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Politique Publié le jeudi 25 février 2010 | Notre Voie

Entrée du RHDP au gouvernement : Bédié et Ouattara cachent la vérité à leurs partisans

Le Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (Rhdp) observe une curieuse omerta face à leurs militants à propos des tractations concernant le nouveau gouvernement.

Le Premier ministre Guillaume Soro Kigafori a formé, mardi dernier, son 2ème gouvernement de l’ère APO (Accord politique de Ouagadougou) avec 11 trous ministériels sur 27 postes à occuper. Ces postes vacants, on le sait depuis, sont répartis entre les partis membres du RHDP que sont le PDCI-RDA d’Henri Konan Bédié (4), le RDR d’Alassane Dramane Ouattara (4), l’UDPCI d’Albert Mabri Toikeusse (1), le MFA d’Innocent Anaky Kobéna (1) et le PIT de Francis Vanga Wodié (1) qui a fini par rejoindre officiellement le RHDP sur le chemin de l’extrémisme. Le Premier ministre a rassuré les Ivoiriens de ce que les négociations en cours avec les responsables de ces partis d’opposition pourraient aboutir, aujourd’hui, à l’occupation de tous les fauteuils vacants et à la présentation d’un gouvernement complet au premier conseil des ministres du gouvernement Soro II. Avant-hier, pendant que le Premier ministre communiquait ses espoirs aux journalistes rassemblés à la Primature, le Pr. Alphonse Djédjé Mady tenait, face à d’autres journalistes, un discours diamétralement opposé.

A suivre le truculent président du directoire du RHDP, auteur d’un appel à la désobéissance civile, l’entrée au gouvernement n’a jamais été à l’ordre du jour dans les conditions actuelles de négociation : «Vous connaissez la position du RHDP et du PIT. Notre priorité, c’est le processus électoral. La formation du gouvernement vient en deuxième position», déclare péremptoire Djédjé Mady. Pour lui, tant que la Commission électorale indépendante (CEI) dissoute le 12 février par le président de la République n’est pas réhabilitée, il ne sera pas question pour cette coalition de l’opposition d’entrer au gouvernement. Et à Djédjé Mady de préciser : «En attendant l’effectivité de la mise en place de la CEI, sous les conditions que je viens d’indiquer, le RHDP et le PIT maintiennent leur mot d’ordre de contestation, de manifestation jusqu’à ce que nous voyions dans les faits la mise en place de la CEI et le début des travaux de cette commission».

Il est clair que, par ces déclarations, Alphonse Djédjé Mady cherche à jeter le discrédit sur les résultats du travail de facilitation accompli à Abidjan par le facilitateur,Blaise Compaoré pour débloquer le processus de sortie de crise raturé par la fraude orchestrée à la CEI. Du coup, M. Djédjé Mady contredit le Premier ministre Guillaume Soro qui a clairement indiqué que, loin des vociférations guerrières, son gouvernement pourrait se réunir au grand complet aujourd’hui. Comment cela pourra-t-il se faire ?

Le RDR et le PDCI en panne de cadres neufs ?

Les faits, c’est que, contrairement aux dénégations du président du directoire du RHDP, Aimé Henri Konan Bédié et Alassane Dramane Ouattara ont accepté, le lundi 22 février, devant le facilitateur Blaise Compaoré, deux points essentiels inscrits aux négociations. A savoir l’entrée du RHDP au gouvernement et la recomposition de la CEI. Concernant le gouvernement Soro II, les démarches entreprises par le Premier ministre auprès de Bédié et de Ouattara, le lundi nuit, dès le départ de Compaoré, ont abouti. Le président du PDCI-RDA et son allié du RDR ont fourni la liste de leurs cadres ministrables à Guillaume Soro Kigbafori. Pour le PDCI-RDA, Henri Konan Bédié a aligné Rémi Allah Kouadio, Dagobert Banzio, Patrick Achi, Marie Ama Téhoua et Youssouf Bakayoko. Quant à Alassane Dramane Ouattara, il a remis en ordre de bataille Amadou Gon Coulibaly, Hamed Bakayoko, Jeanne Peuhmond, Cissé Ibrahim Bacongo et Marcel Amon Tanoh. Vous l’avez noté, Bédié et son allié ont décidé de reconduire intégralement tous leurs anciens ministres du défunt gouvernement. C’est à croire que la dissolution du gouvernement Soro I n’a jamais eu lieu.

Comme il fallait s’y attendre, ces listes de ministrables PDCI-RDA et RDR ont coincé. Le président Gbagbo a déclaré, dans son message de dissolution du gouvernement, qu’il n’entend plus siéger avec les ministres qui ont passé leur temps à obéir aux ordres de leurs partis politiques et non à travailler pour les Ivoiriens. Alors, pour cette raison et pour bien d’autres sûrement, le président Laurent Gbagbo a validé deux noms, celui de Youssouf Bakayoko (ministre des Affaires étrangères pour le compte du PDCI-RDA) et de Jeanne Peuhmond (ministre de la Famille, de la Femme et des Affaires sociales pour le compte du RDR) dans le gouvernement Soro I. Tous les autres noms récusés devaient être remplacés par des ministrables «neufs». C’est suite à ce tri présidentiel que Bédié et Ouattara ont décidé de ne laisser aucun de leurs cadres entrer au gouvernement Soro II, comme si, en dehors des ministres récusés, leurs partis sont cruellement en panne d’intellectuels. Y a-t-il, au PDCI et au RDR, des cadres chargés d’aller au charbon et d’autres cadres nés pour être promus ? Cette vérité, qui devait être clairement expliquée aux militants de base du RHDP, est masquée. Bédié et Ouattara préfèrent faire dire par Djédjé Mady que leur entrée au gouvernement est conditionnée par la mise en place préalable, suivie du fonctionnement de la CEI. Faux !

