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Politique Publié le lundi 1 février 2010 | Notre Voie

Après les brouilles avec son parti - Pierre Dagbo Godé : “Je reviens à la maison, au FPI”

Pierre Dagbo Godé retourne au FPI. Diplômé de l’Institut de relations internationales de Paris, Master en administration des affaires pour cadres et docteur en droit de l’Université de Paris V, l’enseignant de sciences politiques et d’économie politique de l’UFR des Sciences juridiques, administratives et politiques de l’Université de Cocody, a défrayé la chronique politique en juillet 2009 en annonçant sa candidature indépendante à la présidentielle. Le cadre guébié (canton de la région du Fromager, Gagnoa), ancien directeur de cabinet adjoint du Premier ministre Pascal Affi N’Guessan et ancien DG du Centre de Promotion des Investissements en Côte d’Ivoire (CEPICI), a surpris tout le monde en tournant ainsi le dos au Front populaire ivoirien, son parti. Dans l’interview qui suit, Pierre Dagbo Godé explique les brouilles survenues avec son parti, reconnaît humblement s’être trompé et annonce son retour au FPI.


Notre Voie : Monsieur Pierre Dagbo Godé, vous avez rencontré, il y a quelques jours, le président du FPI, Pascal Affi N’Guessan. De quoi avez-vous parlé ?

Pierre Dagbo Godé : Vos informations sont exactes et je vous en félicite. J’ai effectivement rencontré le président du FPI, président de mon parti. Mais, avant de répondre directement à votre question, je voudrais rendre hommage au président Affi pour sa grandeur d’esprit. Je crois que c’est un homme qui a beaucoup de qualités que j’ignorais et que j’ai découvertes. Sa manière d’aborder les problèmes, je pense, continuera de faire du FPI un des plus grands partis de ce pays, de l’Afrique et peut-être du monde …


N. V. : Le président du FPI semble vous avoir marqué…

P. D. G. : Oui ! Et je crois que la vraie valeur d’Affi N’Guessan est ignorée par beaucoup de nos responsables et militants du parti. Je crois qu’avec Affi, l’avenir du parti est assuré. En tout cas, moi, j’ai rencontré le président Affi pour mettre à plat un certain nombre de contradictions idéologiques que j’avais avec le parti et son fonctionnement. Et j’ai trouvé en lui une oreille attentive. Il a pris le temps de m’écouter et m’a donné les réponses sur ce qui m’avait poussé à sortir un tant soit peu du cadre du parti. Il m’a convaincu.


N.V. : D’où est venue l’initiative de cette rencontre?

P.D.G. : D’abord, ça a été une démarche du professeur Ouraga Obou à qui je voudrais dire ici ma sincère reconnaissance. C’est lui qui, dans un premier temps, a cherché à me rencontrer. Nous nous sommes rencontrés et il m’a affirmé qu’il était envoyé par le président du parti pour comprendre ce qui se passait avec moi. J’avais annoncé, au mois de juillet 2009, ma candidature indépendante à l’élection présidentielle. J’avais fait des interviewes dans lesquelles je dénonçais un certain nombre de choses qui n’allaient pas à mon sens dans la vie du parti. J’ai donc discuté de tous ces problèmes avec le professeur Ouraga Obou.


N.V. : Quels sont exactement ces problèmes qui vous ont poussé à bout ?

P.D.G. : Il y a en eu deux. Pour moi, toute difficulté, menace, quelle qu’en soit la nature, doit être convertie en opportunité. Je pense aujourd’hui que les choses vont mieux. Mais j’ai considéré que le FPI n’avait pas pu transformer en opportunité, à un moment donné, les difficultés que nous vivions. C’est-à-dire qu’il m’a semblé que nous gérions la crise d’une manière incorrecte. Les causes de la guerre, les faiblesses de notre propre parti, le manque d’initiatives à mon sens, etc., étaient des choses que je constatais. Le professeur Ouraga Obou et moi, nous avons échangé là-dessus. Et nous nous sommes mis d’accord. Le deuxième élément qui, pour moi, était le plus important est le sens que nous donnions à un parti politique. Pour moi, un parti politique est un espace de solidarité. C'est-à-dire que quels que soient les circonstances et les problèmes, il faut que les militants se sentent dans le parti. Il faut qu’il y ait un minimum de solidarité entre nous. Or, et je le considère encore aujourd’hui et certains sont d’accord avec moi, au FPI, à un moment donné, il y a eu un manque de solidarité entre les militants et entre les cadres. A la haute direction qui décide, on se parlait moins, on se rencontrait moins, on échangeait moins. Et quelquefois, quand on a des choses à dire, on ne trouve pas d’interlocuteur à qui parler. Je prends, par exemple, la situation de nos deux directeurs de campagne qui sont aujourd’hui en prison dans l’affaire café-cacao: Firmin Kouakou et Placide Zoungrana…


