En Cote d`Ivoire, "tout le monde est, a été ou sera houphouétiste". Telle est à notre avis, la déduction que l`on peut faire lorsqu`on s`en tient à l`esprit et à la lettre du discours à la nation, le mercredi 31 décembre 2009. SI, selon ce qu`on a entendu et noté, ce sont les prochaines élections qui " viendront mettre fin à la guerre des héritiers ", l`on peut dire sans se tromper qu`en terre ivoirienne l`on est encore en pleine ère houphouétiste : à quoi a donc servi l`ubuesque et absurde coup d`Etat de décembre 1999 perçu par certains comme une nécessaire et salutaire avancée démocratique ? A quel dessein obéi le seul Référendum organisé dans la Côte d`Ivoire indépendante à l`effet d`élaborer une nouvelle Constitution censée être l`une des plus démocratiques au monde ? A quelle finalité destinait-on la deuxième République devant définitivement " éradiquer " sous nos cieux l`obscurantisme et abolir à jamais le règne de la pensée unique ? Si ces événements et faits n`ont pas été autant " d`avancées " dans la voie d`un quelconque progrès, ce serait alors à désespérer totalement de nos " rénovateurs ? " de ces dix dernières années ! Oui, il faut le dire, ces errements sont aux antipodes de l`houphouétisme qui aujourd`hui plus qu`hier apparaît comme un " humanisme de raison, d`ordre et de grandeur " ! Ceci dit, quel est notre part de responsabilité dans ce que représente l`héritage politique de la première République? Lequel d`entre nous quelle que soit son appartenance politique n`est pas impliqué dans cette histoire " nationale " ? Personne si on s`en tient à la définition " moderne " et non " villageoise " de ce qu`est le pouvoir. Il n`est de pouvoir authentique en effet que dans une conception relationnelle des choses. Le pouvoir - nous devons l`intégrer dans nos mœurs - n`est pas quelque chose qui s`acquiert, s`arrache ou se partage, quelque chose qu`on garde ou qu`on laisse échapper ; le pouvoir s`exerce a partir de points innombrables, et dans le jeu de relations inégalitaires et mobiles. Cette définition renvoie donc inéluctablement au partage des responsabilités quant au déroulement de notre histoire politique nationale. On ne peut donc " louer " ici et là, les acquisitions majeures comme l`instauration du multipartisme (1990), la naissance d`une opposition parlementaire, l`apparition d`une presse indépendante et libre, des partis responsables et bien d`autres manifestations du pluralisme politique et s`en " détourner " curieusement à l`heure du bilan. Tous, nous sommes à quelque titre les " héritiers " de cette histoire politique qui s`est construite sous nos yeux avec nous. Nous le sommes d`autant plus que en tant que parlementaires, nous avons voté les lois, consenti les budgets, amender la Constitution notamment en ces dispositions relatives à la vacance du pouvoir du président Félix Houphouët-Boigny. Ces mêmes dispositions existent bien dans notre Loi fondamentale actuelle sans que pour autant l`on entende parler d`héritiers. Et puis, honnêtement quelle gêne y a t il à se réclamer de l`œuvre absolument remarquable à tous points de vue d`Houphouët-Boigny l`un des rares hommes d`Etat africains de son temps à avoir une réelle vision pour son pays. A vouloir à tout prix "réécrire l`histoire", les faits sont là, têtus, qui nous contemplent et nous ramènent à notre propre image ! Et qu`on le sache une fois pour toutes : quoiqu`on fasse ou dise, on est toujours l`héritier de quelqu`un ou de quelque chose. Tout en effet se fait en fonction d`un héritage et d`une finalité. L`héritage c`est l`histoire qui s`est faite et la finalité c`est l`histoire à faire. Alors, messieurs, avec courage qu`on nous le dise enfin : Si nous ne sommes pas les " héritiers " d`Houphouët-Boigny de qui nous devons notre Etat moderne et le peu de fierté qui nous reste, de qui sommes-nous les héritiers ? Répondre franchement à cette question est un impératif catégorique dans une Côte d`Ivoire post-crise qui doit se reconstruire avant de chercher à se projeter dans un avenir serein et lumineux.
TIACOH Carnot
Membre du Bureau politique du PDCI-RDA
TIACOH Carnot
Membre du Bureau politique du PDCI-RDA