Compaoré en sapeur- pompier du RHDP

En vérité, c’est depuis leur passage du dimanche 21 février auprès du président du Faso, à Ouagadougou, que tout a été acquis. A savoir l’entrée du RHDP au gouvernement, la reconnaissance de la dissolution de la CEI façon Beugré Mambé et la «recomposition» de cette commission pour relancer le processus électoral. Bédié et Ouattara ont été, en effet, convaincus par le président Compaoré, depuis Ouaga, que leur soutien à l’ex-président fraudeur de la CEI, Robert Beugré Mambé, était insensé, inélégant et anti-républicain. Ce soutien, leur aurait expliqué le Facilitateur, était d’autant plus indigne que Bédié et Ouattara sont de hautes personnalités étatiques. Le premier a été président de la République et le second Premier ministre. Les deux hommes ont servi auprès de Félix Houphouët-Boigny et se réclament de lui, même à longueur de…bêtises comme c’est le cas dans cette crise de la CEI. En tout cas, Compaoré a réussi à convaincre les deux crânes durs de l’houphouétisme que, de par leur appel au désordre, ils donnent de l’eau au moulin du président Gbagbo qu’ils accusent de ne pas vouloir aller aux élections. Si telle était vraiment l’intension du chef de l’Etat ivoirien, la logique n’aurait-elle pas été pour lui de laisser perdurer le blocage de la CEI occasionné par Beugré Mambé?
Suite à ces séances d’explications et de formation chez le président Compaoré à Ouagadougou, Henri Konan Bédié et Alassane Dramane Ouattara ont mieux compris leurs errements, mais ils ont commencé à se poser deux lancinantes questions : Comment revenir dans la République sans perdre totalement la face après avoir déclaré qu’ils ne reconnaissaient plus Laurent Gbagbo comme chef de l’Etat ? comment convaincre les jeunes fanatiques du RHDP incités au désordre qu’ils ont fait fausse route, surtout après les morts enregistrés dans leurs rangs en exécutant les mots d’ordre de chienlit ?

Immédiatement, Bédié et Ouattara ont une idée qu’ils croient lumineuse, capable de les sortir d’affaire. Ils proposent au président du Faso d’inviter le président ivoirien pour un Cadre permanent de concertation (CPC) extraordinaire, immédiat, “rapido presto”!

Le CPC, c’est la réunion qui se tient, chaque trois mois, chez le Facilitateur, pour faire le point de l’application de l’Accord politique de Ouagadougou. Elle permet de mesurer les progrès accomplis, de dégager les perspectives et de lever les blocages constatés. Le dernier CPC s’est tenu en décembre 2009. Le prochain ne peut avoir lieu qu’en mars. Pour Bédié et Ouattara, à la fin d’un CPC extraordinaire et au pas de course, ils peuvent revenir dans la République avec moins de honte. L’idée soumise au président Gbagbo est naturellement refusée. Entre autres raisons, le chef de l’Etat ivoirien ne trouve pas élégant que les hommes politiques d’un pays se déportent chez le chef d’un autre Etat, fut-il le facilitateur d’un processus de paix, juste pour parler de formation de gouvernement et de CEI. Le président Compaoré a des tâches éminemment plus importantes à la tête de son pays.
Leaders perdus cherchent…lumière

Le président du PDCI-RDA et son renversant allié du RDR sont coincés. Ils supplient Compaoré d’effectuer lui-même le déplacement d’Abidjan pour les sauver de l’impasse dans laquelle ils se sont eux-mêmes enfermés. Bédié et Ouattara regagnent Abidjan dimanche soir. Ils sont suivis par le Facilitateur, qui est accueilli par le président Gbagbo à l’aéroport international Félix Houphouet-Boigny d’Abidjan-Port-Bouët, le lundi à 22 février, à 10 heures. La suite est connue. Le Premier ministre a publié un gouvernement avec 11 trous à remplir par le RHDP. Du coup, Henri Konan Bédié et Alassane Dramane Ouattara sont en délicatesse avec leurs militants de base et cadres. Après avoir proclamé ne plus reconnaître le président Gbagbo comme chef de l’Etat, après avoir envoyé des jeunes gens à la mort en les incitant à saccager et à incendier pour “s’opposer par tous les moyens à la dictature”, nos deux houphouétistes, qui n’ont rien retenu de la paix - seconde religion proclamée d’Houphouët-Boigny -, ont du mal à trouver les mots justes pour annoncer leur retour dans le gouvernement du même Laurent Gbagbo. Certains des manifestants du RHDP ont déjà noté, avec étonnement et indignation, la petite phrase d’Alassane Dramane Ouattara qui, dans une déclaration télévisée, au sortir de la rencontre d’Abidjan avec le président Compaoré, parlait de M. Laurent Gbagbo en disant distinctement “le chef de l’Etat”. C’est qu’au pied du président Compaoré, Bédié et Ouattara ont fini par mesurer l’incongruité et la nocivité de leur mot d’ordre. Ils ont promis de reprendre leur place au gouvernement. A présent, ils savent que le Facilitateur et la communauté internationale les regardent, et Guillaume Soro garde sa sérénité. Les dernières déclarations oiseuses émanant des responsables de cette coalition de l’opposition doivent être assimilées à des cris de détresse d’apprentis politiques perdus dans leurs premiers pas au cœur de cette jungle réservée aux initiés. Faire la politique, cela s’apprend. Bédié, Ouattara et leurs cliques l’apprennent. Mais à leurs dépens.

César Etou
cesaretou2002@yahoo.fr
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