N.V. : Vous pensez que le parti a manqué de solidarité envers eux ?

P.D.G. : Je pense que nous n’avons pas bien géré cette situation pour la simple raison qu’il y avait déjà eu deux audits qui montraient les dérapages de la filière. Nous n’avons pas pris le temps de les faire asseoir et de discuter franchement avec eux pour leur dire : “Ecoutez, voilà les dysfonctionnements de la filière. Vous êtes nos militants. Alors qu’est-ce que vous pouvez nous dire réellement ?”. Et voilà qu’un matin, le président de la République a saisi le procureur et ils se sont retrouvés en prison. C’est vrai que nous partons leur rendre visite régulièrement, mais il était important, pour moi, qu’en amont, on interpelle nos amis sur la question.


N.V. : Rien que ces deux problèmes ont suffi pour vous pousser à vouloir sortir du FPI ?

P. D. G. : Oh, je n’en souligne là que les deux plus importants. Mais il y a tous ces problèmes au quotidien. Par exemple, à un certain moment, il m’a semblé que le FPI avait pris une position de seconde zone dans la gestion du pouvoir politique de Laurent Gbagbo; chose que je ne pouvais accepter. C'est-à-dire que la création des mouvements présidentiels comme le CNRD, les activités du COJEP, etc., semblaient nous mettre au second plan.

Moi, je suis un orthodoxe du FPI qui est un grand parti, qui regorge de la matière grise. Je ne pouvais pas accepter ces choses. Si les autres veulent qu’on forme quelque chose ensemble, ils viennent avec nous, mais nous ne pouvons pas être à leur remorque. Dieu merci, ma rencontre avec le président du parti m’a donné toutes les réponses qui m’ont satisfait et je pense qu’aujourd’hui, il faut aller à l’essentiel. Et cet essentiel comme, je l’ai dit, c’est la victoire du président Laurent Gbagbo.


N.V. : Qu’est-ce qui garantit la sincérité de votre conviction, vous qui, après avoir été le porte-parole des populations guébié de Gagnoa et proclamé le soutien de ce peuple au président Gbagbo lors d’une visite historique du chef de l’Etat dans votre région, et qui, finalement, avez proclamé votre candidature à la présidentielle ?

P.D.G. : Il faut comprendre une chose. Devant certaines situations, l’Homme a deux attitudes : ou bien vous décidez de vous taire et les problèmes vous rongent ou bien, à un certain moment, vous dites : “Ecoutez, moi je mets le pied dans le plat pour ne pas mourir d’inaction”. C’est la seconde position que j’ai adoptée. On pourra toujours critiquer cette attitude, mais il faut assumer.


N.V. : Vous avez donc voulu faire passer un message ?

P.D.G. : Oui, je voulais faire passer un message; je voulais dire à mes camarades du FPI qu’il y a beaucoup de choses qui ne me semblaient pas marcher dans le bon sens. C’est vrai qu’on dit qu’on n’enlève pas les magnans pendant qu’on est dans les magnans. Mais à un certain moment, quand même, il faut s’arrêter pour réduire le nombre de magnans. Or, je pense que le parti a un peu trop laissé la marmite fermée. J’ai bougé et le couvercle a sauté pour qu’on découvre que moi, j’ai des choses à dire.


