L’historien qui veut dénaturer l’histoire en sa faveur et se poser, à l’instar d’Houphouët, comme celui dont le destin est de marquer forcément l’histoire de la Côte d’Ivoire. C’est ce qu’on peut retenir de la première partie du message à la Nation du chef de l’Etat. L’historien président affirme que 2010 n’est pas une année ordinaire, de même que les élections qui s’y dérouleront. A en croire le candidat Gbagbo, celles-ci permettront de mettre fin à une époque, celle d’Houphouet et d’en ouvrir une autre, celle qui sera marquée par lui-même. « Cette phase de transition d’un monde qui finit, l’ère coloniale, vers un monde nouveau, celui de la souveraineté, a été marquée par de profondes divisions au sein de la classe politique. L’année 1959 a été alors l’année d’importantes négociations politiques ponctuées par des mouvements de grèves », rappelle-t-il. Ainsi, il compare les soubresauts de 1959 avec leur corollaire de grèves et de revendications sociales à ceux qui viennent de secouer le pays tout récemment. L’historien voit en cela une parfaite similitude entre les deux années. Son argumentaire est simple. En 1959, nous sommes à la veille de l’indépendance. Houphouët Boigny a dû faire face aux revendications sociales pour préparer l’ère nouvelle, celle de l’indépendance, intervenue l’année suivante. Toujours dans sa démonstration, lui aussi, a fait face aux grèves en 2009. Ainsi, il est en train de préparer l’ère démocratique qui doit succéder au parti unique. « C’est ce régime politique qui prend fin aujourd’hui, plaçant la Côte d’Ivoire au seuil d’une nouvelle ère. Hier, le pays négociait le passage de la colonisation à l’indépendance. Aujourd’hui, il passe de la culture du parti unique à celle de la démocratie », affirme-t-il. En terme clair, Houphouët a emmené l’indépendance, lui Gbagbo a l’obligation historique d’instaurer la démocratie. Une comparaison qui n’est pas de raison. En vérité, Gbagbo n’est pas Houphouët. En effet, Houphouët n’a pas usé de violence pour faire adopter le parti unique à l’ensemble de la classe politique. Un simple appel au stade Géo-André a suffi. En plus, on ne saurait comparer les grèves de 1959 à celles de 2009 qui ont éclaté suite aux promesses non tenues de Gbagbo lui-même. Le chef de l’Etat ne peut prétendre instaurer la démocratie quand lui-même dresse des obstacles aux fondamentaux de la démocratie. Il interdit les marches pacifiques de l’opposition, casse les grèves des syndicats et réquisitionne. Des actes anti-démocratiques.
Ibrahima B. Kamagaté
Ibrahima B. Kamagaté