipements et accessoires à homologuer. Voici le détail de la tarification : les voitures particulières, les taxis compteurs et taxis communaux devront s’acquitter de 17.000 F CFA TTC ; les camions d’un poids variant de 3,5 à 7 tonnes et les mini cars de 32 places maximum débourseront 20.000 F CFA TTC ; les camions de plus de 7 tonnes et les cars de plus 32 places sont facturés à 23.000 F CFA TTC et les véhicules de transport d’Hydrocarbures ou de produits dangereux payeront 24.000 F CFA TTC. Pourquoi une telle disparité de prix, pour la délivrance de la même attestation ; le support papier de l’attestation change-t-il en fonction du poids du véhicule ? Quand on sait que les automobilistes devront renouveler l’homologation de leurs équipements chaque année, le candidat de l’UDPCI à la présidentielle a de bonnes raisons de se frotter les mains, «sa» Société D&T en plus de l’activité d’homologation s’annonce comme fournisseur des équipements et accessoires de sécurité. Il n’est pas exclu à cette allure que Mabri Toikeusse veuille aussi, un jour, soumettre à un contrôle d’homologation par l’OSER, les pneumatiques des véhicules immatriculés en Côte d’Ivoire. Didier Depry didierdepri@yahoo.fr
Politique Publié le lundi 28 décembre 2009 | Notre Voie