N.V. : Apparemment le parti a perçu le message, puisque vous venez, comme vous le dites, de rencontrer le président Affi pour évacuer les problèmes. Mais, est-ce que vos parents, ceux dont vous avez été le porte-parole à un moment donné, ont perçu votre message de la même façon ?

P.D.G. : Vous savez, je n’ai pas voulu faire comme Kragbé Gnagbé (NDLR : nom du premier cadre guébié, opposant à feu Félix Houphouet-Boigny et tué en 1970 dans des conditions jamais élucidées). Parce que lui, Gnagbé, quand il voulait faire la politique, il est allé au village et ça a donné les évènements regrettables que l’on sait. Je n’ai pas voulu associer mes parents à ma démarche. Ça été une démarche individuelle. J’ai fait une annonce à travers les journaux…



N.V. : Oui, mais vous avez été leur porte-parole quand même et ils ont dû réagir ?

P.D.G. : Oui, j’ai été leur porte-parole et beaucoup sont venus me voir; ils m’ont invité au village. Je ne suis pas allé au village. Je leur ai dit que le débat que je soulevais était national et intellectuel, parce que le FPI est un parti d’envergure nationale. Par la suite, il y a eu beaucoup de débats entre nous. Et j’ai promis qu’une fois, toutes les contradictions avec mon parti réglées, je repartirai vers eux, au village, pour leur faire le point. Et je pense qu’après cette rencontre avec le président Affi, je peux honorer cet engagement; et donc, je me ferai fort d’aller vers mes parents pour les apaiser. Et je pense que mon retour dans le parti, à ma place, sera accepté…



N.V : Vous voilà donc de retour à la maison, comme on le dit. Que voulez-vous que l’on retienne de ce récent épisode qui vous a un peu éloigné ?

P.D.G. : Ce que j’aimerais qu’on retienne, c’est que nous sommes d’abord des socialistes. C'est-à-dire des hommes de gauche. Et, pour moi, pour un socialiste, la liberté s’invente tous les jours. Il faut que le débat interne au parti ait lieu à tout moment quelles que soient les circonstances. Il faut également, à mon sens, que le président du parti parle avec ses cadres. Franchement, j’ai cru qu’il y avait un manque d’intérêt de sa part et de la part du président Gbagbo; et cela m’a bouleversé. Mais, le président du FPI m’a totalement rassuré et notre rencontre m’a permis de me rendre compte que je me suis trompé. Je l’ai reconnu, le président Affi m’a redonné de l’espoir. Pour cela, je présente sincèrement mes excuses à tous ceux qui ont dû souffrir de mes actes. Je demande, à tous ceux que j’ai blessés, de m’excuser.


N.V. : Nous allons vers les élections présidentielles. Quel est le candidat que vous allez soutenir ?

P.D.G. : Je répète que je suis revenu dans la maison, au FPI. Donc, naturellement, je vais reprendre ma place pour soutenir le président Gbagbo, le candidat que le parti offre à toute la nation. Nous allons nous engager en mettant notre intelligence, notre savoir-faire à sa disposition. Je prendrai ma place auprès du président Affi, je ferai toutes les missions qu’il me confiera. Cet homme m’a profondément convaincu, satisfait, et je n’hésiterai pas à faire le tour de la Côte d’Ivoire pour expliquer le programme de gouvernement et le projet de société du président Gbagbo. C’est un engagement que j’ai pris envers lui et que je vais assumer.


N.V. : Pierre Dagbo Godé, certains pourraient croire que votre retour au FPI se fait sous la pression. Que répondriez-vous ?

P.D.G. : Personne n’osera dire cela ! Je pense que tout le monde me connaît au FPI. Je suis libre d’esprit, je n’ai pas été persécuté. Il y a eu des réactions que j’ai trouvées normales. Des parents, des amis n’ont pas accepté mon comportement et m’ont dit: “Là, tu te trompes”. Mais enfin, je dis avoir réalisé que je me suis trompé. Il faut aussi savoir taire les orgueils et reconnaître ses fautes quand c’est nécessaire. En tout cas, aucune pression ne m’a été faite de la part de la direction du parti. Au contraire, la partition du président Affi a été absolument exemplaire. Et j’en tire des leçons pour revenir au parti.

C.E.
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