Dans une interview fleuve accordée à l`hebdomadaire panafricain et reprise intégralement par le journal pro FPI "Le Temps" Laurent Gbagbo sans prendre de gants, a confirmé ce que beaucoup d`Ivoiriens et d`observateurs pensaient de lui. Le mépris royal des principes démocratiques et surtout de la souffrance des Ivoiriens après près de 10 ans de crise politique qu`il a contribué à exacerber. Voici quelques morceaux évocateurs de cette interview.
Le coup d`Etat de décembre 1999 et la décennie de crise militaro politique
" Cette décennie a permis à toutes les contradictions latentes, étouffées, enfouies pendant quarante ans, de surgir, de s`exprimer et, pour certaines d`entre elles, de trouver une solution. Elle a permis qu`éclate au grand jour la guerre entre les héritiers d`Houphouët, qui, trop occupés à se battre entre eux, ne se sont pas aperçus qu`ils créaient les conditions pour qu`un fils du peuple - moi-même - accède au pouvoir. En réalité, cette décennie marque un tournant: l`ordre ancien qui prévalait en Côte d`Ivoire depuis la fin des années 1950 s`efface et un nouvel ordre s`installe peu à peu…. " On voit que l`homme ne regrette pas cette crise. Mieux il s`en délecte, tant elle lui donne le pouvoir et prolonge son mandat.
Présidentielle en mars 2010, faut-il y croire ?
" Ne faites surtout pas abstraction du contexte ivoirien. Notre pays a connu une guerre civile, avec son lot de déplacements de populations, de registres d`état civil détruits et de pagaille administrative. Ceux qui sont chargés de l`organisation du scrutin ne s`attendaient sans doute pas à une tâche d`une telle ampleur. D`où les reports de date ". Ainsi parle celui qui en tout cas ne fera rien pour accélérer le proccessus puisqu`il cherche toujours des arguments pour repousser l`échéance électorale.
Sa candidature
" Je suis candidat pour trois raisons. La première est d`ordre général : un Président en exercice se représente toujours. Ne serait-ce que pour savoir comment les électeurs jugent le travail qu`il a accompli. Deuxième raison : je n`ai vraiment pu gouverner, avec la marge de manœuvre nécessaire, que pendant à peine vingt mois. La tentative de coup d`Etat de septembre 2002 a débouché sur la guerre civile, les négociations à répétition, puis sur un gouvernement hétéroclite fait de bric et de broc et dont le programme ne m`appartenait plus. Troisième raison enfin : le combat électoral qui s`annonce oppose, je vous l`ai dit, les tenants assumés de l`ordre ancien à l`incarnation du nouvel ordre ". Gbagbo est l`homme qui veut effacer la Côte d`Ivoire faite par Houphouët-Boigny, Henri Konan Bédié et le PDCI-RDA. Il a gouverné sans guerre pendant 20 mois. Qu`a-t-il fait ?
Le Chef de l`Etat et le candidat
"Chaque chose en son temps. Je suis candidat à cent pour cent tout en restant chef de l`Etat à cent pour cent. J`ai en tête mon plan de campagne, mon slogan et la date précise à laquelle j`irai sur le terrain appuyer ceux qui, déjà, labourent pour mon compte. Vous verrez bien. ". Faut-il encore s`étonner que le Chef de l`Etat utilise les moyens de l`Etat mis à sa disposition pour sa campagne ? Puisqu`il a véritablement du mal à faire la différence entre le candidat et le Chef de l`Etat et entre sa campagne et les missions de l`Etat.
Le 19 septembre et le cortège d`assassinats :
" Je suis sûr que l`on connaîtra un jour la vérité sur tout ce qui s`est passé au cours de la nuit terrible du 19 septembre 2002, durant laquelle Robert Guéi, Emile Boga Doudou et beaucoup d`autres ont été assassinés. (…) Il y a affaire et affaire. L`affaire Kieffer, par exemple, émeut beaucoup plus les Français que les Ivoiriens, et je ne pense pas que l`on éprouvera un jour l`impérieux besoin de créer une commission d`enquête sur ce cas précis, aussi regrettable qu`il soit. C`est une manipulation. Pourquoi s`acharne-t-on à démontrer que la disparition d`un citoyen lambda, fût-il français, est reliée à la présidence de la République? Pourquoi l`aurait-on emmené ici, torturé ici, tué ici? Lorsque j`étais étudiant à Lyon en 1967, j`ai connu un Ivoirien qui a disparu et que nul n`a jamais revu. Personne n`a accusé le général de Gaulle. L`affaire du bombardement de Bouaké ? Que l`on m`explique pourquoi le général Poncet, commandant à l`époque de la force Licorne, a obstinément refusé au procureur ivoirien auprès des armées l`accès au site où sont morts les soldats français. Que l`on m`explique aussi pourquoi, le jour même des faits, alors qu`ils avaient mis la main sur les contractuels biélorusses mêlés au bombardement, les Français les ont laissés filer en douce vers le Togo sans les avoir interrogés (…) L`affaire du charnier de Yopougon maintenant: c`est une grande escroquerie, un Timisoara ivoirien. Cinquante-huit cadavres sont découverts au matin du 26 octobre 2000, entassés en lisière de forêt. Quelqu`un crie: " Ce sont des musulmans ! " Qu`est-ce qui distingue ici un corps de musulman d`un corps de non-musulman ? " Dan aucun des cas, le Chef de l`Etat ne réclame une enquête en bonne et due forme pour faire la lumière. Il en a même banalisé. La banalisation de la vie humaine.
