Les substituts résidents du procureur à Divo et à Sinfra ont été remplacés. La décision est tombée hier comme un couperet. Le président Laurent Gbagbo a pris un décret pour remplacer ces magistrats. Mais cette décision a été apparemment prise en violation de la Constitution et de la loi portant sur le statut des magistrats. Si le chef de l’Etat est le seul habilité à faire des nominations et autres réaffectations dans l’administration et dans l’armée en ce qui concerne les hauts cadres, il ne dispose pas dans le domaine judiciaire d’un pouvoir discrétionnaire. La Constitution en son article 106 et l’article 5 de la loi portant sur le statut des magistrats stipulent que les nominations, les affectations, les déplacements des magistrats du Parquet se font sur proposition obligatoire du ministre de la Justice. Il est vrai que c’est le chef de l’Etat qui signe le décret, mais en matière d’administration judiciaire la Constitution et la loi lui font obligation de le faire sous proposition du ministre de la Justice. Pour les juges du siège, il faut non seulement l’avis de la tutelle, mais surtout sous proposition préalable du Conseil supérieur de la magistrature. Les juges de grade inférieur sont également soumis à un minimum de protection. Dans tous les cas, le chef de l’Etat ne peut pas décider de façon unilatérale en la matière sans violer la Constitution. Nos sources nous indiquent que le Garde des Sceaux qui était hier en déplacement à Bouaké n’a pas été consulté dans cette décision. Laurent Gbagbo a donc pris sur lui, de violer la Constitution sans aviser la hiérarchie. C’est donc une atteinte terrible à l’indépendance de la magistrature. Dans cette affaire, l’on constate que Laurent Gbagbo a plus agi pour protéger des intérêts particuliers que l’intérêt de la nation comme le lui recommande la Constitution. Cette décision intervient après que les substituts résidents de Divo et de Sinfra ont refusé de cautionner les radiations arbitraires du FPI. Le substitut résident de Divo, on se le rappelle, par des réquisitions conformes à la loi, avait requis l’irrecevabilité des demandes pour radiation introduites par le FPI. Le juge du Parquet avait estimé au cours de la première audience que les demandes devaient être introduites obligatoirement devant la CEI avant de saisir le tribunal. Il a également estimé que les demandes en radiation devaient être accompagnées de pièces justificatives. Conformément au code électoral et à la procédure en vigueur. A Sinfra, le substitut du procureur ne voulait pas, non plus, cautionner les jugements iniques du président du tribunal qui allait jusqu’à prendre des décisions chez lui à la maison. Le chef de l’Etat a décidé de mener une guerre contre tous les magistrats qui ont décidé de faire barrage au FPI dans sa volonté de spolier la nationalité à de milliers d’ivoiriens. Malheureusement, en foulant au pied la loi au risque de commettre un parjure, il y a de quoi à désespérer de la Côte d’Ivoire. Car avec un président qui ne respecte aucune règle, les jours à venir s’annoncent difficiles pour la République.
Jean-Claude Coulibaly
Jean-Claude Coulibaly