Ses relations avec Bédié
" Encore une fois, interrogez-le. Ce n`est pas moi qui ai changé. C`est lui. Au début, nous échangions volontiers. Je l`appelais au téléphone, il m`appelait. Et puis, à un moment donné, je me suis rendu compte que son attitude avait changé... peut-être est-ce à mettre sur le compte d`une campagne électorale mal maîtrisée ". Gbagbo n`a jamais été responsable de rien. Il est toujours le saint, le martyr. Qui a commencé la virulence dans ce pays ? Qui a envenimé la crise politique au retour de Marcoussis ?
Les coups tordus à l`opposition :
"Oui. La politique, c`est aussi l`action, le mouvement, la bataille. Ma campagne sera correcte, certes, mais je n`irai pas à l`élection comme un mouton à l`abattoir. Mes adversaires ont un passif et un exercice du pouvoir que je compte bien mettre en lumière. ". Le message est clair il ne laissera pas ses adversaires mener la campagne comme il se doit et tant qu`il n`est pas sûr de tout avoir, il ne s`engagera pas sur le chemin des élections.
L`accès aux médias publics
" Henri Konan Bédié a cru bon de soulever cette question lors de la dernière réunion du Cadre permanent de concertation, à Ouagadougou, le 3 décembre. Je l`ai regardé, je ne savais pas s`il fallait rire ou pleurer. Et j`ai préféré me taire. Je me souviens d`avoir été tabassé, sous son règne, devant les caméras de la Rti. A l`époque, les temps d`antenne pour l`opposition, c`était cela: des images de manifestations réprimées afin d`édifier les populations. Alors, quand je vois ce monsieur évoquer ce problème, je me dis qu`il est décidément bien mal placé… Cette question n`est pas nouvelle. Ce qui est nouveau, c`est que, nous, nous ne tabassons pas ceux qui la posent. Il y a un progrès, non ? (rires) Vous savez, nous autres Africains, nous ne réagissons pas comme les Européens. Quand un Bédié dit ce genre de chose, je me contente de l`observer en silence. Sinon, je risquerais d`être violent ". En d`autres termes, le régime FPI fera pire que ce qui est déjà fait. C`est parce que Bédié et autres ont encore quelques minutes de temps d`antenne. Et si Bédié s`obstine à poser toujours la question, il risque d`être tabassé.
Eddy PEHE
Le coup d`Etat de décembre 1999 et la décennie de crise militaro politique
" Cette décennie a permis à toutes les contradictions latentes, étouffées, enfouies pendant quarante ans, de surgir, de s`exprimer et, pour certaines d`entre elles, de trouver une solution. Elle a permis qu`éclate au grand jour la guerre entre les héritiers d`Houphouët, qui, trop occupés à se battre entre eux, ne se sont pas aperçus qu`ils créaient les conditions pour qu`un fils du peuple - moi-même - accède au pouvoir. En réalité, cette décennie marque un tournant: l`ordre ancien qui prévalait en Côte d`Ivoire depuis la fin des années 1950 s`efface et un nouvel ordre s`installe peu à peu…. " On voit que l`homme ne regrette pas cette crise. Mieux il s`en délecte, tant elle lui donne le pouvoir et prolonge son mandat.
Présidentielle en mars 2010, faut-il y croire ?
" Ne faites surtout pas abstraction du contexte ivoirien. Notre pays a connu une guerre civile, avec son lot de déplacements de populations, de registres d`état civil détruits et de pagaille administrative. Ceux qui sont chargés de l`organisation du scrutin ne s`attendaient sans doute pas à une tâche d`une telle ampleur. D`où les reports de date ". Ainsi parle celui qui en tout cas ne fera rien pour accélérer le proccessus puisqu`il cherche toujours des arguments pour repousser l`échéance électorale.
Sa candidature
" Je suis candidat pour trois raisons. La première est d`ordre général : un Président en exercice se représente toujours. Ne serait-ce que pour savoir comment les électeurs jugent le travail qu`il a accompli. Deuxième raison : je n`ai vraiment pu gouverner, avec la marge de manœuvre nécessaire, que pendant à peine vingt mois. La tentative de coup d`Etat de septembre 2002 a débouché sur la guerre civile, les négociations à répétition, puis sur un gouvernement hétéroclite fait de bric et de broc et dont le programme ne m`appartenait plus. Troisième raison enfin : le combat électoral qui s`annonce oppose, je vous l`ai dit, les tenants assumés de l`ordre ancien à l`incarnation du nouvel ordre ". Gbagbo est l`homme qui veut effacer la Côte d`Ivoire faite par Houphouët-Boigny, Henri Konan Bédié et le PDCI-RDA. Il a gouverné sans guerre pendant 20 mois. Qu`a-t-il fait ?
Le Chef de l`Etat et le candidat
"Chaque chose en son temps. Je suis candidat à cent pour cent tout en restant chef de l`Etat à cent pour cent. J`ai en tête mon plan de campagne, mon slogan et la date précise à laquelle j`irai sur le terrain appuyer ceux qui, déjà, labourent pour mon compte. Vous verrez bien. ". Faut-il encore s`étonner que le Chef de l`Etat utilise les moyens de l`Etat mis à sa disposition pour sa campagne ? Puisqu`il a véritablement du mal à faire la différence entre le candidat et le Chef de l`Etat et entre sa campagne et les missions de l`Etat.
Le 19 septembre et le cortège d`assassinats :
" Je suis sûr que l`on connaîtra un jour la vérité sur tout ce qui s`est passé au cours de la nuit terrible du 19 septembre 2002, durant laquelle Robert Guéi, Emile Boga Doudou et beaucoup d`autres ont été assassinés. (…) Il y a affaire et affaire. L`affaire Kieffer, par exemple, émeut beaucoup plus les Français que les Ivoiriens, et je ne pense pas que l`on éprouvera un jour l`impérieux besoin de créer une commission d`enquête sur ce cas précis, aussi regrettable qu`il soit. C`est une manipulation. Pourquoi s`acharne-t-on à démontrer que la disparition d`un citoyen lambda, fût-il français, est reliée à la présidence de la République? Pourquoi l`aurait-on emmené ici, torturé ici, tué ici? Lorsque j`étais étudiant à Lyon en 1967, j`ai connu un Ivoirien qui a disparu et que nul n`a jamais revu. Personne n`a accusé le général de Gaulle. L`affaire du bombardement de Bouaké ? Que l`on m`explique pourquoi le général Poncet, commandant à l`époque de la force Licorne, a obstinément refusé au procureur ivoirien auprès des armées l`accès au site où sont morts les soldats français. Que l`on m`explique aussi pourquoi, le jour même des faits, alors qu`ils avaient mis la main sur les contractuels biélorusses mêlés au bombardement, les Français les ont laissés filer en douce vers le Togo sans les avoir interrogés (…) L`affaire du charnier de Yopougon maintenant: c`est une grande escroquerie, un Timisoara ivoirien. Cinquante-huit cadavres sont découverts au matin du 26 octobre 2000, entassés en lisière de forêt. Quelqu`un crie: " Ce sont des musulmans ! " Qu`est-ce qui distingue ici un corps de musulman d`un corps de non-musulman ? " Dan aucun des cas, le Chef de l`Etat ne réclame une enquête en bonne et due forme pour faire la lumière. Il en a même banalisé. La banalisation de la vie humaine.
Ses relations avec Bédié
" Encore une fois, interrogez-le. Ce n`est pas moi qui ai changé. C`est lui. Au début, nous échangions volontiers. Je l`appelais au téléphone, il m`appelait. Et puis, à un moment donné, je me suis rendu compte que son attitude avait changé... peut-être est-ce à mettre sur le compte d`une campagne électorale mal maîtrisée ". Gbagbo n`a jamais été responsable de rien. Il est toujours le saint, le martyr. Qui a commencé la virulence dans ce pays ? Qui a envenimé la crise politique au retour de Marcoussis ?
Les coups tordus à l`opposition :
"Oui. La politique, c`est aussi l`action, le mouvement, la bataille. Ma campagne sera correcte, certes, mais je n`irai pas à l`élection comme un mouton à l`abattoir. Mes adversaires ont un passif et un exercice du pouvoir que je compte bien mettre en lumière. ". Le message est clair il ne laissera pas ses adversaires mener la campagne comme il se doit et tant qu`il n`est pas sûr de tout avoir, il ne s`engagera pas sur le chemin des élections.
L`accès aux médias publics
" Henri Konan Bédié a cru bon de soulever cette question lors de la dernière réunion du Cadre permanent de concertation, à Ouagadougou, le 3 décembre. Je l`ai regardé, je ne savais pas s`il fallait rire ou pleurer. Et j`ai préféré me taire. Je me souviens d`avoir été tabassé, sous son règne, devant les caméras de la Rti. A l`époque, les temps d`antenne pour l`opposition, c`était cela: des images de manifestations réprimées afin d`édifier les populations. Alors, quand je vois ce monsieur évoquer ce problème, je me dis qu`il est décidément bien mal placé… Cette question n`est pas nouvelle. Ce qui est nouveau, c`est que, nous, nous ne tabassons pas ceux qui la posent. Il y a un progrès, non ? (rires) Vous savez, nous autres Africains, nous ne réagissons pas comme les Européens. Quand un Bédié dit ce genre de chose, je me contente de l`observer en silence. Sinon, je risquerais d`être violent ". En d`autres termes, le régime FPI fera pire que ce qui est déjà fait. C`est parce que Bédié et autres ont encore quelques minutes de temps d`antenne. Et si Bédié s`obstine à poser toujours la question, il risque d`être tabassé.
Eddy PEHE